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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 046 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 14 février 2017

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Français]

    Avant de débuter la réunion, j'aimerais souhaiter officiellement un joyeux anniversaire à notre collègue John Nater.
    Nous étudions aujourd'hui les enjeux relatifs au dénombrement des ayants droit tel que cela est défini à l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.
    Nous avons le plaisir de recevoir ce matin M. Jean-Pierre Corbeil, directeur adjoint de la Division de la statistique sociale et autochtone à Statistique Canada. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Corbeil.
    Nous allons entendre votre témoignage. Vous disposerez d'une dizaine de minutes et, par la suite, comme d'habitude, les membres du Comité pourront vous poser des questions et formuler des commentaires.
    La parole est à vous.
    Je remercie les membres du Comité de m'avoir invité, à titre de représentant de Statistique Canada, à comparaître devant eux afin que je nourrisse leur étude sur les enjeux relatifs au dénombrement des ayants droit tel que cela est défini à l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.
    J'aborderai trois points principaux.
    Dans un premier temps, je présenterai quelques considérations et défis associés à l'ajout de questions au recensement de 2021 touchant le dénombrement des enfants d'ayants droit.
    Dans un deuxième temps, je présenterai quelques éléments contextuels sur le dénombrement des parents ayants droit en vertu de l'article 23 de la Charte en utilisant les statistiques officielles.
    Finalement, je présenterai de l'information sur le processus de consultation entourant le contenu du recensement de 2021.
    Permettez-moi d'abord de souligner que Statistique Canada reconnaît l'importance des langues officielles et des outils statistiques mis à la disposition des utilisateurs de données, et ce, tant au gouvernement que dans l'ensemble des communautés. Le gouvernement s'est engagé depuis de nombreuses années à mettre à la disposition de la population canadienne un très large éventail de données statistiques sur les langues.
    Le Canada est le seul pays à poser sept questions sur les langues dans son recensement de la population. Cela témoigne du fait que le gouvernement du Canada en reconnaît l'importance et qu'il s'est engagé à prendre en considération cette dimension fondamentale de la société canadienne dans le cadre de ses politiques et de ses programmes.
     Statistique Canada reconnaît que la collecte de données sur les ayants droit et leurs enfants répond à un besoin primordial des communautés de langue officielle en situation minoritaire et, à ce titre, les commentaires et les suggestions des membres du Comité revêtent une grande importance pour nous.
    Étant donné le nombre de questions que comporte le recensement et le nombre de demandes visant à y ajouter des questions, Statistique Canada doit trouver un juste équilibre entre les besoins, d'une part, et, d'autre part, les coûts, le fardeau de réponse, la qualité des données et ainsi de suite. En d'autres termes, l'ajout de questions dans le recensement requiert la prise en compte d'un ensemble de considérations, et celle portant sur la qualité des données ne peut être sacrifiée.
    En général, les consultations que mène Statistique Canada démontrent des besoins d'information plus grands que ce que le recensement peut combler, et l'agence fédérale recherche constamment des façons de les prendre en compte et de les mesurer.
    Ainsi, le dénombrement des ayants droit et de leurs enfants nécessite une évaluation attentive et minutieuse des façons et des outils disponibles qui permettraient d'obtenir les meilleures données possible sur le sujet. Statistique Canada doit donc évaluer les avantages et les désavantages associés à différents processus de collecte de données.

[Traduction]

     Le recensement de la population canadienne comprend une question sur la langue maternelle du parent, soit la première langue apprise dans l'enfance et encore comprise. Cela permet de prendre en compte l'alinéa 23(1)a) de la Charte.
    On n'y retrouve cependant pas de question concernant la langue d'instruction du parent au niveau primaire, soit l'alinéa 23(1)b) de la Charte, ni sur la langue dans laquelle l'enfant d'un citoyen canadien a été instruit au niveau primaire ou secondaire, soit le paragraphe 23(2) de la Charte.
    Lors des tests des recensements nationaux de 1993 et de 1998, Statistique Canada a effectué des évaluations sur la possibilité de recueillir des données sur la langue d'enseignement dans le recensement. Ces évaluations ont montré que les répondants avaient de la difficulté à faire la distinction entre les programmes d'immersion, les programmes réguliers de langue seconde et les programmes dans les écoles des minorités de langue officielle. Par conséquent, ces expériences et ces évaluations ont démontré que, pour cerner de façon précise l'information sur la langue d'enseignement, il faut un ensemble plus complet de questions.
    Bien que le recensement recueille de l'information sur la langue maternelle et sur la citoyenneté, la seule source de données de Statistique Canada qui permet d'estimer directement le nombre d'ayants droit est celle de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, menée en 2006.
    Statistique Canada a mené l'Enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle au Canada, en partenariat avec une dizaine de ministères et d'organismes du gouvernement fédéral. Cette enquête comprend notamment plus de cinq modules permettant de mesurer diverses dimensions de la thématique de l'éducation, incluant le dénombrement complexe de la population visée par l'article 23 de la Charte. Elle procure également de l'information sur les principales raisons pour lesquelles les parents choisissent l'une ou l'autre des langues d'enseignement pour leurs enfants.

  (1115)  

     En plus de la question sur la langue maternelle, 11 questions étaient requises dans l'enquête postcensitaire pour répondre aux besoins en données associés aux alinéas 23(1)a) et b) et au paragraphe 23(2) de la Charte. Cette enquête avait été privilégiée pour dénombrer les ayants droit en raison des expériences et des résultats des tests antérieurs concernant la langue d'enseignement.
    Selon l'enquête postcensitaire, 52 % des enfants dont au moins l'un des parents est ayant droit fréquentaient une école de langue française au Canada hors Québec. Parmi ceux inscrits à l'école primaire, 56 % fréquentaient une école française, alors que chez ceux inscrits à l'école secondaire, cette proportion atteignait 47 %. Enfin, 15 % des enfants de parents ayants droit étaient inscrits dans un programme d'immersion en français.

[Français]

     Le recensement de la population permet de dénombrer les ayants droit seulement en fonction de l'alinéa 23(1)a). La question se pose donc de savoir dans quelle mesure cette seule information est pertinente en ce qui a trait aux fins visées.
    Selon le recensement de 2006, à la suite duquel a été menée l'enquête postcensitaire de 2006, 185 675 enfants âgés de 5 à 17 ans avaient au moins un parent de langue maternelle française au Canada à l'extérieur du Québec. Ils représentaient 89 % des quelque 209 220 enfants de parents ayants droit du même groupe d'âge qui fréquentaient une école primaire ou secondaire, tel qu'estimés par l'enquête sur la vitalité.
    Ces résultats sont cohérents avec les analyses produites uniquement à partir des données de cette enquête postcensitaire. En effet, lorsqu'on considère l'ensemble des enfants d'ayants droit au Canada hors Québec, d'après cette enquête, 96 % ont au moins un parent ayant droit dont la langue maternelle est le français. Cela signifie que bien que le recensement ne permet de dénombrer la population des parents ayants droit qu'en vertu de l'alinéa 23(1)a), ces analyses comparatives permettent tout de même d'estimer qu'il s'agit d'une forte majorité des ayants droit à l'extérieur du Québec.
    Quant à l'estimation des ayants droit au Québec, les données censitaires sur la langue maternelle sont peu utiles puisque l'alinéa 23(1)a) de la Charte n'est pas en vigueur au Québec en raison de l'article 59 de la Loi constitutionnelle de 1982.
    Le recensement de la population s'appuie sur un processus éprouvé s'étalant sur sept années, allant de la planification du recensement jusqu'aux diffusions officielles des données. Des consultations auprès des utilisateurs de données et des partenaires sont menées d'un bout à l'autre du pays et débutent quatre ans avant le jour du recensement. Elles permettent de recueillir de la rétroaction et des recommandations concernant l'information qui est recueillie dans le recensement.
    Dès l'automne 2017, Statistique Canada mettra en branle un processus formel de consultations publiques portant sur le contenu du questionnaire du recensement de 2021. Ce processus se fera par l'entremise d'un questionnaire Internet auquel aura accès le grand public, ainsi que des discussions lors de rencontres avec les représentants provinciaux et territoriaux, les divers niveaux de gouvernements, les organisations communautaires et les membres du milieu universitaire, et ce, partout au pays.
    Tout changement proposé au contenu du recensement de la population doit faire l'objet d'une évaluation rigoureuse, incluant des tests qualitatifs et quantitatifs, selon les normes élevées de qualité de Statistique Canada. Pour le recensement de 2021, les tests seront menés en 2018 et 2019. Ceux-ci prendront notamment la forme de groupes de discussion comprenant des segments spécifiques de la population qui pourraient être directement touchés par les changements proposés. Ces groupes de discussion seront menés dans plusieurs langues et dans diverses régions, partout au pays.
    Finalement, les tests qualitatifs seront suivis de tests pilotes à grande échelle avec diverses options de contenu et de méthode administrés à un large échantillon de Canadiens dans plusieurs régions du pays. Le processus de consultation que mènera Statistique Canada pour le recensement de 2021 fera également appel à l'ensemble des partenaires gouvernementaux, lesquels sont d'importants contributeurs à chaque cycle du recensement de la population.
    De plus, dans le cadre de ces consultations, Statistique Canada entend prendre des mesures positives pour discuter du dénombrement des ayants droit avec des représentants des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Toutefois, la décision entourant l'ajout de questions sur les langues dans le recensement ne revient pas qu'à Statistique Canada, car elle est ultimement prise par le gouvernement.

  (1120)  

     Ainsi, Statistique Canada préparera des recommandations quant au contenu du recensement de 2021 à partir de la rétroaction émanant des consultations et des résultats des tests. Ces recommandations sur le contenu du recensement de 2021 seront alors présentées au gouvernement aux fins d'examen. Conformément à la Loi sur la statistique, le gouverneur en conseil prescrira, par décret, les questions qui seront posées dans le cadre du recensement de 2021. 
    Pour ce qui est de l'échéancier, les activités menant au recensement de 2021 incluent le processus de consultation, le développement de questions, les essais et, finalement, la recommandation au gouvernement en ce qui a trait au contenu du recensement. Toutes ces activités devront avoir lieu au cours des prochaines années, soit d'ici la fin 2019.
    Je vous remercie. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions à ce sujet.
    Merci, monsieur Corbeil.
    Si vous le permettez, nous allons passer directement à la période des questions et commentaires.
     Madame Boucher, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur Corbeil, d'être parmi nous aujourd'hui et je vous souhaite la bienvenue dans le nouvel espace qu'occupe le Comité. C'est très bien.
    Plusieurs questions me viennent à l'esprit.
     Quand on parle d'ayants droit, est-ce que tout le monde comprend bien de quoi il s'agit? Pour ma part, je remarque que certaines personnes à qui j'en parle n'en ont aucune idée. Est-ce que le terme est bien expliqué à M. et Mme Tout-le-Monde?
     Comme députés, nous connaissons cette expression, mais une foule de gens ne comprennent pas encore aujourd'hui le terme « ayant droit ».
    Vous avez tout à fait raison. Évidemment, nous ne posons pas de questions spécifiques du genre: « Êtes-vous un ayant droit? »
    À mon avis, la distinction entre les parents et leurs enfants est ce qui constitue la principale confusion. Ce ne sont pas les enfants qui sont des ayants droit, ce sont leurs parents. Ceux-ci ont en effet le droit de les inscrire dans une école de la minorité de langue officielle en vertu de l'article 23 de la Charte. Comme vous le savez sans doute, cet article comporte trois alinéas.
    Nous essayons de renseigner le plus possible les gens sur le sujet. Cela dit, lorsque nous avons mené l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, nous n'avons pas eu à expliquer aux gens ce qu'étaient des ayants droit, étant donné que les questions étaient suffisamment explicites. De plus, même si le sujet de l'éducation est complexe, cela n'a pas posé de problème comme tel. Cela dit, je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il y a beaucoup de confusion à cet égard.
    Oui, il y a de la confusion. Encore aujourd'hui, quand on parle avec certaines personnes qui sont des ayants droit, ce n'est pas clair pour elles.
    Par ailleurs, pouvez-vous nous expliquer comment vous dénombrez les ayants droit francophones?
     Je suis une francophone du Québec. Or supposons que je doive répondre à un questionnaire qui n'est pas disponible en français, mais que je décide tout de même de le remplir en anglais. Est-ce que je serai alors considérée comme étant anglophone?
    Venant du Québec, je suis toujours francophone. Par contre, j'ai répondu au questionnaire dans une autre langue. Comment calculez-vous le nombre d'ayants droit francophones? Quels sont vos critères à cet égard?
    Il faut distinguer l'identification à une communauté et le fait qu'une personne est désignée francophone ou non francophone. En principe, l'article 23 ne fait pas cette distinction et ne mentionne aucunement le terme « francophone » ou « anglophone ».
    Cela dit, l'alinéa 23(1)a), qui porte sur la première langue apprise pendant l'enfance et encore comprise au moment du recensement, soit la langue maternelle, est le critère qui, comme je l'ai mentionné déjà, est probablement le plus important à l'extérieur du Québec en ce qui a trait au nombre.
    L'alinéa 23(1)b) porte pour sa part sur la langue d'instruction du parent à l'école primaire. Cette information n'est pas disponible dans le recensement. Par contre, la question a été posée dans le cadre de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle.
    Selon le troisième critère, si un enfant de la famille fréquente ou a fréquenté une école de la minorité, ses parents peuvent envoyer leurs autres enfants dans une école de la minorité, même si le français n'est pas leur langue maternelle ou qu'ils n'ont pas été scolarisés en français au niveau primaire.
    Comme je l'ai dit plus tôt, le fait de distinguer qui est ou n'est pas un francophone n'a pas réellement d'importance pour ce qui est de la mise en oeuvre des dispositions de l'article 23.

  (1125)  

     On n'arrive donc pas à dénombrer exactement la population francophone. Cela demeure toujours nébuleux. Par exemple, si je parle français et que c'est ma langue maternelle, mais que je décide d'aller à l'école anglaise, cela ne fait pas de moi une anglophone.
    Ce qui est difficile à comprendre, c'est qu'on ne parle pas ici d'anglophones et de francophones. Dans le recensement, on peut utiliser peut-être cinq ou six définitions possibles de ce qu'est un francophone ou un anglophone, mais on ne fait pas cette distinction-là, parce que c'est libre à chacun d'utiliser une définition ou l'autre.
    Ce que je vous dis, c'est qu'en ce moment dans le recensement, la seule donnée disponible pour nous permettre de déterminer le nombre d'ayants droit francophones hors Québec, c'est la langue maternelle du parent. Nous n'avons pas les autres critères.
    Dans l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, nous avons posé 11 questions qui nous ont permis d'estimer le nombre de parents ayants droit et d'enfants de ces parents.
    Dans ce cas, ne pourrait-on pas inclure dans le recensement les 11 questions de l'enquête sur la vitalité qui vous ont permis de recueillir des données et de mieux connaître le paysage de la francophonie hors Québec, de même que la situation des anglophones au Québec? Cela nous permettrait d'avoir une meilleure image de la réalité francophone ou francophile.
    La question que vous posez est très importante. Comme je l'ai mentionné auparavant, on doit déterminer, avant toute chose, si le recensement est le meilleur véhicule pour répondre à ces questions.
    Vous savez qu'en ce moment, le recensement comporte un très grand nombre de questions, soit plus de 50. Nous recevons toutes sortes de demandes d'ajouts de questions en provenance de partout au pays. Par exemple, des groupes autochtones demandent d'avoir des questions sur les Autochtones. D'autres aimeraient qu'il y ait des questions sur l'identité de genre ou encore sur les couples de même sexe. Il y a énormément de demandes. La question se pose, et Statistique Canada va devoir déterminer si, parmi l'ensemble des véhicules disponibles, le recensement est celui qui est approprié.
    Il faut aussi savoir que l'ajout d'un tel nombre de questions au recensement crée habituellement un fardeau de réponses pour l'ensemble de la population canadienne. En fait, il faut déterminer si cela doit se faire par l'entremise du recensement, ou bien au moyen d'une enquête postcensitaire, ou encore en ayant recours aux fichiers administratifs des provinces, c'est-à-dire qu'on inciterait les provinces à poser une telle question, ce qui permettrait de colliger cette information en provenance de chacune des autorités provinciales.
    L'objectif est bien compris, c'est-à-dire avoir une meilleure mesure du nombre d'ayants droit. Ce qu'il reste à faire, maintenant, c'est déterminer quel est le meilleur véhicule pour y arriver.
    Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à M. Lefebvre.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'être parmi nous aujourd'hui, monsieur Corbeil.
    Je vais poursuivre un peu dans le même ordre d'idées que Mme Boucher. Toutefois, avant de commencer, j'aimerais revenir sur la raison pour laquelle on mène cette enquête. Le prochain recensement aura lieu en 2021, et il est clair qu'il faut commencer tout de suite à regarder les données.
    Dans plusieurs communautés francophones d'un bout à l'autre du pays, les gens ont de grandes difficultés à obtenir des services en français et peut-être même une éducation en français.
    Ces données sont vitales pour la pérennité de nos communautés, point à la ligne. Qui plus est, beaucoup veulent obtenir des services dans leur langue, mais l'absence de données exactes nous empêche d'avancer. On l'a vu dans plusieurs arrêts de la Cour suprême. Malheureusement, la Cour suprême et même les conseils scolaires des autres provinces utilisent cette excuse. On prétend qu'en l'absence de données, on ne peut rien faire pour aider, et c'est fini. La pérennité de nos communautés francophones hors Québec est à risque.
    Cela explique l'importance du prochain recensement ou, comme vous l'avez mentionné, d'un prochain outil potentiel semblable à l'enquête postcensitaire sur la vitalité des communautés que vous avez menée en 2006.
    J'aimerais revenir sur une chose que vous avez mentionnée dans votre allocution. Est-il possible de recevoir vos notes d'allocution? Je ne les ai pas avec moi. Pourrait-on nous les remettre?

  (1130)  

    Il n'y a pas de problème.
    Vous aurez les notes.
    C'est excellent, merci.
    Vous avez dit qu'il ne revenait pas à Statistique Canada de décider des questions, mais que cela relevait du gouvernement. De qui s'agit-il exactement au sein du gouvernement? Quel ministère décide ultimement à cet égard?
     J'aimerais apporter une petite correction.
    Allez-y.
    Je n'ai pas dit que ce n'était pas à Statistique Canada de décider des questions. En fait, Statistique Canada mène des tests, tient compte des recommandations et évalue de façon très attentive quelles sont les options possibles. C'est la raison pour laquelle je mentionnais le test des recensements, soit celui de 1993 et celui de 1998, qui comportaient une question sur la langue d'enseignement. En 1993, on en a posé une et en 1998, on en a posé deux.
    On fait une analyse et, à la suite de l'évaluation, on fait des recommandations ou non, selon ce qui est possible ou pas.
    À qui faites-vous la recommandation?
    Ultimement, on fait la recommandation au gouvernement et le Cabinet va décider...
    D'accord.
    ... et approuver le contenu du recensement.
    Merci, je viens d'apprendre quelque chose.
    Comme l'a mentionné Mme Boucher, à l'heure actuelle, le recensement contient sept questions et il y en avait 11 dans l'enquête. Il y avait donc quatre questions de plus. Vous avez dit que le recensement en contenait 50 et qu'on peut vouloir en ajouter, car il serait primordial d'aller chercher ces données.
    La semaine dernière, des témoins ont comparu devant nous. Je leur ai posé la même question. Vous n'êtes pas juriste et je ne vous poserai pas une question de nature légale. Je me demande si le recensement n'enfreint pas les droits établis par l'article 23 de la Charte. Vous avez dit vous-même que vous n'alliez chercher que quelques données relativement à l'alinéa 23(1)(a) et non pour le reste. À la lumière de ce que la Cour suprême a dit à quelques reprises et du manque de données, nous avons selon moi un grave problème. Nous ne respectons pas nos obligations envers les francophones hors Québec en vertu de la Charte.
    Je vous remercie de votre question. Ma réponse comportera deux parties.
    Vous avez parlé d'ajouter quatre questions. Ce n'est pas le cas parce que les sept questions du recensement actuel couvrent d'autres dimensions. Il est question d'ajouter 10 autres questions parce que la 11 e est celle qui existe déjà dans le recensement et qui porte sur la citoyenneté. En fait, dans le recensement, il est question de la langue maternelle et de la citoyenneté, mais 10 autres questions sont nécessaires pour pouvoir tenir compte des deux autres alinéas de l'article 23.
    De plus, je souligne que le recensement est certainement l'une des sources de données les plus importantes pour Statistique Canada, mais il y en a de très nombreuses autres. Je vous donne un exemple à ce sujet.
    L'éducation est un champ de compétence provinciale. Statistique Canada a un Centre de la statistique de l'éducation qui mène un très grand nombre d'enquêtes. Il existe une enquête clé qui s'appelle l'Enquête sur l'enseignement primaire et secondaire. En fait, cette enquête va chercher des données statistiques dans toutes les provinces et collige cette information. C'est donc grâce à cette enquête qu'on peut savoir, chaque année et non pas tous les cinq ans, combien de jeunes sont inscrits dans un programme d'immersion et combien sont inscrits dans une école de la minorité. C'est grâce à cette enquête annuelle qui est menée par chaque province.
    En guise de réponse, je me demande donc s'il n'y aurait pas lieu de faire appel à chacune des provinces et des territoires pour leur demander d'ajouter une question sur la langue d'enseignement du parent au niveau primaire. Statistique Canada doit se poser cette question et l'évaluer. De cette façon, on peut obtenir des données annuelles sur un sujet, plutôt que de les avoir tous les cinq ans. Cela ajoute toutefois un fardeau de réponses quand même assez important au questionnaire du recensement.
    Par ailleurs, la question sur le revenu a été enlevée. Elle ne fait plus partie du recensement puisqu'on va maintenant chercher cette information à partir des déclarations de revenu des Canadiens. C'est aussi une façon de s'adapter à l'évolution des outils qui sont maintenant disponibles. C'est pour cela que je mentionne cette option.

  (1135)  

    C'est important.
    Nous avons des données qui nous fournissent la possibilité de déterminer le nombre d'enfants qui vont à l'école élémentaire et secondaire. En ce moment, il nous manque, comme vous nous l'avez si bien dit, des données sur les parents qui ont eu leur formation primaire en français. On ne peut pas avoir cette donnée statistique. On n'a pas non plus de statistiques sur le nombre de parents qui voudraient que leurs enfants fréquentent l'école française. On ne peut pas mesurer le besoin à cet égard. On veut évidemment offrir ce service, mais on ne peut pas mesurer la demande. Il serait très intéressant de mesurer la demande pour l'enseignement dans les deux langues officielles du Canada.
     Merci beaucoup, monsieur Lefebvre.
    Nous passons maintenant à M. Choquette.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Corbeil, je vous remercie de votre présence parmi nous.
    La question des ayants droit est extrêmement importante pour le Comité et pour la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il y a eu beaucoup de dossiers liés à cela récemment, par exemple des procès en Colombie-Britannique concernant l'accès à des écoles de qualité.
    Récemment, il y a eu un article de libre opinion signé par Mark C. Power et d'autres experts intitulé: « Je suis compté, donc je suis! ». Selon eux, plusieurs ayants droit ne seraient pas comptés. En fait, seulement la moitié des ayants droit le seraient.
    Selon vous, le recensement dénombre beaucoup de gens, comparativement à l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, qui a été faite en 2006.
    Commençons par cet aspect. Comment en êtes-vous arrivé à penser qu'il y a autant d'ayants droit qui n'ont pas été comptés?
    Ce que nous avons mentionné, c'est que l'enquête de 2006 mesurait de façon très précise la population des ayants droit au sein des minorités de langue officielle. Dans cette enquête, à l'extérieur du Québec, on dénombrait tous les parents ayant le français comme langue maternelle, soit comme seule langue ou comme une parmi d'autres. De plus, elle comptait toutes les personnes qui, n'ayant pas le français ou l'anglais comme langue maternelle, ont déclaré avoir le français comme première langue officielle parlée.
    C'était notre population de base. À cette population, nous avons posé un éventail de questions dans le cadre de cinq modules. Nous avons estimé le nombre de parents ayants droit, comme je l'ai mentionné tout à l'heure.
    Je ne veux pas remettre en question ces impressions ou ces énoncés, mais quand des gens disent que Statistique Canada ne dénombre qu'une faible partie ou que 50 % des ayants droit, j'aimerais savoir de quelle façon ils s'y prennent pour mesurer ou pour obtenir ce pourcentage. J'ai vu toutes sortes de pourcentages et j'en vois encore régulièrement. Il faudrait simplement faire un arrimage avec la réalité pour voir de quelle façon ce pourcentage a été obtenu.
    C'est tout ce que je dirais à ce sujet.
    En 2006, il y a eu l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, que vous avez d'ailleurs comparée avec le recensement. Selon cette enquête, qui était quand même limitée — elle n'était pas pancanadienne —, mais qui ciblait certains...
    En fait, c'était une enquête pancanadienne qui incluait toutes les provinces. Il y avait un échantillon d'environ 50 000 personnes, mais pris au sein des minorités de langue officielle et non de l'ensemble de la population canadienne.
    Bref, si on ne fait pas un recensement qui posera toutes les questions nécessaires, on ne saura jamais quel est le bassin exact de gens qui pourraient être considérés comme étant des ayants droits.
    Il y a eu l'article que je viens de mentionner, mais d'autres personnes et intervenants du domaine des langues officielles se sont également prononcés sur le sujet. Ils mentionnent que deux autres catégories d'ayants droit restent à déterminer. Toutefois, a-t-on vraiment besoin de poser 10 autres questions pour déterminer les ayants droits de ces deux autres catégories? Il y aurait peut-être moyen de simplifier cette tâche. C'est vous qui êtes le spécialiste en la matière. Vous pouvez peut-être m'expliquer pourquoi ces 10 questions sont nécessaires.
    La deuxième catégorie englobe les parents qui ont fait une partie importante de leur études primaires dans une école de langue française. Quant à la troisième catégorie, elle concerne les parents dont l'un des enfants fréquente ou a fréquenté une école de langue française.
    Pourquoi aurait-on besoin d'autant de questions pour recueillir ces deux informations?

  (1140)  

     C'est en soi une excellente question.
    Je vous répondrai rapidement en disant que ce qui semble aller de soi ne l'est souvent pas pour les gens interrogés et pour les répondants.
    La première question était de savoir si les gens avaient fait une partie ou toutes leurs études primaires en français. Évidemment, dans l'application de l'article 23, il faut aussi — quoique je ne suis pas juriste — savoir si les gens ont fait des études primaires en français pendant trois mois et si cela les rend éligibles ou admissibles en vertu de l'article 23. Donc, il faut déterminer si c'est plus de la moitié, environ la moitié, moins de la moitié et si les études en français avaient eu lieu au Canada parce que, évidemment, il faut poser la question.
    Une autre question était de savoir dans quel type de programmes les gens étaient inscrits. Si c'est un programme d'immersion en français, cela ne satisfait pas aux dispositions de l'article 23. De plus, il s'agissait de savoir si c'était un programme régulier d'enseignement en français. Une autre question était de savoir si c'était dans une école française, une école bilingue ou dans une école d'immersion. Cette question était posée. Une autre question était savoir si leur enfant fréquentait une école de langue française. On le demandait parce que, parfois, des enfants sont inscrits, mais ils ne fréquentent pas une école. Il faut donc faire une distinction dans ce cas-ci. On demandait si l'enfant était actuellement inscrit dans une école de langue française et si c'était dans une école primaire ou une école secondaire. L'autre question consistait à déterminer si l'enfant fréquentait une école anglaise ou une école française et s'il avait des frères ou des soeurs qui avaient fréquenté une école primaire ou secondaire au Canada.
    Vous voyez le nombre de questions juste pour arriver à circonscrire la situation. Si tout le monde comprenait, on pourrait demander aux enfants s'ils ont des parents qui sont des ayants droit. Ce serait simple et réglé. Vous voyez l'éventail de questions qui, en apparence, peuvent sembler simples. Toutefois, pour le répondant, il n'est pas si aisé que cela de comprendre cette distinction.
    Merci, monsieur Corbeil.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Arseneault.
    Merci, monsieur le président.
    C'était une excellente question. Je vous remercie de vos réponses et de votre sagesse, monsieur Corbeil. Je comprends que quelque chose de très simple peut devenir très compliqué quand on se met à s'interroger et à vouloir poser des questions.
    Je vais procéder assez rapidement parce que je ne dispose que de six minutes. Le président est très sévère sur le chronométrage du temps alloué.
    L'affaire Mahe, en 1990, est venu indiquer à tous les gens qui faisaient des revendications pour construire des écoles en vue de respecter les droits des minorités de langue officielle en milieu majoritaire qu'il fallait dénombrer les gens qui pouvaient se prévaloir de ces droits. Il fallait qu'on sache quel était le nombre précis. Je n'ai pas la citation de la Cour Suprême, mais je vais peut-être la trouver. En fait, il faut que le nombre de gens le justifie.
    Comment, au sein de Statistique Canada, l'affaire Mahe a-t-elle une influence sur vous? Aujourd'hui, on est dans un contexte très précis. C'est ce que nous voulons savoir. Statistique Canada fournit une photographie de ce qu'est le Canada, et ce, tous azimuts, avec comme objectif précis de mesurer l'état de la population, mais pas nécessairement pour répondre aux arguments inhérents à l'affaire Mahe. Depuis ce jugement, tenez-vous compte du contenu de cette décision pour dénombrer les adultes et les enfants qui pourraient bénéficier d'une école de langue française en milieu majoritaire?
    J'ai mentionné précédemment que dans le test national du recensement de 1993 et de 1998, Statistique Canada avait mené des tests sur la langue d'enseignement. Les résultats n'étaient pas parfaits et amenaient à poser d'autres questions. Sur une base régulière, nous avons développé des partenariats avec des ministères du gouvernement fédéral. C'est en fait à la suite des résultats des tests du recensement qu'il y a eu des discussions pour que Statistique Canada mène une enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, comme celle qui a été menée en 2006, précisément pour répondre à ce besoin. Évidemment, il y avait beaucoup plus de questions. Il y avait diverses thématiques relatives aux langues d'usage dans l'espace public. C'était l'un des objectifs principaux. C'est donc de cette façon que Statistique Canada a été en mesure de répondre aux questions touchant l'article 23.

  (1145)  

    Comme j'ai peu de temps à ma disposition, je vais aborder la question de la mécanique juridique.
    Plus tôt, vous avez dit que c'est essentiellement le Cabinet qui décide du contenu ou des modifications au contenu du questionnaire. Est-ce bien cela?
    Oui.
    Quand vous dites le Cabinet, vous référez-vous à un ministre en particulier ou à tout le Cabinet?
    C'est tout le Cabinet.
    Merci.
    Ma prochaine question est la suivante. A-t-on suffisamment de temps d'ici le prochain recensement pour tester toutes les questions qui répondraient précisément aux dispositions de l'article 23? Selon vous, les spécialistes de Statistique Canada ont-ils le temps de le faire?
     Comme je l'ai mentionné plus tôt, le test du recensement national et les consultations vont débuter l'automne prochain et, en 2018, un test national va avoir lieu pour vérifier diverses questions qui auront été recommandées.
    Combien de temps de parole me reste-t-il, monsieur le président?
    Vous m'indiquez trois minutes? D'accord.
    J'avais bien compris qu'un premier test se tiendrait en 2018, mais cela ne signifie pas que les résultats seront concluants.
    Il faudra bien sûr attendre les résultats des tests pour savoir si, oui ou non, c'est un...
    Non, ce que je veux savoir précisément, c'est si vous croyez qu'en 2021, peu importe la situation, le prochain formulaire du recensement comprendra des questions précises qui respecteront les alinéas 23(1)a), 23(1)b) et 23(1)c) de la Charte.
    Je ne peux pas me prononcer là-dessus, étant donné que tout dépendra des évaluations.
    Votre organisme considère-t-il le respect de ces dispositions de la Charte comme étant une question urgente?
    On parle ici de mesurer le nombre total d'ayants droit pour les écoles francophones et de s'appuyer sur l'affaire Mahe.
    Ce que je vous dis, c'est que cela dépendra de l'évaluation, des recommandations que nous ferons et de la décision que prendra le gouvernement.
    Il s'agit d'une obligation constitutionnelle. Je suis certain que votre bureau est sensibilisé à cela.
    Il n'y a pas de problème à cet égard, mais comme je l'ai déjà mentionné, très clairement, Statistique Canada doit mener des examens rigoureux et très minutieux pour s'assurer que ces questions sont viables dans le cadre d'un recensement.
    Je comprends.
     J'ai deux brèves questions...
    Pour l'instant, je ne peux pas répondre autrement.
    J'ai deux brèves questions à vous poser.
     Excusez-moi, mais je ne dispose que de six minutes.
    Il n'y a pas de problème.
    Est-ce que Statistique Canada a consulté des spécialistes en matière de droits scolaires en milieu minoritaire pour que la formulation de ces questions soit conforme à l'article 23?
     Statistique Canada consulte régulièrement des représentants des minorités de langue officielle, mais pas nécessairement des gens du milieu juridique.
    Pensez-vous qu'il serait souhaitable de consulter les constitutionnalistes qui se sont battus pendant toutes ces années pour construire des écoles en milieu minoritaire?
    Comme je l'ai mentionné plus tôt, dès que le processus de consultation sera enclenché, toutes les personnes qui voudront soumettre des avis à Statistique Canada...
    Ce n'est pas la question que je vous ai posée.
    ... pourront le faire et cela sera pris en considération...
    Ce n'est pas ce que je vous ai demandé, monsieur Corbeil. Je dispose de peu de temps.
     Est-ce que Statistique Canada a consulté ou a l'intention de consulter ces spécialistes?
    Nous allons consulter toutes les personnes qui sont aptes à fournir le plus grand nombre possible de renseignements utiles à Statistique Canada, de façon à ce que ces besoins soient satisfaits.
    En passant, je vous suggère de consulter toutes les décisions de la Cour suprême qui, en vertu de la Charte, ont donné lieu à des approbations pour la construction d'écoles. Vérifiez quels juristes étaient là. Ce serait un bon début.
     C'est une suggestion que je fais à Statistique Canada et non pas à vous personnellement. Je pense que, d'ici 2018, ces personnes pourraient vraiment vous aider à étayer vos 10 questions de façon à ce qu'elles soient conformes à la Charte.
    Est-ce qu'il me reste un peu de temps, monsieur le président?
    Il vous reste une minute.
    D'accord.
    L'échéance de 2018 m'inquiète. Ce sera un test, mais j'ai l'impression que si le résultat n'est pas concluant, du temps aura été perdu quant au prochain formulaire. Ce seront alors des générations d'enfants que nous perdrons dans nos écoles francophones ou anglophones en milieu minoritaire.
    Statistique Canada pourrait-elle considérer comme une mesure d'urgence la nécessité que cela figure dans le formulaire de 2021?
    Ma réponse sera toujours la même. Un très grand nombre de communautés et d'associations nous parlent de mesures d'urgence. Tout le monde à ses propres mesures d'urgence, et Statistique Canada, en tant qu'organisme statistique national, doit prendre en considération chacune de ces demandes et les évaluer de façon très attentive. Je peux vous assurer que nous déploierons toute l'énergie et l'attention nécessaires pour considérer cette demande.
    J'ai une dernière question à vous poser.
     Je regrette, mais le temps qui vous était alloué est écoulé.
     Monsieur Corbeil, j'aimerais vous demander rapidement à quel moment a été émis le décret gouvernemental qui précise les questions de 2018.
    Dans le cas du test de 2018, il ne s'agit pas d'un décret. Cependant, on parle en effet d'un décret pour ce qui est du contenu du recensement de 2021.
    En ce qui a trait à  2018, le test du recensement national...

  (1150)  

    D'accord.
    ... qui est, à toutes fins pratiques, un sondage d'essai, comporte des variantes et diverses versions de questions. C'est vraiment basé sur les recommandations, l'examen des enjeux ainsi que sur la capacité et la possibilité de poser telle ou telle question. En outre, il faut que les gens comprennent bien ces questions. Ce n'est pas parce qu'une question figure dans le test que M. et Mme Tout-le-Monde la comprennent bien. Statistique Canada est très bien placé pour...
     Merci.
    Madame Lapointe, vous avez la parole.
    Je vais laisser mon collègue poser une question puisqu'il est sur une lancée.
    Merci.
    Monsieur Corbeil, je vais être bref — vous voyez comment cela fonctionne ici — et faire suite à l'intervention de mon collègue, M. Lefebvre.
     Selon moi, le questionnaire, qui doit tenir compte de tous les ayants droit afin de respecter la décision dans l'affaire Mahe et de promouvoir la construction d'écoles dans des milieux minoritaires, est une obligation de la Charte.
    Êtes-vous d'accord sur cette affirmation?
    Absolument.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le fait qu'on ne puisse pas dénombrer actuellement les ayants droit, conformément à l'article 23, est une atteinte à la Charte canadienne des droits et libertés?
    Je ne sais pas si c'est une atteinte à la Charte, mais s'il y a un problème de ce côté, il faut y remédier. Je suis d'accord avec vous à ce sujet.
    Je sais que vous n'êtes pas juriste et je ne veux pas vous faire dire des choses qui pourraient vous embêter.
    Avez-vous le sentiment qu'il y a une épée de Damoclès au-dessus de Statistique Canada? On est courant qu'on peut enfreindre les droits garantis par la Charte si on ne pose pas les bonnes questions pour recenser ou dénombrer les ayants droit, adultes comme enfants, compte tenu de l'affaire Mahe.
    Statistique Canada est-il conscient cela?
    Lorsque des demandes sont adressées à Statistique Canada, l'objectif est de tenter d'y répondre. Nous y avons répondu par le passé en collaboration avec 10 ministères et agences du gouvernement fédéral. S'il y a d'autres options ou d'autres moyens pour y répondre, Statistique Canada est tout à fait disposé à les examiner.
    Je parle plutôt de l'aspect juridique.
    Est-ce que Statistique Canada consulte des constitutionnalistes? Avez-vous reçu des opinions juridiques de constitutionnalistes par rapport à ce qui nous occupe aujourd'hui, à savoir les dispositions de l'article 23?
    Je ne peux pas répondre avec certitude à cette question, mais je ne le pense pas.
    Nous sommes en relation constante avec toutes sortes de gens de partout au pays. Je suis responsable de la section des statistiques linguistiques. Je n'ai pas consulté personnellement de juristes à ce sujet.
    Statistique Canada reçoit énormément de demandes sur tous les sujets. Son objectif, dans le cas d'une demande de ce genre, est de trouver les moyens de répondre à cette obligation. S'il s'agit d'un besoin manifesté clairement, comme c'est le cas en ce qui a trait à l'article 23, Statistique Canada va trouver, en collaboration avec ses différents partenaires, les moyens d'y répondre.
    Je comprends.
    Quand j'étais très jeune, ma mère travaillait pour Statistique Canada. Je me souviens du genre de questions qu'on posait dans le formulaire. En premier lieu, il y avait des questions sur les salaires, venaient ensuite des questions sur les appareils ménagers et ainsi de suite. Mais ici, je parle d'une obligation constitutionnelle. Ma collègue va certainement vous poser des questions à ce sujet. Je vous suggère fortement de consulter des constitutionnalistes sur cette question précise, afin que votre bureau puisse mieux nous éclairer, pour le prochain recensement de 2021, sur l'obligation constitutionnelle de Statistique Canada.
    Voici ce qui m'inquiète. Si le test de 2018 n'est pas concluant, il faudra refaire les questionnaires et, après 2021, il y aura encore des enfants d'écoles françaises ou anglaises en milieu minoritaire qui n'auront pas été dénombrés en tant qu'ayants droit.
    Là-dessus, je cède la parole à ma collègue. 
    Cher collègue, je vous remercie de me laisser un peu de temps.
    Monsieur Corbeil, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
     Tantôt, vous avez parlé de la meilleure mesure pour définir les ayants droit. Mon collègue a d'ailleurs abordé cette question. Vous avez sûrement des suggestions à formuler à cet égard. À un moment donné, vous avez même dit que le meilleur moyen de dénombrer qui sont les ayants droits était de passer par les provinces.
     Comment vous y prendriez-vous? Vous avez dit agir en fonction des demandes qui vous sont faites. À qui allez-vous répondre? Allez-vous répondre au Comité permanent des langues officielles, s'il vous demande explicitement dans un rapport de vous assurer que les gens dont il est question à l'article 23 sont tous dénombrés en tant qu'ayants droit? Allez-vous répondre au commissaire aux langues officielles? À qui allez-vous répondre pour vous assurer que tous les ayants droit au Canada peuvent avoir accès à l'éducation dans la langue de leur choix? Il y a deux langues officielles au Canada.
    Je vous remercie de votre question.
    Plus tôt, j'ai fait allusion à l'Enquête sur l'enseignement primaire et secondaire, qui est une enquête très importante. Sur une base vraiment régulière, Statistique Canada rencontre chacun de ses partenaires et discute avec eux. Chaque année, des rencontres ont lieu avec des représentants de toutes les provinces et des territoires.
    Dans cette enquête, des questions sont posées et les données sont recueillies directement par l'entremise des dossiers administratifs des provinces.

  (1155)  

    Cela peut-il être coordonné avec Statistique Canada?
     C'est une option. Par le passé, nous avons réussi à poser des questions et à demander aux provinces d'ajouter cette question à leur questionnaire de base et à leurs fichiers administratifs. Cela été concluant. C'est la raison pour laquelle...
    Est-ce qu'on pourrait se servir de ces données pour s'assurer que la Cour suprême reconnaisse que ce sont des ayants droit?
    Statistique Canada a reçu des lettres de la part du ministère de l'Éducation de la Colombie-Britannique disant qu'il appuyait les minorités francophones de la province dans le but d'obtenir un dénombrement juste et précis des ayants droit. S'il y a un tel appui de la part des provinces, je présume qu'il ne devrait pas être extrêmement difficile d'obtenir le soutien de chaque province et territoire en vue d'aller chercher les informations relatives aux exigences prévues aux paragraphes (1) a et (1) b de l'article 23 de la Charte.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Généreux.
    Merci, monsieur Corbeil.
     Les questions sont très intéressantes. Dans votre document, vous dites qu'il y avait, en 2006, 185 675 enfants âgés de 5 à 17 ans ayant au moins un parent de langue maternelle française au Canada hors Québec. Sachant que nous sommes maintenant 35 millions de personnes au Canada, il me semble que ce chiffre n'est pas très très élevé. Est-ce que je me trompe à ce sujet?
    Non, c'est bien cela.
    Par contre, il faut préciser que nous parlons de francophones hors Québec. Si on ramène ce chiffre à une population qui est grosso modo d'un million de personnes, et que l'on inclut les enfants du primaire et du secondaire, ce sont les enfants qui sont âgés de 5 à 17 ans qui sont recensés. C'est tout à fait dans la norme.
    Une autre chose qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'étant donné le taux de natalité, le nombre d'enfants correspond à celui que vous mentionnez. Je ne dis pas qu'en 2016 les résultats du recensement ne vont pas montrer une augmentation de ce nombre, mais on parle effectivement d'environ 200 000 enfants âgés de 5 à 17 ans. Cela reflète donc la réalité.
    Qu'en est-il des nouveaux arrivants, soit des gens issus de l'immigration, qui sont arrivés au Canada au cours des 10, 15 ou 20 dernières années? Dans le cas de certains d'entre eux, dans leur pays d'origine, le français était parlé en famille. Quand ils répondent au sondage, peuvent-ils dire qu'ils sont des ayants droit même s'ils ne sont pas nés au Canada?
    En fait, votre question est importante puisque l'immigration est évidemment appelée à contribuer de plus en plus à l'existence de communautés francophones à l'extérieur du Québec. Le problème principal est que beaucoup de ces immigrants n'ont pas le français comme langue maternelle. Nécessairement, ils ne répondent pas aux conditions de l'alinéa 23 (1)a. Comme ils n'ont pas nécessairement été scolarisés en français dans une école primaire au Canada, ils ne sont pas admissibles en vertu de l'alinéa 23 (1) b. Cela dit, je sais que beaucoup d'écoles accueillent quand même ces enfants issus de l'immigration.
    Statistique Canada n'est évidemment pas une firme de sondages. On s'entend toutefois sur le fait que vous colligez toute une série d'informations. Dans la perspective où on aimerait connaître l'intérêt des parents et non seulement ceux qui sont des ayants droit, ne pourrait-on pas leur demander très simplement s'ils seraient intéressés à envoyer leurs enfants dans une école de langue française hors Québec s'ils en avaient la possibilité? Une question aussi simple que celle-là ne permettrait-elle pas d'identifier s'il y a un intérêt à cet égard?
    Tout à l'heure, M. Lefebvre disait qu'on est à la recherche des meilleures informations possibles pour être en mesure de prendre des décisions dans des milieux minoritaires, à savoir construire des infrastructures scolaires ou communautaires. On est incapables de le faire parce qu'on n'a pas l'ensemble des données et qu'on ne connaît pas l'intérêt véritable. Le fait d'être un ayant droit est une chose, mais d'avoir un intérêt envers la francophonie en est une autre. On sait que l'intérêt pour les écoles d'immersion françaises croît rapidement au Canada.
    Il existe donc un intérêt de la part de membres des communautés anglophones à envoyer leurs enfants à l'école française. S'il y avait une question aussi simple que celle-là, cela ne donnerait-il pas des indications à Statistique Canada et au gouvernement pour conclure que dans d'autres communautés du pays, et pas uniquement dans des endroits où les gens sont en situation minoritaire, il existe un intérêt pour le fait français. Je crois que l'un des buts de notre Comité est non seulement de savoir qui sont véritablement les ayants droit, mais aussi qui a un intérêt à apprendre l'autre langue officielle du Canada. Fondamentalement, c'est une question à laquelle j'aimerais obtenir une réponse.

  (1200)  

     C'est une excellente question, mais, comme vous le savez, ce n'est pas si simple. Cela peut être une arme à deux tranchants. Je vous donne un exemple. Parmi les personnes à l'extérieur du Québec dont la première langue officielle parlée est le français, environ 40 % ont déclaré dans des enquêtes, entre autres dans celle de 2006, qu'elles étaient plus à l'aise de communiquer en anglais qu'en français. Si on...
    Permettez-moi de vous interrompre, mais vous comprenez que même si ces personnes répondent cela dans un sondage, il n'empêche qu'elles peuvent avoir un intérêt, si la question leur est posée, à envoyer leurs enfants dans des écoles françaises.
    Oui, absolument.
    Ma belle-soeur ne parle pas un mot de français. Elle est née au Québec, mais elle demeure à Toronto depuis l'âge de 15 ans. Depuis le primaire, ses deux enfants fréquentent des écoles d'immersion française. Elle voulait que ses enfants apprennent le français, ce qu'elle n'avait pas fait elle-même. Pourtant, elle n'était pas une ayant droit.
    Il y a une distinction importante à faire entre les programmes d'immersion en français et les écoles de la minorité.
    Des gens nous ont déjà demandé pourquoi nous ne demandions pas aux gens s'ils étaient francophones. Or, je peux vous garantir que, parfois, on n'aimerait peut-être pas nécessairement avoir la réponse. À vrai dire, selon la façon dont on interprète ces questions, on peut en retirer une certaine information. Par exemple, selon les résultats de l'enquête sur la minorité, 50 % des répondants fréquentaient une école de la minorité, alors que 15 % fréquentaient un programme d'immersion. Il est vrai aussi que, parmi les personnes dont les enfants fréquentaient l'école anglaise, 40 % auraient souhaité envoyer leurs enfants dans un programme d'immersion ou dans une école de la minorité. Vous voyez qu'il y a une complexité dans la formulation de la question.
    Mais de quoi a-t-on peur, monsieur Corbeil? A-t-on peur de la vérité? Ce que vous êtes en train de me dire, c'est qu'on ne pose pas de questions parce qu'on ne veut pas connaître les réponses.
    Je ne dis pas qu'on ne pose pas de questions. Je dis que les questions qui sont simples, en apparence, peuvent être drôlement plus compliquées.
    Vous disiez que c'était un couteau à deux tranchants. Il y a donc un tranchant positif et, potentiellement, un tranchant négatif. Quel est cet autre tranchant dont vous parlez? De quoi a-t-on peur? Pour ma part, si je posais une question aussi simple que celle demandant aux gens s'ils aimeraient envoyer leurs enfants dans une école francophone en milieu minoritaire, et que 250 000 personnes répondaient qu'elles aimeraient cela et que ce serait vraiment bien, j'essaierais de leur donner ces services.
    A-t-on peur d'avoir des réponses qui vont forcer les gouvernements à donner des services à des gens qui, autrement, ne les demanderaient pas?
    Non, mais je peux vous répondre d'une autre façon, en vous donnant l'exemple du domaine de la santé. C'est un enjeu sur lequel nous travaillons beaucoup. Des gens disent qu'en 2006, on a eu un portrait de la demande, mais on n'a pas un portrait de la demande réelle. Pour ce qui est de demander aux gens s'ils voudraient avoir des services dans leur langue, nous avons en effet recueilli de l'information, mais ce n'est pas si simple. Dans certaines provinces, il y a une petite fraction de la population qui souhaite effectivement avoir des services de santé en français, mais étant donné le peu de services disponibles, ils répondent que tout ce qu'ils souhaitent, c'est avoir des services, point à la ligne.
    Je vous réponds donc que les questions ne sont pas si simples. Nous aimerions bien poser des questions très simples dans un recensement. Cependant, on doit comprendre que les gens pourraient facilement interpréter cette question de différentes façons. La question cherche-t-elle à savoir s'ils veulent que leurs enfants fréquentent un programme d'immersion, fréquentent une école de la minorité ou s'ils sont ouverts à l'apprentissage d'une langue seconde pour eux? Vous voyez qu'il y a tout un spectre de concepts et de notions possibles.
    Je vais faire un Darrell Samson de moi-même.
    Vous êtes responsables de la portion linguistique, n'est-ce pas?
    Absolument.
    Il y a la santé, l'économie et toutes sortes d'autres volets. Plus tôt, M. Arseneault voulait savoir quelle était la priorité ou qui décidait des priorités. C'est le gouvernement qui, au final, détermine l'ordre de priorité des questions. Lorsque vous soumettez la version définitive du formulaire, vous avez déjà fait les choix de questions. Le gouvernement dit ensuite s'il est d'accord et, si oui, il estampille tout cela et on peut aller de l'avant.
    Par contre, y a-t-il un comité des priorités qui doit être mis en place?
    À la suite des tests du recensement, évidemment, la haute gestion de Statistique Canada évalue de façon très attentive tous les résultats et toutes les recommandations. Il y a ensuite des discussions avec les différents ministères du gouvernement.

  (1205)  

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Généreux.
    Monsieur Corbeil, avant de terminer, il y a deux points que je voudrais éclaircir.
    Vous parliez d'enquête. Est-ce que l'enquête a la même valeur que le recensement?
    Évidemment, cela dépend de l'enquête dont il est question.
    Dans le cas de l'Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, comme c'est un échantillon, cela permet d'avoir des estimations à une échelle géographique assez large, mais peut-être pas à une échelle géographique aussi fine que celle associée au recensement, lequel permet de savoir ce qu'il en est dans les municipalités ou dans les conseils scolaires.
    Par contre, l'Enquête sur l'enseignement primaire et secondaire est, pour sa part, une recension complète de tous les enfants dans chaque province et territoire, jusqu'à l'échelle de chaque conseil scolaire. Il s'agit d'une recension complète des enfants et des jeunes qui sont inscrits à l'école.
    Il y a une différence importante entre une enquête réalisée au moyen d'échantillons et une enquête qui recueille des données administratives extensives à l'échelle de chaque province et territoire.
    En 2016, de quel type d'enquête s'agissait-il?
    Vous voulez parler de celle de 2006?
     En 2006?
    En 2006, c'était une enquête par...
    Non, c'est en 2016.
    On parle de 2016 et de 2021.
    En 2016, il y a eu un recensement complet de la population, comme ce sera le cas en 2021. L'enquête de 2006 était une enquête postcensitaire, c'est-à-dire qu'on a tiré l'échantillon des minorités de langue officielle à partir de la base d'échantillon du recensement de 2006.
     Cela demeure quand même un échantillon et le questionnaire était très volumineux. Il fallait 45 minutes pour y répondre. Nécessairement, il fallait faire cela avec un échantillon et non pas pour l'ensemble de la population.
    Par contre, l'Enquête sur l'enseignement primaire et secondaire est une enquête qui collige des données administratives chaque année et qui repose sur une recension complète de tous les jeunes inscrits dans les écoles au Canada.
    C'est excellent.
     Merci beaucoup, monsieur Corbeil, de votre comparution et de vos remarques de ce matin qui ont été extrêmement utiles pour le Comité.
    Avant de passer au prochain témoin, nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes.

  (1205)  


  (1215)  

     Nous reprenons la séance.
    Je vous souhaite la bienvenue parmi nous, monsieur Landry.
    M. Rodrigue Landry est professeur émérite et chercheur associé à l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques.
     Nous sommes heureux que vous ayez pu vous joindre au Comité malgré le temps qu'il fait à l'extérieur. Votre présentation durera une dizaine de minutes. Par la suite, nous passerons à la période des questions et commentaires de la part des membres du Comité.
    Nous vous écoutons, monsieur Landry.
    Hier, j'ai informé la greffière que ma présentation pourrait dépasser 10 minutes, si ce n'est pas trop vous demander. Je vais quand même essayer d'être le plus bref possible.
    Ma présentation, que je ferai en français, comportera sept points. Toutefois, je suis prêt à répondre aux questions dans les deux langues officielles.
    Le premier point porte sur le fait qu'une langue ne peut pas être plus forte que la société qui l'appuie. Je dis cela pour montrer que l'État peut vraiment faire quelque chose pour appuyer les minorités. J'étudie les minorités francophones depuis maintenant plus de 40 ans et j'ai dirigé l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques. Je suis présentement à la retraite. Le sujet qu'étudie votre comité est très important. C'est avec plaisir que je vous ferai part de certains aspects relatifs à ces enjeux.
    Revenons sur le premier point, soit le fait qu'une langue ne peut pas être plus forte que la société qui l'appuie. Je parle ici d'acteurs. Il y a trois grandes catégories d'acteurs qui peuvent vraiment agir sur la langue. La première, ce sont les membres de la communauté linguistique eux-mêmes. Dans ce cas-ci, la démographie joue beaucoup. Le nombre, la proportion, la concentration territoriale, la structure familiale — à savoir si on est endogame ou exogame —, la migration et l'immigration sont des facteur déterminants. Règle générale, plus faible est la concentration, plus forte est l'exogamie. L'exogamie, c'est ce qu'on appelle les mariages mixtes.
    Si vous examinez la littérature sociologique à cet égard, vous découvrirez que la tendance normale est de considérer l'exogamie comme étant un des meilleurs indices sociologiques d'une pleine intégration des groupes ethniques à la société dominante. Ce que je veux essayer de vous démontrer, c'est que la francophonie canadienne est un peu une exception à cette règle, du moins qu'elle résiste beaucoup à cette tendance forte. Je reviendrai sur ce point plus tard. Le rôle de cette première catégorie d'acteurs, soit les membres de la communauté linguistique, est de transmettre la langue maternelle à la prochaine génération, ce que j'appelle la « socialisation langagière primaire ».
    La deuxième catégorie d'acteurs porte sur les institutions que la minorité linguistique peut avoir. On appelle cela la « complétude institutionnelle », un terme qui nous a été proposé par Raymond Breton, un chercheur de l'Ontario. Le rôle des institutions est de permettre la présence de l'usage de la langue dans la sphère publique. S'il n'y avait pas d'institutions, on ne parlerait une langue que pour jouer aux cartes le samedi soir avec des amis. Dans ce cas-ci, l'acteur principal est la société civile qui comprend ceux qui gèrent les institutions et tous les organismes qui s'affairent à la promotion de la langue, de la culture, de la gouvernance et ainsi de suite. Souvent, la société civile exerce un leadership sur les membres de la communauté.
    Toutefois, les recherches démontrent qu'il y a deux grandes catégories distinctes d'institutions. La première permet un prolongement de la socialisation primaire, c'est-à-dire qu'elle donne une véritable socialisation au chapitre de la langue. Je parle des écoles, des médias et de la langue de travail. Je suis moins sûr pour la langue de travail parce que je l'ai moins étudiée. Il reste quand même que ce sont des aspects qui ont un effet sur l'identité des personnes.
    La deuxième catégorie d'institutions augmente le statut de la langue. C'est ce que j'appelle le socialisation secondaire. L'effet est sur la perception du statut et de la vitalité du groupe minoritaire. On parle, par exemple, des services publics offerts dans la langue minoritaire, de l'affichage commercial et public et de tous les services qu'un gouvernement peut offrir. Ce n'est pas une socialisation continue. Ce sont des services d'appoint qui donnent un message très puissant sur la vitalité du groupe.
    Un point sur lequel je veux insister est que l'école est à la base de la complétude institutionnelle et de la société civile. En ce sens, elle est l'institution la plus importante. Elle est aussi très importante en ce qui a trait à la transmission de l'identité. Les recherches démontrent qu'elle est aussi importante que la famille et les réseaux sociaux.
    La troisième et dernière catégorie d'acteurs est l'État et, bien sûr, les citoyens qui peuvent appuyer l'État dans ses politiques. Le rôle de l'État est d'offrir ou non une légitimité aux groupes linguistiques. Un État peut donc reconnaître la langue de façon officielle, instituer des droits linguistiques individuels et collectifs, mettre en oeuvre des politiques linguistiques — qu'on appelle parfois des politiques de reconnaissance — et offrir des services dans la langue de la minorité. Ce sont là toutes des choses que l'État peut faire. En raison de la psychologie des personnes minoritaires, ce que certains chercheurs ont appelé l'insécurité statutaire, l'offre active est très importante pour elles.

  (1220)  

     La perception selon laquelle leur langue est reconnue et légitimée par l'État est fondamentale pour les communautés minoritaires. C'est un peu comme un droit d'exister. L'interaction entre ces trois catégories d'acteurs façonne donc l'image que le groupe a de lui-même et influence ses projets comme groupe. C'est ce qu'on appelle en sociologie « l'identité collective ». Lorsqu'une composante s'affaiblit, elle affaiblit les autres.
    Cela peut être le début d'un cercle vicieux qui mène à l'assimilation linguistique. Dans la documentation, on parle souvent de revitalisation langagière. Une combinaison d'actions positives qui engagent les trois catégories d'acteurs — souvent sous le leadership de la société civile et même sous celui du gouvernement — peut créer un cercle vertueux et une croissance de la vitalité.
    Le deuxième aspect que j'aborderai maintenant touche la francophonie canadienne hors Québec. Très rapidement, je dirai qu'on observe des tendances lourdes, entre autres une proportion décroissante de la population francophone et aussi un taux d'attraction linguistique du français qui est décroissant. Certains chercheurs parlent d'un effet gravitationnel de l'anglais sur toutes les autres langues dans le monde.
    Au Canada, les francophones vivent tout près de l'épicentre de cette force gravitationnelle. Le taux d'attraction linguistique — ce que Statistique Canada appelle le « taux de continuité linguistique » — est positif si plus de personnes parlent une langue le plus souvent à la maison qu'il n'y a de personnes ayant cette langue comme langue maternelle. Chez les francophones hors Québec, le taux est négatif, c'est-à-dire inférieur à 1. Le ratio était de de 0,61 en 2011, ce qui veut dire qu'à peine 60 % de tous ceux qui peuvent parler le français, comparativement à ceux qui l'ont comme langue maternelle, le font. Toutefois, chez les anglophones du Québec — et c'est ici un bel exemple de l'attraction de l'anglais —, en raison de la forte attraction de cette langue en Amérique du Nord et pas nécessairement au Québec, et malgré la force du français au Québec, le taux est positif et relativement élevé. Il est de 1,29. Donc, au Québec, il y a 30 % de plus de personnes qui utilisent l'anglais le plus souvent à la maison qu'il n'y a d'anglophones ayant l'anglais comme langue maternelle.
    De plus, il y a une troisième tendance qui est une faible contribution de l'immigration francophone et une nette préférence des allophones hors Québec pour l'anglais. À l'extérieur du Québec, les transferts linguistiques des allophones se font à 98 % vers l'anglais.
    Une autre tendance est celle d'un taux d'exogamie croissant. Au dernier recensement de 2011 — car on n'a pas encore les résultats de 2016 —, 67 % des enfants des parents titulaires du droit à l'éducation en français en vertu de l'alinéa 23 (1)a)— c'est la seule donnée que nous ayons — sont issus de parents exogames.
    De plus, il y a une faible transmission de la langue maternelle associée à l'exogamie. Si les deux parents sont francophones, la langue maternelle française transmise se situe à 91 %. Si le parent francophone vit en situation exogame, cela descend à 29 %. Je veux quand même apporter une précision importante à cet égard. Malgré ce résultat décevant dont je viens de parler — comme je l'avais dit plus tôt, les francophones sont un peu une exception à la règle —, on observe que la transmission du français comme langue maternelle chez les parents francophones exogames est en croissance depuis 1971. La situation a déjà été nettement pire. Par exemple, entre 1991 et 2011, la transmission du français par la mère en situation d'exogamie est passée de 23 % à 39 %, soit une croissance de 69 % en 20 ans. Chez le père qui est francophone, elle est passée de 10 % à 19 %. Il s'agit donc un taux de croissance de 90 %.
    L'école de langue française pourrait donc contribuer encore beaucoup à cette croissance, surtout si elle augmentait le recrutement — et je reviendrai sur le sujet tout à l'heure — et offrait des services dès la petite enfance.
    J'aborderai maintenant d'autres tendances.
    On observe un faible taux de fréquentation de l'école de langue française. Selon l'enquête postcensitaire, dont M. Corbeil a parlé plus tôt, les enfants des couples endogames fréquentent l'école française à 88 %, et ce taux de fréquentation descend à 34 % dans le cas des enfants de parents exogames. Cela donne un taux de fréquentation qui frise les 50 %, mais on ne sait pas si cela inclut la population totale des ayants droit. Il est donc difficile de s'assurer que le taux est vraiment de 50 %. Cependant, selon les statistiques présentées, il est de 55 % au niveau primaire, de 44 % au niveau secondaire et il diminue à 40 % au niveau postsecondaire.

  (1225)  

     Une de nos études a démontré que 64 % des élèves de 12e année inscrits à l'école de langue française prévoyaient faire des études postsecondaires en français. Il est important de se rappeler que parmi les 50 % des élèves qui vont à l'école de langue anglaise, 31 % d'entre eux sont inscrits à un programme d'immersion en français — on se demande s'ils connaissent bien la différence —, et que 41 % des parents de ces enfants auraient préféré l'école de langue française. Cela veut dire qu'on est encore loin de répondre aux besoins. En plus de cela, la population est vieillissante et il y a un exode des régions rurales et une forte urbanisation. Je m'arrête ici en ce qui concerne les grandes tendances. C'était simplement pour dresser un portrait rapide de la situation.
    Voici maintenant le troisième aspect. Le principal défi des communautés francophones hors Québec est le secteur de la petite enfance et le recrutement de sa clientèle scolaire. Cela avait été très bien compris par Stéphane Dion — que vous connaissez bien — dans le premier Plan d'action sur les langues officielles, en 2003. À mon avis, en tant que chercheur et personne qui travaille au sein de la francophonie, c'est le meilleur Plan d'action sur les langues officielles qui a été produit. Ce plan visait le recrutement de 80 % des enfants d'ayants droit.
    L'objectif du gouvernement actuel n'est pas clair. D'ailleurs, on ne sait pas s'il a un objectif. Il demeure cependant que, dans le premier Plan d'action des langues officielles en 2003, on visait un recrutement de 80 %. On était donc prêt à travailler à cet aspect. L'importance du défi de la petite enfance ressort également dans le rapport du commissaire aux langues officielles de 2016 intitulé: « La petite enfance: vecteur de vitalité des communautés francophones en situation minoritaire ». Il recommande même de pratiquer la sensibilisation auprès des ayants droit.
    L'exogamie reste un défi pour la transmission de la langue française, mais, sur le plan démographique — et les gens n'y pensent pas toujours —, elle renferme aussi un potentiel caché. Théoriquement, on peut doubler le nombre d'enfants d'ayants droit avec l'exogamie. Comparez simplement 100 % d'exogamie à 100 % d'endogamie. Si les deux groupes ont le même nombre d'enfants, il y aura deux fois plus d'enfants d'ayants droit. Il y a un aspect positif à cela sur le plan démographique, mais, en ce qui concerne la reconnaissance de la langue française, c'est aussi un défi.
    Un pourcentage important des parents francophones sont anglicisés avant de constituer un couple anglophone, comme la recherche de Jean-Pierre Corbeil l'a démontré. Cependant, on ne sait pas à quel point ces parents « ayants droit » peuvent vouloir reprendre contact avec la francophonie en inscrivant leurs enfants à l'école de langue française, surtout s'ils sont sensibilisés à leurs droits. Une étude que j'ai menée à l'Île-du-Prince-Édouard révélait qu'en ce qui concerne jusqu'à deux tiers des parents qui auraient pu aller à l'école française, c'était parce que leurs grands-parents étaient francophones. Ainsi, quand ils ont su que c'était un droit qui se transmettait de génération en génération, plusieurs d'entre eux ont choisi l'école française.
    Il y a aussi un besoin de sensibilisation auprès des ayants droit. J'appelle cela du « marketing social ». Aucun programme scolaire au Canada ne produit un meilleur bilinguisme chez les enfants que l'école de langue française. Je vais le répéter. Aucun programme scolaire...
    Monsieur Landry, je dois vous interrompre.
    Les interprètes vous demandent de ralentir un peu votre débit.
    Je vais perdre une partie du temps qui m'est alloué.
     Nous vous en donnerons davantage.
     D'accord. Merci.
    Aucun programme scolaire au Canada ne produit un meilleur bilinguisme chez les enfants que l'école de langue française. Or, ceci semble être un secret bien gardé. Au cours des années 1990 et au début des années 2000, nos recherches ont démontré que, selon bon nombre de parents ayants droit — soit jusqu'à 64 % en Nouvelle-Écosse —, le programme idéal pour favoriser le bilinguisme de leur enfant était constitué de 50 % de français et de 50 % d'anglais. Mathématiquement, il y a un équilibre. On pensait donc que cela devrait entraîner un meilleur bilinguisme. Or on appelle cela de la naïveté sociale. On oublie qu'une société s'occupe de l'anglais. En réalité, le meilleur programme est complètement en français, sauf pour les cours d'anglais. En Nouvelle-Écosse, par exemple, il est bien connu que les enfants fréquentant l'école française parlent mieux l'anglais que les anglophones.
    Un autre point que je trouve important de souligner est le fait que l'exogamie n'est pas le facteur causal du développement linguistique des enfants. Le facteur important est la dynamique linguistique langagière que choisissent les parents. Quand les parents sont bien informés, ils peuvent le faire
     Il n'y a que deux principes très simples à respecter pour obtenir ce qu'on appelle un bilinguisme additif. Le bilinguisme additif est un concept des années 1970 qu'on utilise encore. Il y a deux sortes de bilinguisme: le bilinguisme additif et le bilinguisme soustractif. Il s'agit de bilinguisme additif lorsqu'on apprend la langue seconde sans perdre la première et de bilinguisme soustractif quand la première langue est perdue. L'idée ici est donc de rechercher un bilinguisme additif.
     Les deux principes suivants sont simples, mais sont bien sûr un peu plus difficiles à respecter. Cela dit, c'est faisable, et beaucoup de parents le font. Dans le premier cas, chaque parent parle dans sa langue à l'enfant. Dans le deuxième, il s'agit d'accentuer autant que possible l'usage de la langue minoritaire dans la famille. Il peut s'agir, par exemple, de faire la lecture à son enfant en français, de l'envoyer dans une garderie francophone et, par la suite, dans une école de la minorité. Nos recherches se penchent notamment sur les cas où les parents respectent ce qu'on a appelé la francité familio-scolaire, soit l'usage optimal du français et de l'anglais dans la famille et à l'école.
    Lorsqu'un parent exogame parle souvent en français à son enfant et que celui-ci fréquente une école de langue française, les compétences de l'enfant en français et son identité francophone sont égales à celles des enfants dont les deux parents sont francophones. En outre, ils maintiennent une forte identité anglophone, ce qui est légitime, étant donné qu'ils ont un parent anglophone et ont des compétences en anglais similaires à celles des anglophones. Comme je l'ai dit plus tôt au sujet de la Nouvelle-Écosse, ils réussissent parfois mieux que les anglophones en anglais. C'est surprenant, mais des théories expliquent ce phénomène.
    Mon quatrième point est que le recensement actuel ne permet pas un dénombrement complet des ayants droit et de leurs enfants. Il sous-estime le nombre de parents dont le français est la langue maternelle. C'est lié au fait que les réponses multiples sont traitées davantage comme un problème que comme une réalité canadienne.
    J'ai lu les documents méthodologiques de Statistique Canada. Or j'ai constaté qu'on cherchait davantage à résoudre le casse-tête que constitue le fait de déterminer si des personnes peuvent bel et bien avoir deux langues maternelles. Dans le dernier recensement, par exemple, vous pourrez constater que la question relative à la langue maternelle suit la question sur la connaissance des langues officielles. Il y a ensuite la question sur l'usage des langues à la maison. Les réponses multiples ont un effet décourageant. Le fait d'y répondre vous-même pourrait vous permettre de le constater. Les choix de réponse sont au singulier. On parle notamment du français et de l'anglais, mais « autre langue » est au singulier.
    De plus, les deux autres questions peuvent donner lieu à des réponses multiples, mais ce n'est pas le cas pour la langue maternelle. Je pourrais en parler longuement, mais il reste que selon les statistiques, il y a davantage de réponses multiples si la question est isolée que si elle suit ces deux questions. Selon moi, la directive est faussée. Voici ce que dit Statistique Canada dans le cadre de cette question:
Si la personne a appris deux langues en même temps dans la petite enfance, indiquez la langue qu'elle parlait le plus souvent à la maison avant d'aller à l'école.
    Toute personne qui a étudié l'exogamie sait que la langue de la majorité est celle qui domine.

  (1230)  

     Toutefois, l'enfant peut quand même parler en français à un parent et en anglais à l'autre parent. Je pourrais vous nommer plusieurs enfants dans ma famille qui le font. Souvent, à la maison, c'est l'anglais qui domine, mais on choisit l'école française et on s'organise très bien. On perd des ayants droit simplement parce que le fait de parler la deuxième langue aussi souvent est un critère très restrictif, tel que formulé comme suit dans le recensement:
Indiquez deux langues ou plus si la personne les utilisait aussi souvent les unes que les autres [...]
    C'est une autre directive très restrictive. En tant que chercheur ayant étudié cette question, cela n'a aucun sens sur le plan sociolinguistique. Je ne l'avais jamais vraiment remarqué avant, mais je trouve que c'est restrictif.
     Ensuite, le recensement va un peu dans la même direction, en demandant ceci:
Dans le cas d'un enfant n'ayant pas encore appris à parler,  indiquez la langue utilisée le plus souvent à la maison pour communiquer avec l'enfant.
    Encore une fois, si la mère est anglophone et si c'est elle qui est à la maison, il est clair que l'enfant apprendra l'anglais, mais cela ne veut pas dire qu'il n'apprendra pas l'autre langue.
    Je n'aborderai pas les trois autres points, parce que vous en avez déjà discuté.
    Le recensement actuel ne dénombre pas les parents anglophones et allophones dont une partie significative de la scolarisation au primaire a été faite dans la langue de la minorité. Il ne dénombre pas non plus les parents anglophones et allophones dont au moins un des enfants a été scolarisé dans la langue de la minorité. Ce sont les deux autres critères de l'article 23. Vous savez comme moi que les deux critères de l'article 23 non mesurés dans le recensement de Statistique Canada sont les seuls qui s'appliquent au Québec.
    Je passe maintenant au cinquième point.
    Une enquête postcensitaire sur les minorités linguistiques de langue officielle est très utile — je ne veux pas du tout lui enlever son utilité —, mais elle ne peut pas remplacer le recensement pour dénombrer les ayants droit et leurs enfants.
    Comme M. Corbeil l'a dit lui-même, c'était un sondage. On a fait ce sondage à partir des 20 % de personnes qui avaient répondu au questionnaire détaillé. Ces 20 % représentent rarement bien les minorités linguistiques lorsque les nombres sont faibles. Pour utiliser un terme scientifique, je dirais que l'échantillon n'a pas été stratifié pour les langues officielles. Déjà, il y a toutes sortes de problèmes.
    J'ai été président du comité consultatif de Statistique Canada aux fins de l'enquête postcensitaire de 2006. Dans cette enquête, seules les provinces du Québec, de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick avaient des échantillons pour des régions. Cela reste de très grandes régions, comme M. Corbeil l'a dit lui-même. Pour les autres provinces, les résultats n'étaient fiables qu'au niveau provincial, et les trois territoires étaient amalgamés dans une seule unité. On ne pouvait même pas dire ce qu'il en était pour chaque territoire pris individuellement.
    Ce qui n'a pas été dit par M. Corbeil, c'est que les anglophones hors Québec et les francophones du Québec, qui sont des ayants droit en vertu de l'alinéa 23(1)b) ou du paragraphe 23(2) de la Charte, ainsi que les francophones non recensés dans les 20 % à partir desquels on a pris l'échantillon, ne peuvent pas être dénombrés par l'enquête postcensitaire parce qu'ils n'ont pas été sondés. Donc, seuls les francophones et les allophones de première langue officielle faisaient partie de ce sondage.
    Cela étant, un tel sondage ne peut pas dénombrer les ayants droit et ne permet pas d'estimer de façon fiable leur nombre dans une petite région comme une SDR, soit une société de développement régional, ou une zone scolaire.
    Je vais maintenant aborder le sixième point.
    Le dénombrement des ayants droit est d'une grande importance en raison du rôle capital que jouent les écoles dans la vitalité des minorités linguistiques. II permettrait une meilleure planification par les conseils scolaires et les gouvernements relativement à de nombreux aspects de l'enseignement dans les écoles de la minorité.
    Je vais en nommer un certain nombre: identification de la clientèle potentielle; campagnes de sensibilisation et de recrutement; calcul du taux d'inscription aux écoles de la minorité; nombre et pourcentage de la clientèle scolaire qui sont dans les programmes de langue anglaise et d'immersion en français; planification des besoins immobiliers en ce qui a trait aux établissements, aux installations physiques et aux rénovations; planification des besoins en ressources humaines, par exemple le nombre d'enseignants pour la formation pédagogique; interventions relatives aux droits des minorités pour l'obtention de nouvelles écoles, par exemple. Ce dernier point est important et a fait l'objet de nombreux procès liés aux droits linguistiques.

  (1235)  

     Pour ce qui est du dernier aspect, j'insisterai sur l'importance du financement de la recherche sur les ayants droit en raison de situations récentes que j'ai vécues. J'aimerais souligner que personne n'a analysé les données du recensement à ce sujet, en ce qui touche les francophones hors Québec, depuis le recensement de 2006. À l'époque, j'étais directeur de l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, l'ICRML, et nous avions analysé les recensements de 2001 et de 2006 à la demande de la Commission nationale des parents francophones. Celle-ci avait obtenu un soutien financier de Patrimoine canadien.
    Récemment, l'ICRML a proposé, en partenariat avec la Commission nationale des parents francophones et la Fédération nationale des conseils scolaires francophones, d'analyser les résultats des recensements de 2011 et de 2016 — ces derniers seront bientôt publiés —, mais Patrimoine canadien refuse de financer un tel projet. Le ministère affirme que sa politique est de ne pas financer la recherche. Selon moi, une telle politique pose problème parce que si Patrimoine canadien ne peut pas financer de telles analyses, qui le fera?
    Je vais m'arrêter ici.

  (1240)  

    Merci beaucoup, monsieur Landry.
    C'était un peu plus long que ce à quoi nous nous attendions. Nous devons conclure la réunion à 13 heures. Je vais donc limiter la durée des interventions à quatre minutes et nous aurons quatre intervenants.
    Nous allons commencer immédiatement par MM. Nater et Généreux, qui se partageront les quatre minutes.

[Traduction]

    Je serai très bref. Je n'ai qu'une question à vous poser.
    Vous avez parlé un peu plus tôt du rôle de l'État pour ce qui est de légitimer l'offre active dans l'une ou l'autre des langues. J'aimerais connaître votre point de vue, très brièvement, sur la minorité anglophone au Québec, la façon dont elle est touchée par certaines lois linguistiques au Québec et la façon dont l'État pourrait jouer un meilleur rôle au Québec, surtout en ce qui concerne la minorité anglophone.
    Notre Institut a publié un livre sur la vitalité de la langue anglaise au Québec, et j'ai mené la même enquête sur les anglophones dans les écoles anglaises au Québec que celle que nous avons réalisée dans les écoles francophones. C'est assez révélateur. Nous avons publié récemment un document qui montre que la dynamique sociolinguistique parmi les anglophones au Québec est exactement la même que celle parmi les francophones hors Québec, à la différence que la proportion de leur population, entre autres, a un effet sur leur véhicule engagé et leurs expériences de vie dans la langue. Les rapports avec l'identité, la vitalité subjective et tout le reste sont exactement les mêmes.
    Cela dit, il s'agit d'une minorité qui a un avantage en raison de la force de la langue anglaise non seulement au Québec, mais dans le monde entier. Tout le monde veut parler l'anglais.
    J'ai d'ailleurs rendu visite à mon fils au Japon, où il enseignait l'anglais à des enfants de deux ans.

[Français]

    Monsieur Généreux, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Landry, à la suite de votre présentation, je me suis rendu compte que j'ai une famille exogame positive. Mon épouse est anglophone. Je demeure à La Pocatière, qui se trouve probablement dans une des circonscriptions les plus francophones du Canada. Mes enfants sont bilingues et mes petits-enfants le seront également étant donné que nous parlons anglais à la maison. Nous avons beaucoup parlé anglais à la maison. Nous le parlons maintenant un peu moins. Nous voulions nous assurer que nos enfants soient bilingues, malgré le fait que nous vivions dans un milieu très francophone. J'en conclus donc que je suis un exogame positif. Est-ce bien cela?
    Je n'ai pas utilisé l'expression « exogame positif ». Il faudrait savoir ce que cela veut dire.
    En fait, j'ai une solution. Nous allons nous assurer que tout le monde au Canada marie quelqu'un ou se lie avec quelqu'un qui parle l'autre langue officielle.
    Non. Ce n'est pas du tout ce que j'essaie de dire. J'ai dit que c'est un grand défi, parce que la tendance est de préférer la langue de la majorité. Quand on met l'accent sur la langue minoritaire, ce qui est un peu l'exception, c'est à ce moment-là que le bilinguisme devient un ajout et devient un excellent bilinguisme. Malheureusement, ce ne sont pas encore tous les exogames qui le font. On parle de 29 % d'entre eux. Cependant, le chiffre est en croissance, ce qui va contre toutes les règles sociologiques qu'on connaît. Au Canada, le fait de sensibiliser, par exemple, les ayants droit, aux effets du bilinguisme de l'école de la minorité serait une excellente façon d'amplifier ce chiffre.
    Le Canada serait un exemple pour le reste du monde et prouverait que l'exogamie ne met pas une croix sur la transmission de deux langues. Quelqu'un de Statistique Canada m'a déjà dit que ce qui serait juste, dans une situation exogame, serait que 50 % des gens optent pour le français et 50 % pour l'anglais. Ce qui serait juste pour le capital humain du pays serait que 100 % de ces enfants parlent les deux langues maternelles. C'est très faisable. Les enfants peuvent très facilement apprendre deux langues à un jeune âge. J'en ai des exemples, comme vous en avez sans doute.

  (1245)  

     J'ai moi aussi de bons exemples à cet égard.
    Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Dan Vandal.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Landry, de cette présentation fort intéressante.
    Vous avez mentionné que la meilleure façon d'apprendre le français est dans une école de langue française dirigée par des francophones et destinée aux francophones.
    Oui, et aussi de bien apprendre l'anglais.
    Vous avez aussi mentionné que la proportion de 50-50, soit un programme d'éducation bilingue à 50 % en français et 50% en anglais n'est probablement pas une bonne idée.
    Je l'ai même démontré par des recherches.
     Pouvez-vous faire des commentaires au sujet de l'immersion française? Pouvez-vous commenter sur cet aspect?
    Oui.
    En fait, dans mes recherches au cours des années 1990, j'ai aussi étudié la situation des enfants dans les écoles d'immersion. J'ai même étudié un groupe qui était en immersion en Alberta. C'étaient des anglophones qui étaient en immersion totale. Ils avaient l'équivalent d'une école de langue française. De la maternelle à la 12e année, ils ont été scolarisés 80 % du temps en français. À ma connaissance, cette expérience n'a pas été reproduite. Ce groupe n'avait pas un français équivalent aux francophones hors Québec, mais c'était un programme pour des anglophones.
    Il ne faut pas oublier que l'école de la minorité offre une scolarisation pour les élèves ayant le français comme langue première avec un très bon apprentissage de la langue seconde. Par ailleurs, l'immersion est un programme de langue seconde. Le groupe d'anglophones de l'Alberta, en particulier, avait un excellent bilinguisme. Parmi les groupes d'enfants en immersion que j'ai testés, c'est celui-là qui avait le plus haut niveau de bilinguisme.
     L'immersion donne de très bons résultats. Comme M. Corbeil l'a mentionné, environ 15 % des ayants droit envoient leurs enfants en immersion. On ne sait pas si c'est parce que l'école française est inexistante ou si les parents francophones croient que l'immersion donne un meilleur résultat que l'école française. On parle du 50-50 et de tout cela. Tout cela devrait être analysé. Cela dit, l'immersion ne donne pas le bilinguisme que donne l'école de langue française. Je défie n'importe qui de démontrer le contraire. Ce sont les diplômés des écoles de langue française qui sont les personnes les plus bilingues au pays.
    Je voudrais vous poser une autre question.
    Certains témoins et certains députés affirment que la question du recensement portant sur les ayants droit sous-estime le nombre de ceux-ci au Canada. Auriez-vous un commentaire à faire à ce sujet?
    La première question sous-estime le nombre de réponses multiples, soit le fait de parler deux langues. C'est assez clair.
    Je pense que je n'ai pas mentionné cet aspect dans ma présentation. J'ai dû le sauter. J'ai toutes les statistiques avec moi à ce sujet. Quand Statistique Canada demande des réponses multiples, elle parle du Canada en général. Le chiffre est de 1,9 %, ce qui semble dire que c'est un problème insignifiant. Même quand la question n'encourage pas le fait d'indiquer qu'on parle deux langues, 10,6 % des francophones en situation d'exogamie disent en parler deux. Ce chiffre monte jusqu'à 19 % en Colombie-Britannique.
    Les réponses multiples existent et il y en aurait encore plus si la question invitait davantage à montrer, par exemple, que nous ne sommes pas obligés d'utiliser la deuxième langue aussi souvent que la langue majoritaire pour parler deux langues maternelles. Socio-linguistiquement parlant, cela ne se défend pas.
    Je vois que vous avez joué un rôle dans l'enquête de 2006. Est-ce exact?
    Oui, j'étais le président du comité consultatif.
    Selon le témoin qui a comparu avant vous, il semble que les résultats n'étaient pas tellement différents entre l'enquête et le recensement normal vis-à-vis des ayants droit. Est-ce exact?
     Il ne l'a pas dit ce matin, mais je l'ai déjà entendu dire qu'il parlait d'environ 80 %. Il ne faut pas oublier ce qu'il n'a pas dit, soit que cette enquête avait exclu du sondage tous les anglophones et tous les allophones qui n'avaient pas le français comme première langue officielle. Cela veut dire que tous les autres qui seraient devenus des ayants droit en vertu des deux autres critères n'ont pas été considérés.
     Oui, nous avons assez bien mesuré les deux autres critères dans l'enquête postcensitaire pour les francophones. Souvent, un francophone, en vertu de sa langue maternelle, est déjà un ayant droit. Ce n'est donc pas avec les francophones qu'on va chercher les autres. Ce sont avec les anglophones qui sont des francophiles ou avec ceux qui, par assimilation historique, sont devenus des anglophones et qui ensuite redécouvrent le français par l'entremise de leurs enfants. Tout cela n'est pas mesuré par l'enquête postcensitaire.
    Merci beaucoup.
    Je cède la parole à M. François Choquette.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Landry, de votre présence parmi nous et de vos bonnes explications, notamment au sujet des ayants droit et de l'importance de la scolarisation en français.
    J'ai cru comprendre qu'à l'époque du plan Dion, l'objectif était de recruter dans les écoles environ 80 % des enfants d'ayants droit. Je ne me souviens plus du pourcentage exact que vous avez mentionné.

  (1250)  

     L'objectif que se donnait le Plan d'action était de 80 %.
    Actuellement, vous ne savez pas si ce même type d'objectif est considéré. Toutefois, je suppose que vous pensez que le prochain plan d'action devrait viser le recrutement d'un bon pourcentage des ayants droit.
    J'en suis convaincu à 100 %.
    Le Plan d'action pour les langues officielles a par la suite été remplacé par la feuille de route, et j'ai lu toutes les feuilles de route. Il n'y a aucun objectif, sur aucun sujet, dans les feuilles de route. Ce qu'on y retrouve, ce sont les dépenses qu'on va effectuer ici et là.
    Ce qui m'avait impressionné dans le plan Dion, c'est qu'on avait procédé à une très bonne analyse démographique. Si ma mémoire est fidèle, on estimait à l'époque que 56 % des enfants des ayants droit fréquentaient l'école de la minorité. On s'était fixé comme objectif au cours des 20 années suivantes — ou quelque chose du genre — de recruter 80 % de ces ayants droit.
    On dirait qu'on a perdu l'envergure qui était donnée à ce plan d'action pour les langues officielles dans tous les autres plans qui ont suivi.
    De plus, si je comprends bien, vous avez mentionné quelque chose concernant les questions actuelles du recensement. Nous disons souvent qu'il faut ajouter des questions pour refléter les deux autres paragraphes de l'article 23 de la Charte. Cependant, si je comprends bien, même dans le cadre des études que vous avez effectuées, il est démontré que les questions actuelles ne permettraient pas d'avoir un portrait exact des gens touchés par le premier paragraphe de l'article 23.
    Je parlais plutôt du recensement.
    D'accord.
    Selon moi, le recensement tel quel sous-estime le nombre de réponses multiples aux questions qui existent pour les raisons que j'ai mentionnées. Les deux autres questions permettent des réponses multiples. Celle concernant la langue maternelle, qui vient tout de suite après, ne le permet pas. Cela transmet donc aux répondants le message qu'il faut faire un choix. Par la suite, quand on consulte la directive, il faut que soit indiquée la langue qui est la plus souvent parlée. Il me semble donc que cela décourage les réponses multiples. D'ailleurs, les données de Statistique Canada montrent qu'il y a de deux à trois fois plus de réponses multiples. Si vous vous rappelez, par le passé, soit jusqu'en 2011, le questionnaire court comprenait une seule question concernant la langue maternelle. Dans ce cas-là, il y avait plus de réponses multiples que lorsqu'on les juxtapose aux deux autres questions. Cela semble être un facteur décourageant.
    Alors, il ne faudrait pas seulement ajouter des questions, mais aussi modifier les questions existantes.
    Je crois qu'on peut les modifier. Je sais que Statistique Canada s'y opposera, car l'organisme ne pourra plus comparer les nouvelles données à celles du passé si on modifie trop une question. Cependant, il y a des façons d'y arriver.
    Rappelez-vous que, jusqu'en 2001, il n'y avait qu'une seule question sur la langue parlée à la maison et elle concernait celle qui était parlée le plus souvent. Il y a eu beaucoup de pressions pour faire reconnaître qu'on n'est pas assimilés parce qu'on ne parle pas le français le plus souvent. Par la suite, en 2001, Statistique Canada a ajouté une nouvelle question, à savoir s'il y a une autre langue qui est parlée régulièrement. Cela a permis de dénombrer à peu près 40 % plus de gens qui utilisent une langue. Je crois que si on faisait un peu la même chose en ce qui concerne la première question, on pourrait la conserver, sauf qu'on pourrait changer la directive. Ce serait la même question, mais on pourrait ensuite demander s'il y a une deuxième langue qui a été apprise en même temps que l'autre langue et une deuxième langue qui n'est pas parlée aussi souvent.
    Je pourrais donner d'autres indices tirés de l'analyse des données du recensement chez les enfants de 4 ans et moins. Chez les exogames, il y a à peu près 30 % plus de personnes qui utilisent le français régulièrement auprès des enfants de 4 ans et moins qu'il y en a qui ont le français comme langue maternelle. Chez les endogames, c'est exactement le même nombre ou à peu près. C'est un indice qui démontre que les répondants ne sont pas encouragés à fournir des informations. Si des enfants parlent régulièrement français à la maison, que leur nombre est encore plus élevé en ce qui concerne la connaissance de la langue, c'est-à-dire de pouvoir soutenir une conversation dans ladite langue et si cette langue parlée par des enfants de 4 ans et moins n'est pas leur langue maternelle, on se demande ce que c'est?
    Il y a beaucoup d'éléments de la sorte.
    Merci, monsieur Landry.
    Nous nous transportons maintenant en pensée au Nouveau-Brunswick avec M. René Arseneault.
    Monsieur Landry, pour employer une expression bien acadienne, je peux vous dire qu'aujourd'hui, nous étions « greyés » de témoins.
    Des voix: Oh, oh!
    M. René Arseneault:Je parle de M. Corbeil et vous.

  (1255)  

    Cela se dit aussi chez nous, le mot « gréyer ».
    Mes questions abordent deux thèmes.
    Je ne dispose que de quatre minutes et le président est sévère sur les limites de temps.
    Une question me brûle les lèvres et fait suite à celles de M. Choquette. Est-ce que vous avez une idée de la question ou des questions qui devraient figurer en 2021 dans le formulaire du recensement?
    Je suis d'accord avec Jean-Pierre Corbeil lorsqu'il parle de la complexité d'un recensement, mais je ne crois pas qu'on ait besoin des 10 questions qui étaient contenues dans l'enquête postcensitaire.
    Je ne le crois pas non plus.
     Je pense qu'on peut poser des questions synthèses. J'ai commencé à y penser un peu et je crois qu'on peut aller chercher l'essentiel en très peu de questions.
    Compte tenu de vos connaissances, de votre expérience et des discussions que vous avez eues avec des collègues qui ont participé comme vous à cette enquête, serait-il possible de nous envoyer des propositions de questions qui devraient figurer dans le recensement?
    Dans ma présentation, j'ai oublié de dire que je collabore avec d'autres personnes à la production de deux mémoires, qui fourniront des exemples de questions. Ces mémoires seront soumis à votre comité d'ici le 21 février.
    Pourrions-nous les avoir?
    Le rapport n'est pas complètement terminé.
    D'accord.
     Vous allez le recevoir. Les mémoires sont assez longs et il y a des exemples de questions. Il est sûr que nous ne voulons pas rédiger les questions à la place de Statistique Canada.
    Je préfère être proactif.
    Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux commencer la question ainsi: « Dans le cadre d'une sélection de la langue pour l'école [...]», au lieu d'aller chercher des indices pour dire que cela suffit et que cela justifie le nombre. La question pourrait aussi être formulée ainsi: « À quelle école préférez-vous envoyer votre enfant, à l'école française ou anglaise? » Si un parent répondait oui à cette question, on lui demanderait s'il respecte les trois critères. Cela fait deux questions.
    Un peu comme M. Corbeil, j'ai beaucoup de difficulté envisager cela, mais pour des raisons différentes. Comme je l'ai mentionné, beaucoup d'ayants droit sont très mal renseignés sur les effets que peut entraîner le fait d'étudier dans une école de langue française. Dans une province, jusqu'à 64 % des parents croyaient que, si leurs enfants étudiaient au secondaire en français, ils allaient perdre la connaissance de l'anglais et ne pourraient pas étudier à l'université. Cela est faux, mais c'est ce que les parents croient.
    Si vous demandez à ces parents s'ils veulent que leurs enfants aillent à une école francophone, ils diront peut-être qu'ils préfèrent qu'ils fréquentent une école anglophone pour s'assurer qu'ils pourront faire leurs études universitaires en anglais. Il y a toutes sortes de fausses croyances qui peuvent être véhiculées dans des questions d'intérêt.
    Quoi qu'il en soit, nous allons attendre avec intérêt la formulation de ces questions hypothétiques.
    J'ai lu qu'on avait pas répété la fameuse Enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, qui n'a été faite qu'une seule fois en 2006, parce qu'elle avait coûté 7,5 millions de dollars. Tantôt, vous avez suggéré qu'on accorde du financement pour obtenir des données sur les ayants droit et que cela pourrait être fait par l'entremise de Patrimoine canadien.
    Pouvez-vous développer votre pensée à cet égard?
    Ce n'est pas un coût exorbitant. Je parle plutôt d'analyser les résultats. C'est une chose de recueillir des données, mais si personne ne les analyse pour les transmettre ensuite aux personnes qui travaillent dans le domaine, ce sera fait en pure perte.
    J'ai été directeur de l'Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques. On a fait deux enquêtes, soit en 2001 et en 2006, avec un montant d'environ 25 000 $.
    C'était pour analyser les données, mais encore faut-il les obtenir.
    On les obtient avec le recensement. Pour notre part, nous analysons les résultats du recensement. Ce n'est pas nous qui recueillons les données.
    Je pense que le temps dont je disposais est écoulé.
    En effet, monsieur Arseneault, le temps dont vous disposiez est écoulé.
    Cela met fin à la réunion d'aujourd'hui.
    Monsieur Landry, je vous remercie beaucoup de vous être déplacé et d'avoir apporté votre contribution aux travaux du Comité. Je suis sûr que nous pourrons en reparler à un autre moment.
    La séance est levée.
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