Les responsabilités et la conduite des députés

Les députés siègent à la Chambre des communes en qualité de représentants de ceux qui les ont élus. Ils assument de vastes responsabilités dont ils s’acquittent à la Chambre des communes, dans les comités et dans leur circonscription. Il est dit que :

C’est à la Chambre des communes que le député représente sa circonscription. Toutefois, cela ne signifie pas qu’il passe le plus clair de son temps à la Chambre ni même que le temps qu’il y passe est l’aspect le plus important de son travail. En effet, l’emploi du temps d’un député l’amène à travailler plus souvent qu’autrement à l’extérieur de la Chambre. […] Le député doit se mettre au service des gens, être ouvert aux idées, aux propositions et aux plaintes et savoir en parler, maîtriser l’art de la conciliation, expliquer la politique du parti ou du gouvernement aux citoyens et transmettre leurs commentaires au parti et au gouvernement, obtenir du gouvernement qu’il apporte des solutions aux problèmes des électeurs et scruter la façon dont le gouvernement use ou abuse du pouvoir qu’il exerce au nom des Canadiens281.

En plus de participer aux délibérations de la Chambre et des comités, de se faire le porte-parole des électeurs auprès du gouvernement et de défendre leurs intérêts, les députés assument aussi de nombreuses autres responsabilités :

  • Ils agissent comme ombudsmans en fournissant de l’information à leurs électeurs et en les aidant à régler des problèmes ;
  • Ils font office de législateurs en proposant leurs propres projets de loi ou en proposant des amendements aux projets de loi émanant du gouvernement ou d’autres députés ;
  • Ils acquièrent des connaissances spécialisées dans un ou plusieurs dossiers dont est saisi le Parlement et formulent des recommandations à l’intention du gouvernement ;
  • Ils représentent le Parlement du Canada au pays et à l’étranger en participant à des conférences internationales et à des missions officielles.

Une fois élus et assermentés, les députés sont tenus d’observer certaines règles de conduite dans l’exercice de leurs fonctions parlementaires. Il existe dans le Règlement de la Chambre des communes, le Code régissant les conflits d’intérêts des députés, le Code de conduite pour les députés : harcèlement sexuel282, la Loi sur le Parlement du Canada283 et le Code criminel284 des dispositions régissant la conduite des députés et les conflits d’intérêts. La Loi sur les conflits d’intérêts285 régit également la conduite des titulaires de charge publique, dont les membres du conseil des ministres et les secrétaires parlementaires. Certaines de ces dispositions sont examinées ci-après.

Assiduité

Assister aux séances de la Chambre lorsqu’elle siège est l’une des principales responsabilités du député sauf s’il est occupé à d’autres activités et fonctions parlementaires dont les réunions des comités, le travail lié à la circonscription ou les échanges parlementaires. L’article 15 du Règlement énonce ainsi cette responsabilité : « Vu les dispositions de la Loi sur le Parlement du Canada, tout député est tenu d’assister aux séances de la Chambre sauf s’il est occupé à d’autres activités et fonctions parlementaires ou à un engagement public ou officiel286 ». Le Président a toujours rappelé aux députés qu’ils ne devaient pas signaler l’absence d’un autre député car « les députés doivent être à bien des endroits, afin de bien remplir les devoirs de leur charge »287.

La Loi sur le Parlement du Canada prévoit qu’une somme soit déduite de l’indemnité de session d’un parlementaire en cas d’absence288. Chaque député doit, à la fin de chaque mois et à la fin de chaque session, remettre au Greffier de la Chambre un état signé indiquant le nombre de jours de présence au cours du mois ou de la session289. Aux fins de cet état, sont comptés comme jours de présence chaque jour où le parlementaire était absent pour cause de maladie ou d’ajournement, parce qu’il était en service comme militaire ou en raison d’un « engagement public ou officiel »290. Comme il n’existe aucun mécanisme officiel pour vérifier l’assiduité des députés, l’indemnité de session est calculée en fonction de l’état des présences, et une somme est déduite pour chaque absence au-delà de 21 jours de séance291.

La Loi sur le Parlement du Canada autorise la Chambre à prendre des règlements pour renforcer les exigences relatives à la présence des députés ou aux déductions à effectuer sur l’indemnité de session292, mais la présence des députés à la Chambre est largement motivée par des raisons d’ordre politique plutôt que par la loi ou une quelconque règle de procédure. Par conséquent, il appartient aux whips de veiller à ce qu’il y ait un nombre suffisant de députés à la Chambre pour assurer le bon déroulement des débats et des votes. Ainsi, les whips des partis contrôlent la présence des députés à la Chambre, aux réunions des comités et à d’autres fonctions parlementaires grâce à un tableau de service et à divers autres mécanismes.

Prévention du harcèlement et traitement des plaintes

On s’attend à ce que la Chambre des communes offre un milieu de travail sécuritaire et exempt de harcèlement. À ce titre, un code concernant le harcèlement sexuel, comprenant un processus officiel de règlement des plaintes, a été mis en place afin de prévenir et traiter les cas de harcèlement sexuel.

Le Code de conduite pour les députés : harcèlement sexuel est entré en vigueur au début de la 42e législature et s’applique uniquement aux allégations de harcèlement sexuel de nature non criminelle entre députés293.

Conformément à l’article 1, le Code a pour objet :

a) de créer un milieu qui permet aux députés d’exceller dans l’exercice de leurs fonctions officielles et qui est exempt de harcèlement sexuel ;

b) d’encourager les députés à signaler les cas de harcèlement sexuel ;

c) d’établir un processus de résolution axé sur le plaignant auquel celui-ci peut mettre fin en tout temps ;

d) de préserver la confidentialité tout au long du processus de résolution, sauf disposition contraire du Code lui-même ;

e) de mettre en œuvre les recommandations contenues dans le 38e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, deuxième session, 41e législature294.

Le Code de conduite pour les députés : harcèlement sexuel est annexé au Règlement de la Chambre des communes. Conformément à l’article 108(3)a) du Règlement, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a le mandat d’examiner toute question relative à ce sujet295.

Les députés doivent s’engager à créer un milieu de travail sans harcèlement sexuel en signant un document, à la suite de leur élection, qu’ils remettent au dirigeant principal des ressources humaines de la Chambre des communes296.

Processus de résolution, médiation et enquête

Le Code prévoit un processus de résolution confidentiel dans l’éventualité où, malgré l’engagement signé, des allégations de harcèlement sexuel entre députés seraient soulevées. Ainsi, le Code dispose qu’un député peut soulever des allégations de harcèlement sexuel auprès de son whip si le défendeur appartient au même caucus, ou encore auprès du dirigeant principal des ressources humaines si la situation concerne un député indépendant ou des députés appartenant à des caucus différents. Le whip ou le dirigeant principal des ressources humaines, selon le cas, informe le défendeur, facilite les discussions entre les parties et leur offre la médiation.

Si le plaignant et le défendeur n’acceptent pas la médiation offerte, ou si l’affaire n’est pas résolue à la satisfaction du plaignant, celui-ci peut déposer une plainte officielle écrite auprès du dirigeant principal des ressources humaines. Ce dernier retient alors les services d’un enquêteur externe chargé de faire la lumière sur les faits ayant donné lieu aux allégations soulevées.

L’enquêteur doit présenter au dirigeant principal des ressources humaines un rapport qui comporte l’une des conclusions suivantes :

a) la preuve étaye les allégations voulant que le défendeur se soit livré à des actes qui constituent du harcèlement sexuel ;

b) la preuve n’étaye pas les allégations de harcèlement sexuel ;

c) la preuve n’étaye pas les allégations de harcèlement sexuel et la plainte était frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi.

Le dirigeant principal des ressources humaines remet un exemplaire du rapport de l’enquêteur au plaignant et au défendeur. Lorsqu’un rapport final d’enquête conclut que les allégations de harcèlement sexuel sont fondées, le plaignant peut, dans les 15 jours suivant la réception du rapport, aviser le dirigeant principal des ressources humaines par écrit qu’il croit que l’affaire justifie la prise de mesures supplémentaires. Dans le cas où le rapport final d’enquête conclut que la plainte était frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi, le défendeur peut, dans les 15 jours suivant la réception du rapport, aviser le dirigeant principal des ressources humaines par écrit qu’il croit que l’affaire justifie la prise de mesures supplémentaires. Sur réception de l’un ou l’autre de ces avis, le dirigeant principal des ressources humaines en informe par écrit, dans le premier cas, le whip du défendeur ou, dans le deuxième cas, le whip du plaignant et lui remet le rapport final d’enquête. Le whip en question doit, dans les 15 jours suivant le rapport, proposer une mesure disciplinaire au dirigeant principal des ressources humaines qui en avise le député concerné. Advenant que la mesure disciplinaire proposée par le whip ne convienne pas au plaignant ou au défendeur, dans le cas d’une plainte fondée pour le premier ou d’une plainte jugée frivole ou vexatoire ou entachée de mauvaise foi pour le second, ces derniers peuvent proposer une autre mesure disciplinaire au dirigeant principal des ressources humaines qui, en retour, avise le whip de l’autre député concerné. À l’inverse, quand la mesure disciplinaire proposée fait consensus, l’affaire est tenue pour résolue297.

Renvoi au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre

Le Code prévoit un mécanisme supplémentaire lorsque la mesure disciplinaire proposée ne convient pas au plaignant ou au défendeur. L’affaire peut alors être soumise au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Pour ce faire, l’un ou l’autre des députés en cause, ou leur whip avec le consentement de son député, soumet par écrit l’affaire en joignant à sa demande une copie du rapport final d’enquête. Dans les cinq jours qui suivent la réception de la demande, le président du Comité prévoit la tenue d’une réunion à huis clos dans les 60 jours qui suivent, pourvu qu’un préavis de 48 heures soit donné pour la tenue d’une telle réunion. Le Comité doit d’abord déterminer si la totalité ou une partie du rapport final d’enquête, ou encore un résumé de celui-ci, peut être utilisé pendant son étude. Le plaignant et le défendeur peuvent comparaître devant le Comité relativement au rapport d’enquête. Puis, le Comité motive ses conclusions et recommandations dans un rapport, lequel ne doit contenir qu’un résumé du rapport final d’enquête, protégeant ainsi l’anonymat des participants et respectant la vie privée du plaignant et des témoins. Le rapport du Comité peut recommander l’application de sanctions appropriées que la Chambre est en droit d’imposer et peut nommer le député faisant l’objet des sanctions. Une fois l’étude terminée, le président du Comité présente le rapport à la Chambre, conformément à l’article 35(1) du Règlement298.

Déclaration du député

Dans les 10 jours de séance qui suivent la présentation d’un rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, le député qui fait l’objet du rapport peut faire une déclaration à la Chambre. Sa déclaration, d’un maximum de 20 minutes, doit respecter la confidentialité du processus de résolution ainsi que la vie privée des députés visés et des témoins299.

Étude du rapport

Après une déclaration du député faisant l’objet du rapport, ou après que 10 jours de séance se sont écoulés depuis la présentation d’un rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre en vertu du Code, une motion portant adoption du rapport du Comité peut être proposée sous la rubrique « Motions », pendant les Affaires courantes. La motion doit avoir été mise en avis, conformément à l’article 54(1) du Règlement.

La motion proposée peut être prise en considération durant au plus trois heures. Si le débat est ajourné ou interrompu, le Président, après consultation des leaders des partis reconnus, désigne une journée afin d’étudier la motion à nouveau, au plus tard le 10e jour de séance suivant l’ajournement ou l’interruption. À la conclusion du débat, le Président met aux voix toute question nécessaire pour disposer de la motion.

Lorsqu’aucune motion portant adoption du rapport n’a été proposée et n’a fait l’objet d’une décision dans les 30 jours de séance qui suivent la présentation du rapport à la Chambre, une motion portant adoption du rapport est réputée proposée à la fin de cette période. À la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement le 30e jour, le Président met immédiatement aux voix toute question nécessaire pour disposer de la motion.

À tout moment avant l’adoption du rapport, la Chambre peut le renvoyer au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour qu’il l’examine à nouveau.

Si le plaignant ou le défendeur cesse ses fonctions parlementaires après la présentation à la Chambre du rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, la motion portant adoption du rapport est réputée retirée et rayée du Feuilleton, le cas échéant300.

Effet d’une prorogation ou dissolution

À la suite d’une prorogation ou de la dissolution d’une législature, si le plaignant et le défendeur demeurent députés, l’un de ces derniers, ou son whip avec le consentement du député, peut resoumettre l’affaire par écrit au président du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Une fois saisi de l’affaire, le Comité peut présenter à nouveau son rapport à la Chambre301.

Prévention et traitement des conflits d’intérêts

Dès leur élection, les députés de la Chambre des communes deviennent les dépositaires de la confiance publique. Ils doivent faire passer l’intérêt public avant leur intérêt personnel et ne tirer de leurs fonctions aucun avantage ou gain personnel. Il existe diverses dispositions législatives et directives couvrant les conflits d’intérêts. La Loi sur le Parlement du Canada comporte plusieurs dispositions relatives à la rémunération pour services rendus et aux fiducies établies par les députés à leur élection302. De plus, tous les parlementaires et titulaires de charge publique sont assujettis aux dispositions générales du Code criminel sur la corruption, le trafic d’influence et l’abus de confiance303. Annexé au Règlement de la Chambre des communes, le Code régissant les conflits d’intérêts des députés fournit également des règles claires pour aider les députés à s’acquitter de leurs fonctions en évitant tout conflit d’intérêts. De même, la Loi sur les conflits d’intérêts prescrit diverses règles s’appliquant spécifiquement aux titulaires de charge publique, dont les ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires304. Les pages qui suivent porteront sur le Code régissant les conflits d’intérêts des députés ainsi que sur la Loi sur les conflits d’intérêts, qui sont les deux principaux régimes permettant de prévenir et de gérer les conflits entre les intérêts personnels et les fonctions publiques des représentants élus et nommés.

Historique

Depuis le début des années 1970, on a tenté à maintes reprises de définir ce qui constitue un conflit d’intérêts et d’édicter des règles contre le trafic d’influence, les transactions d’initié et la recherche d’avantages personnels. Le gouvernement fédéral a publié, en 1973, un livre vert intitulé « Les membres du Parlement et les conflits d’intérêts »305, lequel a été renvoyé au Comité permanent des privilèges et élections au cours de la législature suivante. Le rapport qu’en a fait le Comité à la Chambre comportait de nombreuses recommandations306. En 1978, le gouvernement a déposé un projet de loi qui aurait élargi en conséquence la portée du livre vert et intégré certaines des recommandations du Comité307. Le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent des privilèges et élections après l’étape de la deuxième lecture308, mais la dissolution de la législature est intervenue avant que le Comité n’ait fait rapport à la Chambre.

En 1983, le gouvernement a créé le Groupe de travail sur les conflits d’intérêts et l’a chargé d’élaborer un code relatif aux conflits d’intérêts afin de rehausser la confiance du public et de préserver l’intégrité du processus politique. En mai 1984, le Groupe de travail dressait la liste de neuf activités susceptibles de créer un conflit d’intérêts et recommandait l’adoption d’un code de déontologie assorti de sanctions en proportion avec la gravité du conflit309.

En 1985, le Comité permanent de la gestion et des services aux députés a reçu le mandat d’examiner les questions relatives à l’établissement d’un registre des intérêts des députés310. Le Comité a conclu que rien ne justifiait la création d’un tel registre, car les lois concernant les conflits d’intérêts déjà en vigueur étaient suffisantes311.

C’est à la fin de 1987 que paraissait le rapport de la commission d’enquête Parker sur les conflits d’intérêts, chargée d’examiner les allégations de conflit d’intérêts mettant en cause Sinclair Stevens, ancien ministre de l’Expansion industrielle régionale. M. le juge Parker a formulé plusieurs recommandations, notamment l’ajout dans le code de déontologie de l’obligation pour un ministre de déclarer publiquement ses avoirs, ses intérêts et ses activités. En 1988, le gouvernement a déposé un projet de loi, lequel a été renvoyé à un comité législatif après la deuxième lecture312, mais la dissolution de la législature est intervenue avant que le comité ne puisse déposer son rapport.

Un autre projet de loi sur les conflits d’intérêts a été présenté au cours de la deuxième session (1989-1991) de la 34e législature313, mais il n’a jamais été adopté. Deux autres projets de loi similaires ont été déposés au cours de la troisième session (1991-1993) : le projet de loi C-43, Loi visant à empêcher toute incompatibilité entre les intérêts privés des parlementaires et les devoirs de leur charge, constituant la Commission des conflits d’intérêts et apportant des modifications corrélatives à certaines lois314, et le projet de loi C-116, Loi visant à empêcher toute incompatibilité entre les intérêts privés des titulaires de charge publique et les devoirs de leur charge, constituant la Commission des conflits d’intérêts et apportant des modifications à la Loi sur le Parlement du Canada et des modifications corrélatives à certaines autres lois315. Le projet de loi C-43, déposé en novembre 1991, a passé outre l’étape de la deuxième lecture et a été renvoyé à un comité mixte spécial, lequel a présenté son rapport en juin 1992316. Le projet de loi C-116 a franchi l’étape de la deuxième lecture et il a été renvoyé à un Comité mixte spécial le 30 mars 1993317. Le 3 juin 1993, le Comité mixte spécial recommandait à la Chambre qu’elle abandonne l’étude du projet de loi318. La 34e législature a été dissoute peu de temps après.

Tous les projets de loi exigeaient des sénateurs, des députés, de leurs conjoints et de leurs enfants à charge qu’ils fassent une déclaration annuelle de leurs intérêts privés à une commission indépendante de trois personnes. Les projets de loi comportaient aussi des règles interdisant le recours abusif à l’influence à des fins personnelles ; des règles relatives à l’acceptation de cadeaux et à la conduite pendant l’après-mandat ; ainsi que des règles spéciales concernant les activités professionnelles des ministres en marge de leur mandat. C’est à la Chambre des communes ou au Sénat que revenait la responsabilité d’imposer des sanctions pouvant aller de l’amende à la destitution.

Au cours de la première session de la 35e législature, un comité mixte spécial a été chargé d’élaborer un code d’éthique destiné à aider les sénateurs et les députés à concilier leurs responsabilités officielles et leurs intérêts personnels, y compris leurs relations avec les lobbyistes319. Le Comité, reconstitué au cours de la deuxième session, a présenté à la Chambre, le 20 mars 1997, un rapport dans lequel il recommandait que le Sénat et la Chambre des communes adoptent un « Code de déontologie parlementaire »320. Le rapport, appelé rapport Milliken-Oliver, d’après ses coprésidents, Peter Milliken (Kingston et les Îles) et le sénateur Donald Oliver, n’a pu être adopté avant la dissolution de la 35e législature, survenue un mois plus tard.

Ce n’est qu’en 2002, au cours de la 37e législature, que l’élaboration d’un code de déontologie a refait surface. Le premier ministre Jean Chrétien annonce alors un plan d’action en huit points sur l’éthique gouvernementale, exhortant notamment les sénateurs et les députés à appuyer la création d’un code indépendant inspiré du rapport Milliken-Oliver de 1997321. Plus tard au cours de l’année, on a déposé dans les deux chambres une ébauche de mesure législative sur l’éthique parlementaire322. La mesure proposait un code de conduite destiné aux parlementaires et comprenait un avant-projet de loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada en vue de créer le poste de commissaire à l’éthique. La mesure et l’avant-projet de loi ont été examinés par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, lequel a conclu qu’il serait bon d’adopter un code sur les conflits d’intérêts qui serait administré par un commissaire à l’éthique. Le Comité a toutefois proposé des modifications à l’avant-projet de loi relativement à la nomination et au mandat du commissaire à l’éthique323.

En avril 2003, le gouvernement a présenté une mesure législative pour modifier la Loi sur le Parlement du Canada en vue de créer deux entités parlementaires distinctes, le Bureau du conseiller sénatorial en éthique et le Bureau du commissaire à l’éthique, ainsi que deux postes de hauts fonctionnaires du Parlement pour les administrer324. Il incomberait aux chambres elles-mêmes de déterminer les devoirs et les fonctions de ces hauts fonctionnaires du Parlement, lesquels jouiraient tous deux des privilèges et des immunités accordés au Parlement et aux parlementaires dans l’exercice de leurs fonctions. La mesure législative a reçu la sanction royale au printemps 2004325. La nomination du premier commissaire à l’éthique a pris effet le 17 mai 2004.

Pendant ce temps, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre continuait d’examiner l’ébauche du code de conduite des députés et présentait quatre rapports à ce sujet en 2003 et en 2004326. Le Code régissant les conflits d’intérêts des députés a été adopté par la Chambre le 29 avril 2004327 et est entré en vigueur en octobre 2004. La responsabilité du nouveau Code est assumée par le commissaire à l’éthique.

Finalement, la Loi fédérale sur la responsabilité, adoptée en 2006, édictait la Loi sur les conflits d’intérêts et menait à la création, en 2007, du Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Code régissant les conflits d’intérêts des députés

Le Code régissant les conflits d’intérêts des députés a pour but d’aider les députés à s’acquitter de leurs fonctions de façon éthique. Le Code s’applique à tous les députés, ainsi qu’aux ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires lorsqu’ils agissent à titre de députés de la Chambre et non comme titulaires de charge publique328. Le Code définit ce que sont les intérêts personnels, établit des règles de déontologie et prescrit les exigences de divulgation visant les députés et leur famille relativement à leurs intérêts. Il détermine aussi la procédure d’enquête.

L’élaboration du Code incarne le droit de la Chambre de réglementer ses affaires internes et de prendre des mesures disciplinaires à l’égard des députés qui se conduisent de façon inconvenante. Le Code fait partie du Règlement de la Chambre des communes329 et relève de la responsabilité générale du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre330.

Lorsqu’il s’acquitte de ses fonctions sous le Code, le Commissaire possède les privilèges et immunités de la Chambre et de ses députés331.

Le Code régissant les conflits d’intérêts des députés vise quatre objectifs :

a) préserver et accroître la confiance du public dans l’intégrité des députés ainsi que le respect et la confiance de la société envers la Chambre des communes en tant qu’institution ;

b) montrer au public que les députés doivent respecter des normes qui font passer l’intérêt public avant leurs intérêts personnels et établir un mécanisme transparent permettant au public de juger qu’il en est ainsi ;

c) fournir des règles claires aux députés sur la façon de concilier leurs intérêts personnels et leurs fonctions officielles ;

d) favoriser l’émergence d’un consensus parmi les députés par l’adoption de normes communes et la mise en place d’un organe indépendant et impartial chargé de répondre aux questions d’ordre déontologique332.

Les dispositions du Code s’appliquent à tous les députés lorsqu’ils exercent leurs fonctions parlementaires333. Les députés ne doivent pas agir de façon à favoriser leurs intérêts personnels ou ceux d’une autre personne ou entité ni influencer quiconque à cette fin de façon indue334.

Dans les 60 jours qui suivent l’annonce de leur élection dans la Gazette du Canada ainsi que la date fixée par le commissaire pour l’examen annuel335, les députés doivent déposer auprès du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique une déclaration confidentielle faisant état de leurs intérêts personnels, tels que leurs actifs, leurs passifs et toute activité extérieure, de même que ceux de leur famille336. Le commissaire prépare alors un sommaire de chaque déclaration. Chaque député dispose de 60 jours pour examiner le sommaire et le remettre au commissaire après quoi, il sera rendu accessible au public pour consultation sur le site Web du Commissariat ou sur demande337.

Si un député a des intérêts personnels dans une question examinée par la Chambre ou un comité dont il est membre, le député doit, s’il participe à l’étude de la question, divulguer dans les plus brefs délais la nature générale de ses intérêts personnels au Greffier de la Chambre, verbalement ou par écrit. Sa divulgation est consignée dans les Journaux et acheminée au commissaire, qui la classe avec les documents du député relatifs à la divulgation publique338.

Les députés ne peuvent participer à un débat ou voter sur une question dans laquelle ils ont un intérêt personnel339. Cependant, les questions d’application générale ou qui concernent les députés en tant que membres d’une vaste catégorie de personnes ne sont pas considérées comme des intérêts personnels. Même le fait de voter en faveur d’une augmentation de la rémunération des députés ne constitue pas un intérêt personnel, car cela concerne l’ensemble des députés340. Enfin, si un député est partie à une action en justice relative à des actes posés dans l’exercice de ses fonctions, il peut continuer à participer au débat ou à voter sur la question341. Si un député vote sur une affaire dans laquelle il a un intérêt personnel, son vote pourrait être contesté et rejeté342.

Par ailleurs, le Code interdit aux députés et à leur famille d’accepter, directement ou indirectement, des cadeaux ou des avantages s’il est raisonnable de penser qu’ils ont été donnés pour influencer le député dans l’exercice de sa charge de député. Une exception existe pour des marques de courtoisie, de protocole ou d’accueil habituellement reçues dans le cadre des fonctions du député, ou s’il s’agit d’une rétribution autorisée par la loi343.

Les députés sont parfois appelés à voyager à l’extérieur du Canada en leur qualité de parlementaire. Si les frais de déplacement dépassent 200 $ et ne sont pas entièrement pris en charge par le Trésor, par les députés eux-mêmes, par leur parti ou par une association parlementaire reconnue par la Chambre, les députés sont tenus de déposer auprès du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique une déclaration faisant état du déplacement dans les 60 jours qui en suivent la fin344. Au plus tard le 31 mars de chaque année, le commissaire dresse une liste de tous les déplacements parrainés de l’année précédente, et le Président la dépose à la Chambre à la première occasion345.

Sur demande écrite, le commissaire peut donner aux députés un avis concernant leurs obligations en vertu du Code346.

Enquêtes

Déclenchement d’une enquête

Le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique peut être appelé à mener une enquête sur le respect du Code régissant les conflits d’intérêts des députés347. On peut déclencher une telle enquête à la suite de l’une des trois circonstances suivantes :

  • À la demande d’un député qui a des motifs raisonnables de croire qu’un autre député n’a pas respecté ses obligations aux termes du Code348. La demande d’enquête doit être présentée par écrit et signée, et doit inclure un énoncé des motifs349. Le député qui présente une demande d’enquête ne peut formuler aucun commentaire public sur cette dernière avant que le commissaire confirme que le député visé par l’enquête a obtenu copie de la plainte, ou qu’un délai de 14 jours se soit écoulé suivant la réception de la demande par le commissaire, selon la première des deux éventualités350 ;
  • Par suite de l’adoption d’une résolution par la Chambre, ordonnant au commissaire de faire une enquête pour déterminer si un député s’est conformé à ses obligations351 ;
  • Lorsque le commissaire lui-même a des motifs raisonnables de croire qu’un député n’a pas observé le Code352.

En 2006, avant l’ouverture de la 39e législature, le commissaire a été chargé de faire deux enquêtes. Avant de commencer, il devait régler deux questions, à savoir si le Code demeurait en vigueur après la dissolution de la législature et à quel moment les députés recouvraient le droit de demander la tenue d’une enquête, étant donné que, d’un point de vue constitutionnel, leur mandat prend fin dès la dissolution de la législature. En ce qui concerne la première question, le commissaire a constaté que le Code demeurait en vigueur après la dissolution de la législature, étant donné que les bureaux des députés demeuraient ouverts pour qu’ils puissent continuer à fournir des services à leurs électeurs et que les députés continuaient à recevoir une rémunération et d’autres avantages jusqu’à la date de l’élection générale. Le commissaire a souligné qu’« il s’ensuit que l’on devrait s’attendre à ce que les députés agissent d’une manière conforme aux exigences du Code. Autrement, on admettrait que les députés sont libres de favoriser leurs intérêts personnels lorsque la législature a été dissoute353 ». En ce qui concerne la deuxième question, le commissaire a conclu que, dès que l’avis d’élection d’une personne est publié dans la Gazette du Canada, cette personne est « officiellement » reconnue à titre de député et peut demander au commissaire d’ouvrir une enquête354.

Tenue d’une enquête

Sur réception d’une demande d’enquête d’un député, le commissaire transmet la demande au député qui en fait l’objet et lui accorde la possibilité d’y répondre dans les 30 jours civils355. Suivant la réception de la réponse, le commissaire dispose de 15 jours ouvrables pour faire un examen préliminaire de la demande et de la réponse et pour aviser les deux députés s’il y a des motifs raisonnables d’ouvrir une enquête356. Si le commissaire est d’avis que la demande est frivole ou vexatoire ou n’a pas été présentée de bonne foi, il rejette la demande et en fait rapport au Président. Il peut recommander que des mesures soient prises à l’égard du demandeur357.

Dans les cas où le commissaire est chargé d’ouvrir une enquête par voie de résolution de la Chambre, il le fait immédiatement sans faire d’examen préliminaire.

Lorsque le commissaire a des raisons de croire que le député ne s’est pas conformé au Code, le député visé est informé par écrit des préoccupations du commissaire et dispose de 30 jours civils pour y répondre358. Sur réception de la réponse du député, le commissaire peut décider de tenir une enquête359.

Le Code exige du commissaire qu’il procède à l’enquête à huis clos et en temps opportun360. Il est tenu de donner au député visé par l’enquête la possibilité d’être présent et de lui faire valoir ses arguments par écrit ou en personne ou par l’entremise d’un conseiller ou d’un autre représentant361.

Si le commissaire a des motifs raisonnables de croire que le député a commis une infraction en vertu d’une loi fédérale, il doit immédiatement suspendre son enquête et en aviser les autorités compétentes362. Le commissaire suspend aussi son enquête s’il constate que l’affaire fait l’objet d’une autre enquête ou qu’une accusation a été portée contre le député relativement à cette affaire363. Pour poursuivre son enquête, le commissaire devra attendre l’issue de l’autre enquête ou que l’on statue sur l’accusation364.

Avant juin 2007, le Code interdisait aux députés de formuler des commentaires sur les enquêtes en cours entreprises par le commissaire. Le Président a dû rappeler cette interdiction aux députés à quelques occasions pendant la période des questions365. Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a recommandé que l’on élimine cette disposition, estimant qu’elle « est inexécutoire et restreint indûment la liberté de parole », ce à quoi la Chambre a agréé366.

Rapport d’enquête

Une fois son enquête terminée, le commissaire remet son rapport au Président, qui le dépose à la Chambre. Le rapport est dès lors mis à la disposition du public367. Le commissaire y formule l’une des trois conclusions possibles à l’enquête et motive ses conclusions et recommandations dans son rapport368.

S’il conclut qu’il n’y a pas eu contravention, il l’indique dans son rapport369. S’il conclut à une infraction sans gravité (par exemple, si le député a pris toutes les précautions raisonnables pour éviter d’enfreindre le Code ou si l’infraction est survenue par inadvertance ou à la suite d’une erreur de jugement commise de bonne foi), le commissaire peut recommander dans son rapport qu’aucune sanction ne soit imposée370. Si le commissaire conclut qu’un député ne s’est pas conformé au Code, et qu’aucune des circonstances atténuantes ne s’applique, il peut recommander des sanctions appropriées371.

Dans son rapport, le commissaire peut formuler des recommandations sur l’interprétation générale du Code ou recommander des modifications à l’égard de son objet et de son esprit372.

Déclaration du député

Dans les 10 jours de séance suivant le dépôt à la Chambre du rapport du commissaire, le député visé peut faire une déclaration à la Chambre, attendu qu’il avise le Président qu’il compte prendre la parole un jour de séance donné. Le jour venu, après la période des questions, le Président donne la parole au député, qui dispose alors de 20 minutes. Les autres députés ne sont pas autorisés à intervenir373.

Étude du rapport

La Chambre peut faire l’étude des rapports d’enquête. D’une part, s’il s’agit d’un rapport concluant à une absence d’infraction ou à une infraction avec circonstances atténuantes, n’importe quel député peut proposer une motion en portant l’adoption. La motion est proposée sous la rubrique « Motions » pendant les Affaires courantes, après un avis de 48 heures374. Les députés peuvent alors intervenir une seule fois et au plus pendant 20 minutes ; chaque intervention de 20 minutes est suivie d’une période de questions et d’observations de 10 minutes375. Si le débat est ajourné ou interrompu, la motion est reportée aux Ordres émanant du gouvernement376. À l’expiration d’un délai de 30 jours de séance suivant le dépôt du rapport, si le gouvernement n’a pas repris le débat, ou si personne n’a proposé de motion portant adoption du rapport, celui-ci est réputé adopté d’office377.

D’autre part, s’il s’agit d’un rapport concluant à une infraction sans circonstances atténuantes, un député peut proposer une motion relative au rapport, toujours sous la rubrique « Motions » pendant les Affaires courantes, après un avis de 48 heures378. La motion est prise en considération durant au plus deux heures, après quoi le Président interrompt le débat et met aux voix sur-le-champ toute question nécessaire à la prise d’une décision sur la motion. Pendant le débat, les députés peuvent intervenir une seule fois et pendant au plus 10 minutes379 ; chaque intervention est suivie d’une période de questions et d’observations d’au plus cinq minutes380. Si aucune motion concernant le rapport n’a fait l’objet d’une décision au 30e jour de séance suivant le dépôt du rapport, une motion portant adoption du rapport est réputée proposée ce jour-là sous la rubrique « Motions », pendant les Affaires courantes. Le Président met alors aux voix toute question nécessaire à la prise d’une décision381.

La Chambre peut renvoyer un rapport au commissaire en lui donnant des instructions pour qu’il l’examine à nouveau382. Le commissaire tient compte des inquiétudes soulevées par la Chambre et donne une réponse au Président, qui la dépose à la Chambre383.

La Loi sur les conflits d’intérêts

De 1973 à 2004, les premiers ministres ont mis en place des directives en matière de conflits d’intérêts applicables aux ministres et aux autres titulaires de charge publique au début de leur mandat, bien qu’aucune loi ne les y obligeait384. Aussi appelé Code du premier ministre, le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat était un code volontaire. Celui-ci consolidait en un seul document les règles d’éthique qui s’appliquaient aux ministres, aux secrétaires d’État, aux secrétaires parlementaires et aux autres titulaires de charge publique, c’est-à-dire les personnes nommées à une charge à plein temps par le gouverneur en conseil. Bien que légèrement modifié par chaque nouveau gouvernement, le code portait, en général, que les titulaires de ces charges publiques devaient, dès leur nomination, prendre les mesures nécessaires pour éviter, dans la gestion de leurs affaires privées, toute possibilité de conflit d’intérêts, réel ou perçu. Il leur était interdit de solliciter ou d’accepter de l’argent ou des cadeaux ; d’outrepasser leurs fonctions officielles pour venir en aide à des personnes dans leurs rapports avec le gouvernement ; d’utiliser à leur propre avantage ou bénéfice des renseignements obtenus dans l’exercice de leurs fonctions officielles ; et, à l’expiration de leur mandat, de tirer un avantage indu de la charge publique qu’ils avaient occupée. À l’expiration de leur mandat, il était interdit aux ministres et aux autres titulaires de charge publique, pendant un certain temps, d’exercer certaines activités afin de garantir leur neutralité dans l’exercice de leurs fonctions officielles et pour éviter tout traitement préférentiel à l’expiration de leur mandat. Ces directives étaient administrées par un conseiller en éthique, fonctionnaire relevant directement du premier ministre385.

En 2004, on a modifié la Loi sur le Parlement du Canada de manière à exiger que le premier ministre établisse des principes, des règles et des obligations en matière d’éthique pour les titulaires de charge publique et les dépose à chacune des chambres du Parlement dans les 30 jours suivant son entrée en fonction. Cette modification constituait également le poste de commissaire à l’éthique, indépendant du gouvernement pour administrer ces règles, remplaçant ainsi le poste de conseiller en éthique qui avait été créé en 1994386. En 2007, à la suite de l’adoption de Loi fédérale sur la responsabilité de 2006, le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat a été remplacé par la Loi sur les conflits d’intérêts, créant ainsi le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique, de même que le poste de commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, tels que nous les connaissons aujourd’hui387.

Dispositions de la Loi sur les conflits d’intérêts

La Loi sur les conflits d’intérêts a pour but d’établir des règles de conduite au sujet des conflits d’intérêts et de l’après-mandat des titulaires de charge publique, ce qui comprend les ministres, ministres d’État, secrétaires parlementaires, directeur général des élections, membres du personnel ministériel, conseillers ministériels et certains titulaires nommés par le gouverneur en conseil388. La Loi définit ce qui constitue un « conflit d’intérêts389 », décrit les obligations générales des titulaires, et établit les règles régissant les conflits d’intérêts, y compris l’interdiction de certaines activités, le dessaisissement de biens contrôlés et l’acceptation de cadeaux et autres avantages390. Par ailleurs, la Loi prévoit des mesures d’observation ainsi que des exigences en matière de déclaration391. Enfin, elle établit des règles sur les activités de l’après-mandat392. La Loi n’interdit pas à un titulaire de charge publique qui serait aussi député de participer aux activités qu’il exercerait normalement en sa qualité de député393. Les titulaires de charge publique qui contreviennent à certaines dispositions de la Loi pour défaut de respecter certaines échéances en matière de divulgation s’exposent à des pénalités financières d’au plus 500 $394.

Le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique est chargé d’administrer et d’appliquer la Loi sur les conflits d’intérêts395. Il veille à ce que les titulaires de charge publique satisfassent à leurs obligations à l’égard de cette Loi et qu’ils se conforment aux exigences en matière de déclaration396. Le commissaire peut aussi entreprendre une enquête sur la conduite d’un titulaire à la demande d’un sénateur ou d’un député, ou de sa propre initiative397. À la fin de son enquête, il prépare un rapport à l’intention du premier ministre et en achemine une copie au titulaire de charge publique visé par l’enquête. Le rapport est ensuite rendu public398.

Les comités parlementaires et les conflits d’intérêts

Deux comités permanents ont pour mandat de s’occuper de certaines questions reliées aux conflits d’intérêts. Conformément à la Loi sur le Parlement du Canada, le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique s’acquitte de ses fonctions à l’égard des députés sous l’autorité générale d’un comité désigné par la Chambre à cette fin399. Conformément au Règlement, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a pour mandat d’examiner, pour en faire rapport, toute question relative au Code régissant les conflits d’intérêts des députés ainsi qu’au rapport annuel du commissaire relativement à ses responsabilités concernant les députés400. Le Comité est aussi chargé de procéder à un examen quinquennal exhaustif des dispositions du Code et de son application401.

Pour sa part, le Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique a pour mandat d’examiner, pour en faire rapport, la gestion, le fonctionnement et les prévisions des dépenses du bureau du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique402. Il examine aussi les rapports du commissaire relativement à ses responsabilités concernant les titulaires de charge publique403. En outre, lorsque le gouvernement compte nommer un commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, le Comité examine la candidature du commissaire proposé404. De concert avec d’autres comités, le Comité a pour mandat d’examiner, pour en faire rapport, tout projet de loi ou règlement fédéral ou toute disposition du Règlement ayant une incidence sur les normes en matière d’éthique des titulaires de charge publique405. Enfin, son mandat comprend notamment la formulation de propositions d’initiatives en matière des normes relatives à l’éthique des titulaires de charge publique, ainsi que la promotion, le contrôle et l’évaluation de ces initiatives406.

La Loi sur les conflits d’intérêts exige que, dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur, un examen approfondi des dispositions et de l’application de la Loi soit exécuté par un comité de l’une ou l’autre des chambres du Parlement407.