Le privilège parlementaire / Droits de la Chambre

Outrage à la Chambre : gouvernement qui aurait délibérément induit la Chambre en erreur

Débats, p. 24039–24040.

Contexte

Le 30 octobre 2018, Lisa Raitt (Milton) soulève une question de privilège concernant la réponse du gouvernement à la question écrite Q-1316, déposée à la Chambre le 29 janvier 2018. Elle soutient que la ministre de l’Environnement et du Changement climatique a sciemment fourni une réponse qui omettait le titre des personnes ayant approuvé un gazouillis publié le 7 novembre 2017, information que la CBC a obtenue par une demande d’accès à l’information. Elle fait valoir que la réponse évasive l’a empêchée de s’acquitter de ses fonctions parlementaires et qu’elle constitue un outrage à la Chambre. Le Président prend la question en délibéré[1].

Le 5 novembre 2018, Kevin Lamoureux (secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre des communes) avance qu’il ne revient pas au Président de juger de la qualité des réponses aux questions écrites. Il fait aussi valoir que l’information demandée par Mme Raitt et la demande d’accès à l’information portent peut-être tous deux sur le même sujet, mais de par leur nature différente, qu’elles avaient mené à des réponses distinctes. Le Président prend la question en délibéré[2].

Résolution

Le 27 novembre 2018, le Président rend sa décision. Il affirme que l’accès des députés à de l’information exacte en temps opportun est essentiel au bon fonctionnement de la Chambre. Il affirme aussi que son rôle est limité, puisque le Président ne se prononce pas sur la teneur ou la qualité des réponses du gouvernement aux questions écrites. Le Président estime qu’il n’y a pas matière à question de privilège.

Décision de la présidence

Le Président : Je suis maintenant prêt à me prononcer sur la question de privilège soulevée le 30 octobre 2018 par la députée de Milton au sujet de la réponse du gouvernement à la question écrite Q-1316 déposée à la Chambre le 29 janvier 2018.

Je remercie la députée de Milton d’avoir soulevé cette question, de même que le secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre de sa réponse.

Lors de son intervention, la députée de Milton a expliqué qu’elle avait déposé une question écrite dans laquelle elle demandait à la ministre de l’Environnement et du Changement climatique de fournir les titres des personnes qui avaient approuvé un « tweet » particulier publié le 7 novembre 2017. Elle a indiqué que dans sa réponse, le gouvernement n’a pas répondu à sa question en omettant de lui fournir l’information demandée. Elle a soutenu que l’information qu’elle souhaitait obtenir avait été donnée à la CBC par le gouvernement en réponse à une demande d’accès à l’information. Selon elle, il s’agit d’une tentative délibérée du gouvernement de la priver de l’information demandée et d’en priver aussi la Chambre, ce qui constitue donc un outrage à la Chambre.

En réponse, le secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre a fait observer qu’il n’appartient pas à la présidence de juger de la qualité des réponses aux questions inscrites au Feuilleton et que la réponse a été dûment déposée conformément au Règlement de la Chambre des communes. Il était également d’avis que différentes questions ont été posées au moyen de deux processus différents, soit les questions écrites et les demandes d’accès à l’information, et qu’il est donc normal que des réponses différentes aient été fournies.

Le droit des députés d’obtenir des renseignements précis en temps opportun de la part du gouvernement, peu importe le moyen utilisé pour le faire, est un principe essentiel de notre régime parlementaire.

Mon prédécesseur l’a bien souligné le 26 mai 2015, lorsqu’il a déclaré à la page 14137 des Débats de la Chambre des communes :

Les députés estiment qu’il est très important que les réponses à leurs questions écrites leur permettent d’obtenir des renseignements complets et exacts; cette pratique permet notamment aux députés de s’acquitter des obligations qui leur incombent en qualité de parlementaires.

Malgré cela, il n’en demeure pas moins que le pouvoir du Président en la matière est limité conformément aux pratiques actuelles. Voici ce que mentionne la troisième édition de La procédure et les usages de la Chambre des communes à la page 529 :

Aucune disposition du Règlement ne permet au Président de contrôler les réponses que le gouvernement donne aux questions.

Dans une décision datant du 8 février 2005 qui se trouve à la page 3234 des Débats, le Président Milliken réitérait ce principe :

Toute contestation de l’exactitude ou du caractère approprié de cette réponse est un sujet de débat. Ce n’est pas là une question que le Président a le pouvoir de trancher.

Bien que je ne puisse conclure qu’il y a, à première vue, matière à question de privilège, tous les députés doivent facilement avoir accès à des informations précises, pertinentes et complètes. Parallèlement à cette obligation, le gouvernement est tenu de collaborer en vue de fournir de l’information aux députés pour les appuyer dans l’exercice de leurs fonctions parlementaires.

Je remercie les députés de leur attention.

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[1] Débats, 30 octobre 2018, p. 23033–23034.

[2] Débats, 5 novembre 2018, p. 23275.