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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 20 février 2003




¿ 0910
V         Le président (L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.))
V         M. Brian Rushfeldt (directeur exécutif, Coalition de l'action pour la famille au Canada)

¿ 0915

¿ 0920
V         Le président
V         Mme Katherine Young (professeure, Université McGill, À titre individuel)

¿ 0925
V         M. Paul Nathanson (À titre individuel)

¿ 0930
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts («Unitarian Church of Montreal »)
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts

¿ 0935
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts

¿ 0940
V         Le président
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)
V         Le président
V         M. Kevin Sorenson

¿ 0945
V         Mme Katherine Young
V         M. Paul Nathanson

¿ 0950
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ)
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         Mme Katherine Young
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson

¿ 0955
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Richard Marceau

À 1000
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Mme Katherine Young
V         M. Paul Nathanson
V         Mme Katherine Young
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.)
V         R. P. Meg Roberts

À 1005
V         M. John McKay
V         R. P. Meg Roberts
V         M. John McKay
V         R. P. Meg Roberts
V         M. John McKay
V         R. P. Meg Roberts
V         M. John McKay
V         R. P. Meg Roberts
V         M. John McKay
V         Le président
V         M. Brian Rushfeldt
V         M. John McKay
V         Mme Katherine Young

À 1010
V         M. Paul Nathanson
V         M. John McKay
V         Le président
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne)
V         M. Paul Nathanson
V         Mme Diane Ablonczy

À 1015
V         Mme Katherine Young
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts
V         Mme Katherine Young
V         R. P. Meg Roberts
V         Mme Katherine Young
V         R. P. Meg Roberts

À 1020
V         Le président
V         M. Brian Rushfeldt
V         Le président
V         R. P. Kathy Sage («Kingston Unitarian Fellowship»)
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.)
V         Mme Katherine Young
V         Le président
V         M. Paul Nathanson

À 1025
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts
V         Le président
V         M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ)
V         M. Paul Nathanson
V         M. Réal Ménard
V         M. Paul Nathanson
V         M. Réal Ménard
V         M. Paul Nathanson
V         M. Réal Ménard

À 1030
V         Mme Katherine Young
V         Le président
V         M. Réal Ménard
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts
V         M. Réal Ménard
V         R. P. Meg Roberts
V         Le président
V         M. Brian Rushfeldt
V         Le président

À 1035
V         R. P. Kathy Sage
V         Le président
V         M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)
V         Le président
V         Mme Katherine Young

À 1040
V         Le président
V         Mme Diane Ablonczy
V         Mme Katherine Young

À 1045
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts
V         Le président
V         M. John McKay
V         Le président
V         Mme Katherine Young

À 1050
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         M. Paul Nathanson
V         M. Richard Marceau
V         Le président
V         M. Brian Rushfeldt

À 1055
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         M. Brian Rushfeldt
V         Le président
V         R. P. Meg Roberts
V         Le président
V         M. Paul Nathanson

Á 1100
V         Le président
V         R. P. Kathy Sage
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 020 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 20 février 2003

[Enregistrement électronique]

¿  +(0910)  

[Traduction]

+

    Le président (L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare ouverte la vingtième séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous examinons la question du mariage et de la reconnaissance des unions de conjoints même sexe.

    Nous accueillons aujourd'hui trois groupes : la Unitarian Church of Montreal, représentée par la révérende Meg Roberts et la révérende Kathy Sage, de Kingston; la Coalition de l'action pour la famille au Canada, représentée par Brian Rushfeldt, directeur exécutif; et l'Université McGill, représentée par Mme Katherine Young et M. Paul Nathanson.

    La Unitarian Church devait témoigner en premier, mais comme Mme Sage n'est pas encore arrivée, nous allons d'abord entendre la Coalition de l'action pour la famille au Canada.

    Ainsi qu'on vous l'a indiqué, chaque groupe aura droit à 10 minutes. Je vous ferai signe quand vous serez sur le point d'écouler votre temps de parole ou de le dépasser. De cette façon, les membres du comité auront le temps de poser plus de questions. J'invite les témoins à se montrer respectueux envers les membres du comité et vice-versa, pour que nous puissions engager un débat sérieux sur une question d'intérêt public qui revêt beaucoup d'importance, et ce, dans le respect.

    Sans plus tarder, je vais demander à M. Rushfeldt, de la Coalition de l'action pour la famille au Canada, de nous présenter son exposé. Vous avez 10 minutes.

+-

    M. Brian Rushfeldt (directeur exécutif, Coalition de l'action pour la famille au Canada): Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de la possibilité que vous m'accordez de vous présenter ce mémoire.

    La Coalition de l'action pour la famille au Canada est une organisation de citoyens ayant pour mission de préserver et d'améliorer la famille naturelle de génération en génération. Nous préconisons l'idéal de la famille naturelle, et permettez-moi d'ajouter sans tarder, il ne s'agit pas là d'une révélation divine qui ne concerne que les adeptes de religion, mais plutôt une question de loi naturelle applicable à tous les peuples, en tout temps et peu importe où ils se trouvent.

    J'aimerais débuter notre présentation en mentionnant que ces audiences pourraient être vaines si le gouvernement n'est pas prêt à assumer le rôle que lui ont conféré le peuple et la Constitution et à défendre le principe adopté il y a quelques années de cela—je vais en parler un peu plus tard.

    Les Canadiens s'inquiètent de plus en plus de la tendance de certains juges qui abusent de leur pouvoir pour imposer leurs propres croyances et objectifs politiques sur toute la population. Le rôle législatif n'appartient pas qu'à une poignée de juges, mais au Parlement.

    Passons maintenant au mémoire.

    Le débat qui consiste à redéfinir le mariage comme n'étant rien d'autre que la relation entre un homme et une femme est un phénomène tout à fait récent. Il y a quelques années à peine, alors qu'on demandait et obtenait certains droits et avantages pour les unions de fait, on comprenait déjà que le mariage était une relation distincte entre un homme et une femme. On n'a pas tenté alors de redéfinir le mariage.

    On présente les unions de fait comme une forme alternative au mariage qui, en tant que telle, vient miner la véritable institution du mariage et la stabilité indispensable aux enfants. Selon les rapports de Statistique Canada, 66 p. 100 des enfants vivant au sein d'unions de fait verront leurs parents divorcer avant d'atteindre l'âge de 10 ans, comparativement à 15 p. 100 pour les enfants des couples mariés.

    Plusieurs études, dont la recherche longitudinale effectuée par Statistique Canada sur les enfants, ont démontré les préjudices psychologiques que peuvent éventuellement entraîner les alternatives au mariage covenant engagé. Cette tentative de normaliser les autres formes de relation pour les placer sur un pied d'égalité avec le mariage est irresponsable et répréhensible.

    Parmi les avantages uniques du mariage, mentionnons—et j'aimerais vous parler de certains d'entre eux—les raisons précises qui démontrent que l'union exclusive d'un homme et d'une femme, plus que toute autre définition du mariage, constitue la base idéale d'une société canadienne civilisée et saine.

    Je commencerai en citant M. LaForest, juge de la Cour suprême, dans la cause de Nesbit c. Egan de 1995 :

C'est la seule unité dans la société qui consacre tous les jours et de façon constante des ressources aux soins des enfants...

    Il ajoute :

... il s'agit de l'unité sociale qui vient ancrer fondamentalement les autres relations sociales et les autres aspects de la société.

    Le juge LaForest a abordé certains principes du mariage dans sa décision, mais d'autres principes ont été laissés de côté. Dans un mariage covenant entre un homme et une femme, certains principes essentiels sont indispensables et intégrés à cette relation en raison de la nature même des deux sexes, que l'on qualifie parfois de genres, en présence. Il n'existe que deux genres hétérosexuels, l'homme et la femme, et non pas trois ou cinq.

    On doit reconnaître le caractère unique du mariage entre un homme et une femme et celui-ci est d'ailleurs reconnu dans presque toutes les sociétés, et cultures et les principales religions. Ce caractère englobe des principes tels l'amour, la conjugalité, l'union sociale, sur les plans émotionnel et physique, la fidélité, la monogamie, la possibilité de reproduction, ainsi que l'objectif unitif unique de la continuité de la famille et de la société civile de génération en génération. Tout cela trouve son apogée dans un élément, soit le respect de la dignité humaine.

    C'est la finalité profondément unitive de l'union des deux genres, soit un homme et une femme, qui procure l'environnement optimal au soutien des rejetons et à la solidité de la famille, qui constitue la base d'une civilisation saine. Il s'agit là de la vérité de cette loi biologique et naturelle innée qui lie l'homme à la femme et qui confère à la cellule familiale la force et la mission d'assurer la survie de l'espèce.

    Je dois aborder l'effet cumulatif de tous les principes entourant l'institution du mariage, soit le sentiment intense de la dignité humaine, un des grands principes que nous aimerions aborder ce matin.

    En tant que société, nous présentons souvent le respect de la dignité comme un idéal fondamental, mais nous permettons ensuite à nos comportements de s'en écarter considérablement. J'aimerais préciser que l'institution du mariage entre un homme et une femme est la seule forme de relation qui, en général, vise essentiellement à répondre à ce besoin élémentaire de dignité. Elle répond à ce besoin grâce à l'expression naturelle de la sexualité et en adhérant aux principes de fidélité, d'engagement et d'amour qui place les intérêts des autres membres de la famille au-dessus de tout, et même de la procréation. Malgré que tel ne soit pas toujours le cas, cela n'enlève rien à la vérité selon laquelle les relations mariées sont conformes à ces principes bien plus souvent que toute autre forme de relation.

¿  +-(0915)  

    Il existe deux aspects de la dignité que l'on doit aborder ici. Permettez-moi de m'attarder un instant aux enfants, puisqu'on doit en tenir compte de façon intrinsèque lors de toute discussion du mariage. En plaçant volontairement un enfant dans une situation où il sera privé d'un père ou d'une mère, on négligerait de façon flagrante sa dignité. Tout enfant a le droit de naître à l'intérieur des liens du mariage et requiert ardemment les soins de ses parents biologiques. Cet aspect de la dignité de l'enfant exige des adultes des deux genres qu'ils accordent la plus haute importance à la dignité de l'enfant, au-delà de tout objectif, croyance, besoin et désir personnel.

    Un autre aspect crucial de la dignité humaine concerne la sexualité. La fidélité sexuelle dans le mariage est la seule forme de sexualité qui respecte la dignité de la personne et qui réponde aux plus profonds des besoins chez la plupart des personnes. Les torts et la douleur résultant de la violation de ce principe sont omniprésents dans notre culture. Il suffit de penser aux maladies, aux grossesses involontaires, aux coeurs brisés, aux détresses psychologiques, à la violence croissante, incluant les meurtres, sans compter les coûts accrus au niveau des soins de santé et la baisse de productivité.

    L'acte sexuel en soi présente une élément indissociable de la dignité humaine. Les relations génitales entre hommes et femmes se déroulent dans le respect de la loi biologique et naturelle. Or, le respect de la dignité humaine découle de la reconnaissance de la loi biologique et naturelle. Des lois fixant des limites à des comportements sexuels tels la sodomie, l'inceste, le viol, la pédophilie et ainsi de suite sont enracinés dans les principes inhérents à la dignité des êtres humains. Le mariage exige qu'on respecte sans exception les rôles, les fonctions, l'unicité et les principes afin de répondre parfaitement aux besoins sur le plan de la dignité humaine. Il ne peut et il ne devrait exister aucun cloisonnement.

    Permettez-moi maintenant d'aborder certains des arguments dépourvus de toute logique dans le débat sur le mariage. Les tentatives visant à comparer d'autres formes de relations au mariage défient la logique, le bon sens et la réalité. On ne peut prendre arbitrairement une relation de fait et la qualifier de mariage en pensant qu'elle deviendra équivalente du simple fait de l'appeler ainsi. Prenons l'analogie des personnes mariées à leur travail ou mariées à leur art. Nous n'émettrions pas de permis de mariage à ces personnes.

    Toutes les relations sont distinctes, tout comme les races, les cultures et les religions présentent des différences. Il est absurde et injuste de s'efforcer ou même de tenter de les comparer. Il est également injuste et offensant pour les personnes mariées de tenter de normaliser les autres formes de relations humaines en les comparant au mariage.

    Pour terminer, j'aimerais aborder un autre risque qu'entraînerait une modification et un remaniement de cette institution qu'est le mariage. Si le gouvernement décide de façon arbitraire de reconnaître publiquement toute autre forme de relation dans sa définition du mariage, comment alors pourra-t-il refuser les autres formes dont on demande également l'inclusion? Ces autres formes pourraient inclure les trios. Rappelez-vous du faux mariage qui s'est tenu sur la Colline du Parlement, quand un membre du clergé a célébré le mariage de trois personnes. On a aussi le cas d'un trio qui souhaite adopter légalement un jeune garçon en Ontario. Quelles raisons invoquera le gouvernement pour refuser de marier les partenaires multiples? Comment refusera-t-il les unions sexuelles entre diverses générations?

    Ces unions, qu'on qualifie présentement de pédophilie, ne doivent pas être confondues avec les avantages intergénérationnels de la famille.

    Encore une fois, on a déjà soulevé ces scénarios au Canada. Il est risqué de rejeter le principe fondamental du mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme, puisqu'en rejetant ou en retirant un tel principe, on doit alors remettre en question toutes les autres formes de relation. Si les limites du mariage s'en trouvent obscurcies et si on rejette les principes du mariage, la société devra assumer la confusion sur le plan social, la douleur humaine et autres effets délétères.

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, ne vous sentez pas contraints à présenter au Parlement une recommandation qui ignore la dignité de la personne et qui rejette le caractère unique des relations naturelles entre hommes et femmes et les principes véritables du mariage. Je tiens également à vous rappeler qu'en juin 1999, le Parlement a examiné une motion qui disait en partie, et je cite :

... le mariage est et doit demeurer exclusivement l'union d'un homme et d'une femme, et [...] le Parlement prendra toutes les mesures voulues pour préserver au Canada cette définition du mariage.

    Je vous remercie de l'attention que vous m'avez accordée.

¿  +-(0920)  

+-

    Le président: Merci de cet exposé de 10 minutes.

    Nous allons maintenant entendre Mme Young et M. Nathanson, de l'Université McGill.

+-

    Mme Katherine Young (professeure, Université McGill, À titre individuel): Je suis professeur de religion et d'éthique comparées, spécialisée en religions asiatiques.

    Notre analyse des religions mondiales telles le judaïsme, le confucianisme, l'hindouisme, l'islamisme et le christianisme, et des perspectives des sociétés de petites dimensions nous amène à conclure que l'institution du mariage est définie comme une relation hétérosexuelle qui repose sur une norme culturelle et dont le but est d'encourager la procréation, à tout le moins pour assurer la préservation et le bien-être de la société. Cette définition laisse sous-entendre que la nature et la culture font partie intégrante des êtres humains. Or, la culture n'est pas un revêtement artificiel de quelque chose de plus primitif ou fondamental. Si on la retirait, nous ne serions ni des humains ni des animaux, qui ont beaucoup plus d'instinct que les humains pour ce qui est des questions de la vie.

    Comme l'hétérosexualité constitue la tendance biologique la plus courante pour les êtres humains, du fait que notre espèce se compose d'hommes et de femmes, ce qui confère au système de reproduction un avantage évolutionnaire, et comme la culture hétérosexuelle se veut le complément de la biologie hétérosexuelle, les sociétés ont érigée celle-ci en norme. Autrement dit, l'hétérosexualité n'est pas simplement considérée comme le choix d'un mode de vie parmi d'autres.

    Par ailleurs, il y a une tendance qui se dégage des analyses comparatives. Le mariage possède des caractéristiques variables et presque universelles. Les caractéristiques universelles comprennent, entre autres, le fait que le mariage est appuyé par une autorité et des mesures incitatives, reconnaît l'interdépendance de la masculinité et de la féminité, a une portée publique, définit des partenaires admissibles, encourage la procréation dans des conditions précises et procure un soutien mutuel non seulement entre les hommes et les femmes, mais aussi entre ceux-ci et leurs enfants. Les caractéristiques presque universelles, que l'on retrouve dans toutes les sociétés d'envergure et toutes les religions mondiales, englobent la durabilité, une affection mutuelle et une camaraderie, des alliances familiales ou politiques, et le cycle intergénérationnel, qui repose sur les liens entre les jeunes et les vieux. Les caractéristiques variables du mariage englobent le mariage à l'intérieur d'un groupe ou à l'extérieur de celui-ci, le mariage à une personne de standing plus élevé ou moins élevé, le mariage choisi ou arrangé, l'égalité ou l'hiérarchie des sexes, la polygamie ou la monogamie, et le mariage pour tous ou pour la plupart.

    Il est important de signaler que le fait de mettre l'accent sur les caractéristiques variables du mariage contribue à en masquer les caractéristiques universelles. Celles-ci se manifestent uniquement par suite d'une analyse interculturelle rigoureuse qui s'appuie sur un échantillon suffisant des nombreux types de sociétés humaines qui existent. Même si la culture hétérosexuelle qui englobe le mariage est définie comme étant la norme, de nombreuses cultures autorisent quelques exceptions à la règle, à la condition qu'elles ne menacent pas le système de reproduction culturel.

    Pourquoi tout ce branle-bas, se demandent les partisans du mariage homosexuel? Les homosexuels forment une minorité. Si on leur permettait de se marier, cela n'entraînerait rien de plus qu'une petite modification au système existant et contribuerait même, peut-être, à appuyer l'institution.

    Or, qu'est-ce que le fait de redéfinir le mariage pour y inclure les couples homosexuels changerait réellement? Il deviendrait très difficile, pour des raisons politiques, d'encourager l'engagement des hommes, par le biais de la culture, à l'égard des hommes et des enfants. Les sociétés utilisent toutes, depuis toujours, des symboles et des rituels à cette fin. Toutefois, une telle utilisation de la culture pourrait être interprétée comme privilégiant l'hétérosexualité en plus d'être qualifiée de non-conformisme politique ou même de geste illégal, ce qui aurait pour effet de rompre les liens publics, et culturels, entre les hommes et la vie familiale. Par ailleurs, nous encouragerions, par défaut si ce n'est par dessein, l'autonomie reproductive des femmes, excluant du coup les hommes des processus du cycle de vie culturel et biologique.

    En outre, les besoins et les désirs des adultes en tant d'individus passeraient avant ceux des enfants—l'idéal de l'interdépendance entre hommes et femmes pour le bien des enfants—et de la collectivité—l'idéal de l'interdépendance entre hommes et femmes pour le bien de l'ensemble de la société.

¿  +-(0925)  

+-

    M. Paul Nathanson (À titre individuel): Le fardeau de la preuve appartient toujours à ceux qui s'écartent du statu quo en voulant, comme dans ce cas-ci, changer la définition du mariage. Mon objectif est de réfuter certaines de leurs affirmations, et non de défendre le statu quo.

    Je vais discuter pour l'instant seulement des deux revendications que je trouve les plus inquiétantes pour des raisons morales, politiques et même—pour un homosexuel—personnelles.

    Les homosexuels prétendent que le mariage gai est nécessaire à leur estime de soi. Il est facile de comprendre pourquoi on invoque cet argument, parce que des gens ont le droit moral—et devraient avoir le droit légal—d'affirmer la reconnaissance de leur identité personnelle ou collective.

    Cela nous amène à nous interroger sur la nature de l'identité et de la démocratie. Par définition, chaque démocratie est composée, et c'est même nécessaire, de majorités et de minorités. Affirmer que la vie est intolérable parce qu'on appartient à une minorité, dans le cas présent en étant exclu du mariage, c'est porter atteinte au fondement même de la démocratie.

    Une analogie fondée sur mon expérience en tant que Juif devrait aider à comprendre. Les Juifs ont vécu en situation minoritaire pendant des siècles et ont pourtant réussi à garder collectivement leur estime de soi, souvent malgré des préjugés ou des persécutions bien pires et beaucoup plus systématiques que tout ce que les homosexuels ont pu subir au Canada. Pourquoi? Parce que l'estime de soi provient de l'individu ou de la communauté. Autrement dit, elle ne peut être ni conférée ni refusée par l'État ou toute autre source extérieure.

    Les Juifs canadiens s'attendent à ce que l'État les protège contre la violence antisémite, d'accord, mais pas qu'il leur offre un traitement psychologique ou même symbolique parce qu'ils sont victimes de leur situation minoritaire.

    Il est vrai que ce ne sont pas tous les Juifs qui ont réussi à affirmer leur identité juive—ce qui a toujours été un problème parmi nous—en s'occupant de mettre en valeur leurs ressources intellectuelles, morales et spirituelles.

    À la fois en tant que Juif et homosexuel, je suis donc en profond désaccord avec ceux qui prétendent que le mariage gai est nécessaire.

    Bien sûr, les Juifs préfèrent vivre dans des sociétés tolérantes, comme tous ceux qui appartiennent à un groupe minoritaire. Mais cela ne veut pas dire qu'on refuse d'accepter les conséquences légitimes liées à sa situation de minorité au sein d'une société démocratique. Autrement, comment pourrions-nous avoir une démocratie? Il suffit de se demander comment trouver un certain équilibre entre les besoins des minorités et ceux des majorités. Le Canada est hostile à toute tyrannie de la part de la majorité. Il interdit qu'on maltraite un groupe quel qu'il soit, par exemple, peu importe ce que les Canadiens, en privé ou en public, en penseraient.

    Après tout, comme dans le cas de la vérité, on ne peut pas établir la justice simplement en fonction du nombre. Et l'histoire, même l'histoire du Canada, montre que les majorités font parfois des choix stupides ou même immoraux, qui nous feraient nous demander si la plupart des Canadiens approuvent ou non le mariage homosexuel.

    Mais c'est la même chose dans le cas des minorités. Il est vrai que la démocratie présume que les minorités vont s'organiser politiquement dans leur intérêt—mais pas sans négliger les besoins de la société dans son ensemble.

    En somme, une société démocratique n'est pas moralement meilleure que ceux qui la composent. De plus, l'argument en faveur du mariage gai refile le problème d'une faible estime de soi à une autre minorité, les célibataires. Si le mariage était si essentiel à l'estime de soi, après tout, tous ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas se marier seraient plus isolés que jamais, et même plus susceptibles que jamais de se dévaloriser.

    On revendique aussi le mariage gai en faisant valoir que les enfants d'homosexuels l'exigent, ce qui est étrange je pense, étant donné qu'il n'est à peu près jamais question des enfants dans ce débat, sauf pour en faire les spectateurs d'un conflit sur les droits des adultes.

    De toute façon, je ne dis pas que les couples gais sont moins capables d'aimer leurs enfants que d'autres couples, ou qu'ils enseignent à leurs enfants à devenir gais, ce qui ne serait pas un problème, à moins de croire que l'homosexualité a quelque chose de foncièrement répréhensible, ce qui n'est pas notre cas.

    Il reste que les enfants ont besoin de plus que de l'amour de leurs parents, que ceux-ci soient gais ou hétérosexuels. Ils ont besoin au moins d'un parent de chaque sexe. Pourquoi au moins un? Parce que la famille élargie, avec des oncles, des tantes et des grands-parents, se rapproche beaucoup plus de l'idéal que la famille nucléaire isolée.

    Pourquoi au moins un de chaque sexe? Parce que les hommes et les femmes ne sont pas interchangeables. Bien que beaucoup plus semblables que différents, les deux sexes sont distincts. Les garçons ne peuvent pas apprendre à devenir des hommes équilibrés même de la mère la plus aimante, ou de deux mères seulement. C'est la même chose pour les filles qui ne peuvent pas apprendre à devenir des femmes équilibrées même du père le plus aimant ou de deux pères seulement.

    D'ailleurs, le besoin d'avoir un père est particulièrement marqué pour les garçons. Comme les filles, ils doivent se séparer de leur mère. Cependant, contrairement aux filles, ils doivent aussi reporter l'attention de leur identité d'un sexe à l'autre.

    Les problèmes des parents homosexuels s'appliquent aussi aux chefs de familles monoparentales hétérosexuels. Ces familles ont toujours existé en raison de la mort, du divorce ou de l'abandon d'un des conjoints, mais elles représentaient l'exception autrefois. Maintenant que le divorce est devenu si courant, le phénomène a changé.

    La monoparentalité, qui existe de plus en plus souvent par choix, est devenue un mode de vie. On envoie aux hommes le message que les pères n'ont aucune fonction distincte et nécessaire dans la famille. Selon le discours dominant de nos jours, au mieux, c'est un luxe de les avoir pour aider les mères et, au pire, ce sont des boulets qui peuvent être des agresseurs. Dans ce contexte, pourquoi voudrait-on que les pères participent activement à la vie de famille?

¿  +-(0930)  

    Dans l'ensemble, les résultats pour les enfants sans père sont décourageants, même en maintenant le statu quo. Autoriser le mariage gai ne ferait qu'aggraver le problème. Avant de le faire, il faudrait au moins reconnaître que nous participons à une vaste expérience, qui concerne les générations futures et pour laquelle nous sommes bien peu préparés.

    Les gens ne sont pas des rats de laboratoire. Les erreurs sont plus lourdes de conséquences. L'organisation sociale, comme toute autre chose, peut entraîner des phénomènes imprévus. On essaie de régler des problèmes, mais on finit toujours par en créer d'autres.

    Il y a 40 ans, il semblait logique de penser que changer les lois sur le divorce serait un geste de compassion à l'égard de certains, même si cela ne changerait rien ou à peu près rien pour la majorité. C'était à tout le moins naïf de notre part. Cette mesure a changé la société comme personne n'aurait pu l'imaginer. Pour le meilleur ou pour le pire—le meilleur pour certains, le pire pour d'autres—nous vivons maintenant dans une culture du divorce.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Les interprètes ont toute mon admiration.

    Je vais inviter Meg Roberts, représentante de l'Église unitarienne, à prendre la parole. Nous allons...

+-

    R. P. Meg Roberts («Unitarian Church of Montreal »): C'est moi qui vais faire l'exposé de toute façon. Je voulais simplement que Kathy m'accompagne. Je suis prête à commencer.

+-

    Le président: Merci.

+-

    R. P. Meg Roberts: Bonjour.

    C'est un privilège pour nous d'être ici ce matin pour entendre le point de vue d'autres intervenants et exprimer le nôtre.

    Je suis la révérende Meg Roberts. Je suis une ministre unitarienne universaliste. C'est agréable d'être assise à côté de quelqu'un de Calgary, quand on est née comme moi à Moose Jaw, en Saskatchewan, et qu'on a grandi à Saskatoon.

    J'ai vécu un certain temps à Vancouver où j'ai travaillé comme aumônier laïc. Dans l'Église unitarienne, les aumôniers laïcs pratiquent des rites de passage et j'ai alors célébré des unions homosexuelles, que nous appelions cérémonies d'union. J'ai maintenant le privilège de remplacer mon collègue, Ray Drennan, à l'Église unitarienne de Montréal pour six mois, pendant son congé sabbatique.

    L'Église unitarienne de Montréal est la plus ancienne congrégation d'unitariens au Canada. L'Église a été établie à Montréal en 1842. Les unitariens universalistes sont des gens de toutes sortes de croyances et de philosophies, ce qui reflète à certains égards notre monde multiconfessionnel et le fait que certaines personnes croient en Dieu et d'autres non. Nous regroupons des athées et des croyants ainsi que des gens d'origine juive, chrétienne et bouddhiste.

    Les unitariens universalistes défendent des principes communs et travaillent à la construction d'un monde meilleur. Le premier principe que nous affirmons ici en Amérique du Nord est celui de la valeur et de la dignité intrinsèques de toute personne. Le deuxième est celui de la justice, de l'équité et de la compassion comme fondements des relations humaines.

    Les origines du mouvement unitarien, pour ceux d'entre vous qui ne le connaissent peut-être pas très bien, remontent à la réforme protestante du XVIe siècle, et celles du mouvement universaliste au XVIIIe siècle en Europe. On retrouve des unitariens universalistes dans différentes parties du monde, et l'association nord-américaine, appelée Association unitarienne universaliste, compte plus de 1 000 Églises et plus de 200 000 membres. Le Conseil unitarien du Canada réunit au-delà de 5 200 membres dans nos assemblées au Canada, et l'Église de Montréal regroupe plus de 200 fidèles.

    Depuis les années 1970, les assemblées unitariennes universalistes militent en faveur des droits des gais, des lesbiennes et des bisexuels et contre l'homophobie et toutes les formes de discrimination fondées sur l'orientation sexuelle.

    Ici au Canada, les membres de notre clergé célèbrent des unions de même sexe depuis les années 1970. La cérémonie témoigne du fait qu'il est important que l'union spirituelle, affective et sociale des couples de même sexe soit reconnue et célébrée par les deux partenaires, leurs familles, et la société. Il est malheureux que ces unions ne soient pas reconnues légalement. J'ai moi-même eu le privilège de célébrer plusieurs de ces manifestations d'amour et d'engagement, et c'est la raison pour laquelle je me sens très bien placée pour intervenir en faveur de l'union homosexuelle.

    Je félicite le gouvernement du Canada de son initiative, et votre comité d'avoir entrepris de discuter avec les Canadiens des moyens de corriger une situation de discrimination, d'après moi, qui existe depuis trop longtemps chez nous. Votre document de travail qui propose aux Canadiens trois solutions parmi tant d'autres, bien sûr, est intéressant. Même si des progrès considérables sont accomplis en vue d'assurer l'équité à l'égard des partenaires de même sexe, je ne crois pas que les trois options proposées soient toutes réalisables, et je pense que vous soulignez bien certaines des anomalies.

    Je préconise donc une loi fédérale qui légalise les unions homosexuelles pour que les couples de même sexe aient la possibilité de confirmer leur union dans un mariage leur conférant des droits et des responsabilités en vertu d'une loi fédérale. Je crois qu'il est important que les Canadiens s'expriment, et je suis désolée que votre comité n'ait pas les moyens de se déplacer ailleurs au pays parce que—vous les avez?

¿  +-(0935)  

+-

    Le président: Nous allons le savoir à 13 heures aujourd'hui.

+-

    R. P. Meg Roberts: Je vais me croiser les doigts pour vous. C'est formidable, et j'espère que vous aurez l'occasion d'aller entendre le point de vue des gens d'un bout à l'autre du pays.

    Pourquoi le mariage devrait-il être changé pour inclure les couples de même sexe? Je crois que cette solution est en accord avec les valeurs canadiennes de justice, d'équité et de tolérance de la diversité. Dans notre société séculière caractérisée par la diversité et les croyances multiples, je crois qu'il faut en arriver à inclure les couples de même sexe.

    Le mariage entre personnes de même sexe, comme le mariage entre personnes de sexe opposé, est une cérémonie qui permet à chaque membre du couple de reconnaître officiellement son engagement envers une autre personne en présence de ses parents et ses amis. Le mariage entre personnes de même sexe, comme le mariage entre personnes de sexe opposé, est un acte social et politique qui garantit les droits et les responsabilités de chacun des partenaires. Il offre un milieu stable et réconfortant pour la croissance et l'épanouissement des enfants. C'est ce que j'en conclus de mon expérience et de ce que d'autres organismes en faveur du mariage homosexuel ont écrit.

    J'approuve les raisons citées dans votre document de travail selon lesquelles le mariage des couples de même sexe règle une fois pour toutes les préoccupations en matière d'équité, alors que ce n'est pas le cas des autres options.

    Pourquoi le mariage ne devrait pas demeurer une institution hétérosexuelle? Dans bien des discussions sur le mariage, on présume que le mariage devrait être permis seulement entre un homme et une femme à l'exclusion de tous les autres unions, parce que c'est la forme traditionnelle du mariage. Je vous soumets que les traditions sont des coutumes qui existent à certaines époques, pour un certain temps, dans certaines sociétés. Il est important de penser qu'elles ne restent pas les mêmes tout le temps, mais s'adaptent et évoluent en fonction de notre compréhension nouvelle du monde.

    Autrefois, la tradition voulait que le mariage soit célébré entre des personnes de même religion, et, dans beaucoup de pays d'Europe et en Amérique du Nord, on désapprouvait le mariage entre personnes de confessions différentes, et on ne l'encourageait pas. Comme on le sait, c'est aujourd'hui une pratique généralement acceptée au Canada. La tradition voulait également qu'il n'y ait pas de mariage entre des personnes de races différentes et, pourtant, c'est aujourd'hui une pratique généralement acceptée.

    Les coutumes et les traditions évoluent. Par exemple, à une certaine époque, la tradition, qui semblait logique et raisonnable, voulait que les femmes, les Autochtones, et les gens de couleur ne soient pas des personnes. Je vous demande de songer à la façon dont la tradition et la loi ont changé avec le temps.

    La majorité des Canadiens reconnaissent maintenant l'importance des droits des couples de même sexe, et les statistiques présentées dans votre document de travail le démontrent. Ce qui est encore plus important que les statistiques, c'est le rôle du Parlement dans la défense des droits de la personne. Je pense qu'il est important que le gouvernement fédéral joue un rôle pour décider qui peut se marier légalement. Les organismes religieux sont des groupes bénévoles et je pense qu'il est important que le gouvernement fédéral continue d'assumer des responsabilités à propos du mariage. Ce n'est pas tout le monde qui fait partie d'un groupe religieux.

    On ne peut pas choisir de respecter ou non la loi canadienne. Elle s'applique à l'ensemble de la société. C'est essentiellement la raison pour laquelle le gouvernement fédéral doit se prononcer au sujet de l'inclusion des couples de même sexe dans la définition du mariage. Actuellement dans la société, le mariage est l'institution qui sanctionne les unions et garantit les droits civils des adultes engagés dans cette relation et de leurs enfants. Il est injuste que la société prive qui que ce soit de ses droits et de ses responsabilités en raison de son orientation sexuelle.

¿  +-(0940)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je vais céder la parole à M. Sorenson, pour 10 minutes, ce qui comprend à la fois...

    Je suis désolé, pour sept minutes.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président. J'aimerais bien avoir trois minutes de plus.

+-

    Le président: Les sept minutes comprennent le temps des questions et des réponses, et je vous demanderais d'indiquer à qui vous adressez votre question, si possible.

+-

    M. Kevin Sorenson: Je tiens à vous remercier tous les quatre d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Il y a eu des exposés très intéressants.

    Notre comité est chargé d'examiner la définition du mariage. J'ai parfois l'impression que nous mettons peut-être la charrue devant les boeufs. Par tradition, nous avons défini l'union entre un homme et une femme comme étant le mariage. Nous cherchons maintenant a déterminer si nous pouvons changer la définition de ce mot.

    Il y a bien des gens qui sont venus exprimer un point de vue religieux, comme aujourd'hui. Notre comité doit analyser beaucoup de considérations religieuses. Il y a aussi beaucoup de considérations politiques. Je reçois, et d'autres ont dit que c'était la même chose pour eux, des centaines et des centaines de lettres à mon bureau de circonscription et à mon bureau ici sur le changement de définition du mariage... Et il y a aussi des considérations juridiques dont il faut tenir compte.

    J'ai une question à poser qui s'adresse principalement aux trois témoins qui se trouvent à mon extrême droite. D'abord, madame Young, vous avez dit dans votre exposé, ou dans le mémoire que vous nous avez remis—peut-être avec votre collègue, parce que je pense que c'est un mémoire conjoint—que le mariage est important sur le plan communautaire. Vous dites aussi qu'il sert des besoins communs et que nous le manipulons à nos risques et périls. Je me demande si vous pourriez nous en dire davantage sur les périls auxquels notre société est exposée.

    Vous dites aussi qu'à tout le moins les Canadiens devraient savoir que nous envisageons l'expérimentation humaine la plus grave de l'histoire. Je me demande si vous pourriez nous expliquer un peu plus pourquoi on devrait s'inquiéter de ce que vous appelez une « expérimentation » à ce sujet.

    Monsieur Nathanson, vous avez beaucoup parlé des enfants, ce qui me plaît. En fait, vous soulignez que les enfants sont parfois les grands oubliés de ce changement de définition.

    À propos des enfants de couples homosexuels, des gais sont venus nous dire que l'estime d'eux-mêmes en souffrait. À l'école ou ailleurs, ils ne peuvent pas dire que leurs parents ou leurs tuteurs sont mariés.

    Vous pourriez peut-être nous en dire davantage sur ces trois ou quatre questions.

¿  +-(0945)  

+-

    Mme Katherine Young: J'aimerais d'abord m'excuser d'avoir parlé si vite, surtout pour les interprètes et mes collègues francophones. Si je parle trop vite, faites-moi ralentir.

    J'ai dit que la mariage était important sur le plan communautaire parce que mes recherches sont plutôt de nature empirique. Je recherche parmi les différentes cultures—à petite et grande échelle—les caractéristiques communes. Une des caractéristiques présentes dans le temps et l'espace est celle qui veut que le mariage revêt une dimension publique et est sanctionné par les plus hautes instances, que ce soit les ancêtres, les dieux, les écritures ou la loi. Le mariage n'a jamais été une affaire privée. Il a toujours eu une dimension publique, communautaire. Cette dimension communautaire, qui est commune à toutes les cultures, doit avoir sa raison d'être. Ces particularités si universellement importantes n'existeraient pas sans raison valable.

    La dimension communautaire s'explique par le fait que le cycle de reproduction à l'origine de la vie humaine n'est pas seulement biologique—c'est l'accouplement, l'acte sexuel—mais aussi culturel, chez l'être humain. La norme culturelle est donc définie par la collectivité et transmise par la famille et les rapports sociaux. Ce n'est pas un processus désorganisé.

    C'est pourquoi les mariages ont toujours été assez conservateurs dans les sociétés mais, comme je l'ai dit, il y a des caractéristiques et des variables assez universelles. Les variables permettent aux sociétés de s'adapter à de nouvelles circonstances. À une certaine époque, les sociétés agricoles ont eu besoin de familles nombreuses. Aujourd'hui, dans notre société industrielle, nous avons besoin de petites familles. Auparavant, les femmes étaient plutôt réprimées dans la famille; aujourd'hui, des réformes ont accordé l'égalité aux femmes dans le mariage.

    Il y a donc des variables qui changent en fonction des circonstances. Mais le cycle de reproduction à l'origine de la vie humaine doit s'accomplir avec la contribution de la collectivité et en fonction des plus hautes instances, et c'est pourquoi il est ancré dans la religion et dans la loi.

    C'est la raison pour laquelle nous touchons à cette institution à nos risques et péril et pourquoi c'est une expérience aussi importante. Ces caractéristiques universelles devraient à tout le moins nous inciter à être très prudents et à comprendre que nous allons à l'encontre de l'histoire de l'humanité quand nous agissons de la sorte.

    Les défenseurs du mariage homosexuel ont dit que des précédents existent déjà à propos de ce mariage. J'ai étudié tous les faits à ce sujet, et ce mariage a toujours été l'exception dans les sociétés pour lesquelles le mariage hétérosexuel est la norme et, même dans les sociétés qui ont autorisé ces exceptions—parce que ce ne sont pas toutes les sociétés qui l'ont fait—des aménagements ont toujours été apportés à la norme communautaire et publique de reproduction, qui est essentiellement le mariage.

+-

    M. Paul Nathanson: J'espère me rappeler de vos questions.

    D'abord, je n'ai pas dit que c'était l'expérimentation la plus importante de l'histoire de l'humanité. Je ne sais pas vraiment si c'est le cas. C'est sûrement une expérience.

    Vous avez aussi parlé de l'estime de soi. Je dirais, d'après mon expérience personnelle, que l'estime de soi est beaucoup plus difficile à acquérir pour les enfants qui découvrent qu'ils sont homosexuels que pour les autres personnes—même si, franchement, il y a tellement de facteurs qui nuisent à l'estime de soi que je ne dirais pas que leur cas est unique.

    Mais je dirais que le problème qui se pose pour eux, comme pour moi, ne vient pas du fait que leurs parents ne sont pas mariés, mais parce qu'ils sont homosexuels, qu'ils sont différents.

    Ensuite, je dirais qu'en 2003, le mariage ne confère pas tellement de statut. L'institution du mariage a vraiment été dévalorisée à bien des égards. Beaucoup de gens ont des parents qui ne sont pas mariés. Avoir des enfants sans être mariés n'est plus ce que c'était il y a 40 ou 50 ans. Je pense qu'on exagère la place qu'occupe le mariage. Que ce soit bon ou mauvais est une autre histoire, mais je ne pense pas que le mariage gai va résoudre le problème.

¿  +-(0950)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    C'est maintenant au tour de M. Marceau pour sept minutes.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais d'abord avoir une clarification. Sur l'avis de convocation que nous avons eu aujourd'hui, il est écrit: Pre Katherine K. Young et Dr Paul Nathanson, Université McGill. Est-ce que vous témoignez au nom de l'Université McGill?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non, nous ne témoignons pas en son nom.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Je voudrais avoir une précision. Vous ne témoignez pas au nom de l'Université McGill. Vous travaillez à l'Université McGill et vous comparaissez ici à titre personnel. Vous n'êtes pas les porte-parole de l'Université McGill. Est-ce bien le cas?

[Traduction]

+-

    Mme Katherine Young: Non, bien sûr, nous ne sommes pas des porte-parole de l'Université McGill. L'université permet toujours à ses professeurs de faire des recherches et d'en présenter les conclusions sur des tribunes académiques, et aussi publiques. Alors, je suis ici que sous le titre de professeure Young, pour présenter les recherches que je fais, et ce que je vous présente est en mon nom propre et non en celui de l'université.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

    Je vais prendre votre mémoire et on va l'examiner.

    Docteur Nathanson, aux pages 8 et 9, vous parlez d'expérimentation humaine. Vous dites qu'envisager le mariage de conjoints de même sexe serait l'expérimentation humaine la plus grave de l'histoire.

    Ensuite, vous continuez en disant, ce qui me surprend un peu:

Les gens ne sont pas comme des rats de laboratoire; des expériences utopiques qui tournent mal ont souvent occasionné des souffrances phénoménales.

    Dites-vous que si le comité suggérait au gouvernement de permettre le mariage de conjoints de même sexe, cela pourrait occasionner des souffrances phénoménales?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Tout d'abord, je le répète, je n'ai pas dit que c'était la plus vaste expérimentation de l'histoire de l'homme, j'ai dit que c'était une expérience d'envergure.

¿  +-(0955)  

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Un instant. Vous avez dit, et je cite:

À tout le moins, les Canadiens devraient savoir qu'ils envisagent l'expérimentation humaine la plus grave de l'histoire.

    À moins que ce soit un problème...

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non. Peut-être est-ce à cause de la traduction. Ce n'est pas ce que j'ai dit en anglais.

+-

    M. Richard Marceau: Il me semble que c'est ce qu'il y a dans le mémoire.

+-

    M. Paul Nathanson: Sérieuse—pas la plus importante, mais sérieuse.

+-

    M. Richard Marceau: La plus sérieuse.

+-

    M. Paul Nathanson: Quoi qu'il en soit, je n'ai pas l'intention de faire des déclarations comparatives ici, mais c'est une expérimentation sérieuse. Nous ne savons pas à coup sûr quels en seront les résultats, pas plus qu'avec toute autre expérimentation sociale. Peut-être est-ce que ce sera une bonne chose, peut-être pas. Nous ne le savons tout simplement pas.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Cela ne me pose pas de problème, mais pensez-vous que cela peut entraîner des souffrances phénoménales?

+-

    M. Paul Nathanson: Peut-être.

+-

    M. Richard Marceau: Donnez-moi un exemple.

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Cela dépend de ce qui arrive aux enfants. J'ai utilisé l'analogie du divorce. Maintenant, il y a moyen de divorcer facilement, d'une perspective juridique. Ce n'est pas toujours facile au plan psychologique, mais nous avons facilité les choses sur le plan juridique. Il y a eu des effets positifs. Certaines personnes avaient vraiment besoin de divorcer. Mais une chose qu'on n'avait pas prévu, c'est que nous avons créé un immense phénomène qui n'existait pas auparavant. Parmi les résultats de cette expérience, il y a les enfants du divorce et les problèmes qu'ils vivent. Ce n'est plus le même phénomène parce que, lorsque ce ne sont que quelques personnes qui divorcent alors que la plus grande partie de la société préserve un mode de vie, c'est une chose, mais lorsque la majorité des gens font quelque chose, le phénomène, en lui-même, n'est plus le même. Les paramètres ont changé; les résultats sont différents. Le phénomène s'anime d'une vie qui lui est propre, autrement dit. Nous ne savons plus. Les résultats du divorce en masse, jusqu'à maintenant, ne sont pas très encourageants.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Ce que j'ai de la difficulté à comprendre, à part les mots «des souffrances phénoménales», ce sont les mots que vous écrivez un plus loin dans votre mémoire: «D'autres, à la recherche de solutions miracles, succombent au totalitarisme.»

    Il me paraît un peu particulier que vous parliez du mariage de conjoints de même sexe comme de l'une des expérimentations humaines les plus importantes et que vous disiez par la suite que cela peut entraîner des souffrances phénoménales et que si on est à la recherche de solutions miracles, on peut succomber au totalitarisme. Je ne vois pas le lien logique entre le mariage de conjoints de même sexe et une société totalitaire.

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non, il n'y a pas de lien direct. Tout dépend de la manière dont la société essaie de régler les problèmes qui en découlent. Nous ne savons pas comment cela se passerait.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Aux pages 11 et 12 de votre mémoire, vous faites la comparaison entre le mariage de personnes de même sexe et le mariage de personnes de races différentes. Vous dites:

Cependant, l'analogie est sérieusement défectueuse parce qu'elle présume que toutes les personnes qui s'opposent au mariage homosexuel, comme celles qui s'opposent au mariage mixte, sont des fanatiques.

    Comment pouvez-vous affirmer cela?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Je ne connais pas ce terme, dans la traduction. Je ne l'ai jamais utilisé en anglais.

+-

    M. Richard Marceau: Puis-je avoir la version anglaise?

+-

    Le président: Oui.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: J'essaie de trouver la version anglaise. S'il y a un problème de traduction, il est important. En français, c'est à la page 11. On peut lire: « L'interdiction du mariage homosexuel est comme celle du mariage mixte ».

À  +-(1000)  

[Traduction]

+-

    Le président: Vous suivez la traduction, Richard. Dans l'anglais, c'est au bas de la page 6.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: D'accord. Vous dites:

[Traduction]

Cependant, l'analogie est sérieusement défectueuse parce qu'elle présume que toutes les personnes qui s'opposent au mariage homosexuel, comme celles qui s'opposent au mariage mixte, sont des fanatiques.

[Français]

    Comment peut-on dire cela? Comment peut-on présumer cela de la personne qui s'oppose à cela?

[Traduction]

+-

    Mme Katherine Young: Je pense que si on considère qu'il y a de bonnes raisons d'appuyer le mariage hétérosexuel comme étant la norme, on ne peut tout simplement pas dire que quelqu'un qui s'oppose au mariage homosexuel est fanatique.

+-

    M. Paul Nathanson: Mais on peut le dire, à mon avis, de gens qui s'opposent au mariage mixte

+-

    Mme Katherine Young: L'argument qui est soutenu ici, c'est que l'analogie est défectueuse.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: D'accord. Mais si c'est une analogie défectueuse, comment pouvez-vous faire l'analogie avec les Juifs en Angleterre à la page suivante?

    Vous dites que comparer l'interdiction des mariages mixtes, c'est-à-dire des mariages de personnes de races différentes, à l'interdiction des mariages de personnes de même sexe est une analogie défectueuse. Mais à la page suivante, vous prenez l'exemple des Juifs en Angleterre pour faire valoir un point. C'est une contradiction.

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Eh bien, tout ce que je disais, au sujet des juifs d'Angleterre, c'est que même si l'Angleterre est officiellement un pays chrétien, ce n'est pas ce qui ferait les juifs se sentir persécutés.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: D'accord. Peuvent-ils se marier en Angleterre?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Je ne parlais absolument pas des mariages juifs.

    Les Juifs, c'est évident, préfèrent épouser d'autres Juifs. Cela n'a rien à voir avec la race; c'est une question de religion. Autrement dit, ce qu'ils veulent, c'est perpétuer la Torah. Si des gens d'autres origines veulent se convertir au judaïsme, il n'y a pas de problème. Ce n'est pas du tout comme l'opposition au mariage mixte, qui soutient que les gens, tout simplement parce qu'ils sont ce qu'ils sont, ne peuvent pas se marier entre eux.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Je comprends cela. Cependant, vous dites que vous ne pouvez faire la comparaison entre la discrimination envers les homosexuels et la discrimination envers des groupes ethniques et religieux, et à la page suivante, pour appuyer un argument, vous affirmez que les Juifs sont une minorité en Angleterre, qui est un pays officiellement chrétien. Vous ne pouvez pas avoir les deux côtés; vous ne pouvez pas utiliser un argument à une page et l'argument contraire à la page suivante.

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non, ce sont des sujets complètement différents. L'un concerne le mariage mixte, et l'autre ne concerne que la nature de la situation de membre d'une minorité. Il n'y a pas de lien entre ces arguments.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Est-ce que je peux poser une dernière question?

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur MacKay.

+-

    M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.

    Comme vous pouvez le voir, ce peut-être un comité divisé, mais je ne suis pas sûr qu'il y ait de l'hostilité entre nous.

    Ma première question s'adresse à Mme Roberts, et elle concerne votre église. Vous êtes dites ministre du culte de l'Église unitarienne universelle. Comme vous le savez, nous étudions la définition du mariage, et je comprends votre argument, quand vous dites de pas voir de raison de ne pas inclure les couples homosexuels dans le mariage, mais la définition du mariage est l'union entre un homme et une femme, à l'exclusion de tous les autres.

    J'ai un document, ici, qui dit que la philosophie et la pratique d'aimer plus d'une personne à la fois a été présentée à une assemblée générale de l'Unitarian Universalist Association. L'Unitarian Universalist for Polyamory Awareness a présenté des arguments en faveur de l'acceptation des arrangements non conventionnels comme pouvant constituer une authentique alternative philosophique à la monogamie. Pouvez-vous me dire la position de votre église en ce qui concerne la deuxième partie de la définition, « à l'exclusion de tous les autres »?

+-

    R. P. Meg Roberts: Certainement. Pour ceux qui ne le savent pas, les Unitariens fonctionnent en congrégation. C'est-à-dire que leur constitution, leur gouvernance, sont telles qu'ils prennent des décisions en assemblée, et le regroupement des congrégations, que ce soit l'Unitarian Universalist Association ou le Conseil unitarien du Canada, vote sur les résolutions, et ceci en est une. Je pense que vous parlez de quelque chose qui a pu être présentée devant l'assemblée générale de l'Unitarian Universalist Association.

À  +-(1005)  

+-

    M. John McKay: Est-ce que la position d l'église unitarienne universelle est, de façon générale, que...

+-

    R. P. Meg Roberts: Bien, je n'ai pas devant moi le document dont, je pense, vous parlez. L'un de nos groupes appuie la multiplicité des relations. C'est un groupe parmi bien d'autres. Il y a les délégués qui votent pour le compte de l'Association, et il y a des organisations unitariennes universelles distinctes qui se rassemblent pour discuter de certains enjeux, comme les questions concernant les gais et les lesbiennes, l'histoire, la multiplicité des relations, le paganisme, etc. Je pense que c'est le genre de groupe qui soulèverait ce type d'enjeu en assemblée générale.

    Pourriez-vous répéter ce que vous avez lu?

+-

    M. John McKay: Ça dit seulement que c'est l'énoncé de mission de l'Unitarian Universalist for Polyamory Awareness et il y a une définition.

+-

    R. P. Meg Roberts: Ce pourrait être l'une des organisations affiliées. À l'instar de tout autre groupe, dont les groupes de défense de la justice sociale, ils peuvent présenter des résolutions à l'assemblée générale. Pour l'instant, je ne crois pas que l'UUA ou le CUC ait aucune résolution de soutien de la multiplicité des relations, bien qu'il y ait des membres de l'église unitarienne qui y soient favorables.

    Alors je ne peux pas vraiment en parler, mais si cela peut vous être utile, je peux vous donner mon opinion personnelle sur le sujet. Il y a de nombreuses formes différentes d'amour dans le monde, et à ce que je comprends, actuellement, au moins 10 p. 100 de la population a une orientation homosexuelle et affective. Selon la « norme » comme nous l'appelons, compte probablement pour 90 p. 100 de la population. Et bien, 10 p. 100 de la population est gauchère—j'en suis—et 90 p. 100 est droitière. Selon moi, il faut faire attention lorsque nous parlons de normes et de groupes particuliers.

    Tout le monde a le droit de discuter de ses expériences. Ce que j'aime du Canada, c'est sa diversité, et le fait que cette diversité soit reconnue.

+-

    M. John McKay: Mais ce dont il est question, ici...

+-

    R. P. Meg Roberts: L'exemple de la multiplicité des relations, et c'est, je crois, ce dont vous voulez que je parle...

+-

    M. John McKay: Le problème, c'est que nous examinons la définition de la loi, et, soit que votre église soutient la notion que c'est à l'exclusion de tous les autres, soit qu'elle la rejette. Tout ce que je veux savoir, c'est où en est la discussion?

+-

    R. P. Meg Roberts: À ce que je sache, aucune résolution n'a jamais été présentée au sujet de la multiplicité des relations ou adoptée par l'UUA, le CUC ou l'Église unitarienne de Montréal. Ce que nous avons confirmé, tant au CUC qu'à l'UUA, c'est que nous sommes convaincus que le mariage entre personnes de même sexe devrait être légalisé. Il suffirait de remplacer « homme et femme à l'exclusion de tous les autres par deux personnes à l'exclusion de tous les autres » . C'est cela que nous appuyons.

+-

    M. John McKay: D'accord. Alors, pour résumer...

    Je m'excuse.

+-

    Le président: M. Rushfeldt voulait aussi donner une réponse.

+-

    M. Brian Rushfeldt: Je voulais seulement parler de la diversité ou de la tolérance à la lumière du débat. Telle que je la comprends, la diversité reconnaît les différences. Je pense que ce que nous demandent certaines personnes, au Canada, actuellement, ce n'est pas de respecter les différences mais d'essayer de les regrouper dans un cadre unique, celui du mariage.

    À mon avis, ce n'est pas respecter la diversité. On ne peut pas dire qu'on respecte toutes ces différences lorsqu'on veut encore les encadrer du terme « mariage », ou les intégrer à cette structure particulière.

+-

    M. John McKay: Ma deuxième question revient sur un sujet dont ont parlé M. Macklin et M. Lee tard hier après-midi, quand nous discutions de ceci. J'aimerais revenir à l'essentiel.

    Ici, nous essayons, en quelque sorte, de toujours garder l'oeil sur ce qui se passe pas très loin d'ici, à la Cour suprême du Canada. Nous avons l'illusion que c'est un dialogue. Certains d'entre nous sont un peu plus cyniques et je pense que c'est plutôt une espèce de monologue, mais c'est un autre sujet.

    Ce dont je parle, c'est que l'article 1 stipule que le mariage ne peut être restreint que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique. J'aimerais que les professeurs Young et Nathanson puissent nous expliquer ce qu'est une justification qui peut se démontrer.

+-

    Mme Katherine Young: Là encore, je crois que l'histoire de l'homme explique ce qui peut se justifier dans le sens où certains choix ont déjà été faits. Des exceptions ont été permises une fois que les normes ont été définies. La norme permet certaine latitude, pour que des ajustements puissent être faits selon des circonstances nouvelles, comme je l'ai dit plus tôt, mais c'est le genre de justification que contient notre passé.

    Ceci étant dit, nous devrions sérieusement penser que l'universalité... on peut toujours revenir et dire ce qu'on veut, mais pensons encore aux bonnes raisons. Quelles bonnes raisons y a-t-il de faire ceci? Permettez-moi de commencer par dire que toute analyse éthique commence avec l'analyse des risques et des préjudices. Il est tout à fait légitime, dans ce genre de discussion, de peser les risques et les préjudices avec les avantages.

    Alors, quels sont les risques? Revenons à notre histoire d'expérimentation. Quel que soit le sérieux avec lequel nous allons définir ceci, je crois qu'il est grave que nous voulions risquer de rompre le lien entre les père et les femmes et des enfants. L'hétérosexualité a besoin de la culture. Ce n'est pas seulement qu'un fait biologique. Il faut une culture pour amener les hommes à établir ce lien fondamental avec les femmes et les enfants, parce que c'est le lien le plus faible de ce triangle biologique; la culture est indispensable à cela. Si nous la supprimons, et nous ne laissons pas les gens affirmer l'importance pour les hommes hétérosexuels d'être pères, que c'est important pour leur identité, et s'appuyer sur la culture pour établir un lien entre eux, les femmes et les enfants, nous troublons cette raison d'être fondamentale du système.

    Nous devons aussi dire qu'il nous faut lier les hommes avec les femmes ensemble dans les sociétés humaines, sinon nous avons des sociétés polarisées, et ce lien, encore une fois, se fait au moyen de la culture. Il y a des quantités phénoménales d'aspects de la culture auxquels nous ne pensons plus. C'est comme si la nature... Et nous devons nous fonder sur la culture pour orienter l'hétérosexualité, particulièrement pendant l'adolescence. Il faut de la culture pour cela aussi. Enlevez-la, et il n'y a plus rien pour appuyer l'identité hétérosexuelle et le processus de procréation.

À  +-(1010)  

+-

    M. Paul Nathanson: Je voudrais ajouter quelque chose. Votre question était, je crois, un peu à l'envers. Je pense que le fardeau de la preuve ne devrait pas reposer seulement sur les gens qui voudraient tout simplement préserver le statu quo. Le fardeau de la preuve devrait reposer sur les gens qui veulent le changer. Ils doivent prouver qu'ils ont des raisons assez convaincantes de faire ce changement.

+-

    M. John McKay: Je suis d'accord là-dessus.

+-

    Le président: J'aimerais maintenant laisser la parole à Mme Ablonczy.

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Je vous remercie.

    Je ne suis pas un membre régulier de ce comité mais, bien entendu, en tant que députée, j'ai reçu beaucoup d'information sur le sujet. L'un des arguments que j'entends est que les couples de même sexe s'aiment, s'engagent l'un envers l'autre et devraient être en mesure de pouvoir célébrer cet engagement par le mariage. La révérende Roberts a dit voir ceci comme une célébration de l'amour. Monsieur Nathanson, je crois, vous êtes particulièrement qualifié pour parler de cette intersection de l'amour et du mariage, et de la manière dont nous devrions percevoir le changement de la politique publique à la lumière de ce genre de sentiments dans notre société, alors, je vous demande votre avis sur la question.

+-

    M. Paul Nathanson: Tout d'abord, ni Katherine, ni moi, ne nous opposons—en fait, je l'appuie pleinement—à l'amour entre homosexuels, comme entre toutes autres personnes, et il y a, de fait, des églises pour le célébrer; l'Église unitarienne en est. Je n'y vois aucun problème. C'est la question de savoir si se devrait être fait dans le cadre spécifique du mariage qui, selon moi, est problématique.

    Je dirais aussi, si je peux en juger d'après la culture populaire comme la Saint-Valentin et tout ce que vous voulez, que la plupart des gens, de nos jours, partent du principe que le mariage est principalement une question d'amour, c'est-à-dire de gratification émotionnelle. Maintenant, je ne voudrais pas dire que l'amour n'est pas partie du mariage, mais je ne voudrais certainement pas non plus dire que c'est la condition sine qua non et unique du mariage. Il y a beaucoup plus dans le mariage; nous avons parlé un peu des enfants et de la société. Je pense que tout ce qui peut amener les gens à penser encore plus que ce n'est qu'une question d'amour—pourquoi les homosexuels ne devraient-ils pas s'aimer, et donc, pourquoi ne devraient-ils pas se marier—ne fait que déformer le concept du mariage. Le mariage, ce n'est pas que la gratification émotionnelle.

+-

    Mme Diane Ablonczy: J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Young. D'après vos études, vous avez dit qu'il y a eu, dans certaines sociétés, une acceptation des unions de même sexe par le mariage. Je ne sais pas si je vous ai comprise. Si c'est le cas, je me demande si vous pourriez nous donner une idée de l'ampleur de ce phénomène, et aussi des effets que cette acceptation a pu avoir lorsque les politiques sociales ont été modifiées dans ce sens particulier.

À  +-(1015)  

+-

    Mme Katherine Young: À l'examen de notre histoire, avec les anthropologues qui ont consigné tout ce qui était observé—dans la période moderne, en tout cas—nous pouvons constater qu'il y a eu quelques exemples de mariage entre personnes de même sexe. Mais si on lit les documents d'auteurs qui soutiennent l'homosexualité, ils recourent souvent aux exemples de relations entre personnes de même sexe pour illustrer le mariage homosexuel, et il y a beaucoup plus d'exemples de relations entre personnes de même sexe que de mariages entre personnes de même sexe .

    Mais alors, souvent, ils ne regardent pas le contexte. Si on observe de près le contexte de ces quelques exemples de mariages entre personnes de même sexe, on voit qu'ils sont généralement ajustés à la norme plus générale de la reproduction hétérosexuelle, du mariage et de la vie de famille. Par exemple,un mariage entre personnes de même sexe peut être le deuxième mariage d'un homme reproducteur qui a eu un mariage hétérosexuel, ou encore le nombre de personnes qui ont été autorisées à s'intégrer à ce contexte est limité par les shamans, etc. Alors, un argument présenté est qu'on ne peut prendre ces exemples hors contexte; il doivent minutieusement être examinés.

    Une autre série d'exemples est, en fait, tirée des rites d'initiation et non pas du mariage en tant que tel. Ils recourent aux mêmes types de symbolique, mais alors l'homme, après une certaine période de relations hétérosexuelles, passe par le mariage hétérosexuel, comme en Grèce antique, puis revient à son orientation hétérosexuelle. Si on met ensemble ces deux exemples parce que le langage est similaire, on se retrouve avec un plus grand nombre d'exemples, et pourtant ce n'est pas le cas.

    Il existe de nombreux exemples d'amour utilisant des analogies avec le mariage, mais c'est plus pour parler de l'amour qu'il y a entre le couple de même sexe que du mariage. Bien qu'il en existe, ils sont toujours l'exception. Ils peuvent être honorés, ce n'est pas qu'ils sont perçus sous une lumière négative, mais ils sont limités dans un contexte spécifique, et cet ajustement a été fait.

    Il peut y avoir des sociétés qui ne l'ont pas fait, mais il y a aussi des sociétés qui disparaissent si leurs systèmes de reproduction s'écartent trop de leurs bases.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    J'aimerais avertir les membres du comité et les témoins qu'il arrive que nous puissions dépasser notre heure, mais le Comité de l'agriculture doit se réunir ici à 11 heures, alors je vous prie de vous efforcer à la concision.

    Madame Roberts

+-

    R. P. Meg Roberts: J'apprécie les éléments qu'a apportés Mme Young, au sujet de la réflexion sur la norme. L'une des normes, c'est-à-dire les caractéristiques sur lesquelles nous nous fondons quand nous examinons les aspects réguliers du mariage au fil des temps... Une norme signifie le plus grand nombre, n'est-ce pas? Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de variantes, comme vous l'avez dit. Parlez-moi de la norme,

+-

    Mme Katherine Young: La norme est l'idéal. Il y a deux sens au mot «norme», alors vous avez raison. L'un est simplement la moyenne, mais la norme dont nous parlons ici est l'idéal qui...

+-

    R. P. Meg Roberts: Pour vous, c'est l'idéal.

+-

    Mme Katherine Young: ...qu'établit la communauté.

+-

    R. P. Meg Roberts: D'accord, et c'est pourquoi j'ai parlé du fait que—et je pense que M. Marceau le faisait aussi—l'idée que nous nous faisons de l'idéal dans une société change avec le temps. Si auparavant, et dans de nombreux pays encore, la norme, l'idéal du mariage est considéré comme visant à appuyer le cycle de reproduction, j'aimerais suggérer que nous tenions compte du fait  que nous vivons dans un monde surpeuplé. Nous reconnaissons maintenant, particulièrement en Amérique du Nord, qu'il n'est plus nécessaire d'avoir un cycle de reproduction qui assure la survie de l'espèce humaine. Au lieu de cela, puisque nous consumons les ressources, ce qu'il nous faut tenir en compte, c'est notre idéal de justice pour les hétérosexuels et les homosexuels.

    Lorsque nous parlons d'autres types de société et de leurs idéaux, le gouvernement fédéral, en particulier, ne tient pas compte de notre point de vue, qui reconnaît que les couples de même sexe ont aussi droit à certains types d'avantages.

À  +-(1020)  

+-

    Le président: Monsieur  Rushfeldt, vous avez la parole.

    Je ne peux pas revenir là-dessus, madame Young. J'ai une longue liste d'intervenants, et il ne reste plus beaucoup de temps.

+-

    M. Brian Rushfeldt: Merci. Je serai bref.

    Je crois que c'est M. Nathanson qui a parlé de l'amour. Nous avons entendu les termes célébration et engagement. J'aimerais que nous ne perdions pas de vue que ce qui fait la singularité de l'institution du mariage, à mon avis, est l'effet cumulatif de tout cela.

    Il peut y avoir deux personnes qui s'aiment. Je sais que des filles et des pères s'aiment entre eux. Si nous fondons un mariage sur cela, est-ce que nous allons dire qu'un homme peut épouser sa fille parce qu'il l'aime? Non. Je pense qu'il nous faut songer à l'effet cumulatif du concept général de ce qui fait la singularité du mariage.

    S'il y a d'autres formes de relations, pas de problème; je ne m'y oppose pas. Mais n'essayons pas de les intégrer au concept du mariage, parce qu'ils n'y ont tout simplement pas leur place. 

+-

    Le président: Je m'excuse. J'aurais dû souhaiter la bienvenue à Mme Sage avant. J'espère que votre voyage à Kingston n'a pas été trop difficile.

+-

    R. P. Kathy Sage («Kingston Unitarian Fellowship»): Le stationnement l'a été plus que le voyage jusqu'ici.

+-

    Le président: J'ajouterai cela à notre liste.

    Je vais maintenant laisser la parole à M. Macklin pour trois minutes. 

+-

    M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Notre problème est en partie qu'il nous faut essayer de comprendre ce qui, parfois, semble être un écran de fumée dans cette discussion. Nous nous efforçons surtout, ici, c'est certain, de trouver des mesures de protection et des avantages équitables pour tout le monde dans cette relation qu'on essaie de définir comme étant le mariage.

    Il semble que Mme Young et M. Nathanson disent quelque chose du genre qu'on peut être dans ces relations engagées, mais que ce n'est pas seulement une conséquence de l'évolution du mariage. Il s'agit plus que de créer un symbole en disant qu'on redéfinirait le mariage comme englobant les couples de même sexe et les couples hétérosexuels. C'est l'argument qui est présenté. Nous entendons que ce n'est pas l'équité, mais le symbolisme qui est la clef du désir d'obtenir l'unité du mariage entre tous, hétérosexuels et homosexuels.

    Pourriez-vous vous expliquer plus en détails et nous dire ce que vous pensez de cet argument?

+-

    Mme Katherine Young: Nous croyons tous en l'équité, mais même s'il y a équité politique, il y a des différences entre le corps de l'homme et celui de la femme. Il y a des différences inhérentes entre la virilité et la féminité; par conséquent, la culture a toujours dû tenir compte de ces différences.

    Nous pouvons dire que dans le passé, les couples de même sexe auraient pu formuler des normes pour le mariage. Une collectivité de femmes aurait toujours pu obtenir du sperme et se constituer en communauté. Les hommes auraient toujours pu enlever des enfants ou les obtenir d'une façon ou d'une autre une fois qu'ils étaient nés et constituer une communauté d'hommes. Mais ce n'est jamais arrivé, alors, ça signifie que les gens jugent qu'il est important de tenir compte de ces différences entre la masculinité et la féminité, de les unir sous une forme d'institution et soutenir cette institution pour le bien de la collectivité, des enfants, et pour lier les hommes et les femmes.

    Je ne sais pas si c'est la réponse que vous souhaitiez.

+-

    Le président: Merci, monsieur Macklin.

    Monsieur Nathanson.

+-

    M. Paul Nathanson: Je pense que vous avez raison. Il s'agit ici de lutte des symboles, et non pas d'avantages.

    Dans mon exposé, j'essayais de dire ce que signifiait le fait d'être membre d'une minorité. Nous vivons dans une société démocratique et nous sommes tous, d'une façon ou d'une autre, membre de groupes minoritaires. Alors, si nous disons que le statut de membre d'une minorité est un symbole intolérable et qu'il nous faut un autre symbole pour faire partie de la majorité, alors, il n'y a pas de démocratie. Je ne voudrais pas lier l'identité et tous les symboles qui l'entourent à la notion d'appartenance à la majorité. Je pense que c'est une position qui ne peut être appuyée que sur des motifs politiques et philosophiques généraux, pour ne pas dire psychologiques.

    L'exemple que j'ai utilisé est tout simplement que les Juifs vivent ici depuis longtemps et représentent un groupe minoritaire, et ils ont certainement souffert d'être une minorité. Mais cela ne veut pas dire que leur estime de soi ou leur identité de Juif en aient souffert.

À  +-(1025)  

+-

    Le président: Merci.

    Madame Roberts.

+-

    R. P. Meg Roberts: Si je comprends bien, votre question concernait la symbolique du mariage et son importance. À mon avis, il y a d'excellentes raisons qui font l'importance de cette symbolique pour les couples gais et lesbiennes.

    Nous connaissons déjà les avantages pratiques. En tant qu'institution, le mariage est reconnu dans la culture canadienne comme le cadre de l'amour romantique et érotique dans une relation conjugale entre deux personnes qui ont des valeurs communes et qui veulent en assurer la pérennité. C'est quelque chose que les couples de gais et de lesbiennes veulent faire reconnaître parce que cela existe déjà.

    Ils veulent y accéder en tant qu'institution, et ne pas le permettre, c'est faire preuve de discrimination à leur égard. Ils en reconnaissent la symbolique et elle ne leur est pas accessible, et c'est pourquoi ils demandent la justice et à être soustraits à la discrimination.

+-

    Le président: M. Ménard a la parole, pour trois minutes.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): En tout respect pour M. Nathanson et Mme Young, je pense que le mémoire qu'il nous ont soumis présente de grandes failles aux plans de la rigueur et de la logique.

    D'abord, les gens qui sont d'orientation homosexuelle ne veulent pas s'engager dans le mariage au nom d'un idéal démocratique et parce qu'ils s'estiment minoritaires. Ils s'engagent dans le mariage parce qu'ils croient au sentiment amoureux et parce qu'ils ont le goût d'occuper un espace social. Cela n'a rien avoir avec un statut de minoritaire ou de majoritaire.

    Deuxièmement, tout le plaidoyer que vous faites ne peut résister à l'analyse. D'abord, dans toutes les sociétés, il y a eu des segments de la population qui étaient homosexuels. Tous n'ont pas pu le vivre, dépendamment des construits culturels, mais c'est un autre débat.

    Vous vous présentez devant nous ce matin en disant que la plus grande menace au mariage est le divorce, et vous avez raison. Mais jusqu'à preuve du contraire, les gais n'ont pas investi l'institution du mariage et le divorce existe. Donc, en quoi l'adhésion au mariage de la communauté des gais ou des homosexuels qui croient aux valeurs du mariage pourrait-elle fragiliser une institution, alors que la plus grande menace qui plane sur cette institution est le divorce de gens qui eux-mêmes n'y ont pas eu accès?

    Il y a dans votre discours une faille logique qui ne peut résister à l'analyse, et vous devriez la revoir. Si j'étais professeur et qu'un étudiant m'avait soumis ce type d'argumentation, sur le plan de la relativité culturelle, il aurait eu A+, mais sur le plan de la logique, il aurait eu D-.

    J'aurai une question pour M. Rushfeldt par la suite.

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Je le disais tout à l'heure, vous assimilez le mariage à l'amour, et ce n'est pas une équation que je ferais. Je n'y vois pas de lien logique. Ce n'est pas forcément que l'amour ne fasse pas partie du mariage, mais je ne crois pas que ce soit la caractéristique qui le définit.

    Maintenant, j'ai oublié l'autre partie de la question.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Êtes-vous marié?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Pensez-vous que si un jour vous vous mariez, ce sera pour une raison d'affaires? Si ce n'est l'amour, quelle est la valeur qui sous-tend le mariage? Dites-moi quelle est la valeur fondamentale qui préside au mariage si ce n'est pas l'amour.

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Nous avons essayé d'en discuter. Nous avons parlé de plusieurs choses, comme la constitution d'un cadre approprié pour élever des enfants et l'établissement d'un lien entre les hommes et les femmes.

    J'essaie seulement de dire que l'amour n'est pas nécessairement ce qui définit le mariage. Je ne vois pas le mariage comme le seul moyen de conférer de la dignité à une relation amoureuse. Je ne crois pas que ce soit le mariage ou la moindre intervention de l'État qui y confère vraiment de la dignité.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Dans mon réseau social, je ne connais personne qui se soit marié sans être amoureux, sauf peut-être un étudiant qui s'est marié pour les prêts et bourses. Tous ceux que je connais dans mon réseau social se sont mariés parce qu'ils étaient amoureux. Laissez-moi vous dire que le jour où je vais me marier, c'est parce que je vais être amoureux.

À  +-(1030)  

[Traduction]

+-

    Mme Katherine Young: Nous ne disons pas que l'autorisation des mariages gais ferait augmenter le taux de divorce. Le taux de divorce est ce qu'il est, et c'est un autre problème. Ce que nous disons, cependant, c'est que la culture hétérosexuelle ne serait plus la culture générale. On dirait qu'elle privilégie l'hétérosexualité et ce ne serait pas permis. Cela signifierait la chute de cette contrepartie culturelle de la biologie. Ce serait accompagné d'autres genres de choses. Alors je pense que ce sont deux questions tout à fait différentes qui ne devraient pas être liées.

+-

    Le président: Vous pouvez poser une autre question, monsieur Ménard, puis nous laisserons la parole à ceux qui ont la main levée.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: La question de la polygamie, à mon point de vue, est un argument archi-faux qui est à la limite de la malhonnêteté. Il n'y a aucun lien entre la polygamie et le mariage gai, parce que la polygamie n'est pas une valeur qu'on défend dans la société canadienne. Aucune cour de justice, aucune charte ou aucun mouvement organisé ne fait la promotion de la polygamie, parce qu'elle est contre l'égalité des individus.

    Si le seul argument qu'on peut faire valoir est de dire que si on reconnaît les droits des gais, on reconnaîtra ensuite la polygamie, c'est un argument qui vaut zéro sur le plan de la logique et des valeurs canadiennes.

[Traduction]

+-

    Le président: Je vois des mains levées partout. Il y en a même en arrière. Je laisserai d'abord la parole à Mme Roberts, puisqu'elle était la première. Mais j'aimerais que tout le monde essaie d'être très concis dans ses réponses, comme M. Ménard. J'ai été très généreux avec M. Ménard. C'est son anniversaire.

    Allez-y.

+-

    R. P. Meg Roberts: Votre premier argument s'est perdu. C'est à lui que j'aurais voulu répondre. Est-ce que vous pouvez me rappeler ce que c'était?

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Elle portait sur la fragilisation du mariage par le divorce, alors que les gais n'ont pas investi cette institution et que le mariage est déjà fragilisé.

[Traduction]

+-

    R. P. Meg Roberts: Oui, comme vous l'avez dit, il ne s'agit pas ici du divorce. C'est une question distincte. Ce dont nous voulons parler, c'est des relations saines, entre personne du sexe opposé ou du même sexe.

    Ce que j'entends, si je comprends bien, c'est que, lorsqu'on considère un mariage comme étant l'institution qui soutient les définitions de ce que sont l'homme et la femme, il est important que nous reconnaissions que la masculinité et la féminité font partie intégrante de nous tous. Je suis à la fois homme et femme, dans le sens culturel, mais non pas dans le sens biologique. Je ne pense pas que le mariage entre personnes de même sexe y soit une menace.

    L'autre chose que je veux dire, c'est que, comme la majorité est actuellement hétérosexuelle, il est très important que nous ne nous engagions pas dans l'hétérosexisme et que nous reconnaissions l'importance du partage des droits pour les minorités aussi.

    Je pense que la distinction à faire, puisque vous parliez des Juifs, pour les hétérosexuels, c'est que nous reconnaissions que le mariage n'est pas seulement que... que le mariage présente, pour les gais et lesbiennes qui veulent se marier, la possibilité, si c'est légalisé pour eux, de jouir de privilèges qu'ils n'avaient pas auparavant.

    Voilà que j'ai perdu le fil de mes pensées. Je m'en excuse.

+-

    Le président: Monsieur Rushfeldt, très brièvement, je vous prie.

+-

    M. Brian Rushfeldt: J'aimerais seulement dire à M. Ménard, au sujet de l'amour, que peut-être que la définition de l'amour n'est pas aussi claire que nous pourrions le présumer, parce que je crois que l'amour doit tenir compte de la constitution biologique de l'autre personne.

    Vous avez parlé de polygamie, et dit qu'il n'y a pas de mouvement de favoriser la polygamie. Permettez-moi de vous rappeler qu'il y a deux ou trois ans, trois personnes se sont présentées ici, sur la Colline parlementaire, qui voulaient se marier. Il y a 20 ans, il n'y avait pas non plus de mouvement pour faire reconnaître les relations entre personnes de même sexe. Si nous décidions que le mariage assume, d'un coup de crayon, la définition qu'on veut lui donner, quelle qu'elle soit, il y aura—j'en suis absolument convaincu—d'autres groupes qui viendront revendiquer d'autres choses.

+-

    Le président: Madame Sage, est-ce que j'ai vu votre main levée? Vous avez la parole.

À  +-(1035)  

+-

    R. P. Kathy Sage: Merci. Je m'excuse de mon retard.

    J'aimerais exposer un point de vue très pratique. Je suis ministre du culte unitarien. J'ai dirigé des cérémonies d'union de gais et de lesbiennes. Il y en a eu une, justement l'été dernier, où deux femmes s'unissaient, dont une avait cinq enfants et l'autre deux, issus de mariages hétérosexuels antérieurs. Elles ont établi une relation amoureuse.

    En tant que ministre du culte, je veux offrir un soutien aux familles qui viennent à moi, qu'elles soient hétérosexuelles ou homosexuelles, pour qu'elles donnent de l'amour à leurs proches, qu'elles leur offrent un soutien, qu'elles puissent contribuer à la stabilité d'un foyer. L'amour, c'est entre autres le fait de vouloir des prestations de pension qu'on peut léguer. L'amour, c'est notamment vouloir offrir un foyer stable aux enfants pour qu'ils puissent grandir et se sentir aimés et entourés. Ces parents vivent l'hostilité que subissent leurs enfants parce qu'ils ne peuvent pas être unis par le mariage comme d'autres parents. Il y a des questions d'ordre très pratique auxquelles je suis confrontée quotidiennement dans mon rôle de pasteur auprès des familles.

    J'aimerais terminer avec un souvenir qui date d'avant même que je puisse célébrer des mariages à l'église. En 1979, j'accompagnais Bob et Michael qui prenaient un engagement dans la mesure où ils le pouvaient. Une relation légale n'était pas possible pour eux, c'était en 1979, et maintenant, 23 ans plus tard, ils sont encore ensemble. Ils forment une famille, ils se soutiennent mutuellement. Leur amour a duré.

    Des gens comme eux aimeraient avoir l'appui juridique de l'État. Laissez les églises, les synagogues et d'autres groupes religieux décider s'ils veulent donner leur appui. En tant que ministre du culte unitarien, avec ma communauté religieuse, je veux offrir ce soutien et nous aimerions que le gouvernement offre la protection de la loi.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Je vais maintenant laisser la parole à M. Lee pour trois minutes.

+-

    M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.

    Nous voilà encore un comité d'experts très intéressant, et c'est une question fascinante. Nous faisons réellement un examen très minutieux de notre société.

    Au sujet de la réponse de Mme Sage, l'une des questions que je ne poserai pas, c'est qu'est-ce qui est arrivé aux hommes de ces deux relations?

    Quoi qu'il en soit, ceci m'amène à la question que je voulais poser à Mme Young. L'argument juridique que soutiennent les gais et lesbiennes est qu'il y a une discrimination indirecte dans notre définition actuelle du mariage. Si cette discrimination indirecte est maintenue, nous allons devoir trouver des preuves pour justifier cette restriction de leurs droits présumés... Mais oui, c'est un droit. Ils ont le droit de ne pas faire l'objet de discrimination.

    Certaines de ces preuves pourraient être dans ce ce que vous, monsieur Nathanson, et d'autres nous avez dit aujourd'hui. Est-ce que vous pourriez m'aider à formuler un argument avec fondement anthropologique pour dire que notre définition du mariage a toujours constitué un poste d'ancrage, un lieu consacré aux hommes et aux femmes dans la famille? En l'absence de tels postes d'ancrage, nous aurions pu évoluer—et je ne dis pas que nous allons le faire—un peu plus comme les éléphants, dont les males apparaissent au moment opportun, mais autrement, ils vivent leur vie, ou encore comme les meutes de loups. Et je ne sais pas si les lions font la même chose... mais les hommes ne font pas partie de l'unité familiale.

    Ce que vient de dire Mme Sage est justement un exemple de femmes qui s'unissent sans les hommes, alors j'aimerais que vous formuliez, si vous le pouvez, un argument qui ait après un fondement anthropologique, quelque chose qui permettrait à un avocat d'exprimer devant la Cour ou la Chambre, autour de cette table, de façon censée, cette justification anthropologique.

+-

    Le président: Je dois dire, en tant que Néo-Brunswickois, que j'admire le système d'éducation de Scarborough.

    Madame Young.

+-

    Mme Katherine Young: Lorsqu'on pense au mariage, c'est selon la perspective des femmes, des enfants ou des hommes. C'est différent selon la lentille qu'on utilise pour observer cette relation tripartite.

    Maintenant, si nous commençons à découpler les hommes de ce processus, les hommes sont déjà en marge de la vie familiale dans le sens où on peut créer une nouvelle génération avec une cuiller à thé de sperme. La culture a toujours servi à soutenir l'identité mâle dans la vie familiale et à favoriser l'établissement de ce lien.

    Je ne sais pas quel genre de société nous aurions si nous prenions la majorité des hommes, les hommes hétérosexuels, pour les extraire de ce processus de vie de façon générale. Que fait ce groupe, alors? Il ne regarde plus vers l'avenir. Est-ce qu'il devient un groupe en voie d'extinction? Devient-il un groupe distinct, polarisé? Est-ce qu'il devient hostile aux femmes, aux enfants? Toutes sortes de choses pourraient arriver si nous prenions cette voie.

    Alors, tandis que nous allons vers le mariage gai, les nouvelles technologies de reproduction arrivent à l'avant-plan et il est beaucoup plus facile pour les femmes de tout simplement recourir aux banques de sperme. Si nous devions prévoir l'équité reproductive pour les hommes dans un nouveau scénario de la société, alors, il nous faudrait plaider en faveur de la légalité de la maternité de substitution, à laquelle la plupart des femmes se sont très vivement opposées, et probablement que le gouvernement serait contre, lui aussi. Il se pourrait que nous devions plaider en faveur des grossesses ex-utero, ce à quoi les féministes se sont vivement opposées. Mais c'est le seul moyen dont on pourrait neutraliser cette différence entre les corps de l'homme et de la femme.

    Si nous n'empruntons pas cette voie ou si elle reste l'exception plutôt que la norme, alors nous revenons à cette nécessité de nous appuyer sur la culture pour unir les hommes et les femmes dans un cadre intime et durable, et c'est cette intimité qui permet de transmettre une bonne part de cette culture hétérosexuelle. Elle est transmise, par exemple, dans la vie de famille. Elle est transmise par l'enseignement. Elle est transmise par les normes qui sont encodées dans les religions et les communautés religieuses, etc. Alors, les répercussions pourraient être vraiment graves.

    Quelque chose de très grave pourrait arriver avec les enfants. Nous ne voulons pas perdre de vue les enfants, parce que si on en juge par les décisions des tribunaux et par bon nombre des mémoires présentés, les enfants ne sont presque jamais mentionnés. C'est devenu un enjeu d'adultes, qui touche les droits des adultes.

À  +-(1040)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je vais maintenant laisser la parole à Mme Ablonczy pour trois minutes.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Je trouve aussi troublant qu'on puisse, dans une discussion sur la politique sociale, suggérer que les hommes et les femmes sont en quelque sorte interchangeables et que nous n'avons rien d'unique à apporter à la vie de famille et à l'éducation des enfants. Je me demande si vous pouvez nous dire, d'après vos études, madame Young, si c'est quelque chose qui devrait nous préoccuper tandis que nous examinons l'institution du mariage. Quelles seraient les conséquences, d'après vos études, ou quelles conséquences pouvez-vous entrevoir, sur nos enfants et sur leurs interactions, en tant que parents, plus tard? Est-ce que cela fait une différence si les deux parents sont des hommes ou si ce sont des femmes? Est-ce qu'il y a des répercussions?

    Mme Roberts a suggéré que ce pourrait être une espèce de moyen de contrôle des naissances, je suppose, mais nous sommes dans un pays... Je siège au Comité de l'immigration, et on essaie désespérément de faire venir des immigrants au Canada parce que nous nous inquiétons de la chute du taux de natalité, alors je pense que ce serait sain pour notre société, sur une scène mondiale économiquement compétitive. J'aimerais que vous puissiez nous donner une idée de ce qui pourrait nous attendre.

+-

    Mme Katherine Young: L'une des choses dont Paul et moi doutons, c'est qu'une ou deux femmes puissent donner une identité masculine à un petit garçon ou qu'un ou deux hommes, qu'ils soient pères célibataires ou un couple gai, puissent donner à une petite fille une identité féminine. Nous soutenons qu'il faut des parents des deux sexes pour faire en sorte que quel que soit le sexe de l'enfant, il a un modèle d'identité. Il y a d'autres raisons en faveur des deux parents, mais c'en est une des plus fondamentales.

    De plus, il est beaucoup plus difficile pour les garçons de trouver leur identité lorsqu'ils sont généralement élevés par des femmes au début de leur vie, de trouver leur virilité, une identité masculine saine. C'est une caractéristique très complexe de la culture hétérosexuelle, qui nécessite beaucoup de réflexion et de travail culturel.

    Nous savons que les jeunes garçons commencent à avoir de graves problèmes. Ce pourrait être un des gros enjeux de notre société ces 20 ou 30 prochaines années aussi, avec le taux élevé de décrochage scolaire chez les garçons et le haut taux de suicide chez les hommes. Ce sont des enjeux qui se pointent à l'horizon.

    Je pense que nous avons effectivement un problème de population au Canada—ce n'est pas seulement la population mondiale—parce que notre démographie est en chute; il nous faut, soit plus de naissances ou des immigrants. Si nous neutralisons la culture d'hétérosexualité, nous ne pouvons pas appuyer la venue d'immigrants. Ils auront, au début, un plus haut taux de natalité, mais il leur faut l'appui de cultures, pour favoriser la pérennité du système. Autrement, avec chaque génération, nous devons compter sur de nombreux immigrants pour remplacer la population, et la situation se perpétue.

À  +-(1045)  

+-

    Le président: Mme Roberts aimerait répondre à cela.

+-

    R. P. Meg Roberts: Il est important de dire que ce dont je parle ici, ce n'est pas de nous débarrasser de la culture hétérosexuelle, mais de reconnaître la diversité. Si je saisis bien—ou c'est l'interprétation que je donne—vous dites que les parents de même sexe ne peuvent donner l'identité sexuelle, que s'il y avait deux femmes, elles ne pourraient donner l'identité sexuelle à un garçon. Nos identités sexuelles sont formulées au sein de notre culture; nous obtenons les identités sexuelles des amis du couple, de la télévision, etc. de sorte qu'il ne s'agit pas pour moi d'un argument convaincant.

    Je veux aussi revenir à la question de la population. Ce que j'essayais de dire lorsque je parlais de surpopulation c'était que l'idéal du mariage, selon moi, consiste maintenant à être capable de se reproduire. Je crois que c'est un cadeau et un désir chez certaines personnes; je n'essayais donc pas de dire que nous allions utiliser les mariages entre personnes de même sexe pour freiner la croissance démographique. Je voulais que nous demandions par là quels sont nos idéaux du mariage à l'heure actuelle? À l'heure actuelle, ils ne se confinent pas seulement, selon moi,au cycle lié à la reproduction

+-

    Le président: John McKay.

+-

    M. John McKay: Merci.

    Je crois que le professeur Young a indiqué que le révérend Roberts n'a peut-être pas compris le point. Dans la réponse que vous allez me donner, aborder la question de l'identité sexuelle parce que je ne pense pas que les deux sont d'accord sur ce point.

    Voici ce dont je voulais parler. Nous avons entendu le révérend Hawkes hier. Dans son exposé, il a surtout fait valoir qu'il ne s'agit pas d'un débat entre la communauté gaie et lesbienne et les croyants ou diverses croyances religieuses. Il estime que la règle de common law contre le mariage homosexuel—je crois qu'il faisait allusion à Hyde—est un vestige de l'application par l'État de la théologie chrétienne traditionnelle, qui n'a plus sa place au XXIe siècle. Il soutient tout au long de son document que ce sont particulièrement les chrétiens conservateurs qui imposent leurs valeurs, qu'il ne s'agit que d'un soutien permanent pour un seul point de vue religieux et que c'est contraire un groupe à accepter les pratiques religieuses d'un autre.

    Il développe ensuite un argument plus anthropologique, à savoir qu'en fait le système d'éducation de Scarborough est de loin supérieur et qu'avant l'arrivée des Européens dans ce pays, les Ojibwas—il utilise l'exemple des Ojibwas—permettait la polygamie, les conjoints de même sexe, etc.

    J'aimerais connaître votre réponse à ces deux questions, à savoir s'il s'agit d'une simple question de dominance d'une religion au sein de notre culture et la question de l'identité sexuelle pour laquelle, selon moi, il nous faut une réponse.

+-

    Le président: Madame Young.

+-

    Mme Katherine Young: Notre recherche a pour fondement l'étude de toutes les principales religions du monde. Lorsque je parle de caractéristiques universelles, je tiens compte du judaïsme, du confucianisme, de l'hindouisme, du christianisme et de l'islam. Elle utilise aussi des travaux qui ont été faits sur les sociétés de petite dimension, tout particulièrement ceux de Suzanne Frayser, qui a effectué l'une des études les plus importantes se rapprochant le plus de nos intérêts dans ce cas-ci , étude qui a porté sur 62 sociétés de différentes parties du monde pour vérifier les variables. Ces caractéristiques universelles dont j'ai parlé découlent de cette recherche comparative; il est donc impossible qu'elle privilégie le christianisme. En fait, elle s'attache à la foi aux religions mondiales ainsi qu'aux religions de plus petite envergure.

    Lorsque nous considérons les sociétés de petite dimension, il existe toutefois certaines différences. C'est la raison pour laquelle, en ce qui a trait aux caractéristiques universelles, j'ai pris bien soin de parler de formation de liens affectifs entre les hommes et les femmes. Parfois, après la naissance d'un enfant, la relation n'est pas toujours avec la mère ou le père biologique. Le groupe peut prendre la relève, mais ces sociétés ont une façon très complexe de définir l'identité masculine et, en tant que groupe, ils prennent soin d'une partie du reste. Ces sociétés, soit dit en passant, ne sont pas celles qui se rapprochent le plus des nôtres, qui sont les sociétés de grande envergure. Ensuite nous parlons de la durabilité, les cultures qui la favorisent, l'identité biologique et le recours à la culture pour atteindre cette permanence.

    Vous devez vraiment connaître vos religions mondiales et vous disposer de bonnes méthodes de comparaison pour obtenir ce point de vue des universaux. C'est important parce que cela peut permettre de corriger tout genre de point de vue myope qui provient d'antécédents chrétiens qui ont dominé dans beaucoup de sociétés occidentales. C,est ce point de vue que vous obtenez en recourant à cette méthode.

    Une dernière chose. Dans mon affidavit qui se trouve maintenant à la Bibliothèque du Parlement, je passe au travers de chacune des caractéristiques universelles et presque universelles de même que des variables et je démontre cette théorie en fonction de chacune de ces religions.

À  +-(1050)  

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Marceau.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Malheureusement, je vais être obligé de vous demander de me répondre par un oui ou par un non parce qu'il ne me reste plus beaucoup de temps. À la page 8 de votre mémoire, vous dites:

[Traduction]

L'argument en faveur du mariage homosexuel est fondé sur la notion de droits de la personne et rejette ce que les défenseurs considèrent comme une discrimination injustifiée. Dans ce contexte, cependant, les exceptions n'auraient absolument aucun sens moral. ... aucune communauté religieuse ne serait en mesure de résister à l'accusation de violer les droits de la personne en refusant de célébrer des mariages homosexuels.

[Français]

    J'ai deux questions à poser. Vous êtes juif, monsieur Nathanson, et je voudrais savoir s'il y a déjà eu des décisions où la cour a forcé un rabbin orthodoxe à marier un juif et un non-juif. Et savez-vous s'il y a des cours qui ont forcé l'Église catholique à ordonner les femmes à la prêtrise?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Pas encore.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Je vous soumets respectueusement que depuis la Charte canadienne des droits et libertés, en 1982, cela ne s'est jamais fait et ne pourrait se faire à cause de la liberté de religion.

    À la même page on peut lire ce qui suit:

[Traduction]

Contrairement au meurtre, le relations homosexuelles ne sont pas intrinsèquement néfastes. Pourtant, l'État n'a aucune raison évidente ou convaincante de les encourager.

[Français]

    Est-ce que l'État a des raisons de les décourager?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: À la page 9, on lit:

[Traduction]

Tout d'abord, elle pourrait diviser le mouvement homosexuel. Après tout, ce ne sont pas tous les homosexuels qui veulent se marier.

[Français]

    Étant donné que ce ne sont pas tous les hétérosexuels qui veulent se marier, est-ce une raison pour dire qu'il ne devrait pas y avoir de mariages hétérosexuels?

[Traduction]

+-

    M. Paul Nathanson: Non.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci. C'est tout.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Rushfeldt.

+-

    M. Brian Rushfeldt: J' aimerais répondre à la question de savoir s'il est arrivé qu'un membre du clergé ait été obligé ou forcé de célébrer des mariages contre les désirs ou les préceptes d'une religion en particulier. La réponse est de toute évidence non, mais je crois que nous avons certainement dans ce pays des cas très récents où la liberté religieuse a été foulée aux pieds.

    Nous avons eu un cas très récent en Saskatchewan, comme vous le savez probablement, avec Hugh Owens. L'utilisation de passages de la Bible assortis d'un symbole, qui a été réinterprété par la juge, a nettement servi à fouler aux pieds la liberté religieuse. Je ne pense pas que la question consiste à savoir si nous avons eu un cas ou non. Il faut plutôt nous demander, selon moi, si nous en aurons un. Je crois que cela arrivera. Nous pouvons adopter une politique ou insérer un article dans une nouvelle loi. Des articles sont déjà en vigueur et le projet de loi 250 renferme peut-être un article qui établit un système judiciaire à deux niveaux, parce qu'il me permettrait de dire une chose alors que ce ne serait pas le cas pour une personne qui n'est pas chrétienne ou qui n'est pas religieuse. Je ne pense pas que c'est la direction que nous voulons suivre dans une société tolérante et hétérogène—commencer à dresser les gens les uns contre les autres.

À  +-(1055)  

+-

    Le président: Permettons à M. Marceau de poser une courte question. Je passerai ensuite la parole à Mme Roberts.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: À ce sujet, il est important de dire quelques mots concernant le symbole dont vous parlez et son interprétation. Vous dites que le juge a fait une mauvaise interprétation du symbole. Le symbole était un gros X sur deux personnes. Ne pensez-vous pas qu'un jeune homme ou une jeune femme pouvait interpréter cela comme s'il fallait éradiquer les personnes homosexuelles? Est-ce qu'il y avait juste une façon d'interpréter cela? Ce n'est pas un cas de liberté religieuse parce qu'il y avait un mot sur les écritures saintes, mais le symbole était très explicite et pouvait être interprété comme étant contre l'existence même d'une personne à tendance homosexuelle.

    Monsieur Rushfeldt.

[Traduction]

+-

    M. Brian Rushfeldt: Je ne suis pas sûre que nous comprenions le symbole de la même manière parce que ce n'est pas un X que j'ai vu. Il s'agissait d'un cercle—un cercle d'interdiction de fumer. Vous roulez en voiture sur une rue qui comporte des zones d'interdiction de stationner et d'interdiction de fumer. Il ne s'agit pas d'éliminer les personnes qui pourraient vouloir garer leur voiture ou qui pourraient vouloir fumer. On veut simplement dire qu'il est interdit de garer une voiture et de fumer dans ces zones.

    Le symbolisme est une toute autre question. Dans sa décision, la juge—les observations sur les renvois aux écritures elles-mêmes—a aussi laissé entendre que les écritures Saintes constituaient aussi une partie du problème. Je me demande simplement, vu que qu'un juge est allé dans cette direction, ce qu'on pourrait faire pour empêcher d'autres juges d'agir de la sorte?

+-

    Le président: À cet égard, ce n'est pas la première fois qu'on fait allusion à cette affaire. Je vais demander à Phil d'obtenir un exemplaire de la décision pour que nous puissions tous la lire et juger par nous-mêmes.

    Je vais maintenant passer à Mme Roberts. M. Nathanson a également levé la main. S'il nous reste du temps... Je vois d'autres mains qui se lèvent. D'accord. Je vais passer à Mme Roberts.

+-

    R. P. Meg Roberts: En tant que ministre d'un mouvement religieux qui prône la liberté d'expression religieuse, je suis tout à fait favorable à ce que d'autres membres du clergé prennent leurs propres décisions lorsqu'il s'agit de célébrer des mariages homosexuels. Mais je crois que pour ceux d'entre nous qui y sont favorables, il doit s'agir d'une option. Je reconnais également qu'il peut arriver que les tribunaux aient à se prononcer, mais parce que la Charte confirme la liberté en matière de religion et d'orientation sexuelle, il est important, selon moi, que nous avalisions les mariages homosexuels et que nous permettions aux organismes religieux de prendre leur décision. C'est avec plaisir que je discuterai avec mes amis catholiques du droit que leur confère leur liberté d'expression religieuse de ne pas célébrer ces mariages. C'est avec plaisir que je discuterais avec eux des droits des conjoints de même sexe de poursuivre le dialogue afin de voir ce qui peut être fait.

+-

    Le président: Je donne la parole à monsieur Nathanson.

+-

    M. Paul Nathanson: Pour revenir à la question de M. Marceau—il est difficile de penser assez vite dans ces situations—par le passé et même encore aujourd'hui, je suppose, dans une certaine mesure, les gens ont respecté la notion de liberté religieuse. Le problème c'est qu'il y a en droit international ce qu'on appelle les droits de la personne et que ces principes risquent de se heurter. Il y a des choses que font les religions, qui ne respecteraient pas la législation en matière de droits de la personne que nous pressent d'appliquer les Nations Unies, par exemple. Et il y a certainement pratiques religieuses qui sont défendues. Nous ne permettons pas toute pratique religieuse, même maintenant.

    La question que vous posez est pertinente, mais je crois que nous devrions tous être réalistes et tenir compte du fait que le conflit qui s'annonce—et qui, dans une certaine mesure existe déjà—entre des principes comme la liberté religieuse et les droits de la personne est un véritable problème que nous devons prendre au sérieux et ne pas simplement supposer que la religion ne pose pas de problème. Des problèmes risquent de se poser et il vaut la peine de prendre la chose au sérieux.

Á  -(1100)  

+-

    Le président: Vous avez le dernier mot madame Sage.

+-

    R. P. Kathy Sage: C'est un privilège d'être ici et de savoir que ce comité prend à ce point au sérieux les préoccupations des gais et lesbiennes qui sont une composante de la culture canadienne. Je vous invite à ne pas oublier qu'il n'y a pas seulement le petit pourcentage de gais et lesbiennes qui examinent cette question.

    Lorsque je réfléchis le dimanche matin, je réfléchis aux parents de gais et lesbiennes qui souffrent et sont préoccupés parce que leurs enfants n'ont pas les mêmes droits que certains autres citoyens. Je regarde les frères et les soeurs des gais et lesbiennes, les tantes et les oncles les nièces et les neveux. Il s'agit d'une petite partie de la population qui veut avoir le droit de se marier. La question intéresse toutefois un grand nombre d'entre nous.

    J'espère également que vous comprendrez ces situations auxquelles je suis confrontée régulièrement, où il y a un mélange d'hétérosexuels qui supportent et éduquent les enfants de gais et lesbiennes, qui se soutiennent les uns et les autres, dans le respect et la dignité. Je vous demande d'accorder ces avantages aux personnes qui veulent se marier.

    Merci.

-

    Le président: Je remercie les membres du groupe de discussion ainsi que les membres du comité.

    Nous apprendrons aujourd'hui à 13 heures ce qu'il en est au sujet du voyage et tout le monde saura demain aux fins de la planification.

    La séance est levée.