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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 025 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 mai 2009

[Enregistrement électronique]

  (1035)  

[Traduction]

    Conformément à l'article 108(2), nous poursuivons notre étude de la contribution fédérale à la réduction de la pauvreté au Canada. Ceci est la 25e réunion du comité.
    Je souhaite la bienvenue à tous nos invités et témoins. Merci d'avoir pris le temps de venir devant le comité et merci pour tout le travail que vous faites sur le terrain. Nous sommes heureux de vous accueillir aujourd'hui à Moncton.
    Nous avons déjà entendu un certain nombre de témoins à Ottawa et nous savons que le vrai travail ne se fait pas à Ottawa mais dans les circonscriptions, dans les diverses régions du pays.
    Nous avons commencé hier à Halifax, nous sommes aujourd'hui à Moncton et nous serons demain à Montréal.
    Notre objectif est de recueillir vos témoignages sur la situation au niveau local, sur ce qui marche ou ne marche pas, ainsi que vos recommandations pour améliorer la situation.
    Je vais donner la parole aux témoins en commençant par ma droite. Bernard, c'est vous qui commencerez. Chacun d'entre vous aura cinq minutes pour faire son exposé, après quoi nous aurons une période de questions. Si les cinq minutes ne vous donnent pas le temps d'exprimer tout ce que vous souhaitez nous dire, vous pourrez probablement compléter vos interventions pendant la période des questions.
    Je vous identifierai à tour de rôle. Vous pouvez voir que j'ai une minuterie, ce qui me permettra de donner le même temps de parole à chacun d'entre vous. En ce qui concerne les micros, vous n'avez pas à y toucher, quelqu'un se charge de les ouvrir.
    Je tiens aussi à parler de l'interprétation. Pour ceux qui en ont besoin, comme moi, l'anglais passe sur le canal 16 et le français, sur le canal 17. Certaines questions seront posées en français et vous avez toute latitude pour y répondre dans la langue de votre choix.
    Nous commençons donc avec Bernard Richard, ombudsman et défenseur des enfants et de la jeunesse, qui témoigne à titre personnel.
    Monsieur Richard, vous avez la parole pendant cinq minutes.
    Merci beaucoup. J'essaierai de parler aussi vite que possible.
    N'allez pas trop vite, cependant, car les interprètes risquent de ne pas pouvoir vous suivre.
    Très bien, je ferai attention à ne pas parler trop vite.

[Français]

    Cela me fait grandement plaisir d'être ici, évidemment, et je veux féliciter les membres du comité de s'être déplacés à l'extérieur d'Ottawa. Il y a sûrement du vrai travail qui se fait à Ottawa aussi, mais c'est important pour les citoyens du Canada de pouvoir avoir un tel accès à leurs députés fédéraux. Nous pouvons nous considérer comme privilégiés d'avoir cette chance.
    Merci.

[Traduction]

    Je suis l'ombudsman du Nouveau-Brunswick et je suis aussi le défenseur des enfants et de la jeunesse, le commissaire à la vie privée et au droit à l'information, et le commissaire de la fonction publique. J'ai beaucoup de fonctions différentes. J'ajoute que j'ai été député provincial pendant plusieurs années, et ministre dans un gouvernement précédent.
    Depuis plusieurs années, mes fonctions me permettent de me pencher de près sur la pauvreté et de réfléchir aux défis qu'elle pose à notre société. Je suis donc certainement très heureux de vous accueillir ici. Je suis sûr qu'on vous a déjà rappelé un million de fois que la Chambre des communes avait pris une position ferme sur la pauvreté en 1989, quand elle avait promis d'abolir la pauvreté des enfants pour l'an 2000. Il est clair que l'objectif n'a pas été atteint mais, comme aucun d'entre vous n'était là en 1989, je ne vous en tiens pas personnellement responsable.
    Cela dit, il est important de ne jamais oublier que c'est une chose que nous devons absolument faire si nous voulons que toute la société canadienne continue d'avancer. Nous bénéficions de nombreux avantages et nous sommes un modèle pour de nombreux pays. Ceux d'entre vous qui avez voyagé à l'étranger avez certainement été contactés par des gens souhaitant immigrer dans notre pays parce qu'ils estiment que le Canada est un modèle et un pays merveilleux, ce qui est vrai.
    En revanche, cela fait qu'il est d'autant plus embarrassant pour nous de réaliser que beaucoup d'enfants vivent encore dans la pauvreté au Canada et que, même si nous exportons notre eau merveilleuse dans d'autres pays, beaucoup de nos enfants n'ont pas accès à l'eau potable. Nous n'avons pas en être fiers.
    Si nous souhaitons rester un phare pour le monde, du point de vue des droits humains et du développement économique — ainsi que de l'égalité des chances, pour employer une expression inventée au Nouveau-Brunswick —, nous devons nous assurer que la marée fait monter tous les bateaux et que tous les membres de notre société ont la possibilité d'en bénéficier.
    J'ai déjà eu l'occasion de formuler des recommandations sur la maladie mentale, notamment au sujet des jeunes souffrant de troubles mentaux, et sur le fait que notre système de justice pénale ne les traite pas très bien — pas seulement au Nouveau–Brunswick mais aussi dans le reste du pays. S'il y a une chose que je tiens à vous demander pendant ces brèves minutes, c'est de vous concentrer sur la pauvreté des enfants et sur les défis auxquels les jeunes sont confrontés en ce qui concerne l'accès limité aux services de santé mentale.
    Je pense que cette situation prévaut dans tout le pays. J'ai eu l'occasion de rencontrer des ombudsmen de chaque province, ainsi que des porte-parole des enfants et de la jeunesse et des commissaires à l'information et à la protection de la vie privée. Je crois qu'il est important de ne jamais oublier que ces problèmes n'existent pas seulement au Nouveau-Brunswick et que, quels que soient les résultats dans des provinces comme le Québec ou l'Alberta, nous laissons toujours certains de nos citoyens dans la misère, ce qui empêche à notre société dans son ensemble de devenir tout ce que nous en attendons.

  (1040)  

[Français]

    Donc, c'est important d'inclure tous les citoyens dans nos efforts de rendre le Canada pareil à tout ce qu'il devrait être, à tout ce qu'il est dans les yeux de beaucoup de gens sur la planète Terre. En grande partie, c'est vrai, mais nous ne serons pas réellement rendus au point où nous devons l'être, si nous n'arrivons pas à trouver des façons d'inclure tout le monde.
    De plus, les paroles des parlementaires comptent beaucoup. Même si vous n'étiez pas présents en 1989, le Parlement y était. C'est l'institution des Canadiens. Ces derniers se fient aux engagements non seulement de leurs parlementaires, mais aussi de leur Parlement.
    En tant que députés, nous sommes fiers de dire que nous tenons nos promesses. Du moins, nous l'étions quand j'étais député. À mon avis, c'est vrai pour tous les députés, peu importe les partis.

[Traduction]

Nous faisons des promesses, nous tenons nos promesses. Eh bien, le Parlement avait fait une promesse aux enfants du Canada et il ne l'a pas tenue. Je pense que nous avons le moyen de la tenir, à condition de comprendre que les beaux discours ne suffisent pas, il faut aussi de l'action et de l'engagement.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci, monsieur Richard.
    C'est maintenant au tour de Kelly Wilson, de la Société John Howard du Nouveau–Brunswick.
    Je ne sais pas, Kelly, si vous aviez l'intention de parler un peu du travail que fait la Société John Howard. Si vous en aviez l'intention, très bien. Sinon, je vous serais reconnaissant de nous dire quelques mots à ce sujet.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci de nous avoir invités à ces audiences du Nouveau-Brunswick.
    Mon exposé sera très différent de celui de Bernard Richard. Je veux en effet vous parler un peu de mon rôle de directrice générale de la Société John Howard et de l'action que je mène, personnellement et individuellement, auprès des personnes vivant dans la pauvreté et souffrant quotidiennement des conséquences de la pauvreté.
    Plus de 95 p. 100 des 150 personnes dont nous nous occupons vivent dans la pauvreté. Ce sont des personnes avec qui nous travaillons activement chaque année, des personnes qui s'adressent directement à nous. Ce sont des personnes qui témoignent de faibles taux de scolarité, de faibles taux d'alphabétisation et de problèmes d'emploi et de santé, des personnes qui ont des comportements sexuels risqués et qui ont souvent des démêlés avec la justice. Pour survivre, elles adoptent beaucoup de mauvaises stratégies comportementales, ce qui les amène à prendre de mauvaises décisions, à ne pas savoir résoudre leurs problèmes et, bien sûr, à la toxicomanie. La toxicomanie a une incidence énorme sur notre communauté et sur nos ressources provinciales. La santé nous coûte de plus en plus cher. Au Canada, un sans-abri utilise pour 4 714 $ de services de santé, alors que la moyenne nationale est 2 633 $, ce qui représente une dépense importante pour le gouvernement fédéral.
    Si vous examinez la situation au Nouveau-Brunswick...
    Veuillez m'excuser, Kelly, s'agit-il de 4 000 $ par an?
    Oui, par personne.
    Merci.

  (1045)  

    Au Nouveau-Brunswick, le coût moyen de traitement des toxicomanes par le système de santé s'élève à 1 500 $, contre une moyenne nationale de 1 267 $. Au Nouveau-Brunswick, nous sommes au-dessus de la moyenne nationale en ce qui concerne la toxicomanie et son traitement, ce qui représente un fardeau financier énorme pour le gouvernement du point de vue des services de santé. Et je n'ai pas encore parlé du système de justice pénale. Plus de 80 p. 100 de ma clientèle se compose d'individus qui ont eu des démêlés avec la justice et qui souffrent de problèmes de toxicomanie. Je pense que beaucoup de ces problèmes doivent être traités dans la collectivité, au moyen des programmes et de services que nous pouvons dispenser en tant qu'organisme à but non lucratif.
     Les faibles taux de scolarité ont aussi une incidence profonde sur notre clientèle. Selon Alphabétisation Nouveau-Brunswick, notre province est avant-dernière en matière d'alphabétisation. Plus précisément, 60 p. 100 des jeunes de 16 ans ou plus du Nouveau-Brunswick ont le niveau d'alphabétisation le plus faible du pays, ce qui est un énorme problème. En effet, les familles enregistrant de faible taux d'alphabétisation sont plus susceptibles d'être plus souvent malades, plus susceptibles de fumer, moins susceptibles de consulter un médecin ou un optométriste, et plus susceptibles de mal se nourrir et d'être pauvres. Plus de 80 p. 100 des individus incarcérés ont de faibles taux d'alphabétisation. Ce phénomène influe également sur l'accès à l'emploi, ce qui a une incidence sur la qualité de vie des familles. Je pense qu'il est temps d'envisager des méthodes pour cibler des facteurs de risques multiples en même temps. Il faut trouver le moyen de traiter l'individu dans sa totalité.
    Réagir au problème de la pauvreté prendra du temps et les résultats ne se manifesteront pas aussi rapidement qu'on pourrait le souhaiter. Je pense que des résultats mesurables devront clairement être flexibles de façon à saisir de bons résultats. Ce n'est pas question de noir ou de blanc. Ce que je veux dire, c'est que, si nous voulons aider une personne qui a un problème de toxicomanie en supposant d'emblée qu'elle pourra être débarrassée de ce problème jusqu'à la fin de ses jours, nous faisons erreur. La guérison de la toxicomanie doit tenir compte qu'il y aura des rechutes. Cela fait partie du processus. Si une personne fait une rechute mais ne retombe pas aussi bas que précédemment, cela doit être pris en compte. On ne doit pas considérer que c'est un échec.
    En cette période de crise économique, notre clientèle souffre lorsque le gouvernement réduit ses services et programmes. Cela a des conséquences énormes, surtout que ces personnes n'ont pas les connaissances ni les compétences nécessaires pour se défendre. Autrement dit, leurs problèmes risquent de passer inaperçus tant qu'elles n'ont pas une crise majeure.
    Je veux vous dire quelques mots de la démarche de la Société John Howard et de ce que nous faisons sur le plan concret. À mon avis, si nous voulons réduire la pauvreté, nous devons nous attaquer à ses causes profondes. Il est important d'être en contact avec sa communauté, sa province et son pays pour comprendre les défis et opportunités qui existent pour notre population cible. En qualité d'agence de service public, nous devons rester au courant des dernières recherches, mettre en pratique les meilleures méthodes et tirer les meilleures leçons de nos programmes et services. Tous les clients qui franchissent le seuil de notre porte doivent analyser sérieusement leur passé, réfléchir à ce qu'ils veulent faire et examiner ce dont ils ont besoin pour y arriver. Notre rôle à nous est de les appuyer durant ce processus.
    Merci.
    Merci.
    Je donne la parole à John Castell de la Fundy Community Foundation.
    Je vous souhaite la bienvenue, monsieur. Vos cinq minutes commencent maintenant.
    Comme je sais qu'il me sera impossible de dire tout ce que j'ai à dire en cinq minutes, je vous annonce d'emblée que je vais recommander une démarche du bas vers le haut pour lutter contre la pauvreté au Canada. Je pense que ce sont les collectivités locales qui peuvent le mieux saisir le problème et le mieux y réagir. Des organismes comme la Société John Howard, que représente Kelly, et beaucoup des organismes caritatifs ou à but non lucratif avec lesquels je travaille ont une connaissance immédiate du problème, et bénéficient de la confiance de beaucoup des personnes vivant dans la pauvreté.
    En m'exprimant devant vous aujourd'hui, j'espère attirer votre attention sur une tribune où vous pourrez continuellement puiser des informations provenant de groupes comme celui avec lequel je travaille. Je ne fais pas partie de la Fundy Community Foundation mais je collabore étroitement avec elle. J'aimerais vous parler de son modèle de développement communautaire qui est à mon avis l'un des moyens permettant de s'attaquer à la pauvreté au niveau communautaire, mais au sein d'une organisation nationale, les Fondations communautaires du Canada.
    Voilà ce que je tenais absolument à vous dire dans mes cinq minutes et c'est pourquoi j'ai tenu à le faire tout de suite.
    Je collabore avec le programme Dial-A-Ride du comté de Charlotte dont le rôle consiste à fournir des services de transport bénévoles aux personnes âgées, aux personnes handicapées et aux familles dans le besoin du comté de Charlotte. Nous avons un certain nombre de bénévoles qui donnent de leur temps pour assurer le transport des personnes dépourvues de moyens de transport dans cette collectivité rurale afin de leur permettre d'aller chez le médecin, d'aller à la banque, d'aller faire leurs courses, de participer à des activités sociales, etc.
    Nous offrons environ un millier de déplacements par jour. Ce n'est pas un programme qui a été conçu dans le comté de Charlotte, nous avons volé l'idée à la Nouvelle-Écosse où une dizaine de comtés l'ont mise en application. Dans notre comté, le programme a été mis sur pied à la suite de dialogues organisés par la Fundy Community Foundation avec les diverses parties appliquant des programmes d'aide aux personnes dans le besoin. À l'époque, je faisais partie de la Société de bénévolat du comté de Charlotte qui dispensait des services de soutien aux familles d'enfants gravement malades. Ce dialogue sur le transport nous a amenés à résoudre ce problème.
    La Fondation a maintenant un groupe de travail sur la pauvreté. Je vais vous donner un petit cours d'histoire, si vous me le permettez. Le premier ministre du Nouveau–Brunswick a mis sur pied un conseil consultatif sur les organismes à but non lucratif, présidé par Claudette Bradshaw. Afin de contribuer aux travaux de ce conseil, un grand nombre d'organismes à but non lucratif du comté de Charlotte ont organisé des réunions afin de partager leurs idées, de façon à fournir une meilleure image de la situation à Claudette Bradshaw pour qu'elle puisse conseiller le premier ministre. Je crois que la contribution du comté lui a été très utile. Elle a fait des remarques très élogieuses sur la manière dont le comté s'était organisé.
    Cela nous a permis de constater qu'il y avait beaucoup de chevauchements dans nos objectifs et que nous nous connaissions bien mal, les uns les autres. Certains de nos organismes sont dirigés par des conseils bénévoles — parfois sans aucun personnel rémunéré — et abordent leur mission avec beaucoup d'enthousiasme mais en ayant beaucoup de mal à recueillir des fonds puisqu'ils n'ont pas d'agent de financement professionnel. Or, il y a toutes sortes de subventions que nous ne connaissons pas.
    À l'occasion de ce dialogue, nous avons réalisé que nous pourrions faire beaucoup plus en collaborant plutôt qu'en agissant séparément et l'un des résultats les plus importants du groupe de Claudette a été de nous amener à nous parler. En nous réunissant, nous avons conclu que nous pouvions proposer des solutions. Certes, nous pouvons attendre que la province nous vienne en aide, ou nous pouvons nous tourner vers le gouvernement fédéral, mais nous pensons qu'il y a aussi bien des choses que nous pouvons faire sans attendre un appui gouvernemental.
    Avec l'aide de la Fundy Community Foundation, nous avons lancé une série de dialogues. Le processus marche très bien. Vous convoquez les personnes ayant des intérêts similaires, vous identifiez le besoin — dans le cas présent, lutter contre la pauvreté — et vous facilitez le dialogue. Vous avez des groupes de cinq à 10 personnes qui se réunissent pour réfléchir aux problèmes et chercher des solutions.
    Nous avons eu une série de dialogues qui nous ont amenés à décider, au sein de notre groupe, que nous pouvions faire un certain nombre de choses. Nous pouvons choisir trois projets, par exemple, que nous décidons de mettre en application. Nous pourrons peut-être obtenir l'aide du gouvernement mais nous ne l'attendons pas pour démarrer.

  (1050)  

    Tout d'abord, comme ils étaient en relation avec les groupes de lutte contre la pauvreté, nous avons invité des gens vivant dans la pauvreté à travailler avec nous. Notre comité comprend des gens qui vivent dans la pauvreté.
     Trois programmes concernent la sécurité alimentaire et la sécurité du logement et vous avez les détails ici.
    Troisièmement, à cause des heures de bénévolat, nous avons pris connaissance d'un programme appelé banque de temps, et je vous ai donné des informations à ce sujet.
    Je préférerais parler de ces sujets durant la période des questions, si possible.
    Merci. Je suppose que notre période des questions sera plus productive que celle d'Ottawa.
    Je donne la parole à Brian Duplessis. Merci beaucoup, Brian. Vous représentez les Fredericton Homeless Shelters et vous avez cinq minutes pour faire votre exposé.
    Tout d'abord, merci de nous donner l'occasion de comparaître. La possibilité de s'adresser aux députés fédéraux est une chance qu'on ne peut pas laisser passer.
    Il y a quelques mois, j'étais invité à prendre la parole devant un groupe religieux local et le responsable m'a demandé combien de temps je voulais. Je lui ai dit que je pouvais parler au groupe entre 15 minutes et deux heures et nous nous sommes entendus sur une vingtaine de minutes.
    Je n'ai jamais essayé de parler de cette question pendant seulement cinq minutes et je vais donc me concentrer sur deux choses. Tout d'abord, je vais vous dire quelques mots des refuges que nous gérons à Fredericton car je pense que c'est important. Ensuite, je vous dirai comment, selon moi, notre société et nos différents paliers de gouvernement devraient travailler ensemble pour faire face à la pauvreté.
    Je dois d'abord vous dire que les gens avec qui je travaille — les 389 hommes qui ont eu recours aux Fredericton Men's Shelter l'an dernier, et les 96 femmes qui ont eu recours à Grace House for Women, le refuge des femmes — ne vivent pas dans la pauvreté. Ils vivent plutôt dans une pauvreté abjecte. Il y a la pauvreté, malheureusement, puis il y a une pauvreté pire, puis une pauvreté encore plus profonde et, tout en bas, une pauvreté abjecte. Voilà les gens avec qui nous travaillons — près de 500 personnes de Fredericton.
    Quand je parle de pauvreté abjecte, je parle des taux et des systèmes de bien-être social du Nouveau-Brunswick qui poussent les gens dans la pauvreté et les forcent à y rester. Le taux de bien-être social pour une personne seule pouvant travailler... Je vais appeler les choses par leur nom et parler non pas de soutien du revenu ou d'assistance sociale mais, comme les gens qui reçoivent cet argent, de bien-être social. Donc, le taux de bien-être social pour une personne seule pouvant travailler est 294 $ par mois au Nouveau–Brunswick. C'est 294 $ à Fredericton où le plus bas prix possible pour une chambre, dans la maison de chambres la plus pourrie qu'on puisse trouver, tourne autour de 325 à 375 $ par mois.
    Le niveau suivant de soutien du revenu — l'assistance de base, comme on dit — est 537 $ par mois. Songez à ces deux chiffres quand vous entendez Statistique Canada vous dire que le taux de pauvreté pour une personne seule à Fredericton tourne autour de 20 000 à 22 000 $ par an. À 294 $ par mois, ça fait moins de 4 000 $ par an. À 537 $, on est entre 6 000 et 7 000 $ par an. On parle donc bien de pauvreté abjecte.
    Nous gérons ces deux refuges 24 heures sur 24 avec un budget de 400 000 $ par an, somme qui sert à payer notre personnel et à couvrir nos frais. Avec cela, nous pouvons tout juste assurer une subsistance élémentaire et donner un toit, tout en essayant de coordonner nos efforts avec ceux d'autres organismes.
    Nous recevons 60 000 $ de la province, zéro dollar du gouvernement fédéral et zéro dollar des municipalités. Quinze pour cent viennent d'un palier de gouvernement. Nous recevons un peu d'argent de Centraide et le reste provient de nos campagnes de levée de fonds, soit 250 000 à 275 000 $ par an à Fredericton, pour tenir nos portes ouvertes et donner un toit à ces 500 personnes.
    Je ne fais ce travail que depuis un an et demi. Tous les services existent pour aider les gens que nous accueillons dans nos refuges à retourner dans un délai raisonnable dans la communauté. Des services existent mais ils fonctionnent tous en silos. Au ministère du Développement social, il y a des silos pour le logement, la protection des adultes, la protection des enfants, etc. Il n'y a aucune coordination entre les différents services. Il n'y a pas de bonne coordination avec les services de santé mentale et de toxicomanie. Soixante pour cent des gens que nous accueillons souffrent de maladie mentale. Je pense que la proportion réelle est plus élevée mais c'est notre estimation, avec ou sans diagnostic.
    Environ 80 p. 100 ont une toxicomanie quelconque, que ce soit le jeu, la drogue, l'alcool ou une combinaison de tout cela. Beaucoup de ceux qui souffrent de maladies mentales sont aussi des toxicomanes puisque la toxicomanie est leur forme d'auto–traitement médical. Personne ne travaille avec les autres. Je vais même plus loin en disant qu'une partie énorme du défi que nous avons à relever, dans ce pays, vient du fait que vous, représentants du gouvernement fédéral, du gouvernement provincial et des municipalités, restez tous dans vos silos. Je ne mâcherai pas mes mots et vous dirai que vous avez tous la tête bien plongée dans le sable lorsqu'il s'agit de la pauvreté. Je n'hésite pas à le dire.
    Vous avez des mécanismes de financement pour différentes choses. Par le truchement du gouvernement fédéral et de la stratégie de partenariat sur le sans-abrisme, il n'est pas difficile d'obtenir de l'argent pour construire un nouveau refuge. Grace House, notre refuge de femmes, a ouvert ses portes en 2001. Il y a eu un peu d'argent grâce à l'ancien programme SCIPPI. On peut lancer des projets et obtenir des fonds supplémentaires pour des projets mais on ne peut pas obtenir de budget d'exploitation alors que c'est ce qui nous permettrait de coordonner ces activités pour les sans-abri.
    Je suis sûr que j'approche de ma limite de cinq minutes mais je voudrais essayer de vous raconter une histoire.
    Au fait, y a-t-il des représentants de la presse dans cette salle?

  (1055)  

    Je vais vous parler d'un homme de Fredericton, au Nouveau-Brunswick, du nom de Danny. Danny est un homme de 53 ans souffrant de multiples maladies mentales qui a habité dans le dortoir de notre refuge pendant 14 ans. Il n'a eu aucun traitement médical pendant des années. Il n'a reçu aucun traitement psychiatrique. Il n'avait rien. Il était toujours passé à travers les mailles du filet. Dans deux mois, il devra partir car nous avons forcé tous les gens des services de développement social et de santé mentale à venir discuter et leur avons dit que ça suffisait, que nous allions tracer une ligne dans le sable au sujet de Danny. Il va donc partir. Il va recevoir un traitement, il va recevoir des soins et sa vie va changer.
    Il était marié et avait des enfants. Son dossier aux services de développement social remonte loin dans le temps parce que nous avons finalement réussi à le faire sortir, mais personne ne travaille avec les autres. Nous avons découvert il y a des mois qu'il n'existe aucun gestionnaire de cas pour les gens recevant l'assistance de base au Nouveau-Brunswick. Autrement dit, quelqu'un rédige un chèque de 537 $ par mois mais il n'a pas de gestionnaire de cas. Au fond, Danny n'avait qu'à se débrouiller. Nous en avons d'autres qui sont là depuis moins longtemps. Danny sera le premier à partir et nous nous occuperons ensuite des autres.
    Nous devons travailler ensemble à tous les niveaux de gouvernement et avec le secteur à but non lucratif, de manière sérieuse, si nous voulons vraiment changer la vie des personnes qui vivent dans cette pauvreté abjecte.
    Merci.
    Merci, Brian.
    C'est maintenant au tour de Dan Weston, de la Fredericton Anti-Poverty Organization.
     Bienvenue, Dan. Vous avez cinq minutes.

  (1100)  

    Merci. Bienvenue au bout du monde.
    Nous faisons ce travail depuis pas mal de temps et avons parlé à beaucoup de comités au cours des années. Généralement, c'est à la fin d'une législature.
    J'ai la réputation d'être une personne un peu audacieuse et je vais donc vous présenter les choses non pas d'un point de vue micro–économique, comme c'est généralement le cas devant ces comités de passage, mais d'un point de vue macro–économique.
    Ce que j'ai fait, et c'est remarquable, c'est que j'ai résumé 35 années d'histoire économique en une page et demie. Mon intervention ne devrait pas être trop longue.
    Au début des années 1970, le capitalisme a été restructuré. Après que Henri Kissinger eut rencontré Zhou EnLai, vice-premier ministre de Chine, en 1971, et que Richard Nixon eut serré la main à Mao Tsé toung, en 1972, Nixon décida que les États-Unis abandonneraient l'étalon-or, en 1973. Le dollar américain est alors devenu la monnaie de base du commerce mondial et de la concurrence des entreprises. Ces événements ont placé les travailleurs américains et canadiens en situation de concurrence salariale pour conserver des emplois qui se développaient à une échelle beaucoup plus grande et bien meilleur marché dans le tiers-monde.
    Durant les années 1980 et 1990, l'ajustement structurel du capitalisme est devenu mondial et l'on a vu les industries secondaires américaines et canadiennes, les entreprises créant des emplois et fabriquant des produits, chercher de la main-d'oeuvre bon marché outre-mer, avec l'appui et l'encouragement du gouvernement. Ainsi, l'Amérique et le Canada, le Canada étant à la remorque des États-Unis, ont exporté leur industrie secondaire dans des pays à bas salaires et ont donc ainsi exporté leur capacité de création d'emplois de fabrication chez eux alors que c'était l'ossature de la création d'emplois et de la prospérité nationale.
    Afin que les consommateurs d'Amérique du Nord aient le pouvoir d'achat nécessaire pour acheter tous ces produits fabriqués par une main-d'oeuvre à bon marché dans le tiers-monde, notamment dans le cadre de projets en participation avec des entreprises chinoises, il fallait donner aux travailleurs nord-américains l'accès à plus d'argent que ne leur en donnaient leurs chèques de paye stagnants. C'est ainsi que se sont multipliées les cartes de crédit et, un peu plus tard, de débit. Aujourd'hui, le consommateur achète tout, comme l'essence et les produits alimentaires, avec des cartes de crédit ou de débit. L'avenir finance le présent.
    Le système financier canalise tout l'argent des travailleurs dans les banques et non pas seulement la partie des salaires que les travailleurs choisissaient auparavant d'y déposer. Les marchés financiers ont connu une prospérité sans précédent en finançant à la fois des nouvelles usines à l'étranger et l'économie de service tributaire de la dette chez nous. L'expansion des entreprises et la création d'emplois dépendent maintenant du capital financé et de l'argent des contribuables par le truchement de l'aide gouvernementale. L'ajustement structurel, envisagé à l'échelle mondiale, fait que tous les pays dépendent d'une chaîne d'approvisionnement mondiale pour les choses de tous les jours.
    Face à une crise soutenue du capital et de la finance, comme aujourd'hui, la durabilité de la chaîne d'approvisionnement mondiale dépend du succès ou de l'échec du travailleur du tiers-monde, qui est employé ou mis au chômage par ce qui était autrefois notre industrie secondaire.
    Selon la FAPO, le chômage et l'appauvrissement affecteront bientôt plus de tranches de la population au Nouveau-Brunswick et au Canada. Une fois que la morphine des injections financières gouvernementales se sera dissipée, l'inflation se conjuguera au chômage pour déclencher la première grande crise du chômage dans ce nouveau système de marché financier dépendant de la dette en Amérique du Nord.
    L'aptitude du gouvernement à créer des emplois en sauvant le secteur financier avec de l'argent emprunté, garanti par un contribuable pourri de dettes, plutôt qu'en aidant le secteur productif depuis longtemps disparu, ne fera qu'empirer les choses. C'est une recette qui mène droit à la catastrophe car on fait financer le présent par l'avenir puisqu'on ne peut plus financer le présent par le passé.
     Quelques mots maintenant de la FAPO, la Fredericton Anti-Poverty Organization. Créée en 1983, la FAPO est la plus grande organisation de personnes pauvres au Nouveau-Brunswick, qui aide des milliers de personnes chaque année dans tout le centre de la province à maintenir leur niveau de vie par ses programmes de recyclage et de distribution.
    La FAPO ne reçoit aucune aide financière de qui que ce soit, c'est-à-dire des gouvernements, d'autres organisations, d'associations ou d'individus. Nos trois centres de services sont ouverts sept jours par semaine.
     Merci.

  (1105)  

    Merci, monsieur Weston.
    Nous allons maintenant commencer la première série de questions, avec des périodes de sept minutes pour les questions et réponses. C'est mon collègue M. Savage du Parti libéral qui va commencer.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui. Vous avez fait des exposés extrêmement intéressants et qui portent à réfléchir.
    Je viens de la province voisine, la Nouvelle-Écosse, et plusieurs d'entre vous avez dit avoir acquis une certaine expérience en Nouvelle-Écosse.
    Monsieur Richard, vous nous avez présenté un point de vue tout à fait particulier, me semble-t-il. Nous sommes des politiciens actifs, ou raisonnablement actifs. Vous avez été politicien. Si je ne me trompe, vous avez été conseiller municipal, député provincial, ministre et chef d'un parti provincial. Aujourd'hui, vous vous adressez à nous au sujet de questions auxquelles nous voulons sérieusement nous attaquer.
    Avez-vous des conseils quelconques à nous donner sur la manière de traiter avec nos collègues de la Chambre des communes pour nous attaquer sérieusement à la pauvreté? Je ne voudrais pas laisser entendre que la plupart d'entre eux ne s'y intéressent pas, loin de là, mais je ne sais pas si certains d'entre eux sont prêts à y accorder la même priorité que vous.
    Avez-vous donc des conseils à nous donner à cet égard?
    Je vais faire mon possible. Je ne veux pas être présomptueux.
    Mon expérience politique m'a appris que les députés de tous les partis veulent que les choses s'améliorent. J'ai travaillé avec des représentants de tous les partis pendant de nombreuses années et j'en suis tout à fait convaincu.
    À mon avis, les politiciens ont souvent tendance à dire : « Comme nous avons pris telle ou telle mesure, ou avons investi 500 millions de dollars et avons créé tel ou tel nouveau programme, comment pouvez-vous dire que nous ne faisons rien ? »
    Ce que j'aimerais, c'est que le Parlement, quel que soit le parti au pouvoir — et il a souvent changé ces dernières années —, parle moins d'initiatives et plus de résultats mesurables.
    Si le Parlement donnait à notre fonction publique puissante et pleine de ressources la tâche de produire des résultats mesurables, vous pourriez juger des résultats année après année, ou une fois tous les deux ans, quel que soit le parti au pouvoir. Autrement dit, vous pourriez voir si l'on a réellement abaissé le taux de pauvreté ou si les enfants vont à l'école, par exemple. Il y a des moyens de mesurer ça.
    L'an dernier, notre bureau a produit un rapport sur la situation des enfants et de la jeunesse et nous avons constaté que le Nouveau-Brunswick, tout comme le Canada, j'en suis sûr, est riche en données mais pauvre en informations. Nous avons beaucoup de statistiques mais peu de gens prennent le temps de les analyser pour voir ce qu'elles révèlent vraiment et c'est pourquoi nous avons pris l'initiative de mesurer chaque année les taux d'obésité des enfants, les taux de pauvreté et les taux de grossesse d'adolescentes. Quel que soit le parti au pouvoir, si un ministre me dit qu'il a mis sur pied un nouveau programme ou investi plus d'argent dans les écoles, ou dans le secteur de la santé, mais que ce n'est pas mesurable, ça n'a aucune valeur, à mon avis. Je pense que ce qui vaut dans le monde des affaires vaut tout autant dans le monde politique. Si vous ne pouvez pas mesurer, ça n'existe pas, vous ne savez pas si l'on a vraiment agi.
    Les fonctionnaires fédéraux peuvent fixer des points de référence pour vous permettre de mesurer la situation au bout d'un an, ou de deux ou trois. Ils ont beaucoup de ressources. Il y a des milliers et des milliers de fonctionnaires très intelligents. S'ils établissent des points de référence, vous saurez cinq ans après si l'on a vraiment fait des progrès, que vous soyez au gouvernement ou dans l'opposition.
    Ce qui me choque le plus, c'est la situation des Canadiens autochtones. Nous vivons dans le pays le plus riche au monde et même, parfois, le meilleur du point de vue des indicateurs sociaux mais nous tolérons encore que certains de nos concitoyens vivent dans des conditions lamentables.
    Au moment même où je vous parle, la ministre annonce à l'assemblée législative de Fredericton qu'elle demande à mon bureau d'analyser les services d'aide à l'enfance des 15 premières nations du Nouveau-Brunswick. Je vais donc commencer par établir des points de référence pour pouvoir déterminer si nous faisons réellement des progrès et non pas si nous dépensons des milliards de dollars. C'est facile de dépenser, surtout au niveau fédéral, mais j'estime qu'il est beaucoup plus important de mesurer les progrès et de savoir si l'on atteint les objectifs.

  (1110)  

    Je pense que nous sommes passés de l'époque où l'on considérait l'appui gouvernemental à l'infrastructure sociale comme un acte de charité pour l'envisager plus aujourd'hui comme une question de justice sociale, et peut-être même un investissement. Voyez les pays qui investissent dans ce que j'appelle l'infrastructure sociale, ils s'en sortent bien sur le plan économique. Ils ont des taux moins élevés d'analphabétisme, etc.
    Je voudrais parler maintenant des questions de santé mentale chez les adolescents.
    Brian, nous avons dit très brièvement que nous étions hier au refuge de Metro Turning Point avec Michael Poworoznyk. Il a témoigné devant notre comité et nous sommes allés voir ses installations. Il a un dortoir de 75 lits et nous y avons vu des hommes qui y dormaient. Un membre du comité lui a demandé quelle proportion de sa clientèle a des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie et il y avait un graphique indiquant 50 p. 100 pour la santé mentale.
    Cependant, a-t-il dit, la question est de savoir comment on établit le diagnostic. C'est vraiment difficile à faire et je crois qu'il a ajouté que la proportion tourne probablement autour de 90 à 95 p. 100 car, si vous n'avez pas ce genre de problème en arrivant, vous finirez par l'avoir après avoir passé des nuits et des nuits dans la même pièce à côté de 60 ou 70 autres hommes sujets à des hallucinations et incapables de dormir.
    En ce qui concerne les adolescents dont vous avez parlé, John, que peut-on faire pour eux du point de vue de la santé mentale? Comment peut-on établir le diagnostic et offrir un traitement afin de ne pas les criminaliser plus tard et d'éviter qu'ils aboutissent dans l'organisation de Kelly ou à la Société Elizabeth Fry, par exemple?
    Y a-t-il des idées particulières et des investissements que l'on pourrait faire du point de vue de la santé mentale des jeunes pour les aider vraiment?
    Je veux bien accepter la proportion de 60 p. 100 mais, comme ce type de Halifax à qui vous avez parlé, je crois que c'est beaucoup plus élevé.
    Nous voyons des jeunes qui n'ont obtenu aucune aide du point de vue de la santé mentale, qui n'ont jamais eu de diagnostic alors qu'ils souffrent peut-être de maladies mentales multiples, sans parler de toxicomanie. Nous voyons continuellement ce genre de cas d'adolescents. Quand je parle d'adolescents, je parle de jeunes qui n'ont peut-être pas plus de 16 ans. Nous accueillons des jeunes de 16 ans dans nos refuges. Croyez-moi, ça ne me fait pas plaisir de voir arriver un jeune de 16 ans chez nous et j'essaye toujours d'intervenir directement pour l'aider. Nous faisons tout notre possible pour que les jeunes de cet âge aillent ailleurs mais nous en avons de 16 à 18 ans. Ils sont totalement abandonnés.
    Le problème commence à l'école. Je pense qu'on pourrait identifier les cas dès cette étape et qu'on pourrait fournir des services dans le réseau scolaire, dans le système médical, pour établir les diagnostics et commencer à les aider. Je vais vous donner un exemple.
    L'an dernier, nous avons eu pendant quelques mois un jeune de 20 ans. Sa mère l'avait retiré de l'école à Fredericton quand il n'avait que huit ans, en troisième année. L'école trouvait qu'il n'était pas gérable et la mère avait donc décidé de s'occuper elle-même de ses études, à la maison, ce qu'elle avait fait jusqu'il ait 16 ans.
    Il n'y avait eu aucune intervention médicale. Le père refusait d'admettre que l'enfant avait un problème et personne ne s'en était occupé. J'ai eu de nombreuses conversations avec le père et la mère à son sujet. À l'heure actuelle, il a repris l'école et il obtient une certaine aide mais, quand elle l'avait retiré de l'école, c'était parce qu'elle n'avait pas d'autre solution, m'a-t-on dit. Elle avait dit qu'elle allait s'occuper elle-même de ses études parce que ça simplifierait la vie de tout le monde. Elle n'avait reçu aucun appel de l'école pour surveiller l'évolution de la situation et, en fait, ce jeune avait été tout simplement abandonné.
    Je pense que beaucoup d'enfants qui ne reçoivent pas de traitement sont à toutes fins utiles abandonnés. On veut qu'ils retournent à la maison ou, s'ils restent dans le système, on essaie de leur donner un petit coup de pouce de temps en temps parce que les enseignants essayent de s'en débarrasser en les faisant passer au niveau suivant.
    C'est tout à fait triste mais c'est ce que j'ai pu observer.
    Comme c'est un aspect important du problème, je vais demander à Dan et à Bernard s'ils ont quelque chose à ajouter immédiatement, avant de passer au député suivant.
    Vous avez la parole, Dan.
     Il y a une mesure de la pauvreté qui me reste constamment à l'esprit. En 1974, un assisté social vivant seul recevait 254 $ mais la somme a été ramenée à 100 $ par mois et est restée à ce niveau pendant des années. Aujourd'hui, on vient tout juste de la remonter à 290 $. Si vous mesurez cela en dollars constants, cet assisté social était dans une meilleure situation au Nouveau-Brunswick en 1974 qu'aujourd'hui.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la situation des personnes ne pouvant pas s'adapter mentalement à la pauvreté, l'État semble prêt à dépenser énormément d'argent pour ce que j'appelle l'industrie psychosociale pour essayer de régler le problème de cette manière plutôt que de donner de l'argent aux gens. Très franchement, je ne vois pas comment on peut éviter de devenir à moitié fou quand on est obligé de dépendre d'un chèque de bien-être social jusqu'à la fin de ses jours. Au Nouveau-Brunswick, quand une personne reçoit du bien-être social, on dit que c'en est fini pour elle, qu'elle n'en sortira jamais.
    La question est donc de savoir si le gouvernement est prêt à engager de l'argent pour faire face au problème. On a beaucoup retiré d'argent de l'assurance-emploi et on pourrait penser qu'il est temps d'en remettre. À mon avis, si l'on dépensait beaucoup d'argent et qu'on mettait sur pied beaucoup d'autres programmes, cela aiderait les personnes à trouver du travail. Au Nouveau-Brunswick, par exemple, nous avons une très grosse industrie de la construction, en tout cas par rapport aux autres industries. Quand on a décimé l'assurance-emploi, on a causé d'énormes difficultés aux gens qui possédaient des entreprises et qui essayaient de s'en sortir car ils ne pouvaient plus conserver leur personnel. Quand une équipe était mise à pied parce qu'il n'y avait pas assez de travail et que l'employeur n'avait pas beaucoup de contrats, celui-ci savait que l'assurance-emploi permettrait à l'équipe de rester dans la région et qu'il pourrait la faire revenir plus tard et gagner un peu d'argent. L'une des choses les plus difficiles est de trouver une équipe qu'on peut former et conserver.
    À bien des égards, les gouvernements, autant fédéral que provincial, ont été vraiment incapables d'adopter une vision globale de la situation. Ils ne cessent de considérer que c'est un petit problème ponctuel qu'on réglera avec des interventions ponctuelles. Comme vient de le dire monsieur, nous en sommes maintenant au point où nous considérons que, si nous consacrons de l'argent à aider les gens, ce sera un investissement pour l'État, et c'est vrai. Cela nous donne la possibilité d'agir de cette manière à grande échelle. Vous savez, nous sommes l'un des pays les plus riches au monde mais nous avons un très gros problème de pauvreté. Nous n'avons que trois habitants au mille carré. Allez-vous me dire que nous sommes incapables de conserver ces gens dans des activités productives, de faire en sorte qu'ils participent à la vie sociale, qu'ils soient en forme et en bonne santé mentale et puissent se nourrir correctement? Que se passe-t-il? Sommes-nous prêts à laisser toute l'infrastructure de notre pays disparaître? J'en ai bien l'impression.

  (1115)  

    Bernard, pouvez-vous répondre brièvement?
    Au sujet de la santé mentale, les dégâts qu'elle cause m'ont été vivement communiqués l'an dernier par la mère d'une des jeunes filles que nous avons suivies pendant plusieurs années en préparant notre rapport Connecting the Dots. Elle m'a regardé et m'a dit qu'elle aurait préféré que sa fille ait le cancer plutôt que la schizophrénie car elle aurait alors pu obtenir un traitement et de l'aide.
    Il n'y a rien à ajouter à cela. Nous considérons la santé mentale différemment de la santé physique. Nous dépensons beaucoup d'argent pour la santé physique. Votre père était médecin, je crois. Nous dépensons des tonnes d'argent. Par rapport au reste du monde, je crois que nous dépensons beaucoup — il y a un grand débat là-dessus. Par contre, quand il s'agit de santé mentale, nous n'aimons pas en parler. Même au sein des familles, on n'aime pas en parler. Si un membre de notre famille est atteint du cancer, on fait tout pour l'aider. On dit qu'on va réussir à le guérir. Mais, s'il s'agit de schizophrénie ou d'autisme, on ne fait rien. Il n'y a pas le même type d'appui.
    Je crois qu'il est temps de considérer la santé mentale de la même manière que les autres types de maladies. Je suis sûr que Michael Kirby vous donnera beaucoup de matière à réflexion au cours des prochaines années. Il a obtenu beaucoup plus de ressources et je pense que ce sera utile mais, en ce qui concerne la stigmatisation de la santé mentale, cette mère avait tout dit en quelques secondes l'an dernier.
    Nous avons un gros défi à relever. Nous devrions nous attaquer à ces problèmes et ne pas les ignorer. Nous en payons le prix comme contribuables, comme membres des familles et comme société. Où aboutissent ces personnes? Elles aboutissent chez Brian ou elles aboutissent en prison où ça nous coûte 100 000 $ par an pour ne pas les traiter et où elles reviennent continuellement. Nous le constatons tous les jours.
    Merci, Bernard.
    Nous avons accueilli M. Kirby ces dernières semaines et c'est exactement ce qu'il nous a dit : faire de la sensibilisation. Le simple fait que nous en parlions plus est un pas en avant mais c'est loin d'être suffisant. Pouvoir en parler est déjà un progrès, au lieu de rester silencieux et d'essayer de le cacher. Nous vous remercions sincèrement de ce témoignage.
    Je donne maintenant la parole à Mme Beaudin pour sept minutes.

  (1120)  

[Français]

    Merci, monsieur le président. J'ai une heure devant moi? Ah, ah! Il y a tellement de choses dont on doit discuter!
    J'aimerais poursuivre dans la même foulée, puisque c'est très pertinent. J'aurais une question à poser à chacun d'entre vous, mais la première s'adressera à M. Duplessis et concernera le dossier des refuges.
    Hier, nous avons rencontré le responsable d'un refuge en Nouvelle-Écosse. Je lui disais que le Québec avait aussi des refuges comme le sien. Je suis une députée du Québec. Un des grands problèmes relatifs à ces refuges, c'est d'assurer un suivi avec les gens une fois qu'ils quittent le refuge.
    J'ai deux questions à poser. Vous sembliez dire que les programmes existants liés à l'itinérance et les subventions pour les initiatives de partenariat ne servaient qu'à l'infrastructure physique, qu'à du logement.
    Donnez-moi un peu plus d'information à ce sujet. Cela ne répond donc pas à tous vos besoins?
    Vous avez aussi besoin de financement pour les ressources humaines et pour assurer des suivis professionnels auprès des personnes que vous desservez?

[Traduction]

    Si je comprends bien la question, il n'y a pas de coordination pour suivre les cas individuels, pour accorder un soutien, tant qu'une crise n'a pas éclaté et, même alors, ce n'est généralement qu'une intervention ponctuelle. Je sais qu'on a beaucoup travaillé là dessus à Montréal, par exemple à la Old Brewery Mission. Jim hughes, qui est aujourd'hui notre sous-ministre du Développement social, dirigeait autrefois la Old Brewery Mission. Il avait mis au point des programmes pour aider les sans-abri à retourner dans la collectivité et pour suivre leur transition.
    Il y a aussi un modèle intéressant au Nouveau-Brunswick, à Saint John, au Salvation Army Booth Centre. Il y a les refuges mais il y a aussi une infirmière praticienne qui vient y donner des consultations. Ils obtiennent aussi des appartements et des chambres dans la communauté, ce qui leur permet de suivre leurs clients pendant leur transition. Ils assument une certaine responsabilité à l'égard de chaque personne dont ils deviennent une sorte de tuteur. Ils aident les clients à retourner dans la collectivité et suivent leur évolution. Ils veillent à ce qu'ils obtiennent un appui et des services une fois qu'ils ont trouvé une chambre ou un appartement. C'est un modèle intéressant mais je sais qu'ils ont constamment des problèmes de financement.
    L'Armée du Salut aide depuis un siècle des gens à subvenir à leurs besoins essentiels et nous essayons de travailler avec elle pour tirer profit de ses leçons et voir ce que nous pouvons faire de notre côté. Toutefois, c'est au niveau gouvernemental qu'il y a un manque de coordination entre tous les services.
    Si nous voulons vraiment aider ceux qui sont tout en bas de l'échelle, nous devons d'abord nous occuper de leur logement, et on vous l'a sans doute déjà dit. Si quelqu'un n'a pas de logement, et je ne parle pas ici d'un refuge, rien d'autre ne compte. Les gens essaient de s'en sortir chaque jour, de survivre dans l'environnement du refuge et de trouver à manger. Par contre, s'ils ont leur propre logement, ne serait-ce qu'une petite chambre élémentaire, ou un appartement, leur transition peut commencer. Toutefois, si les prestations de bien-être social sont tellement faibles qu'on ne peut même pas se payer une chambre, ce n'est même pas la peine d'essayer.
    Pour revenir à ce que disait Dan au sujet de l'argent, on peut bien parler de programmes, on peut bien parler de structure mais c'est l'argent qui compte avant tout. Avec 294 $ par mois, vous pouvez bien offrir toutes sortes de programmes, ça ne permettra pas au bénéficiaire de se loger. Au Nouveau-Brunswick, on vient à nouveau de geler les prestations cette année à cause de la situation économique.
    J'aimerais vous lancer le défi, tout comme au gouvernement provincial, d'essayer d'envisager l'économie un peu différemment. Je pense que c'est cohérent. Chaque fois que j'en parle, les gens semblent penser que ça l'est.
    Nous voulons une relance économique en ce moment, et nous la voulons rapidement. On entend dire un peu partout que le grand programme de relance économique n'avance pas. Si vous voulez faire de la relance économique, si vous voulez lancer de l'argent dans le système, donnez-le aux pauvres. Au lieu de leur donner 294 $ par mois, donnez-leur 400 ou 500 $. Tout cet argent retournera immédiatement dans les circuits économiques. Donnez-le aux organisations qui essayent de les aider. Soyez certains que nous dépenserons tous. Nous ne garderons pas l'argent, nous le dépenserons immédiatement. Vous verrez que votre stimulation économique se manifestera très vite, en deux, trois ou quatre mois, et beaucoup plus vite en tout cas qu'en signant des ententes entre paliers de gouvernement pour construire des ponts et réparer des infrastructures. Je n'ai rien contre tout cela mais nous sommes en crise. Mettez donc l'argent dans les mains de ceux qui vont le dépenser immédiatement pour leurs besoins essentiels et pour survivre.
    Vous verrez les résultats dans l'économie. Voyez-vous, nous avons le sentiment de bien faire quand nous faisons ces choses-là mais il est essentiel de retourner aux questions fondamentales. Il est essentiel de faire les bonnes choses pour ceux qui souffrent vraiment dans notre société et, pour le moment, nous ne faisons pas les bonnes choses. Nous ne les aidons pas. Notre action reste superficielle.
    Ai-je bien répondu à vos questions ou pensez-vous que je viens encore de radoter?

  (1125)  

[Français]

    Oui, merci beaucoup, cela répond tout à fait à mes questions.
    Monsieur Richard, vous parlez de la petite enfance, et cela me rejoint particulièrement car j'ai travaillé pendant de longues années auprès des tout-petits de 0 à 5 ans. Je pense qu'en offrant des outils à ces tout-petits, on peut peut-être arriver à briser le cycle de la pauvreté.
    Vous parliez de ce que le gouvernement avait fait ces dernières années pour tenter d'éradiquer la pauvreté infantile. Selon vous, pourquoi ces initiatives ont-elles échoué?
    C'est une bonne question. Je ne prétends certes pas avoir la réponse, mais c'est clair que cela a échoué. On n'a pas énormément progressé. On dit que le taux de pauvreté est maintenant sensiblement le même qu'en 1989, il y a donc 20 ans. Pourtant, notre pays s'est beaucoup enrichi.
    Qu'est-ce qui n'aurait pas fonctionné? Je me pose la même question que vous.
    Je pense comme Fraser Mustard, par exemple. Je ne sais pas si vous le connaissez. C'est un grand Canadien, un grand expert canadien aussi. Il a dit qu'investir le plus tôt possible, c'est ce qu'il y a de mieux. C'est donc la prévention, l'assistance aux gens...
    On ne choisit pas où et dans quelle circonstance on naît. Si on est aidé un peu, on peut tout accomplir peu importe où l'on naît. Il faut intervenir le plus tôt possible. Autrement, le cycle va continuer. C'est ce qu'on voit depuis 20 ans. Et c'est ce qu'on verra encore dans 20 ans, si on n'arrive pas à trouver le moyen d'investir le plus tôt possible, d'intervenir le plus tôt possible, d'apporter des appuis où les appuis ne sont pas tout le temps, pour toutes sortes de raisons, bonnes et mauvaises, mais c'est la réalité.
    Je crois que le Canada a les moyens d'intervenir, d'apporter l'équilibre et la chance nécessaires à chaque individu pour qu'il puisse atteindre son plein potentiel. Il n'y a pas beaucoup de limites à ça dans un pays comme le Canada, si on s'engage réellement à trouver de vrais solutions.
    Que tous les enfants aient le meilleur départ qui soit dans la vie.
    Absolument.
    Merci beaucoup.
    M. Bernard Richard: De rien.

[Traduction]

    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Martin, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup. Je dois dire d'emblée que Dan a parfaitement raison, à mon avis. C'est un problème global auquel nous n'avons pas réussi à nous attaquer pendant longtemps. Les signes sont partout autour de nous. Nous aurions dû prévoir ce qui est arrivé. Certains économistes nous avaient prévenus mais nous ne les avons pas écoutés. Les différentes formes de la pauvreté sont comme le canari dans la mine de charbon. Nous aurions dû comprendre qu'elles nous annonçaient un problème que nous n'allions pas pouvoir éviter.
    Aujourd'hui, nous sommes en plein dans le problème avec la pauvreté que nous constatons partout autour de nous. Nous avons vu au cours des dernières années augmenter petit à petit le nombre de travailleurs pauvres, le nombre de personnes qui travaillent à temps plein toute l'année pour le salaire minimum et qui n'arrivent tout simplement pas à joindre les deux bouts parce que l'inflation continue d'augmenter. Étant donné la manière dont le système a été conçu, nous avons maintenant des groupes de gens qui sont profondément endettés et qui n'ont aucune économie. Le filet de sécurité a été déchiré. Ils seront très bientôt à vos portes également.
    Nous sommes sur le point de faire face a une véritable catastrophe que nous pourrions cependant éviter, si l'on en croit le Centre canadien d'options politiques. Pour être tout à fait franc, je dois dire que je ne sais même pas si nous pourrions l'éviter en modifiant le système d'assurance-emploi comme il le recommande. Au bout de 50 semaines, les prestations s'arrêtent. Ils viennent d'ajouter cinq semaines mais il y a quand même une limite. Ensuite, quand les prestations s'arrêtent, les gens constatent qu'il n'y a pas grand-chose d'autre pour les aider. Le bien-être social vient d'être réduit mais, après ça, il n'y a plus rien.
    Que pouvons-nous donc faire? Nous sommes en plein milieu d'une énorme relance, mais une relance pour quoi faire? Pour refaire ce que nous avions et qui nous a mené à l'échec? Est-ce bien raisonnable? Je sais qu'il faut quand même prendre ces mesures qu'on dit souvent ponctuelles. Nous avons un secteur caritatif à but non lucratif qui travaille à temps plein et en heures supplémentaires et qui manque d'argent. Il y a à Toronto un organisme appelé le Recession Relief Fund qui essaye d'envoyer au gouvernement le message qu'il tombera en faillite dans quelques semaines. Les sources de financement du secteur caritatif s'assèchent parce que les investissements qu'ils avaient fait ne produisent plus les mêmes revenus qu'avant.
    Cela dit, je pense que nous avons maintenant l'occasion de changer de système, si nous le voulons vraiment, dans l'intérêt de tout le monde. J'essaye pour ma part d'obtenir des réponses sur la manière de changer le système afin qu'il marche mieux pour tout le monde.
    Avez-vous des idées à ce sujet? Vous avez fait une excellente analyse. Avez-vous réfléchi à la manière dont on pourrait le changer et à ce qu'on pourrait faire pour qu'il marche mieux?

  (1130)  

    Voyez ce que fait l'administration Obama aux États-Unis. L'une des solutions qu'elle a retenues, avec les fonds d'infrastructure, est de commencer à mettre en place une nouvelle infrastructure plus écologique et technologiquement plus moderne. Le Canada a besoin de faire un peu la même chose. Il doit être capable de produire plus de ses propres produits avec ses propres ressources. Des gens disent ça depuis 50 ans et c'est encore vrai.
    Si nous faisons cela, nous bâtirons une économie capable de produire ses propres ressources pour notre propre pays d'abord. Nous pourrons commencer à faire du commerce avec ce que nous avons en trop. De cette manière, nous pourrons employer de plus en plus de gens. Par contre, si nous continuons comme avant, il n'y aura de travail que quand quelqu'un pourra financer quelque chose.
    Il était déjà assez difficile pendant le choc pétrolier d'essayer d'avoir un contrat avec quelqu'un pour couvrir les dépenses de mazout, ou d'essayer de faire quelque chose en vue du long terme parce que tout était chamboulé. Il n'y avait pas de stabilité économique. L'économie n'avait plus aucun sens. Même pour le capitalisme lui-même, ça n'a aucun sens quand on ne peut pas maîtriser les prix de l'énergie parce qu'on ne peut pas avoir un contrat et faire de prévision stable sur la quantité d'argent qu'on pourra gagner.
    À cause de cette soi-disant mondialisation, nous sommes à la merci de toutes sortes de force que nous ne pouvons plus contrôler. Nous nous laissons aller en nous disant que tout va bien. Non, tout ne va pas bien. Nous devons contrôler notre économie et nous devons bâtir notre nation. Voilà ce que nous devons faire. Nous en avons la possibilité. Nous avons la possibilité de bâtir une nation fabriquant des produits de manière écologiquement et technologiquement avancée.
    Il y a d'autres pays dont nous pourrions nous inspirer, comme l'Allemagne qui est très avancée dans la mise au point de nouvelles technologies écologiquement acceptables. Il y a aussi le Danemark, qui est en train d'éliminer la plupart de ses poteaux et de ses fils électriques parce que beaucoup de ses institutions et de ses immeubles d'appartements produisent leur propre énergie avec le gaz naturel. Au lieu de gaspiller du gaz naturel dans les sables bitumineux, nous devrions en faire un bien meilleur usage qui serait plus constructif.
    Il y a beaucoup de choses que nous pourrions faire. Il suffit de commencer à y réfléchir au lieu de faire toujours la même chose que nous ont toujours donnée les Conservateurs, les Libéraux et le NPD. Vous savez, ce sont leurs politiques économiques qui nous ont mis dans ce pétrin.
    Essayons d'être un peu créatifs, c'est tout ce que je veux dire.
    J'ai moi aussi une question à vous poser.
    Même si je sais que nous aimons penser en termes de médiation moderne d'aujourd'hui, nous sommes dans la mère de toutes les crises. Elle s'est développée pendant de nombreuses années.
    Beaucoup des gens dont nous nous occupons vivent dans la pauvreté depuis de nombreuses années. Il y a le cycle économique actuel; ça fait partie du cycle. Ça sera pire que c'était mais c'est quand même un cycle. Ceux qui sont tout au bas de l'échelle y sont depuis toujours. Ils n'ont jamais vu beaucoup de changements. Ce qui m'est venu à l'esprit, même en venant ici en voiture, c'est que, pendant votre tournée nationale, vous allez recueillir tous les rapports qui ont été préparés dans les années 1970 et 1980 sur la question de la pauvreté. Beaucoup l'ont été ici même, au Nouveau–Brunswick, en remontant même à l'époque de Hatfield : détails, consultations dans la communauté.
    Il y a actuellement toute une tournée faite par le groupe de travail sur la réduction de la pauvreté au Nouveau-Brunswick et je pense que nous avons tous eu la possibilité d'y participer. Je leur ai posé cette question il y a quelque temps : ont-ils lu tous les rapports? Très franchement, à ce moment-là, ils n'avaient pas recueilli le rapport qui avait été préparé. On s'intéresse beaucoup à Saint John à un quartier de logements publics appelé Crescent Valley où il se trouve que j'ai grandi. Un magnifique rapport avait été préparé au début des années 1970 et ils sont maintenant en train de produire de nouveaux rapports sur Crescent Valley mais personne n'a pris la peine de relire ceux des années 1970. Je soupçonne que vous pourriez constater que beaucoup des choses que vous entendez aujourd'hui avaient déjà été dites dans les années 1980 et 1970 quand ces rapports étaient rédigés.
    S'il vous plaît, prenez le temps de rassembler ces rapports de tout le pays et commencez à comprendre que ce n'est pas un problème qui vient de surgir, c'est un problème systémique. Il existe depuis longtemps. Vous pouvez apprendre tout cela dans les rapports. Vous n'avez pas besoin de venir nous parler. Certes, il est bon que vous nous parliez mais vous n'avez pas besoin de nous parler à tous pour apprendre ce que beaucoup d'entre vous savez depuis nombreuses années et pour quoi vous luttez depuis de nombreuses années. S'il vous plaît, s'il vous plaît, trouvez ces rapports, lisez-les et tenez compte de ce qu'ils contiennent quand vous préparerez le vôtre.

  (1135)  

    Merci, Tony et Brian.
    Nous passons maintenant au dernier député pour ce tour.
    Vous avez cette minute, monsieur Komarnicki.
     Merci, monsieur le président.
    Vos remarques sont légitimes. Si je vous comprends bien, vous dites qu'il y a beaucoup de choses que vous savez mais que c'est maintenant de l'action que vous souhaitez, des mesures positives.
    Sur une note plus légère, on nous a dit lors de la dernière tournée que beaucoup de politiciens parlent dans le vide, si je peux dire. De votre côté, vous nous avez dit que nous avons la tête dans le sable, et je suppose que c'est partiellement vrai. Certains déplacent peut-être plus de sable que d'autres mais le fait est que la question est grave. Je pense que mon collègue a dit qu'il y a un peu de transformation dans la pensée, dans le fait de ne pas traiter les racines de la pauvreté comme une question de charité mais une question de justice sociale, et aussi une question d'investissement dans notre infrastructure sociale.
    J'ai pris note de vos paroles, Kelly, quand vous avez dit que, quand vous voyez les coûts du système de santé, et le système de justice pénale... J'étais avocat avant de devenir député et je sais quelque chose des coûts du système de justice. Si l'on mettait tout ensemble, on pourrait, en essayant de s'attaquer aux racines profondes beaucoup plus tôt, économiser un peu d'argent si l'on était prêt à faire cet investissement.
    Je comprends que traiter l'individu dans sa totalité exige plus d'efforts. Ça prendra plus d'argent pour faire ça plutôt que de simplement voir ça en noir et blanc, ce qui est peut-être ce que nous avons fait d'un point à un autre.
    Je m'adresse d'abord à M. Richard. Le sénateur Kirby nous a parlé de questions de santé mentale, d'une forme de stigmatisation et d'un malentendu, et de ce qu'il faudrait faire à ce sujet. Pourriez-vous cependant décrire ce que vous voyez en ce qui concerne les jeunes qui ont des problèmes et qui tombent à travers les mailles du filet? Pouvez-vous décrire ce que vous considérez comme des choses inadéquates? En outre, vous pourriez peut-être décrire certaines des choses concrètes que nous pourrions envisager pour combler ces trous. Je passerai ensuite à d'autres questions.
    Certainement. Je vous renvoie au rapport que nous avons publié l'an dernier, Connecting the Dots, où nous abordons beaucoup de ces questions. Le gouvernement provincial a accepté toutes nos recommandations et certaines sont en cours d'application.
    Je pense qu'il y a beaucoup plus à dire sur tout cela que ce que je pourrais dire en quelques instants mais il est clair que cerner les questions de santé mentale très tôt et intervenir de la bonne manière... Ce sont les solutions. Trop souvent, les jeunes qui ont des problèmes de toxicomanie ou de santé mentale se défoulent, évidemment, et la réponse est généralement le système de justice pénale, pas le traitement. On ne les détourne pas du système de justice pénale.
    Je pense que cela exige une bonne formation. Je pense qu'il faut des tribunaux de santé mentale des jeunes. Il y a en ce moment un projet pilote à Ottawa que je dois aller visiter vendredi. J'espère qu'il va marcher car je pense que c'est une merveilleuse approche pour éviter de plonger les jeunes dans le système de justice pénale et les orienter plutôt vers le traitement. C'est multidisciplinaire et multiministériel, ce qui fait que les gens ne travaillent pas dans des silos. Ils travaillent ensemble. Une fois qu'on a identifié qu'un jeune a un problème de santé mentale, on l'oriente vers le traitement plutôt que vers l'appareil de justice pénale.
    Si nous pouvons faire cela, si nous pouvons les identifier assez tôt et fournir la bonne réponse, ils ne reviendront pas continuellement dans le système pour que des gens comme vous et moi, anciens avocats, puissions gagner notre vie en les défendant. Nous fournirons plutôt du traitement. Ils n'iront pas en prison où ils ne pourraient que devenir de meilleurs criminels. En prison, ils auraient les mêmes problèmes de santé mentale et, à la sortie, ils commettraient à nouveau des crimes contre les biens, des vols et des crimes avec violence. En prison, ils ne peuvent que retourner dans le système où ça coûte 100 000 $ par an rien que pour les garder dans une cellule où ils n'ont aucune chance de s'améliorer.
    Les solutions comprennent la détection précoce, l'intervention précoce, les bonnes formes d'intervention, la déjudiciarisation des jeunes ayant des problèmes de santé mentale, une meilleure coordination des efforts et un meilleur partage de l'information. Comme des parents me disaient : « Mon enfant autiste a changé d'école et c'est comme repartir à zéro ». Il n'y a aucune raison que ce soit comme ça dans une province comme le Nouveau-Brunswick. Déménager dans une autre région ne devrait pas signifier repartir à zéro. Ces parents-là n'avaient aucune information. Ils ne pouvaient pas obtenir les dossiers de l'autre région. La protection de la vie privée est devenue une véritable obsession chez les fonctionnaires. Même lorsqu'il y va de l'intérêt d'un enfant ou d'une famille, ils refusent de partager l'information.
    Je pense qu'il y a des solutions. Il y a de très bons modèles et de très bonnes pratiques dans toutes les régions du pays. Il faut simplement nous assurer que nous sommes capables d'en tirer les leçons et d'appuyer ce genre de modèles.

  (1140)  

     Je vous comprends. Dan disait que nous devrions faire preuve de créativité et il a raison. M. Castell, dans ses remarques liminaires, parlait d'une démarche de bas en haut et du recrutement de professionnels de la collecte de fonds et de gens capables de présenter des demandes de subventions, pour pouvoir obtenir de l'argent. Il y a aussi un certain élément de concurrence entre les différents groupes qui essayent de cibler l'argent au lieu de se demander où se trouve le plus grand besoin et quelle serait la meilleure utilisation de ces dollars.
    Il me semble que nous devrions avoir une sorte d'approche systémique dans ce domaine. C'est bien beau de dire que nous allons lancer un appel de propositions pour ce que nous croyons qu'il faudrait faire et veiller à ce que ce soit fait correctement mais nous sommes peut-être déjà allés trop loin dans cette voie. Si nous avions une approche systémique pour agir sur le terrain et nous assurer que l'argent rentre, en faisant ressortir les dollars, comment pensez-vous que cela pourrait se faire dans un pays aussi divers que le Canada? Étant donné que nous avons des différences régionales, des gouvernements différents, et toutes sortes de choses de cette nature, comment feriez-vous? Quel genre de système mettriez–vous en place pour renverser cet ordre?
    Je suis pas sûr d'être suffisamment sage pour pouvoir vous conseiller à ce sujet. Toutefois, je constate dans les fondations communautaires canadiennes et dans l'exemple de la Fundy Community Foundation, du comté de Charlotte, au Nouveau-Brunswick, le modèle de quelque chose qui marche pour appuyer un grand nombre d'organismes à but non lucratif. La Fundy Community Foundation n'est pas là pour faire elle-même du travail caritatif mais pour appuyer d'autres organismes à but non lucratif et caritatif en facilitant leur financement. Elle est organisée de manière à ce que les gens puissent lui fournir des dons et créer des fondations pour des activités d'aide. Elle possède des fonds de donations et l'intérêt qu'elle gagne sur l'argent qu'elle investit lui sert à aider les organismes de charité.
    Elle facilite aussi la communication. Je pense que faciliter la communication au niveau communautaire et au-dessus est important mais, au lieu de rédiger un rapport en bout de ligne, je pense qu'il devrait y avoir un dialogue continu à partir de la base, en passant par les municipalités, les provinces et le gouvernement fédéral. Ce sont les dialogues communautaires organisés par la Fundy Community Foundation qui ont fini par résoudre un problème.
    Le transport avait été identifié comme problème. Nous avons fini par voler une idée de la Nouvelle-Écosse en mettant sur pied un programme Dial-a-Ride. Demain soir, je dois m'adresser à tous les maires du comté de Carleton qui souhaitent copier notre modèle. J'ai parlé au député provincial de Sackville, collectivité qui veut également mettre sur pied le même programme. J'ai parlé à des gens d'une collectivité du comté de Queens, Chipman Parish, toujours pour la même raison. Donc, la Fundy Community Foundation a organisé le dialogue et a analysé le problème, et cela a débouché sur une solution communautaire. Nous avons des bénévoles qui participent.
    Il n'y a pas de service d'autobus dans les collectivités rurales et il y a donc des problèmes de transport. Avec la centralisation des services hospitaliers, il y a beaucoup de gens de St. Stephen, de St. Andrews ou de Rollingdam, par exemple, qui ont le cancer ou qui ont des rénopathies et ont besoin de dialyse mais qui n'ont pas d'argent parce qu'ils dépendent du bien-être social. Comment diable pourraient-il se payer un taxi et payer 100 $ dans chaque sens pour aller à St Stephen ou à Saint John suivre leur traitement? Avec le programme Dial-a-Ride, nous avons réglé cette question. Voilà un modèle du genre de chose qui peut marcher. La Fundy Community Foundation est une organisation communautaire mais elle a une organisation nationale. C'est un modèle. Ce n'est pas la solution.

  (1145)  

    Il y avait à Halifax un service d'information appelé 211-dial-up auquel on pouvait téléphoner pour être mis en contact avec la personne qu'on avait besoin de voir, au lieu d'essayer de trouver soi-même qui on devrait aller consulter. MOSH, une unité médicale mobile, se rendait sur place. J'ai l'impression que c'était un service tout à fait spécifique à cette collectivité, un exemple de service communautaire faisant des choses positives qui, sinon, ne seraient peut-être pas faites.
     Merci.
    M. Savage.
    Vous avez parlé de créativité. Je pense que c'est vrai mais qu'il y a aussi d'autres choses à envisager. Nous avons entendu de fermes partisans des politiques sociales nous dire que nous avons maintenant certains mécanismes qui fonctionnent pour lutter contre la pauvreté. Exemple : la prestation fiscale pour enfants. Elle a été créée en 1996-1997 et les 1 500 $ du départ tournent aujourd'hui autour de 3 500 $. À leur avis, si cette prestation atteignait 5 200 $, nous pourrions réduire encore plus la pauvreté.
    Le SRG pour les personnes âgées à revenus modiques a aidé beaucoup de personnes âgées à sortir de la pauvreté. La prestation fiscale pour revenu de travail est très prometteuse pour les gens dont parlait Tony, des gens qui travaillent dur mais qui n'arrivent quand même pas à sortir du trou dans lequel ils sont avec leur famille. L'institut Caledon a proposé l'instauration d'un revenu de base pour les personnes handicapées. Le montant serait égal au total de la SV et du supplément de revenu garanti, ce qui donnerait de meilleures chances aux bénéficiaires. Ce qui est triste avec la pauvreté au Canada, c'est qu'il y a des groupes qui sont continuellement marginalisés : des Autochtones, des gens ayant des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie, des personnes handicapées. Les défis que doivent relever les personnes ayant une forme ou une autre de handicap physique ou intellectuel sont tout simplement effarants. Il leur est tout simplement impossible d'avoir un accès égal à la richesse du pays.
    Je me demande si l'un d'entre vous a des idées sur la production d'un revenu de base pour les personnes handicapées.
    Je pense que c'est plus important que simplement leur donner des dollars. Il faut leur enseigner des compétences avec ces dollars. Si vous voulez trouver le moyen de financer une certaine partie de la société ou un groupe marginalisé, vous devez établir certains points de référence avant de faire cela, de façon à avoir quelque chose à mesurer pour voir si ce que vous mettez sur pied est efficace ou non. Si vous vous contentez de donner des dollars pour résoudre un problème, ça ne marchera que si vous continuez à donner des dollars. Une fois que vous arrêterez, le problème sera toujours là et ces personnes retomberont dans le même groupe.
    Il est vraiment important de fixer des points de référence, de bien déterminer ce qu'on veut faire avec ces dollars et de déterminer quel genre d'objectifs mesurables on veut atteindre avec ces dollars pour veiller à ce que les gens qui utilisent le service réussissent à s'en sortir et à maintenir ces résultats mesurables à la fin.
    Je suis d'accord avec vous à 100 p. 100 mais, entre-temps, il me semble qu'il y a des gens qui meurent de faim et qui ne peuvent pas se déplacer.
    Exact. À vous donc d'établir des priorités et de choisir ce que vous allez financer ensuite.
    L'une des choses que je vois dans ma région, et je suis sûr que c'est la même chose pour les autres députés, c'est que des gens viennent dans mon bureau avec des enfants adolescent qui ont des problèmes, par exemple des enfants trisomiques. Ils sont allés à l'école et ont fait partie du groupe d'enfants ayant obtenu leur diplôme. Ils ont suivi la filière scolaire normale. Ils se sentent très bien et ils ont obtenu leur diplôme. Tous les autres enfants sont ravis de les avoir aidés à obtenir leur diplôme. C'est bon pour eux et c'est bon pour les autres enfants. Puis, d'un seul coup, c'est l'effondrement. Les autres enfants continuent à l'université ou au collège ou obtiennent un emploi mais, pour eux, il n'y a rien.
    Quand vous parlez de places, dans ma propre région de Halifax, vous parlez de centaines d'enfants pour quatre, cinq ou six places. Il y a un programme qui a une vingtaine de places. Donc, oui, nous devons absolument prévoir une formation pour ces gens.
    Et leurs parents vont se coucher tous les soirs en se demandant ce que deviendront leurs enfants quand eux-mêmes quitteront cette terre. Nous ne semblons pas leur fournir un revenu leur permettant de vivre.
    Je suis donc certainement d'accord avec vous, Kelly. Nous devons offrir plus de possibilités aux enfants de ce groupe, pour que des adultes comme ça obtiennent une formation.

  (1150)  

    Je suis un grand partisan de la prestation fiscale pour enfants. Je pense que c'est très bien mais cela montre qu'il est important que les différents paliers de gouvernement travaillent ensemble afin que les prestations créées au palier fédéral ne soient pas simplement une excellente occasion pour les gouvernements provinciaux de reprendre des sommes équivalentes, car c'est ce que nous avons déjà vu, très souvent. En fin de compte, pour les bénéficiaires, ça ne change pas grand-chose puisqu'une partie de la prestation est reprise par un autre palier.
    Il est donc extrêmement important d'avoir une coopération fédérale–provinciale–territoriale et des ententes sur ces programmes. Pour ce qui est d'étendre cela aux personnes handicapées, vous avez raison, c'est important. Je suis malheureusement assez âgé pour me souvenir d'une époque où les enfants handicapés n'allaient même pas à l'école. On les cachait dans la pièce du fond ou dans une chambre parce qu'il n'y avait pas de place pour eux. Nous avons donc fait des progrès à cet égard. Aujourd'hui, ils sont inclus et c'est devenu un principe fondamental de notre société pour que les autres enfants savent qu'ils existent réellement.
    Je pense que vous avez raison. Pendant un certain temps, ils sont bien intégrés, ils font partie de la bande puis, d'un seul coup, c'est l'effondrement, comme vous l'avez si bien dit. Il faut qu'il y ait une transition dans un monde différent, évidemment, après l'école.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Lobb qui sera le dernier pour la session du matin.
    Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités d'aujourd'hui.
    Comme vous pouvez l'imaginer, nous avons rencontré de nombreux professionnels et experts comme vous et vous pouvez deviner que nous avons souvent entendu le même thème. Les plus vulnérables de notre société ont des problèmes de logement. Nous avons aussi entendu dire qu'il faut travailler avec les groupes à but non lucratif de tous les niveaux, avec les ONG, qu'il faut un financement stable pour la santé, la santé mentale, la toxicomanie, l'éducation, les personnes handicapées, l'éducation de la petite enfance. Ce sont certains des thèmes que j'ai retenus. Toutefois, ces personnes sont les plus vulnérables d'entre nous, comme nous le savons fort bien, et il y a beaucoup de groupes de catégories différentes quand on parle de pauvreté.
    Partant du principe que le verre est à moitié plein, je voudrais m'adresser à M. Richard car il a fait partie du gouvernement McKenna. Je sais pas si Georges Corriveau était l'un de vos collègues. J'ai fait des affaires avec lui.
    Je voudrais me concentrer sur une déclaration célèbre de M. Mckenna qui avait dit, et il avait tout à fait raison, que le meilleur programme social, c'est l'emploi. Je voudrais voir ce qui s'est passé au Nouveau-Brunswick et ce qui s'est fait de bien à Moncton. Je pense qu'on attribue à M. Corriveau l'arrivée d'Internet au Nouveau–Brunswick. Ce n'est peut-être pas tout à fait juste mais il est parfaitement clair que Moncton est passée dans une économie du savoir, dans une certaine mesure, et que cela a permis à certaines personnes sous-employées de trouver un travail rémunérateur, de donner des emplois à des chômeurs, ce qui est la progression naturelle que nous souhaitons dans toute société. Comme vous avez été ministre de l'éducation, vous l'avez certainement constaté aussi.
    Je me demande si vous pourriez nous dire ce qui s'est passé à Moncton au cours des 10 dernières années, notamment à l'époque de cette grande transition du Nouveau–Brunswick, et ce qu'il faut faire pour l'avenir. Je sais que l'APECA a été un excellent outil régional pour stimuler la croissance économique et le commerce. La TVH a été positive, tout comme les incitatifs fiscaux.
    Pouvez-vous donc nous expliquer comment s'est faite la transition et ce qu'il faudrait faire maintenant pour passer au niveau suivant?
    Évidemment, l'emploi était la toute première préoccupation de M. McKenna. On pourrait même dire que c'était son obsession. Pendant les 10 années où il a été premier ministre, son premier souci a toujours été de créer des emplois et d'utiliser les nouvelles technologies pour nous faire sortir des industries traditionnelles.
    Je vis dans une petite collectivité de pêcheurs de homard qui traversent actuellement une période très difficile. Quand je me réveille dans mon village de Cap-Pelé, je vois des Jamaïcains passer sous mes fenêtres pour aller travailler dans les usines de transformation du poisson car, dans ce village acadien de Cap-Pelé, on ne trouve personne pour faire ce travail. La plupart des habitants travaillent dans des centres d'appel de Moncton.
    Étant donné son caractère bilingue et son accès à une main-d'oeuvre bilingue, et malgré nos problèmes de scolarité, Moncton a réussi à se transformer, ce qui n'a pas été le cas de toutes les collectivités du Nouveau-Brunswick. Notre taux de chômage est encore beaucoup trop élevé mais, évidemment, le message d'espoir, comme nous l'avons constaté chez nos cousins du Sud, a beaucoup d'importance. C'est un petit train qui fait son chemin. Ça pousse les gens à agir et c'est ce qui fait que les gens d'affaires de Moncton, les élus municipaux et les élus provinciaux depuis M. McKenna et jusque M. Lord puis, maintenant, le premier ministre Graham, ont décidé qu'on peut faire des choses. Ce n'est pas parce que certaines boutiques ne peuvent pas survivre à Moncton que nous... Voyez cependant maintenant où nous en sommes : nous sommes revenus au point de départ. Un homme d'affaires local vient juste d'obtenir un contrat de 100 millions de dollars pour rénover des wagons de VIA ici même, à Moncton. On l'a annoncé la semaine dernière.
    Je pense que c'est le résultat d'une attitude positive, du fait qu'on sait qu'on peut faire des choses si on est résolu, si on est vraiment déterminé, mais il faut être capable en même temps d'amener les gens... C'est pourquoi il disait que le meilleur programme social, c'est l'emploi.
    Ce qui m'inquiète, c'est de voir notre gouvernement engagé dans cette course vers le bas car le Nouveau-Brunswick est absolument décidé à avoir les taux d'imposition les plus bas du Canada mais je suis absolument certain qu'il y aura ensuite une autre province qui voudra que les siens soient encore plus bas. Si nous ne préservons pas l'équilibre dont nous avons besoin, et suffisamment de flexibilité et de ressources pour... Il y aura toujours des gens malades, il y aura toujours des personnes handicapées, nous ne pourrons jamais abolir tous les accidents d'automobiles et il y aura toujours des gens en fauteuil roulant. Si nous ne réussissons pas à trouver un juste équilibre pour que chaque membre de la société se sente inclus, nous aurons échoué comme société. J'en suis totalement convaincu.
    Je pense que c'est possible, avec la bonne attitude et suffisamment d'efforts, mais il ne faut jamais perdre de vue que nous devons faire avancer tout le monde en même temps.

  (1155)  

    Merci beaucoup.
    Je remercie nos témoins d'aujourd'hui, à la fois pour tout le travail qu'ils font en première ligne et pour avoir pris le temps de venir nous parler de cette question très importante.
    La séance est levée.
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