HAFF Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS
COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 16 novembre 1999
Le président (M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)): Je constate que nous avons le quorum. La séance est ouverte.
Chers collègues, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-2, la Loi électorale du Canada.
Nous avons aujourd'hui des témoins qui représentent deux ordres de gouvernement. Ce sont Pierre-F. Côté, ancien directeur général des élections du Québec, et M. Warren Bailie, directeur général des élections de l'Ontario. M. Bailie est accompagné de son conseiller, M. Derm Whelan.
• 1035
Merci messieurs d'être avec nous aujourd'hui. Nous sommes
impatients d'entamer cet échange qui nous aidera à prendre des
décisions relativement à notre projet de loi.
Dois-je présumer que chacun de vous fera une présentation?
M. Warren Bailie (directeur général des élections de l'Ontario): Je vais faire une présentation. Je serai assisté de mon adjoint spécial, M. Whelan, pour répondre aux questions s'il y en a.
Le président: D'accord.
Généralement, je suis l'ordre du jour. Ici, M. Pierre-F. Côté est notre premier témoin.
Monsieur Côté, comptez-vous nous faire une présentation ce matin?
[Français]
M. Pierre-F. Côté (ancien directeur général des élections du Québec): Oui, je vais faire une présentation, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Veuillez commencer, je vous prie.
[Français]
M. Pierre-F. Côté: D'accord. Je veux d'abord remercier les membres du comité de leur invitation à participer à leurs travaux ce matin. Je veux également vous transmettre mes félicitations pour votre travail à l'égard de la Loi électorale du Canada. Tout ce qui concerne le domaine électoral est, quand on légifère, un petit pas pour nous, mais un grand pas pour la démocratie, pour parodier ce qui s'est dit quand on a accédé à la lune. Mais il me semble très important qu'on ait des normes et des règles très bien établies dans le domaine électoral.
Puisque l'intervention est assez limitée, je vais juste soumettre à votre attention quelques considérations, dont certaines auxquelles je m'attarderai davantage.
Je veux d'abord vous signaler le fait que le Québec est heureux—et continue d'être heureux, je pense, mais je ne suis plus en fonction depuis deux ans—de collaborer au registre des électeurs du Canada. Vous savez qu'une liste électorale permanente proviendra de Québec. Pour illustrer le travail considérable qui s'effectue dans ce domaine, je soulignerai que, pas plus tard que le 9 novembre dernier, la réalisation de la liste électorale permanente à Québec a reçu le prix d'excellence de l'administration publique.
Je suis assez fier de mettre en lumière ce fait et de vous signaler notre collaboration avec Élections Canada pour la mise à jour du registre des électeurs, comme vous l'appelez ici, ou de la liste électorale permanente. Évidemment, dans ce domaine comme dans tout autre, il y a toujours possibilité d'amélioration, mais je pense qu'on peut être assez fiers de ce qui s'est fait à cet égard.
Le deuxième point que je voudrais aborder relativement à votre projet de loi touche en particulier la nomination du directeur général des élections et des directeurs du scrutin. Je commencerai par traiter du poste de directeur général des élections du Canada. Sa nomination n'est le fait que de l'adoption par la Chambre des communes d'une motion et, si j'ai bien compris le projet de loi, a l'effet de nommer... [Note de la rédaction: Difficultés techniques] ...de 65 ans. Il s'agit de la limite d'âge jusqu'à laquelle il peut être en fonction. Cela semble être le terme. Donc, si on nomme une personne à l'âge de 40 ans, à moins qu'on la destitue en cours de route, elle demeurera en poste pendant 25 ou 30 ans. Ce qui me frappe dans cette façon de procéder, c'est que, contrairement à qu'on voit au Québec, on semble avoir perdu de vue une notion du droit parlementaire britannique qui remonte au XVIe ou XVIIe siècle, soit la notion de la persona designata, la personne désignée.
Cette notion de droit parlementaire britannique est le fait, pour une chambre des communes, une assemblée nationale ou une assemblée législative, de demander à quelqu'un de faire quelque chose à sa place. C'est ce que fait un directeur général des élections pour voir au renouvellement de la Chambre. Mais les conséquences de ce fait juridique britannique sont des plus intéressantes. J'en ai tiré partie au maximum pendant les 19 ans où j'ai été en poste comme directeur général des élections. Le principal avantage, c'est d'avoir un statut totalement indépendant de l'exécutif, du Conseil du Trésor et du gouvernement, et d'être en mesure, à cause de cette indépendance totale, d'agir de façon neutre, impartiale et objective pendant toute la durée d'un mandant ou pendant qu'on exerce une telle fonction.
• 1040
Pour nommer un directeur général des élections,
l'Assemblée nationale à Québec exige les deux
tiers des votes. Vous voyez qu'on éprouve actuellement
certaines difficultés pour s'entendre sur la nomination
de mon successeur, mais le
principe est là et la mise en application de cette
disposition est, selon moi, passablement importante.
Je dirais que, selon la même logique, il faut qu'on adopte la même approche à l'égard des directeurs du scrutin dans les quelque 300 circonscriptions au Canada. Je suis convaincu, d'après mon expérience—j'ai vécu les deux systèmes—qu'il faut qu'un directeur du scrutin soit nommé de façon indépendante et impartiale. Au Québec, on tient un concours public. Les candidats subissent d'abord un examen écrit et font une présentation devant un jury de sélection. La personne qui est nommée exerce la fonction pendant 10 ans. Elle peut être destituée pour cause, évidemment, mais il serait assez difficile de la destituer. La même mécanique est utilisée pour l'adjoint du directeur du scrutin dans les circonscriptions électorales.
Ce qui me surprend, c'est qu'on n'ait pas encore adopté cette façon de procéder partout au Canada, qu'elle ne se soit pas généralisée. On semble croire qu'en procédant par voie de décision du Conseil des ministres—peu importe le gouvernement en place, c'est une façon partisane de procéder—, il peut y avoir une certaine conséquence sur le déroulement du scrutin ou sur le résultat des élections. Je vous avoue que je ne vois pas comment. Un directeur du scrutin est une personne qui exerce une fonction administrative et qui doit l'exercer de façon impartiale. Je ne vois pas comment il serait en mesure—peut-être qu'autrefois il pouvait le faire, mais pas de nos jours—d'influencer de quelle que façon que ce soit le résultat du vote.
S'il n'influence pas le résultat du vote, il faut donc trouver une personne qui puisse exercer ces fonctions en toute indépendance. Pour parodier un euphémisme en droit, où on dit qu'il ne faut pas seulement que justice soit rendue, mais aussi qu'il y ait apparence de justice, je dirai que dans le domaine démocratique, il ne faut pas seulement qu'il y ait démocratie, mais également apparence de démocratie. L'autre point sur lequel je veux attirer votre attention, c'est l'intervention des tiers. Je n'ai pas pu faire la comparaison entre les dispositions du projet de loi C-2 et celles de la Loi électorale provinciale. Je peux cependant vous dire que j'avais reçu mandat du gouvernement du Québec de faire une étude, dont vous avez probablement pris connaissance, sur le jugement de la Cour suprême dans l'affaire Libman. J'ai ici un résumé de cette étude assez considérable. La question fondamentale qui se posait était celle-ci: est-ce qu'il fallait ou pas utiliser la clause dérogatoire ou est-ce qu'il fallait modifier la Loi électorale de sorte qu'on tienne compte du jugement de la Cour suprême de façon pratique et concrète? C'est ce qui a été fait au Québec. La proposition que j'ai soumise a été, dans son ensemble, adoptée. Mais, comme je vous le dis, je n'ai pas fait une comparaison formelle. Vous comprendrez que je ne dispose pas des mêmes moyens qu'autrefois pour faire ce genre de travaux ou d'études. Je suis quand même satisfait de voir—et c'est obligatoire—que vous avez inclus dans ce projet de loi des dispositions concernant l'intervention des tiers.
Je terminerai, monsieur le président, en insistant sur le dernier point, qui me semble être de première importance, soit le financement des partis politiques et le rapport des dépenses électorales, et que j'ai de la difficulté à comprendre. Je vais vous le résumer par une phrase assez simple. La question fondamentale qu'il faut se poser est celle-ci: est-ce qu'un dollar égale un vote ou est-ce qu'un électeur égale un vote?
En démocratie, il va de soi qu'un électeur égale un vote, mais si on trouve le moyen, en pratique, de faire en sorte qu'un dollar égale un vote, la démocratie en prend pour son rhume. Si on regarde le cheminement qui s'est fait au Québec à partir de 1875 jusqu'à 1926 ou 1930, alors qu'il y avait dans la loi provinciale des dispositions concernant les dépenses électorales, on s'aperçoit qu'à partir de 1932 jusqu'à 1962, il n'y avait dans la loi provinciale aucune disposition concernant les contributions et le financement des partis politiques. Quand on regarde l'histoire, on voit ce que cela a donné. Cela a donné la période de Taschereau, la période Duplessis et des façons de procéder sur le plan électoral qui, aujourd'hui, sont à peine imaginables.
• 1045
Au niveau du Canada, ce n'est pas à vous que je
rappellerai l'histoire de la construction de nos
chemins de fer nationaux et la façon dont cela a pu
contribuer à aider certains partis politiques en place.
Mais cette façon de procéder, cette absence de règles
précises comme celles qu'on a au Québec,
contribue à dévaloriser
les hommes et les femmes politiques dans l'opinion
publique.
La dépréciation actuelle de la fonction de
député dans les différentes législatures peut être
attribuable en particulier au fait qu'on
s'interroge—et je pense à tort—sur l'honnêteté de nos députés.
Je suis personnellement convaincu que les députés
sont des personnes très honnêtes et très dévouées, mais
je reviens à mon slogan de tout à l'heure: il faut
qu'il y ait apparence de démocratie.
Au Québec, la façon d'essayer de commencer à régler le problème—on ne réglera pas tous les problèmes, puisqu'il n'y a jamais de solution parfaite—a été de dire, par exemple, que désormais les contributions devaient venir des individus, qu'elles ne devaient pas dépasser une somme maximale et qu'elles devaient être publiées une fois par année, et d'établir très clairement que seul le financement populaire est admis.
Évidemment, cela pose une difficulté assez grande pour les différents partis politiques, qui ont de plus en plus besoin d'argent. C'est un dilemme qui ne fait que croître parce que les campagnes électorales nationales ou générales ne se font pratiquement plus de porte à porte. Elles se font à la télévision, et la télévision devient de plus en plus coûteuse. Il faut donc avoir des sources de financement qui n'attachent pas les partis politiques.
Il ne faut pas que les élus soient redevables de leur élection à des personnes ou entreprises fortunées. On peut avoir l'impression que c'est parfois le cas. Il faut un financement populaire et un accès équitable aux médias. Je pourrai vous remettre ce document de sept ou huit pages, que je ne vous lis pas parce qu'il est trop long, où on relève trois éléments importants: le soutien de l'État, un financement populaire et un accès équitable aux médias, et des rapports financiers publics et vérifiés. Ce qui aide à faire fonctionner le tout, c'est une institution neutre. Je reviens à ce que j'ai dit au début à l'égard du directeur général des élections: il doit être une personne neutre, impartiale et apolitique qui est chargée d'appliquer des contrôles.
Trois grands principes sont en cause: le pluralisme—il faut favoriser la venue de nouveaux partis politiques, par exemple—, la transparence et l'équité.
En résumé, le Québec s'est donné des règles afin de contrôler le financement des partis politiques. Les principales règles sont les suivantes: tous les revenus des partis sont la responsabilité d'un représentant officiel; seul le financement populaire est autorisé; les contributions et les adhésions sont limitées, autant celles de l'électeur que celles de l'État; les contributions de montants de plus de 200 $ doivent être versées par chèque; l'émission de reçus est obligatoire pour toute contribution; les noms des électeurs ayant versé une contribution de plus de 200 $ sont rendus publics lors de la production des rapports; et les partis politiques doivent préparer annuellement, à date fixe, un rapport financier accompagné du rapport d'un vérificateur.
De toutes ces règles, les plus fondamentales sont probablement celles de la divulgation et de l'accessibilité de l'information sur les sources de revenu des partis politiques. C'est un peu le symbole de ce que je suis devenu; je ne suis plus directeur général des élections, mais j'espère qu'à la fin de mon exposé, je ne tomberai pas par terre. Je m'excuse de cette parenthèse. Que tous les intervenants, qu'ils soient du domaine politique ou d'ailleurs, puissent connaître les sources de revenu des partis politiques permet un contrôle que les partis politiques exercent eux-mêmes les uns envers les autres, et que les médias exercent également.
Malgré les limites inhérentes à tout modèle, il est indispensable de viser une plus grande équité dans le financement politique afin d'assurer la plus large implication possible des électeurs dans le débat politique et, ultimement, de préserver la confiance des électeurs dans leur système électoral. Un des trucs qu'on a développés à Québec, mais qu'on ne retrouve pas dans votre projet de loi, c'est la création et le fonctionnement d'un comité consultatif.
• 1050
Il faut que je vous dise deux mots
de ce comité consultatif, qui est une trouvaille
parlementaire assez étonnante, mais qui donne des
résultats surprenants.
Il existe, de par la Loi électorale, un comité
consultatif qui est présidé par le directeur général
des élections et qui est composé de trois représentants
de chacun des partis politiques qui siègent en Chambre. Ce
comité se réunit pour conseiller le directeur général
des élections.
Mais avec les années, ce comité a pris l'allure suivante et s'est avéré pas mal efficace. Il n'y a pas un seul un projet de loi ou amendement à la Loi électorale qui ne soit pas d'abord soumis à ce comité consultatif. Ce n'est pas un comité public, bien que ses délibérations puissent être rendues publiques. Il permet aux partis politiques d'échanger très franchement entre eux, les uns en présence des autres, pour voir de quelle façon tous les membres de l'Assemblée nationale peuvent ensemble améliorer ou modifier la Loi électorale.
Je vous en donnerai un seul exemple. En 1989—et cela s'est reproduit au cours des dernières années—, des amendements considérables qui ont été apportés à la Loi électorale avaient été si bien négociés entre les différents partis politiques au comité consultatif que lorsqu'ils sont arrivés en Chambre, il n'y a pratiquement pas eu de débat, le débat ayant eu lieu auparavant. C'est une mécanique de la Chambre qui, à Québec en tout cas, s'est avérée fort intéressante et positive.
J'ai l'impression, monsieur le président, que le court moment que vous m'avez accordé, soit une quinzaine de minutes, est terminé. Je me ferai évidemment un plaisir de répondre aux questions des membres du comité. Je vous remercie.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Ensemble, M. Bailie et vous-même avez de nombreuses années d'expérience dans le domaine de l'administration électorale. Nous n'aimons pas avoir à vous couper la parole, et nous espérons seulement que vous n'hésiterez pas à intervenir au besoin.
Nous laissons maintenant la parole à M. Bailie et à M. Whelan.
M. Warren Bailie: Bonjour, monsieur le président et membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Je tiens à vous remercier de m'avoir invité à témoigner devant vous et à faire une brève présentation sur le projet de loi C-2.
Comme vous pouvez l'imaginer, les collègues de M. Kingsley dans tout le pays ont suivi la situation de près, impatients de savoir ce que sera en fait la loi définitive. Nous étions bien au courant de ces travaux.
J'ai préparé des notes pour mon exposé, dont j'ai remis copie au greffier. Il y a d'autres copies, pour ceux qui en voudront.
Si des questions que vous poserez devaient nécessiter une réflexion plus poussée, j'espère que vous comprendrez que je vous demande de me permettre d'y réfléchir et de donner une réponse plus tard, laquelle aura été soigneusement pesée et formulée.
Je tiens à dire immédiatement que je ne discuterai pas spécifiquement de chacun des changements envisagés à la Loi électorale du Canada. Un grand nombre de ses dispositions sont semblables à celles qui sont en vigueur en Ontario en ce moment, donc je préférerais mettre l'accent sur celles sur lesquelles j'aimerais peut-être intervenir maintenant que l'occasion m'en est donnée. Je limiterai donc mes observations à des commentaires sur ce que j'estime être les éléments clés.
La transparence, lors d'élections, est l'un de ces éléments clés. Dans ce projet de loi—et je tiens à en complimenter le ministre—il semble très clair que ces articles ont été revêtus d'une importance qu'ils méritent. Ma préoccupation particulière concerne ce que beaucoup appellent, dans les règlements, les dispositions «lumineuses» ou «claires». Ces lois visent principalement la divulgation des montants et des sources du financement des campagnes et des activités partisanes pendant les périodes électorales par les partis politiques inscrits, les associations de circonscription, les candidats et autres, souvent appelés les «tiers partis».
Je commencerai par commenter les règlements concernant les tiers partis. Je pense que les tiers partis ou les groupes partisans privés existeront toujours, seront toujours un élément de la politique, surtout pendant les campagnes électorales. Si on est réalistes, il serait inconcevable qu'ils ne participent pas à ces joutes dans l'avenir. De plus, ces groupes et ces particuliers ont le droit de se faire entendre.
• 1055
Il convient de noter que les limitations ne s'appliquent pas
généralement au financement de telles organisations ou de
particuliers qui se prévalent de la liberté d'expression ou des
droits d'association à des fins politiques. Les restrictions
imposées à ces droits par les lois électorales, quelles qu'elles
soient, ne visent que les campagnes électorales. Autrement, en tout
autre temps, les tiers partis sont libres d'exprimer leurs opinions
sur des sujets politiques par l'entremise des médias, sans aucune
restriction.
Par conséquent, je pense que la définition que donne le projet de loi C-2 est pertinente. Il est important de bien définir le «tiers parti». C'est «une personne ou un groupe, autre qu'un candidat, qu'un parti inscrit ou qu'une association de circonscription d'un parti inscrit». Ce genre de définition est important pour cerner les groupes ou les personnes visés par les règlements établis dans la Loi électorale du Canada qui est proposée, et je suis tout à fait d'accord avec cette elle.
Je remarque encore que la réglementation des tiers partis, tels qu'ils sont définis précédemment, se préoccupe de la publicité—c'est-à-dire la publicité qui soutient l'élection d'un parti ou d'un candidat particulier pendant une campagne électorale. Le projet de loi C-2 n'intervient pas d'autre façon dans les activités des tiers partis.
Si le Parlement doit légiférer sur les limites des dépenses de ces groupes, le seuil de divulgation est des plus importants. Je remarque dans le projet de loi C-2 que l'on envisage d'établir ce seuil à 500 $. Si vous avez déjà fait de la publicité ou même préparé ou planifié un document de publicité, avant même de l'avoir imprimé, s'il doit avoir la moindre efficacité, vous avez vite dépassé 500 $. Je suggère humblement de fixer ce seuil à 1 000 $.
La publicité est coûteuse. Pour réellement se faire remarquer par la publicité dans les médias imprimés ou électroniques, les tiers partis doivent engager des dépenses importantes. Mieux vaut donc être réalistes à propos du seuil, de manière à entraver le moins possible la conduite des activités des tiers partis concernés et à leur permettre de vraiment se faire entendre pendant les campagnes électorales.
L'élément suivant, dans la chaîne de logique des tiers partis que renferme le projet de loi C-2, est l'inscription. Une fois le seuil atteint, peut-être est-il nécessaire que les tiers partis soient tenus de s'inscrire auprès du directeur général des élections et de respecter les règles générales relatives à l'inscription imposées aux partis politiques et aux candidats.
Le plafond de dépenses des tiers partis est bas. J'ai examiné les données disponibles sur les dépenses de publicité engagées par les partis politiques inscrits lors de la dernière élection générale. Je sais que vous avez déjà discuté de ce sujet, mais permettez-moi de dire que pour entraver le moins possible les activités des tiers partis, il faut leur permettre de dépenser des sommes suffisantes pour mettre sur pied une campagne de publicité significative et cohérente. Les plafonds imposés actuellement par la loi sont bas, si l'on tient compte du coût de la publicité, mais je vous laisse, bien sûr, le soin d'en décider.
Une autre chose importante, c'est la divulgation. En fait, c'est l'un des éléments clés de tout programme visant à réglementer les dépenses des tiers partis. La loi prévoit que les tiers partis doivent déposer des déclarations, comme le font les partis politiques et les candidats, sur les montants et les sources de financement des campagnes et des activités partisanes. Les candidats doivent le faire à propos de leurs revenus et de leurs dépenses. C'est un progrès dans la bonne direction, parce que cette mesure permettra d'informer l'électorat. Nous tenons à avoir un électorat bien informé.
Les Canadiens voudront comprendre quel tiers parti soutient un candidat ou un point de vue particulier sur toutes sortes de sujets pendant une campagne électorale. Il est important que l'électorat canadien puisse comprendre et avoir accès à l'information sur le financement des activités partisanes pendant les campagnes électorales.
• 1100
De plus, l'accès à la documentation divulguée est laissé à la
discrétion du directeur général des élections. Je suis bien
d'accord avec ça.
Enfin, les tiers partis ne devraient pas avoir droit aux crédits d'impôt, et ils ne devraient pas être financés avec les deniers publics.
Il est clair que le projet de loi C-2 ne donne pas aux tiers partis accès à la liste électorale. Ceci protège la vie privée des Canadiens. Les candidats et les partis se servent de cette liste pour leur campagne électorale, et le personnel électoral s'en sert pour gérer les élections. Ceci permet au personnel électoral de faire en sorte que la liste soit plus exacte et plus à jour.
Ceci termine mes observations générales sur la réglementation des tiers partis, mais je vous invite à me poser des questions plus tard, après mon intervention. Cependant, permettez-moi de terminer en disant qu'il est important d'entraver ou d'interrompre le moins possible les démarches normales des organisations et des particuliers qui veulent prendre part au processus politique. Il faut à tout prix placer la liberté d'expression au-dessus de tout et ne la limiter que dans la mesure nécessaire pour réaliser les objectifs de la loi électorale du Canada dans le domaine du revenu et des dépenses de publicité pendant les campagnes électorales.
J'aimerais maintenant vous parler de l'interdiction de publicité.
Les dispositions sur l'interdiction de publicité influencent-elles ou modifient-elles de façon significative le vote des Canadiens? Certains croient que ces dispositions sont offensantes. D'autres estiment qu'elles sont une insulte à l'intelligence de l'électorat. Il est possible qu'un petit nombre d'électeurs soient influencés par la publicité ou les sondages d'opinion, mais leur nombre n'est pas significatif. Les gens se sont généralement fait une opinion bien avant l'émission du décret de convocation des électeurs et revoient leur choix pendant toute la période électorale et après, en évaluant les progrès de la gestion du Canada.
Ensuite, il est pratiquement impossible de faire appliquer les dispositions sur l'interdiction de publicité. En effet, ces dispositions sont très souvent enfreintes et mal compromises, et elles ne font, de toute façon, l'objet de sanctions qu'après les élections, quand la publicité ou le sondage d'opinion qui fait l'objet d'une infraction a été largement diffusé.
Le fait que le projet de loi permet une certaine publicité la veille et le jour du scrutin complique davantage le problème. En effet, l'interdiction de publicité ne s'applique pas aux panneaux-réclames, aux affiches, aux publications dans les hebdomadaires ainsi qu'à l'information sur Internet qui n'a pas été modifiée. Cette publicité reste encore accessible durant les 48 dernières heures de la campagne électorale. Je ne trouve pas qu'il soit équitable d'interdire aux quotidiens, par exemple, de publier des annonces dans les dernières heures d'une campagne électorale si les hebdomadaires ou les magazines mensuels peuvent publier ces annonces. La loi ontarienne prévoit des exceptions qui, essentiellement, rendent ces lois injustes.
Une autre école de penser préconise que les électeurs ont besoin d'une période de réflexion sans sollicitation avant de voter, qu'ils ne devraient pas être influencés par des sondages d'opinion ou des annonces publicitaires. Pour beaucoup de gens, cet argument est sans grand fondement, et je serais d'accord avec eux.
En ce qui concerne la réglementation des dépenses de publicité, il n'est pas nécessaire d'interdire la publicité pendant les 48 dernières heures d'une campagne électorale. Elle devrait être permise jusqu'à la fin de la campagne. Pour les partis et les candidats, la campagne ne se termine sûrement pas avant que le dernier bulletin de vote ne soit déposé le jour du scrutin.
J'en suis venu à la conclusion que l'interdiction de publicité n'a vraiment aucune utilité et qu'on ne devrait pas l'imposer ni aux électeurs ni aux opérations électorales. C'est une mesure inutile qui limite un droit constitutionnel par ailleurs consenti à tous les Canadiens. Je propose qu'il n'y ait aucune interdiction de publicité dans le projet de loi C-2.
• 1105
Les sondages électoraux sont aussi régis par la partie 16 du
projet de loi C-2, intitulée «Communications». L'article 326
prévoit que:
-
326.(1) Pendant la période électorale, la personne qui est la
première à diffuser les résultats d'un sondage électoral—sauf le
sondage régi par l'article 327—et toute personne qui diffuse les
résultats au cours des vingt-quatre heures qui suivent doivent
fournir, avec les résultats, les renseignements suivants:
Je suis certain que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est important de connaître le nom du demandeur du sondage, le nom de la personne ou de l'organisation qui a procédé au sondage, la date à laquelle ou la période au cours de laquelle le sondage s'est fait, la population de référence, le nombre de personnes contactées et la marge d'erreur applicable aux données.
Je souscris à cette disposition parce que je crois qu'elle offre aux électeurs des informations qui leur permettent de juger de la validité du sondage et des renseignements rapportés dans les médias imprimés et électroniques.
Les modifications proposées dans le projet de loi C-2 en ce qui concerne les pouvoirs accordés au commissaire sont très positives et j'en félicite le ministre.
J'ai toujours pensé que la Loi électorale du Canada et la Loi sur le financement des élections de l'Ontario sont des lois au civil qui ne font pas partie du Code criminel du Canada.
Dans l'histoire de l'application de la loi ontarienne sur le financement des élections, on a toujours essayé de faire respecter la loi par la voie de négociations et d'accords avec les personnes ou les organisations prises en défaut. En donnant au commissaire le pouvoir de négocier et de conclure des accords de conformité, on prend une mesure positive qui décriminalise la Loi électorale du Canada.
Il était parfois nécessaire durant les périodes électorales d'empêcher la poursuite d'une activité spécifique. Dans ce domaine également, le commissaire était pratiquement incapable de solliciter des injonctions devant les tribunaux pour mettre fin aux activités qui contrevenaient à la Loi électorale du Canada. Même si le commissaire pouvait recourir à la common law pour obtenir une telle injonction, la procédure était toujours des plus ardues.
Le projet de loi C-2 permettrait au commissaire de régler rapidement les dossiers urgents durant une campagne électorale. Je perçois ce changement comme un progrès dans l'application de la loi électorale.
Le régime fiscal des partis politiques, des candidats et des associations de circonscription et de comté constituent un élément important du projet de loi C-2, mais le projet de loi ne va pas assez loin. Je crois que les associations de circonscription ou de comté doivent être soumises à des règlements similaires à ceux utilisés pour régir, de façon générale, les partis politiques et les candidats durant les élections.
Plus précisément, les associations de comté ou de circonscription devraient s'inscrire auprès du directeur général des élections et nommer un directeur financier et des vérificateurs des comptes. Je pense qu'il est nécessaire que ces associations conservent, ce qu'elles font sans doute, des registres détaillés de leurs revenus et de leurs dépenses, aussi bien durant les années sans élection que durant les années d'élection.
De plus, ces associations devraient déposer une déclaration financière détaillée chaque année, et après chaque élection générale ou partielle donnée.
La loi sur le financement des élections de l'Ontario prévoit toutes les mesures décrites. En Ontario, ces déclarations comprennent des registres des cotisations et d'autres revenus et dépenses pour chaque année et durant une élection.
De plus, le nom et l'adresse de toute personne, société ou syndicat versant à une association ontarienne un montant supérieur à 100 $ doivent être divulgués. Le seuil de 100 $ n'a pas été changé lors des récentes modifications apportées à la loi sur le financement des élections en Ontario. Je ne conteste pas le montant de 200 $ prévu dans le projet de loi. Ce montant est convenable à ce moment-ci.
En termes clairs, je crois que les associations de comté constituent l'épine dorsale du système des partis politiques, au niveau de la base, et qu'elles devraient répondre de leurs activités devant l'électorat canadien.
C'est pourquoi je pense que les exigences financières de la loi devraient tenir compte des activités politiques et de leur financement à ce niveau. Je recommande que le comité se penche sur la réglementation des finances des associations de comté dans toutes les circonscriptions électorales du Canada. Je fais référence, bien sûr, aux associations affiliées aux partis politiques inscrits, et je verrais d'un bon oeil la mise en application, pour les associations de comté, d'exigences similaires à celles en vigueur pour les partis politiques et les candidats.
• 1110
Pour finir, j'aimerais faire quelques dernières remarques. Je
crois que l'élimination du répondant dans les secteurs ruraux
constitue une mesure positive. J'aurais aimé que les législateurs
l'éliminent aussi en Ontario, comme on l'avait proposé.
Pour moi, si un segment de la population possède un droit qu'un autre segment n'a pas, comme c'est le cas entre les régions urbaines et les régions rurales, on pourrait contester la situation pour des raisons constitutionnelles. Aucun juge, je le crains, ne pourrait dire que ce n'est pas contraire à la Constitution.
La loi électorale s'applique de la même façon en milieu rural et en milieu urbain. De plus, je crois que la majorité des électeurs possèdent des pièces d'identité ou peuvent en obtenir au besoin.
Lors d'élections provinciales en Ontario, le droit de vote est universel. Si vous êtes citoyen canadien, âgé de 18 ans et plus et que vous résidez en Ontario, vous pouvez voter. Je suis heureux de constater que le droit de vote aux élections fédérales a été élargi pour permettre aux directeurs du scrutin de voter.
En Ontario, les directeurs du scrutin ont le droit de vote depuis 15 ans. Selon nos lois, si les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages sont à égalité, le directeur du scrutin demande immédiatement un dépouillement judiciaire. Si les candidats sont toujours à égalité après le dépouillement judiciaire, le juge doit demander, conformément au protocole que j'ai conclu avec eux, la tenue d'un nouveau scrutin dans cette circonscription.
La loi permet toujours au juge de demander au directeur du scrutin de voter pour départager le vote, mais ce n'est sûrement pas très faisable. Je pense qu'aucun candidat qui se respecte accepterait qu'une personne nommée par le gouvernement puisse décider qui sera élu dans une circonscription. Il est évident qu'il y aura contestation. Ainsi, ce qui a été convenu avec les juges, c'est que le juge demanderait la tenue d'un nouveau scrutin.
Je suis en faveur du principe et de la pratique qui permettent l'inscription électronique des déclarations de candidature et également du droit de regard que peuvent avoir les directeurs du scrutin sur les personnes qui proposent un candidat sur ces déclarations, pour s'assurer que ces personnes sont des électeurs admissibles et sont en droit de proposer le candidat en question.
Ceci met fin à mon exposé, monsieur le président. Je serais heureux de répondre aux questions que vous voudrez bien me poser, et je vous remercie de votre attention.
Le président: Merci beaucoup. Nous allons passer aux questions. Vous aurez droit à des tours de cinq minutes. Dès que les cinq minutes seront écoulées, je donnerai la parole à quelqu'un d'autre, si mes collègues sont d'accord.
Je demanderais à ceux qui ont des téléphones cellulaires de les utiliser à l'extérieur de la salle. Cela nous dérange dans nos délibérations quand un téléphone sonne.
Je vais donner la parole à un représentant de l'opposition officielle, M. White.
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur Côté, vous avez parlé de la nomination des directeurs du scrutin, et M. Kingsley nous a aussi demandé qu'il soit possible de nommer les directeurs du scrutin selon leur mérite. Au sujet du mécanisme d'application de cette mesure, proposeriez-vous que les directeurs du scrutin soient remplacés de façon graduelle, par attrition, à mesure qu'ils meurent ou démissionnent, par exemple? Le directeur général des élections devrait-il pouvoir les nommer en fonction du mérite ou faudrait-il les remplacer tout d'un coup? Quel est votre avis à ce sujet?
[Français]
M. Pierre-F. Côté: Je ne crois pas qu'il devrait y avoir un changement soudain et radical. Remplacer les 330 créerait pas mal de difficultés. On pourrait établir dans le projet de loi qu'à l'avenir, la nomination d'un directeur ou d'une directrice du scrutin doit se faire selon une méthode semblable à celle qui est suivie à Québec, à savoir: un avis public dans les journaux pour le poste; les personnes qui posent leur candidature passent un examen écrit qui porte sur leur connaissance de la loi et leur aptitude à exercer une telle fonction; enfin, le choix par un jury.
• 1115
Ce qu'il y a de particulier dans la façon de procéder
à Québec, c'est qu'il n'y a aucun intervenant politique.
Que je sache, il n'y en a pas eu. On suit cette
méthode depuis
plusieurs années à Québec. Il
n'y a aucune intervention à caractère politique pour la
nomination, et même le directeur général
des élections n'a pas grand-chose à y voir parce que
c'est vraiment l'attribution d'une fonction au mérite.
On tient compte des aptitudes et des capacités de la
personne. Le processus se déroule en
collaboration, de la même façon que les concours de
la fonction publique. À ce moment-là, la personne
la plus apte est choisie,
et cela donne de bons résultats.
La seule chose qu'on ne peut contrôler et vérifier, et je ne connais pas encore de système satisfaisant pour le faire, est de savoir si la personne choisie, celle qui est la plus compétente et qui arrive la première au bout de ce processus, a du jugement et un peu de flair politique. Pour moi, le jugement et le flair politique sont la même chose. C'est seulement quand elle exerce ses fonctions qu'on s'aperçoit si elle en a ou pas. Le jugement est une qualité essentielle pour exercer la fonction.
[Traduction]
M. Ted White: Monsieur Bailie, j'ai deux questions à vous poser au sujet de la loi électorale en Ontario. Premièrement, j'aimerais vous poser une question sur la liste électorale permanente ou la liste électronique. Nous avons entendu dire qu'il y avait eu beaucoup de confusion aux dernières élections provinciales, et j'aimerais savoir ce que vous pensez de cette liste permanente.
Deuxièmement, j'aimerais vous poser une question sur une modification qui a été apportée, d'après ce que j'ai cru comprendre, à la loi ontarienne pour permettre le vote électronique. C'est ce qui a permis aux gens de voter de leur chalet à l'aide d'un téléphone à clavier. Par exemple, on a pu voter de cette façon au moment du référendum de North York. Le directeur général des élections, M. Kingsley, nous a demandé de pouvoir tester et étudier cette méthode pour les élections fédérales.
J'aimerais bien avoir votre avis sur ces deux sujets.
M. Warren Bailie: Permettez-moi de répondre d'abord à votre deuxième question.
Le projet de loi permet au directeur général des élections de tester le vote électronique et d'autres nouvelles technologies au moment de la tenue d'une élection partielle plutôt que de la tenue d'élections générales. Je pense que c'est une bonne chose parce que nous disposons de nouvelles technologies et que certaines d'entre elles pourraient mieux convenir que le système actuel dans des régions éloignées du Nord. Il s'agit du pouvoir de faire des tests, et la disposition à ce sujet est valable d'après moi. En fait, j'ai recommandé que cette mesure figure dans le projet de loi.
Elle ressemble beaucoup à une disposition de la loi électorale du Québec. J'avais recommandé au ministre de songer à faire ces tests au moment d'une élection partielle, quand toutes les ressources de notre bureau peuvent être concentrées au même endroit, parce que c'est le bon moment d'essayer de nouvelles méthodes. Pour ce qui est de son application proprement dite, cette disposition accorde un pouvoir et je peux vous assurer qu'on fera preuve d'une grande prudence.
Pour ce qui est de la liste électorale permanente en Ontario, il est possible de l'établir depuis à peine plus d'un an, depuis que le projet de loi a reçu la sanction royale. Pour constituer cette liste, nous avons décidé de nous arranger pour obtenir la liste fédérale. Le transfert dans notre système de la liste fédérale, constituée il y a deux ou trois ans, et cela pendant une courte période électorale de 28 jours, a évidemment présenté des problèmes. Je tiens à signaler que sept millions de personnes ont voté en Ontario. Pendant la période de révision, moins de 9 p. 100 d'ajouts ont été faits à la liste électorale, ce qui est supérieur aux ajouts que nous faisons normalement. Compte tenu du fait que la liste datait de deux ans, je ne crois pas que ce soit vraiment anormal.
• 1120
De plus, comme nous avions amélioré le système de révision,
nous comptions deux fois plus d'agents de révision. Avec un peu
moins de 9 p. 100 d'ajouts, il reste que le nombre d'électeurs qui
ont été inscrits sur la liste et qui ont effectivement voté
correspondait à peu près au nombre auquel nous nous attendions.
Évidemment, pour celui qui n'arrive pas à pouvoir voter, il lui
importe peu de savoir qu'il n'y ait eu qu'une seule personne
oubliée. La situation nous préoccupe. Les députés fédéraux ou
ontariens en entendraient sûrement parler.
Je ne prends pas à la légère les problèmes que nous avons eus ou le fait que certaines personnes n'ont pu être inscrites sur la liste électorale. Il reste que nous avons respecté les limites d'une saine gestion.
M. Ted White: Puis-je poser une dernière question?
Le président: Comme j'ai insisté pour que nous nous en tenions à cinq minutes, je dois appliquer la règle rigoureusement, sinon je ne pourrai pas le faire plus tard. Je sais que vous comprenez.
M. Ted White: Je vais vous surveiller.
Le président: Madame Dalphond-Guiral, vous avez cinq minutes.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): J'ai quelques questions à poser à M. Côté et quelques autres à M. Bailie.
Monsieur Côté, vous avez dit, en début d'intervention, que le Québec était heureux de participer à l'élaboration de la liste permanente. Vous savez qu'il y a des différences entre la liste permanente québécoise et la liste permanente fédérale, notamment en ce qui concerne le sexe et l'âge.
La raison qui a été utilisée pour justifier l'absence de ces données sur la liste fédérale était, bien sûr, le respect de la vie privée. Avez-vous l'impression qu'au Québec, on respecte moins la vie privée qu'au Canada?
M. Pierre-F. Côté: Cela me surprendrait. L'information sur le sexe et de l'âge n'est quand même pas rendue publique, à moins que je ne me trompe. Je crois qu'elle est communiquée uniquement aux personnes concernées. L'une des choses qui n'existent plus, c'est l'affichage d'une liste avec tous les renseignements pertinents, comme cela se faisait autrefois. Cela pouvait nuire aux personnes.
Je serais assez étonné que la façon actuelle de procéder porte atteinte aux droits et liberté des individus.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: J'ai une autre question à vous poser. Parmi les différences importantes qu'il y a entre les deux lois, il y a tout ce qui touche la rémunération des agents d'élection le jour du scrutin. Bien sûr, au Canada, les scrutateurs et les greffiers sont rémunérés, mais les représentants de candidats ne le sont pas, alors qu'au Québec, ces représentants reçoivent une allocation.
J'aimerais que vous nous précisiez quels avantages vous voyez à donner aux représentants des candidats une rémunération qui est symbolique, mais qui est quand même existante.
M. Pierre-F. Côté: Si je ne me trompe, l'an dernier, cette façon de procéder a été remise en cause au Québec. L'idée originale de rémunérer les représentants étaient de s'assurer que les représentants des candidats ou des partis politiques, qui sont bénévoles, soient des personnes compétentes et puissent passer toute la journée au bureau du scrutin. Cette rémunération n'est pas considérable, mais elle permet à ces personnes de consacrer toute la journée du scrutin à cet exercice démocratique qu'est la surveillance du déroulement du vote.
Je me demande si on peut indéfiniment faire appel au bénévolat. On le fait déjà beaucoup lors des campagnes électorales des candidats, mais il est difficile de faire appel indéfiniment au bénévolat, surtout pour l'administration de la Loi électorale.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Monsieur Bailie, vous avez parlé dans votre présentation des seuils de divulgation qui, en Ontario, sont toujours de 100 $, alors que selon la loi qui nous est proposée, ce seuil sera de 200 $. Croyez-vous que ce serait une bonne chose que le seuil de divulgation soit le même, peu importe le niveau de juridiction? Je pense que ce serait plus facile pour l'électeur. Si vous partagez ma vision, puis-je penser qu'on va suggérer une modification à ce plafond dans la loi ontarienne?
• 1125
Deuxièmement, et c'est vraiment mon
ignorance qui me fait poser cette question, est-ce que la
loi ontarienne s'applique également à la juridiction
municipale? Est-ce que vos exigences en matière
de contrôle des dépenses au palier provincial
s'appliquent aussi au processus municipal?
[Traduction]
M. Warren Bailie: Bien, d'abord, il serait utile que les lois soient identiques, évidemment, parce que le seuil de 100 $ représente un aspect administratif important dont les gens se rappellent. J'aimerais bien que ce seuil soit le même, et c'est d'ailleurs ce que j'avais recommandé. Pour ce qui est de savoir si le seuil devrait être de 100 $ ou de 200 $, je ne sais pas si ce sera accepté. Je ne suis sûrement pas en désaccord avec cette idée.
Pour revenir à ce dont vous avez parlé plus tôt, le sexe ne figure pas sur la liste électorale des bureaux de scrutin. Il figure sur la liste provinciale parce que le bureau fédéral nous fournit ses listes. Selon notre entente, quand nous faisons des mises à jour, nous devons nous assurer de recueillir les informations dont le bureau fédéral a besoin pour mettre sa liste à jour. Nous recueillons donc cette information, mais elle ne figure pas sur la liste électorale qui se trouve au bureau de scrutin.
Pour ce qui est de votre dernière question sur les élections municipales, le greffier de chaque municipalité doit accepter les inscriptions pour le directeur général des élections; c'est notre seul lien avec les administrations municipales, et c'est parce que nous visons la perfection en ce qui concerne nos listes électorales. Autrement dit, au moment où on se parle, les greffiers de toutes les municipalités de l'Ontario son en mesure d'accepter les inscriptions en vue de la mise à jour de la liste. Nous n'exerçons aucun pouvoir, heureusement, sur les élections municipales, outre le fait, comme je vous l'ai dit, que le greffier de la municipalité peut maintenant faire des inscriptions pour le compte du directeur général des élections.
Le président: Merci.
Madame Parrish, vous avez cinq minutes.
Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Je vais devoir faire vite, et peut-être que M. Whelan peut simplement prendre note de mes questions.
D'abord, monsieur Bailie, je tiens à féliciter les membres du personnel financier qui ont produit les rapports des dernières élections. J'ai eu affaire à eux, et j'ai trouvé qu'ils étaient très accessibles, qu'ils répondaient très clairement aux questions et qu'ils étaient très gentils.
Mis à part le fait qu'il y a eu de la confusion au sujet de la liste, ce que je n'ai pas aimé aux dernières élections, c'est que le directeur du scrutin a demandé à ceux qui votaient par anticipation de prêter serment. Une ou deux personnes que nous avons aidées ont trouvé cela très difficile parce qu'elles avaient des difficultés d'apprentissage et des problèmes d'élocution. Vous pourriez peut-être corriger cette situation la prochaine fois parce que c'est très difficile pour les gens ayant différents problèmes. J'ai pu lire le serment, mais avec difficulté, parce que j'avais oublié mes lunettes.
J'aimerais poser une question sur le plafond fixé pour les dépenses des tiers. Vous avez dit que vous trouviez ce plafond un peu bas. J'aimerais vous rappeler que, quand on fait campagne, on doit prévoir des dépenses de bureau, la nourriture des solliciteurs et les coûts des lignes téléphoniques. Les tiers n'engagent pas des dépenses de ce genre. Ils n'ont que des dépenses de publicité. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet parce que nous sommes suivis de très près, comme vous le savez. Toutes les dépenses liées au téléphone ou à la nourriture pendant une campagne électorale sont consignées très soigneusement, et les tiers n'ont pas cette obligation à respecter.
J'aimerais aussi vous poser une question sur l'interdiction de publicité. Vous estimez qu'elle est un peu trop sévère. Je m'inquiète des renseignements divulgués par les tiers, ou même par les partis d'opposition. On a essayé de divulguer des renseignements mensongers à mon sujet en 1993. On voulait le faire le soir des élections. On voulait s'en prendre à moi de façon très indiscrète, méchante et malhonnête. Les Conservateurs ont fait la bêtise de remettre ces informations à un service de livraison pour lequel le directeur de ma campagne travaillait, et nous avons donc su d'où cela provenait. Nous avons appelé M. Horner qui a empêché la divulgation.
Si on n'interdit pas la publicité à la toute fin de la campagne, je pense que la plupart d'entre nous sont susceptibles de se retrouver dans une situation qui peut être très embarrassante et à laquelle ils n'auront pas le temps de réagir. Cette règle empêche ce genre de choses. Dans mon cas, nous avons simplement eu à dire que cela devait soit être inscrit dans les dépenses de la campagne conservatrice, soit figurer comme de la publicité faite par des tiers ou ce qui est prévu maintenant.
• 1130
Vous avez parlé des registres de revenus et dépenses des
associations de circonscription. Je me demande si vous voudriez que
les dépenses liées à la présentation des candidatures soient de
votre ressort. Un des groupes de femmes du Parti libéral a proposé
une limite de 15 p. 100 ainsi que la présentation des reçus et de
rapports pour essayer de régir le processus de présentation des
candidatures. J'aimerais savoir si vous pensez être en mesure de
vous occuper de cela dans votre service.
Enfin, j'aimerais vous poser une question sur la présentation des candidats, parce que vous avez parlé du droit de regard sur les personnes qui proposent un candidat. J'ai eu le plaisir, en 1997, de faire campagne contre deux candidats nommés illégalement, le candidat du Parti réformiste, et le candidat du Parti conservateur, parce que personne n'avait le pouvoir de vérifier les déclarations de candidature pour s'assurer que tous les signataires vivaient dans la circonscription et étaient citoyens canadiens. Après vérification, j'ai pensé que la situation pourrait se retourner contre moi si j'avais dit que mes adversaires n'avaient pas été choisis en toute légalité?
J'aimerais que vous me disiez quelle pénalité vous imposeriez, quel processus vous proposeriez. Si le directeur du scrutin devait vérifier les déclarations de candidature, les candidats auraient-ils droit à cinq jours pour trouver de nouveaux signataires et, sinon, seraient-ils disqualifiés?
M. Warren Bailie: J'aimerais répondre à votre première question en dernier, si vous me le permettez, monsieur le président. En fait, nous ne sommes pas habilités, en Ontario, à vérifier les noms figurant sur les déclarations de candidature. Par contre, je suis heureux que le ministre ait prévu cette mesure. Nos directeurs du scrutin trouvent très frustrant que la loi ne leur accorde pas ce pouvoir. C'est donc avec plaisir que j'ai accueilli cette mesure dans le projet de loi. Je pense que la même mesure devrait exister en Ontario, et je peux vous assurer que c'est ce que nous allons recommander.
Pour ce qui est des pénalités à imposer, je n'y ai pas vraiment pensé. Mais c'est une bonne question, et je vais vous répondre plus tard.
Quant à votre autre question sur les dépenses que vous avez à engager en plus des tiers, je pense que c'est un bon argument. C'est pourquoi je n'ai pas voulu indiquer de montant. Je trouve simplement que c'est un aspect important pour la liberté d'expression et d'information.
La dernière question que vous avez soulevée était à propos de quelque chose d'injuste qui était imprimé le dernier jour, ou à peu près, et de l'impossibilité dans laquelle vous étiez d'y réagir, à cause du manque de temps. M. Whalen, M. Côté et moi-même appartenons à une organisation qui s'appelle le Council on Governmental Ethics Laws, et lorsque nous parlons à nos homologues américains, l'une de leurs principales préoccupations, ce sont ces annonces publicitaires qui font surface un jour ou deux avant le jour du scrutin. Je crois qu'avant d'en dire plus là-dessus, nous devrons réexaminer la question. Je suis bien heureux que vous me l'ayez rappelé.
Pendant que je suis ici, nos directeurs du scrutin sont penchés avec mon adjoint sur les recommandations relatives à un tas de choses qui sont sur la liste.
À propos du vote par anticipation des tiers partis, j'ai entendu parler de ces longs serments que les gens doivent faire avant de pouvoir voter par anticipation. Nous sommes déterminés à examiner cela en profondeur. Nous le ferons avec grand soin, pour préserver la sécurité du système.
Mme Carolyn Parrish: Si vous permettez un commentaire, nous étions sur la liste électorale, les gens qui devaient faire serment. Donc, si vous pouvez vous en occuper, je crois que ce serait utile.
Le président: Nous en sommes à cinq minutes. Merci.
Nous passons à M. Harvey, pour un tour de cinq minutes.
Le temps passe vite quand on s'amuse.
[Français]
M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Je voudrais d'abord remercier nos témoins et particulièrement M. Côté. Malheureusement, je n'ai jamais eu l'occasion d'être candidat à des élections provinciales et surtout de gagner, n'est-ce pas? Cela me fait énormément plaisir de vous voir ici.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Tu en a eu l'occasion, André.
M. André Harvey: Oui, mais la vie est trop courte.
Monsieur Côté, pourriez-vous nous illustrer, d'une part, les dispositions concernant les activités des tierces parties dans le projet de loi C-2 et, d'autre part, les dispositions de la Loi électorale et de la Loi sur les consultations populaires qui sont en vigueur au Québec? Pouvez-nous démontrer la différence qu'il y a entre les deux en termes de rigueur ou de contraintes?
M. Pierre-F. Côté: J'ai mentionné tout à l'heure que je n'avais pas fait une étude comparative exhaustive des deux lois. Je pourrais toujours la faire et vous la faire parvenir, si vous le vouliez, mais ma première lecture du projet de loi C-2... Le directeur général des élections du Canada m'a fait hier une remarque en privé, et je pense bien pouvoir vous la communiquer. Il m'a dit que dans la rédaction du projet de loi C-2, on avait cherché à éviter qu'il y ait trop de paperasserie. Je n'ai pas très bien compris et cela m'intrigue. Il faudrait que je regarde et que je compare.
• 1135
Ce n'est pas facile parce que, fondamentalement,
le jugement de la Cour suprême dit qu'il faut respecter
la liberté d'opinion des gens, mais le
problème fondamental, à mon avis, est le suivant:
à quoi sert-il de contrôler et vérifier
les contributions et les dépenses des partis politiques
jusque dans le moindre détail alors qu'on n'a pas de
contrôle efficace et vraiment complet quand il y a
intervention des tiers? L'intervention de
tiers qui
se fait sous forme de dépenses de publicité doit, à mon
avis, être assez rigoureusement contrôlée.
Dans la loi du Québec, qui a été amendée, on s'est attardé
à cela assez rigoureusement.
C'est peut-être un peu tatillon, mais pour moi,
il n'y a pas d'autres solutions
que celle de contrôler rigoureusement toutes les
interventions des tiers quand elles se manifestent
par des dépenses de publicité.
M. André Harvey: Monsieur Côté, il y a plusieurs petites associations qui survivent avec des budgets extrêmement réduits. Est-ce qu'une loi tatillonne au sujet de l'embauche d'agents et de vérificateurs, selon le niveau d'intervention et l'investissement projeté, pourrait, à la limite, remettre en cause la survie de certaines petites associations?
M. Pierre-F. Côté: J'en serais surpris. C'est possible, parce que ce genre de loi est très difficile à régir. Il est possible qu'une telle loi conduise à cela, mais j'en serais un peu surpris. Les exigences pour les tiers qui font une dépense ne sont pas énormes, et on verra ce qu'il en est à l'usage, mais je serais surpris que l'existence de petites associations soit remise en cause. Si c'était le cas, je pense qu'on nuirait d'une autre façon à la liberté d'expression et au droit d'association. Cela, il faut le préserver. Je ne crois pas que cela se soit produit à ce jour. Il y a eu une expérience des dispositions de la loi québécoise aux dernières élections générales, et tout s'est bien déroulé.
On verra à l'expérience si ces dispositions sont très contraignantes ou trop contraignantes, mais je ne suis pas porté à le croire.
M. André Harvey: Il y a moyen de trouver un équilibre au niveau des provinces.
M. Pierre-F. Côté: Oui, je pense qu'il faut trouver un équilibre. Il le faut vraiment. Quand la Cour suprême accorde ce droit fondamental d'association et de dépense en période électorale, c'est la liberté d'expression qui est en cause. Il faut toujours être à la recherche de cet équilibre. Ce n'est pas facile, mais c'est ce que la Loi électorale québécoise essaie de faire.
M. André Harvey: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci.
Madame Catterall, vous avez cinq minutes.
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Je voudrais juste ajouter un commentaire à ce que Carolyn disait à M. Bailie à propos de la publicité. Même si les partis ont les moyens de faire de la publicité sur tous les médias, je ne crois pas qu'aucun de nous puisse se permettre des annonces quotidiennes à la télévision ou à la radio pendant une campagne électorale. Lorsque nous parlons de publicité des tiers partis à l'échelle de la circonscription, je ne pense pas que la somme de référence que vous établissez puisse réellement s'appliquer à une campagne électorale de circonscription.
La deuxième chose est que je ne voudrais pas que ma collègue soit embrouillée. Même si ce n'est pas de votre ressort, il existe en fait une loi sur les dépenses dans le cadre des élections municipales, et peut-être la lui avons-nous fournie.
La troisième chose dont je voulais parler, c'est qu'à cause des lacunes de la liste des électeurs réels, l'une de mes préoccupations, dès le début, se rapporte à la détérioration progressive qu'a subi la liste électorale permanente, en ce qui concerne qui est sur la liste et l'apparence de partialité démographique. Je me suis toujours particulièrement préoccupée de la situation des locataires comparativement aux propriétaires, par exemple, des membres de la population à faible revenu; des groupes minoritaires de la population par la langue maternelle; des membres de la population qui sont analphabètes ou encore moins instruits.
• 1140
Je me demandais si vous avez fait une analyse démographique de
ces gens qui n'étaient pas inscrits sur la liste, pour voir si avec
le temps, si on peut dire, ce genre de préjugés démographiques
s'immiscent dans la liste.
M. Warren Bailie: Oui, monsieur le président, madame la députée a raison. Ce sont des sujets de préoccupation, et à propos des groupes particuliers que vous avez mentionnés, nous avons remarqué qu'ils ont plus de difficulté à se faire ajouter à la liste et à s'inscrire. Vous avez raison.
Cependant, si vous regardez bien le recensement, nous avons les mêmes difficultés. Lorsque les recenseurs frappent à des portes, par exemple à Rosedale, s'il se trouve quelqu'un à la maison, ce peut être seulement une servante, mais les recenseurs obtiennent les renseignements. Mais s'ils vont aux maisons—les recenseurs, selon l'ancien système—et que les gens ne sont pas à la maison, qu'ils soient au travail ou qu'ils ne soient pas sûrs de vouloir donner les renseignements à quelqu'un qui se présente à leur porte, alors je crois que les mêmes groupes sont également désavantagés par le recensement.
J'ai reçu des appels de gens qui me disaient qu'ils voulaient corriger leurs coordonnées sur la liste et que l'agent électoral n'a pas été très efficace. Il me semble dans ces cas-là que je dois poser certaines questions. Il y a par exemple ce couple propriétaire d'un restaurant, qui va au travail à quatre heures du matin et revient vers une heure du matin. J'ai répondu que malheureusement, nos recenseurs spéciaux ne travaillent pas pendant les quelques heures qui restent.
Donc, ça a toujours été un problème. Je crois que les deux systèmes ont besoin d'être mis au point de manière à ce que ces gens et les préoccupations de ces groupes dont vous avez parlé soient tenus en compte. Je pense qu'il nous suffit d'être plus efficaces avec le système que nous utilisons, quel qu'il soit.
Je dois vous dire que, selon mon expérience, le recensement est encore le meilleur moyen de dresser une bonne liste. Cependant, il n'a pas été efficace ces dernières années, à cause des immeubles à haute sécurité, de la prudence des gens qui hésitent plus maintenant à ouvrir leur porte, ainsi de suite. La technologie du recensement était sans aucun doute le meilleur système, mais elle a commencé à être moins efficace pour nous, particulièrement dans le noyau central des villes, et cetera. Il nous faudra manifestement combiner les deux systèmes pour arriver à dresser une liste parfaite.
Je vous remercie de me rappeler ces groupes qui sont désavantagés. Nous n'avons pas oublié, et nous avons essayé de trouver des moyens—j'ai parlé à une coalition de gens à Kenora—pour commencer plus tôt de manière à ce qu'ils puissent rappeler à leurs électeurs de veiller à s'exprimer ou à être disponibles. Nous allons y travailler.
Mme Marlene Catterall: Je vous remercie beaucoup.
Le président: Monsieur Anders, vous avez cinq minutes.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Ma première question s'adresse à M. Côté. Vous avez demandé, dans votre intervention, si un dollar égale un vote. Ce que j'aimerais savoir c'est, selon votre expérience, si vous croyez que l'argent peut acheter une élection, ou qu'un dollar égale un vote?
[Français]
M. Pierre-F. Côté: Pour répondre à votre question, j'ai envie de citer une déclaration faite par Bob Dole, qui était candidat à la présidence des États-Unis. Il l'a faite il y a quelques années et je pense qu'il l'a regrettée par la suite. Il parlait des political action committees, des comités d'action politique qui existent aux États-Unis et qu'on ne retrouve pas ici. «Quand les comités d'action politique donnent de l'argent, disait-il, ils attendent en retour autre chose qu'un bon gouvernement.»
Je pense qu'on ne devrait pas mettre les candidats, et encore moins les députés de la Chambre, en état de tentation d'accepter des remerciements sous des formes tangibles ou de l'aide pour se faire élire. On ne sait jamais exactement ce qui se passe, mais la nature humaine étant ce qu'elle est, il est bien certain qu'il y a des personnes qui savent en profiter avant, pendant ou après.
• 1145
La fonction de député est la fonction la plus noble
qui soit dans notre société, la plus difficile à
remplir et celle qui exige le plus de sacrifices. Il est un
peu normal que, quand de grosses sociétés
fournissent de grosse sommes d'argent à un
parti politique, il y ait quelque part un retour
d'ascenseur. C'est ce que
je veux signifier quand je dis qu'en démocratie, ce
ne doit pas être un dollar égale un vote, mais un
électeur égale un vote.
[Traduction]
M. Rob Anders: J'aimerais vous poser une question, monsieur Bailie, sur quelque chose dont vous avez parlé dans votre exposé à propos des interdictions.
Vous avez dit qu'il est à peu près impossible d'obliger le respect d'une interdiction. Je donne cet exemple, non pas pour plaisanter, mais pour aborder cette question littéralement et très sérieusement. Il est arrivé, dans l'histoire, que certaines formes de gouvernements tentent de faire parfaitement respecter les interdictions—je pense à Joseph Goebbels ou à Josef Stalin. Je suis tout à fait sérieux. La question que je veux vous poser, c'est que si on vous donnait un mandat, un ordre, une loi pour faire d'une interdiction qu'elle soit aussi parfaitement appliquée que possible, que feriez-vous? Quels genres de mécanismes ou de contrôles vous faudrait-il pour faire respecter une interdiction avec une parfaite efficacité?
M. Warren Bailie: C'est une excellente question. Dans la mesure où c'est moi qui suis en charge des choses maintenant, puisque le gouvernement de l'Ontario a démantelé notre commission... Je ne suis pas sûr que vous êtes au courant que nous avions une commission composée de neuf membres qui était chargée de traiter de ce genre de questions, et dans sa sagesse, le gouvernement de l'Ontario a décidé que le directeur général des élections peut faire cela à lui tout seul. Une chose qui est sûre est que cela nous a posé beaucoup de problèmes. Je dis ça, parce que nous pouvons recevoir une plainte d'un candidat selon laquelle tel ou tel candidat a publié une annonce publicitaire dans un journal. Monsieur Bailie, qu'allez-vous faire à ce sujet?. C'est la période d'interdiction. Nous voyons l'annonce, nous vérifions la date de publication du journal. La loi a été violée. Donc nous envoyons une lettre au journal pour demander qu'est-ce qui se passe, vous aviez été mis au courant, nous avions averti tous les médias, et cetera. Et alors, ils disent nous avons fait des vérifications, et l'un de nos commis n'a pas supprimé cette annonce, ou a omis de la publier la veille. Ce n'est pas la faute du candidat. La commande d'insertion qu'il nous a donnée était claire. Ce n'était pas censé être publié jusqu'à telle date, ou s'était censé sortir avant cette date. Que voulez-vous qu'on fasse, devons-nous renvoyer cet employé?
Je trouve cela un peu frustrant. Les explications sont tellement plausibles et si proches de ce que pourrait être la vérité. Cependant, l'annonce est là, et je ne sais pas quoi répondre au candidat qui s'est plaint et qui me demande pourquoi nous ne faisons rien. Voilà ce qui se passe.
Monsieur le président, j'ai un autre exemple à vous donner—j'essaierai d'être bref. J'ai dit que les quotidiens ne pouvaient pas publier d'annonces durant ces deux journées, c'est-à-dire la veille de l'élection et ainsi de suite. Toutefois, mon journal de quartier, The Richmond Hill Liberal, paraît le jeudi, soit la journée même de l'élection en Ontario. Donc, comme il s'agit d'un hebdo et que c'est le seul jour où il paraît, il peut paraître le jour de l'élection parce qu'autrement, celui qui souhaite faire paraître une annonce dans ce journal ne pourrait pas le faire pendant toute une semaine. De la même façon, s'il s'agissait d'une publication mensuelle qui ne paraissait que ce jeudi-là, l'annonce pourrait paraître. Cela semble effectivement injuste pour les autres médias.
Je ne voudrais pas vous donner l'impression que nous ne sommes pas vigilants au sujet de ces questions, mais il est difficile d'agir avec efficacité en bout de ligne, étant donné ces quatre ou cinq exceptions et que toute mesure est prise après coup.
• 1150
Quiconque parviendrait à rédiger une loi qui s'appliquerait
vraiment à toutes les situations de manière à rendre l'interdiction
de publication efficace accomplirait un véritable exploit—ne
croyez-vous pas, cher collègue? Naturellement, on courrait alors le
risque d'entraver la liberté de parole.
Le président: Merci, monsieur Bailie.
Monsieur Bergeron, vous avez cinq minutes.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, nous avons eu l'occasion, dans le cadre des travaux de ce comité, de poser des questions sur la question du financement populaire. Très souvent, les intervenants qui s'opposent à l'idée d'introduire dans la loi fédérale des dispositions concernant le financement populaire pour limiter les contributions permises ou pour n'admettre que les contributions venant de citoyennes et citoyens, disent que, de toute façon, il y a toujours possibilité de contourner les dispositions de la loi. Par exemple, une entreprise qui veut contribuer à un parti politique peut donner de l'argent à ses employés pour que ceux-ci le donnent au parti politique.
Je pense qu'il y a des préoccupations légitimes à l'égard de ces trous—appelons-les comme ça—ou de ces possibilités de contourner la loi. J'aimerais que M. Côté précise sa pensée quant à ces objections qui sont émises par des opposants à la Loi sur le financement populaire.
J'ai aussi une question pour M. Bailie. Sa présentation était étrangement muette sur la question de la nomination des directeurs du scrutin. J'aimerais donc que M. Bailie nous indique ce qu'il pense de la question de la nomination des directeurs du scrutin.
M. Pierre-F. Côté: Votre préoccupation quant à la difficulté que présente l'application stricte de la loi est bien réelle. Cependant, il est relativement facile de dire qu'on contourne la loi et qu'il ne vaut donc pas la peine d'avoir des exigences comme celles-là. Quand j'étais en poste, je disais toujours publiquement: qu'on me donne le début du commencement d'une preuve et j'intenterai des poursuites.
J'ai évidemment fait certaines recherches, pour ne pas employer le mot «enquêtes», dans le monde des affaires pour savoir si c'était monnaie courante, si on le faisait de façon systématique. L'exemple que vous donnez est celui qu'on donne le plus souvent: un conseil d'administration dit à ses employés ou aux membres du conseil d'administration: «Donnez le maximum et faites-vous rembourser.»
Je pense que cela peut se faire. Il ne faut pas être assez naïf pour croire que cela ne se fait pas. Mais je ne crois pas que ce soit généralisé. Cependant, il y a une autre chose sur laquelle il faut réfléchir et que j'ai mentionnée tout à l'heure rapidement, et c'est l'augmentation constante du coût des campagnes électorales et la nécessité pour les partis politiques d'avoir des sources de financement suffisantes.
Peut-être sommes-nous rendus à une période où le financement populaire des individus à même leur propre argent n'est plus suffisant. De quelle façon faut-il compenser? D'une part, il y a l'aide qu'apporte l'État. Le gouvernement du Québec apporte aux partis politiques une contribution financière qui est assez considérable en termes de pourcentage de tout ce que peut utiliser un parti politique.
Je me demande s'il n'y aurait pas lieu, si c'est la seule solution—je me pose la question mais je n'ai pas la réponse—, de dire: Très bien, dans certains cas, on pourrait peut-être permettre à des entreprises de contribuer à un parti politique si on contourne la loi aussi facilement, ce dont je doute, mais il faudrait qu'il y ait alors des règles absolument strictes concernant le maximum, la façon de le faire et de rendre cela public. Dans le fond, il est vrai que les élections ne se font pas avec des prières, mais avec de l'argent. De nos jours, la communication coûte cher.
Alors, quelle solution trouver? Je pense qu'il faut fouiller davantage, mais en gardant le principe de base qu'on a adopté: premièrement, cela doit venir des individus et, deuxièmement, il doit y avoir une grande diffusion de la provenance de l'argent et de son utilisation. C'est là que la vigilance de tous peut aider à l'observation de la loi.
Le président: Monsieur Bailie.
M. Warren Bailie: Nous sommes en train de consulter les oracles.
On me pose là, monsieur le président, des questions difficiles. Cependant, je vais tenter d'y répondre.
Un des règles énoncées dans la loi de l'Ontario interdit de contribuer de l'argent qui ne vous appartient pas. Il est difficile de la faire respecter, mais la loi et les lignes directrices précisent bien que l'argent versé ne doit pas appartenir à un autre. Même si les entreprises peuvent faire des contributions en Ontario, cette loi ne change pas et elle est exécutée avec beaucoup de rigueur. Donc, si vous faites un don, il faut que l'argent vienne de vous.
Un organisme a essayé de contourner ainsi la loi, de faire des contributions à un parti politique en versant d'importantes primes à ses employés et en leur demandant d'envoyer cet argent au parti qui fait tant pour l'entreprise. Son président a abouti en prison.
Par conséquent, nous suivons effectivement la situation de près. Il n'est pas très facile de faire la preuve de l'acte, mais nous gardons l'oeil ouvert.
Voilà ma réponse à cette question.
En ce qui concerne la nomination des directeurs de scrutin, j'ai fait en réalité appel à mon collègue pendant plusieurs années pour trouver la réponse à certaines questions, parce que j'estime qu'il faut être prêt au cas où la volonté politique en Ontario serait telle que le gouvernement autoriserait la nomination des directeurs de scrutin sur une base strictement technique. Rien n'a jamais laissé croire que ce serait le cas. J'applique la loi électorale de l'Ontario et je prodigue des conseils à la demande de l'assemblée législative. Il est arrivé que je prodigue ces conseils avant qu'on me les demande, mais en règle générale, il n'en a pas vraiment été question en Ontario.
J'ai suivi de près la procédure appliquée au Québec, et je crois qu'elle est bonne. La Colombie-Britannique et certaines autres compétences ont à peu près la même formule. À Terre-Neuve, par exemple, on procédait de la même façon jusqu'à un certain point, mais sans avoir modifié la loi.
J'ai moi-même déjà été directeur de scrutin pour des élections fédérales. J'avais été nommé dans le cadre du régime actuel. J'ai aussi été nommé directeur de scrutin pour des élections provinciales en vertu du même régime. Je crois qu'il est efficace. Il est clair maintenant qu'étant donné les progrès technologiques et les complications provoquées par les listes permanentes, il faudra réfléchir davantage à la procédure en place au Québec. Toutefois, cela demeure une décision du gouvernement.
Lorsque j'ai discuté de la question il y a 20 ans environ avec mon prédécesseur, il m'a demandé, si je réussissais à convaincre le gouvernement de me donner l'autorité de nommer les directeurs de scrutin et si, tout à coup, il y avait une vacance à Kenora, comment je m'y prendrais pour pourvoir le poste? Je lui ai répondu que le meilleur moyen était assurément de faire paraître une annonce dans le journal. Il m'a alors répliqué que c'était une épée à double tranchant, car, pour l'instant, je pouvais compter sur une vaste organisation comptant dans chaque région de la province un membre ou un éventuel membre capable de me conseiller quant au choix logique d'une personne dans les régions éloignées.
J'étais donc légèrement préoccupé par la façon dont je m'y prendrais, étant donné mes effectifs très réduits. M. Côté comptait comme effectifs auparavant quelque 19 employés.
Les examens, les annonces à faire paraître et les lettres envoyées par d'éventuels candidats—ce sont là des tâches qui reviennent à un niveau supérieur d'administration. Les examens qu'écrivent ces personnes ressemblent à un examen de la fonction publique.
J'ai même demandé à mon collègue, lors d'une visite, si je pouvais voir les questions d'examen et en obtenir un exemplaire puisqu'il semblait si intéressant. Il m'a répondu qu'il fallait faire très attention, que s'il laissait sortir des exemplaires... Les règles de sécurité sont très rigoureuses.
• 1200
Élections Ontario comptent actuellement 15 employés
permanents. Il faudrait plus que doubler les effectifs avant
d'envisager une mise en oeuvre efficace de cette idée.
Toutefois, nous y réfléchissons toujours. C'est tout ce que je puis dire pour l'instant.
Le président: Nous avons certes épuisé le temps...
M. Warren Bailie: Je m'en excuse. Je suis un bavard impénitent.
Le président: Non, c'est simplement que le tour de cinq minutes est terminé. C'étaient de bonnes questions et de bonnes réponses.
M. Harvey avait une question, mais avant de lui céder la parole, la présidence aimerait poser deux brèves questions.
La loi actuelle cherche à protéger la publicité électorale des candidats sur le terrain. Un article interdit d'enlever les panneaux d'un candidat ou de les couvrir.
L'un d'entre vous a-t-il de l'expérience dans l'application de ce genre de disposition? Je suis conscient que l'exécution d'une loi pose toujours problème, mais l'un d'entre vous a-t-il tenté d'appliquer les dispositions d'une de vos lois visant à protéger la publicité électorale d'un candidat? Dans l'affirmative, qu'est-il arrivé?
M. Warren Bailie: Je puis vous affirmer, si jamais vous examinez la loi électorale de l'Ontario, que vous la trouverez très mince par rapport à la loi fédérale, qui s'applique à l'échelle du pays. J'ai essayé au fil des ans de convaincre les comités de ne pas inclure dans la loi des dispositions impossibles à faire respecter. La protection des affiches en est une.
Il n'y a donc pas de disposition à cet effet dans la loi. La seule protection dont jouit le candidat lors d'élections en Ontario est la protection de la propriété privée.
Par exemple, à Willowdale, juste au nord de Toronto, le fils d'un candidat—j'arrive à peine à y croire—a circulé dans la ville pour enlever les panneaux de l'adversaire. Un policier l'a vu placer les pancartes dans le coffre de son auto. La preuve était donc claire. Nous avons certes été ravis de voir toute la publicité qui a entouré l'arrestation, bien qu'il ait fallu du temps pour obtenir une condamnation.
Donc, les règles générales de protection de propriété privée ont suffit à faire arrêter et condamner la personne qui volait les affiches. Désolé, mais la loi électorale est muette à ce sujet.
[Français]
Le président: Monsieur Côté.
M. Pierre-F. Côté: Si j'ai bien compris votre question, vous avez demandé s'il existe un contrôle sur le contenu d'une publicité.
M. Stéphane Bergeron: On a plutôt parlé de la protection des pancartes.
M. Pierre-F. Côté: Très bien, je m'excuse. La loi québécoise renferme des dispositions assez précises sur les autorisations qui sont requises de la part des municipalités en particulier. La disposition et l'emplacement des affiches publicitaires sont assez bien contrôlés par la réglementation municipale. Ce qu'on a ajouté dernièrement, ce sont des obligations qui, si elles ne sont pas respectées, sont assorties d'amendes. Par exemple, on exige qu'on dispose de ces fameuses affiches et pancartes qui traînent dans le décor trop longtemps après les élections.
Depuis l'adoption de la réglementation, aucun problème majeur n'a surgi à l'égard des pancartes. Par exemple, on dit que des ententes doivent être conclues avec Hydro-Québec et les municipalités lorsqu'on veut utiliser leurs espaces.
M. Stéphane Bergeron: Je crois que la question portait davantage sur les actes de vandalisme contre les pancartes.
M. Pierre-F. Côté: J'ai de la difficulté à suivre; je m'en excuse.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie.
M. Harvey a une question à poser.
[Français]
M. André Harvey: J'aimerais faire un court commentaire, monsieur le président.
À la suite de la question de mon collègue Bergeron concernant le financement populaire, M. Côté a ouvert une porte qui m'apparaît intéressante et que nous devrions peut-être explorer. Je crois avoir compris—il pourra toujours me corriger si je suis dans l'erreur—que ce ne serait peut-être pas une mauvaise chose que les Canadiens acceptent davantage de responsabilité au niveau du financement des campagnes électorales pour qu'on en arrive à une démocratie qui soit plus transparente.
J'aimerais demander à M. Côté s'il a l'impression, intuitivement, que les Canadiens seraient prêts à participer davantage au financement des campagnes électorales afin d'obtenir une meilleure garantie qu'il n'y ait pas d'intentions obscures de la part de ceux qui financent une partie des campagnes électorales fédérales.
M. Pierre-F. Côté: Je serais porté à répondre spontanément oui à votre question et à vous dire que la confiance des électeurs est surtout basée sur ce qui leur apparaît. Tout ce qu'on garde caché ou enveloppé de mystère, surtout les sources de financement, produit une mauvaise impression chez la population.
L'autre avantage, c'est que s'il y a un plus grand engagement direct au financement populaire de la part des électeurs, on constatera que les élections deviennent leur affaire, leur préoccupation. Par voie de conséquence, il y aura un plus grand engagement des électeurs dans tout le processus.
M. André Harvey: Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Je vous remercie.
Monsieur White.
M. Ted White: Merci, monsieur le président.
Monsieur Harvey, j'allais poursuivre simplement dans le même ordre d'idées qu'auparavant, mais j'ai trouvé intéressant qu'en réponse à une question au sujet du recensement, vous avez mentionné que les gens ne sont pas à la maison et qu'ils ont peur d'ouvrir leur porte à des étrangers. Je ne puis m'empêcher d'observer que, si les impôts étaient peut-être plus bas, un parent pourrait demeurer à la maison et que, si notre système juridique était plus sévère, on n'aurait pas peur d'ouvrir la porte. Il serait alors possible de faire du recensement. Quoi qu'il en soit, ce n'était pas vraiment une question, mais simplement un commentaire.
Monsieur Harvey, nous avons effectivement accueilli, hier soir, les porte-parole du Congrès du travail du Canada. Ils étaient opposés à la liste d'électeurs électronique, à la liste permanente. Ils ont cité comme exemple, entre autres, l'envoi de sept cartes de recensement ou fiches d'électeur à la même adresse où habitaient des étudiants. Il était donc facile de se faire passer pour un autre au bureau de scrutin. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Pendant que nous y sommes, pourriez-vous aussi commenter la fraude à laquelle peut donner lieu le recensement ordinaire. Comparez les deux, si vous le pouvez, je vous prie.
M. Warren Bailie: Il serait plus efficace de répondre à votre seconde question en premier. Lors d'un recensement, la carte serait livrée de la même façon et, dans le cas des étudiants, étant donné leurs allées et venues, nous pourrions faire face à la même situation—l'envoi de sept fiches à la même adresse, de sorte que des gens croient qu'on peut voter illégalement.
Toutefois, cette fiche dit simplement à l'électeur où se rendre pour voter. J'ai toujours privilégié le système utilisé au Québec. Si j'ai bien compris, une fiche est envoyée par courrier pour dire aux électeurs d'un immeuble où se trouve leur bureau de vote. Il serait presque impossible d'usurper l'identité d'un électeur avec cette carte parce qu'il s'agit presque de ce que je qualifierais d'envoi collectif. J'ai sérieusement envisagé de recommander ce système en Ontario, mais je ne l'ai pas fait encore.
Le recensement comporte plusieurs avantages. Un avantage que j'avais l'habitude de citer constamment est que les partis nous remettaient une liste d'électeurs en règle. Puis, le recensement a commencé à avoir des ratés, quand les partis ont cessé de bien s'acquitter de cette responsabilité, soit de fournir le nom d'une personne dans chaque bureau de scrutin pour aider au recensement et qu'ils ont commencé à envoyer des gens de l'autre bout de la ville pour le faire et ainsi de suite.
Quand ils le faisaient eux-mêmes, c'était très utile parce que deux personnes allaient de porte en porte pour annoncer l'imminence d'une élection, un important avantage que présentait le recensement par rapport à la liste permanente. Toutefois, nous avons simplement constaté que cela ne fonctionnait pas bien, et le gouvernement a décidé qu'il souhaitait raccourcir la période électorale, de sorte que huit jours ont été retranchés de la campagne. Il devenait alors impossible de faire le recensement, les révisions et tout le reste à temps pour distribuer des exemplaires de la liste aux partis.
Il demeure possible encore de faire le recensement des électeurs en Ontario, mais il faut que ce soit fait en dehors de la période électorale.
M. Ted White: Monsieur Bailie, sauf votre respect, vous n'avez pas vraiment répondu à ma question. Je me suis peut-être mal expliqué.
Lors d'un recensement, il me semble que la personne va de porte en porte pour demander à chacun s'il est citoyen canadien, s'il a 18 ans et s'il habite à cette adresse. Aucune preuve n'est requise, de sorte qu'il est assurément facile de commettre une fraude.
• 1210
En fait, la loi actuelle prévoit que l'on commet une
infraction si l'on fait inscrire un animal ou une chose, d'où j'en
conclue qu'il est possible de faire inscrire un animal ou une
chose.
M. Warren Bailie: On avait l'habitude d'entendre parler de choses pareilles à l'époque où l'on effectuait encore des recensements. Près d'où j'habite vit un couple qui a une petite propriété d'environ 19 acres. Sur sa boîte aux lettres, on trouve leurs prénoms, quelque chose comme «Ray et Sue», suivis de quelques autres. Si les recenseurs étaient allés là-bas et qu'il n'y avait eu personne, ils auraient cru savoir qui habite là. Cependant, les autres noms—l'un est le chien et l'autre, le poney. C'est ainsi que des animaux se retrouvaient sur la liste d'électeurs.
Bien des retraités et des veuves, beaucoup de dames, qui habitent dans mon vieil immeuble ne changent pas, probablement pour plusieurs raisons, le nom de l'occupant précédant inscrit dans le hall d'entrée. Les recenseurs inscriraient donc le nom de cet occupant, mort quatre ans auparavant.
M. Ted White: Avec le temps, toutefois, la liste électronique ne serait-elle pas plus fiable en raison de la façon dont les noms y sont ajoutés? Il faut désormais qu'il y ait recoupement avec les fichiers relatifs à la citoyenneté, à l'inscription des permis de conduire et au registre de l'état civil. Tous ces renseignements nous parviennent maintenant d'autres bases de données. Il semble donc raisonnable de croire qu'avec le temps, la liste gagnera beaucoup en exactitude.
M. Warren Bailie: Vous avez raison, pour les raisons même que vous citez. Il ne fait aucun doute que le temps joue en notre faveur.
[Français]
Le président: Monsieur Bergeron.
M. Stéphane Bergeron: J'aimerais d'une part rapidement poursuivre nos discussions sur la question qu'a posée le président au sujet des pancartes. Au fond, nous nous demandions si la loi québécoise contenait des dispositions visant à protéger du vandalisme les pancartes et les publicités visibles sur les propriétés, les poteaux et ainsi de suite. Est-ce qu'au contraire, comme c'est le cas dans la Loi électorale provinciale de l'Ontario, on dit simplement que cette protection existe en vertu du droit de propriété privée? Est-ce qu'il y a des dispositions particulières dans la Loi électorale du Québec sur cette question-là?
Voici l'autre question que j'aurais le goût de poser à M. Côté. Ai-je bien compris qu'il a répondu plus tôt que la Loi électorale québécoise permettait au directeur général des élections, s'il y a entorse non seulement à la lettre mais aussi à l'esprit de la loi, d'entamer des poursuites? J'ai cru comprendre que si une personne se faisait rembourser par sa compagnie une contribution qu'elle a faite à un parti politique, elle pouvait éventuellement être poursuivie en vertu des dispositions de la loi québécoise.
M. Pierre-F. Côté: Ma réponse à votre deuxième question est oui. Il est évident que cette personne pourrait être poursuivie et qu'elle risque de payer de fortes amendes. Évidemment, la difficulté la plus grande consiste à établir la preuve.
Quant à votre première question au sujet du vandalisme, je ne suis pas en mesure d'y répondre de façon précise et de vous dire s'il y a des dispositions très strictes à cet égard dans la loi. Je m'excuse auprès du président de ne pas avoir bien compris sa question tout à l'heure. Il faudrait que je vérifie les dispositions de la loi. On peut évidemment invoquer toutes les dispositions de méfait public et de manquement à des règlements au Code criminel, aux règlements... Ces méfaits publics ou cette façon de porter atteinte à un autre candidat ne sont pas très généralisés, bien qu'il arrive qu'ils se produisent. Je crois qu'il s'agit finalement d'une question d'éducation de la population.
Si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais ajouter quelques éléments au sujet de la liste électorale à la suite des échanges qu'il y a eu concernant cette question. Je crois que la liste électorale du Québec devrait être celle qu'on utilise au niveau fédéral. Le fédéral ne devrait pas avoir une liste électorale fédérale distincte pour les élections fédérales au Québec parce que la liste électorale du Québec est l'une des plus complètes qui soient à cause de sa source d'information, qui est d'abord la Régie de l'assurance-maladie. Nous sommes rendus au point où les noms des personnes sont sur la liste électorale parce que ces données se recoupent avec celles du ministère de la Citoyenneté, de la Régie des rentes, de l'inscription des permis de conduire et du registre de l'état civil. Les noms de tous les gens qui ont les qualités de base requises, à savoir être âgé de 18 ans, être citoyen canadien, et le reste, pour avoir le droit de vote, se retrouvent sur la liste. Lorsqu'une personne ne veut pas que son nom soit inscrit sur la liste, elle doit en faire la demande.
• 1215
La difficulté principale d'une liste électorale
permanente est sa mise à jour, qui se fait par voie de
révision de la liste. Je pense qu'on ne
corrigera pas ce problème en faisant de
nouveaux recensements. Je crois que les recensements de
porte à porte sont chose du passé. Le principal
problème survient lorsqu'une personne change
d'adresse, soit à l'intérieur d'une circonscription,
soit d'une circonscription à l'autre.
Il est assez étonnant de voir les derniers chiffres relatifs aux modifications à la liste électorale du Québec, laquelle sert lors des élections provinciales, municipales et scolaires. Le taux de révision et de changement est constamment à la baisse tellement la liste est de haute qualité.
Quand on parle d'un système informatisé à la fine pointe et d'une source de renseignements fiable, je crois qu'on peut donner le Québec en exemple.
Évidemment, le pendant d'une liste et du document qui accompagnait le recensement porte à porte, c'est qu'il faut s'assurer que la liste est bien montée et, d'autre part—c'est un élément nouveau de la loi québécoise—qu'on oblige les électeurs à s'identifier. Nous en avons fait l'expérience cet automne, lors des élections municipales. Nous n'avons pas émis de carte d'électeur, mais nous leur demandons de présenter une pièce d'identité pour bien démontrer que le nom sur la liste correspond à la bonne personne.
Il y a trois modes d'identification: la carte d'assurance-maladie, le permis de conduire et le certificat de citoyenneté. Pourquoi ces trois-là? Ce sont trois pièces d'identité qui portent une photographie de la personne. Nous sommes presque rendus à un système qui permet aux électeurs de vraiment exercer leur droit de vote en toute quiétude et d'être assurés que leur nom est sur la liste.
[Traduction]
Le président: Merci.
J'ai une autre question. J'aimerais que vous me parliez de votre expérience, si vous en avez dans ce domaine précis. Le projet de loi à l'étude fait de son mieux pour permettre au citoyen de voter, sans égard au lieu où il se trouve et à sa situation personnelle. Lorsqu'il y a un établissement de soins chroniques, un foyer pour personnes âgées où il y a des personnes handicapées, la loi à l'étude permet au scrutateur et au secrétaire du bureau de vote de prendre la boîte de scrutin et de passer de chambre en chambre et elle permet aussi au scrutateur de donner à l'électeur toute l'aide requise pour lui permettre de voter.
Or, deux éventualités me viennent à l'esprit. Voici donc ma question. Estimez-vous qu'il y a moyen d'appliquer cet article, étant donné les deux éventualités? Ainsi, il pourrait violer le secret du vote de l'électeur et, en second lieu, permettre par son libellé au scrutateur de remplir lui-même le bulletin de vote de la personne handicapée. Je me demande si, soit en Ontario, soit au Québec, vous avez fait l'expérience d'un scrutateur qui fournit une aide significative à la personne handicapée ou à l'électeur invalide.
L'un ou l'autre d'entre vous peut répondre.
[Français]
Monsieur Côté.
M. Pierre-F. Côté: Oui, une telle disposition existe dans la loi québécoise. On parle dans de tels cas de votes itinérants, qui peuvent avoir, par exemple, été recueillis dans des établissements de santé qui sont reconnus par le ministère. La procédure utilisée jusqu'ici nous a donné entière satisfaction. Elle permet aux personnes qui ne sont pas en mesure de se déplacer d'exercer leur droit de vote et de se faire aider Soyez assurés que la procédure à laquelle on a recours pour permettre à une personne handicapée qui a besoin d'aide d'exercer son droit de vote est très bien contrôlée. Par exemple, la même personne ne peut pas aider 20 autres personnes. Il faut avoir recours à des personnes différentes. Une série de mesures ont été inscrites dans la loi pour protéger le secret du vote. De plus, afin qu'on ne puisse savoir que les personnes d'un établissement ont voté d'un côté ou de l'autre, leurs votes sont ajoutés à des résultats d'autres sections de vote.
• 1220
Je crois que la sécurité
et le secret du vote sont maintenus. Malgré le
travail supplémentaire que cela exige,
le vote itinérant est certainement une
amélioration considérable.
[Traduction]
Le président: Monsieur Bailie.
M. Warren Bailie: Monsieur le président, en Ontario, nous avons des dispositions presque identiques à ce que vous avez décrit. Le scrutateur d'un bureau de scrutin décrit comme étant un établissement de soins chroniques place, à une certaine heure, habituellement aux alentours de 11 heures, une affiche devant la table, et le bureau de scrutin, pour reprendre le terme utilisé dans notre loi, «se déplace» autour des lits des patients qui sont incapables de se rendre au bureau de scrutin habituel.
Il est vrai qu'un pareil arrangement ne donne pas au patient le même isolement que l'isoloir. Toutefois, nous avons pour principe qu'un bureau de scrutin fournit cet isolement, qu'on y fournit un isoloir et tout le reste.
Cependant, c'est le patient qui ne peut pas se rendre à cet endroit ou à ce genre d'endroit, pour lequel il faut prendre des dispositions extraordinaires, qui décide d'adopter cet autre moyen de voter. Il est même prévu que, si une personne handicapée arrive au bureau de scrutin et est incapable d'entrer dans l'immeuble parce qu'il n'y a pas de rampe d'accès pour les fauteuils roulants ou qu'il y des escaliers, le scrutateur peut être prié d'apporter la boîte de scrutin au véhicule. Le scrutateur demande alors au conducteur de sortir de l'automobile et remet le bulletin de vote à l'électeur. L'automobile sert d'isoloir.
Tout le monde se tient en retrait jusqu'à ce que la personne ait voté, après quoi la boîte de scrutin est placée devant la fenêtre du véhicule. La personne y glisse son bulletin de vote, et on retourne la boîte de scrutin au bureau. Ce n'est pas très fréquent, mais il est possible de déplacer la boîte de scrutin jusqu'à la rue pour aider les personnes handicapées à voter.
Le président: Est-il acceptable, à ce moment-là, de permettre au scrutateur de cocher lui-même le bulletin de vote, dans certains cas extraordinaires?
M. Warren Bailie: Oui. Si la personne demande que le scrutateur fasse la coche sur le bulletin de vote parce qu'elle est incapable de le faire, cette personne prend alors la décision de renoncer à un vote secret parce qu'elle n'a pas d'autre choix. Ce n'est pas le meilleur système au monde, mais je crois que les scrutateurs agiraient avec discernement. Aux termes de notre loi, si le scrutateur fait lui-même la coche sur le bulletin de vote, il doit le faire en présence du secrétaire du bureau de scrutin qui agit comme témoin.
Le président: Fort bien. Je vous remercie.
Madame Bakopanos, vous aviez une question?
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Je sais que nous sommes en retard, mais je souhaitais simplement poser une brève question.
[Français]
Ma question s'adresse à MM. Côté et Bailie. Vous avez parlé des cartes d'identité. J'aimerais savoir si vous êtes en faveur d'une carte qui nous permettrait d'identifier les électeurs, comme c'est le cas dans d'autres pays. Il s'agit d'une carte permanente qu'on donne à un citoyen et qui lui sert de pièce d'identité lorsqu'il va voter lors des élections provinciales, municipales ou scolaires, ou de l'élection d'un conseil d'administration dans un hôpital, comme ce fut le cas récemment.
M. Pierre-F. Côté: Vous parlez d'une carte d'électeur ou d'une carte identité?
Mme Eleni Bakopanos: C'est la même chose.
M. Pierre-F. Côté: C'est justement la distinction que je veux établir pour bien comprendre votre question. En France et en Europe, il y a une carte d'électeur. Ici, il n'y a pas de carte d'électeur, mais plutôt une carte d'identité de l'électeur, ce qui est très différent. J'ai étudié les deux systèmes et j'en suis venu à la conclusion que cette formule se prêtait mal à notre vécu et à notre expérience. En France, la liste électorale est établie à partir d'une démarche de l'électeur auprès de la commune ou de la municipalité qui émet la carte d'électeur. De nombreux problèmes surgissent aussitôt que la personne quitte l'endroit qu'elle habite pour aller demeurer ailleurs. De plus, cette carte d'électeur nous donne l'impression d'un contrôle policier.
Le système le plus parfait que j'ai vu au monde et le plus extraordinaire à cet égard se retrouve au Mexique. Le Mexique a dépensé des dizaines et des dizaines de millions de dollars pour émettre des cartes d'électeur. Il vient tout juste de terminer ce processus, il y a un an. Le Canada a d'ailleurs été conseiller dans ce domaine. Cette carte d'électeur est devenue au Mexique la carte d'identité nationale, de sorte qu'on ne peut plus faire une affaire au Mexique ou se présenter dans un bureau de banque si on n'a pas cette carte-là. Elle est sophistiquée. Elle a coûté une fortune. Il y a tout sur cette carte: l'empreinte, la photo et le reste.
• 1225
Je suis arrivé à la conclusion que si on a une
liste électorale qui est mise à jour de façon
constante et qui est complète en elle-même, il faut
éviter à l'électeur ce contrôle policier. La seule
chose nécessaire, c'est que, lorsque la personne se
présente au bureau de scrutin, on fasse bien la relation
entre le nom, le prénom et l'adresse de la personne qui
apparaît sur la liste et la personne qui se présente.
La meilleure relation
est établie lorsque la personne
présente sa carte d'identité.
Au Québec, on s'oppose depuis longtemps à une carte d'électeur formelle. Vous savez que dans des vieux films français, on disait très souvent: «Vos papiers, s'il vous plaît». Ici, au Canada et en Amérique du Nord, on n'est pas rendu là et une telle carte ne créerait pas bonne impression. Mais je crois surtout que la carte d'électeur n'est pas nécessaire au plan de l'efficacité.
[Traduction]
Mme Eleni Bakopanos: Monsieur Bailie.
M. Warren Bailie: J'ai eu la chance, au bureau fédéral des élections, de pouvoir aider à suivre et à surveiller les élections dans plus de 20 pays un peu partout dans le monde. La plupart du temps, on exigeait ces cartes et ainsi de suite.
La carte rend effectivement la tâche de voter difficile à certaines personnes. Je me souviens, quand j'étais au Salvador, dans un petit village, d'un couple qui a fait appel à moi, en larmes. Ils avaient vu ma carte internationale d'identification. L'homme avait acheté deux billets d'autocar pour se rendre au centre administratif où il devait voter ce dimanche-là. Il y avait consacré la paie de toute une semaine. Une fois sur place, il avait vérifié qu'il avait sa carte d'identité et que son nom se trouvait sur la liste des électeurs. Toutefois, la veille des élections, son épouse a décidé de laver sa chemise après qu'il s'était couché. Sa carte d'électeur a été réduite à un petit tas de carton mouillé. Il n'a pas pu voter. Son nom se trouvait sur la liste et il avait sa carte d'identité, la carte nationale d'identification... L'idée que toutes ces cartes... C'est dommage.
J'ai aussi aidé à surveiller des élections au Zimbabwe. C'était intéressant. C'était l'une des premières élections internationales auxquelles nous assistions en tant qu'observateurs. Il n'y avait pas de liste d'électeurs, étant donné que la population noire n'avait jamais été recensée. Après tout, tous pouvaient se présenter pour voter. À condition d'avoir l'air d'avoir 18 ans, ils pouvaient voter. Il fallait plonger les doigts dans une teinture pour prévenir qu'une personne ne se présente une seconde fois pour voter. Avouons-le franchement. Certains avaient probablement 17 ans seulement, et peut-être même des jeunes de 16 ans ont-ils voté, mais ils sont aussi des citoyens.
Si la personne tient tant à voter, est-ce si terrible? Ici, en Ontario, des gens de 40 ans ne sont même pas conscients qu'ils ont la responsabilité d'aller aux urnes pour aider à gouverner le pays.
Par contre, la carte d'électeur nous simplifierait beaucoup la vie parce que tout serait plus précis. Cependant, il est certain que quelqu'un perdrait sa carte et serait ainsi empêché de voter. Ce serait malheureux. Je ne sais donc pas...
En Ontario, beaucoup de personnes ont la ferme conviction religieuse que le jour où chacun aura un numéro coïncidera avec la fin du monde. Ils renonceraient à leur droit de voter plutôt que d'être obligés de présenter une carte d'identité où, forcément, il y aurait un numéro. Ainsi, ils ne viendraient pas voter.
Autant la carte faciliterait la tâche à certains, autant elle nuirait à d'autres. J'ignore... Dieu merci, je prends ma retraite cette année, de sorte que je n'ai pas à m'en inquiéter.
Le président: Au nom de mes collègues, je tiens à vous remercier énormément d'avoir répondu à notre invitation. À vous deux, vous réunissez un véritable trésor d'expérience que nous vous sommes très reconnaissants d'avoir partagé avec nous, dans le cadre de notre examen du projet de loi.
La séance est levée.