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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 069 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 juin 2023

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 69e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    La séance d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le 23 juin 2022. Les députés participent en personne dans la salle, ainsi qu'à l'aide de l'application Zoom.
    J'aimerais faire quelques remarques à l'intention des témoins et des députés.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Les gens qui participent par vidéoconférence doivent cliquer sur le symbole de microphone pour l'activer. Veuillez le mettre en sourdine si vous ne parlez pas.
    Vous pouvez sélectionner l'interprétation au bas de l'écran sur Zoom. Vous pouvez choisir le parquet, l'anglais ou le français. Pour ceux qui sont dans la salle, vous pouvez utiliser l'oreillette et sélectionner le bon canal.
    Conformément à notre motion de régie interne, je vous informe que tous les témoins ont fait les tests de connexion requis.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 21 septembre 2022, le Comité reprend son étude du régime de sanctions du Canada.
    J'accueille avec grand plaisir les témoins. Brandon Silver, directeur de la politique et des projets, Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, se joint à nous par vidéoconférence. Je présume que vous le connaissez tous très bien. Stephen Alsace, responsable mondial des sanctions économiques à la Banque Royale du Canada, représente l'Association des banquiers canadiens, de même qu'Angelina Mason, avocate en chef et vice-présidente principale, Affaires juridiques et risque.
    Vous disposerez de cinq minutes chacun pour votre exposé, puis les députés pourront vous poser des questions.
    Nous allons commencer par M. Silver.
    Vous avez cinq minutes. Vers la fin, je lèverai ce carton. Nous vous serions reconnaissants de faire de votre mieux pour conclure votre exposé à ce moment.
    Monsieur Silver, vous avez la parole.
    Honorables députés, c'est un plaisir et un privilège de me trouver parmi autant d'amis et de visages familiers. Je vous transmets les salutations chaleureuses d'Irwin Cotler. Le professeur regrette de ne pas pouvoir être parmi nous aujourd'hui, mais il appuie sans conteste le contenu de notre allocution.

[Français]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de me joindre à vous aujourd'hui. Cela me fait plaisir de témoigner en tant qu'avocat et directeur des politiques et des projets au Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne.
    Notre organisme est très engagé dans l'élaboration des systèmes de sanctions canadiens ainsi que dans leur mise en oeuvre. Nous gérons aussi une coalition mondiale de presque 400 organismes de la société civile qui agissent pour demander des sanctions et promouvoir les droits de la personne.

  (1110)  

[Traduction]

    Le Canada peut être un chef de file mondial de la sauvegarde de la dignité et de la démocratie en favorisant l'emploi accru de sanctions ciblées. Votre étude présente une excellente occasion de tracer la voie.
    Votre étude tombe à point nommé, puisque l'agression illégale et injustifiée de Poutine contre l'Ukraine est l'expression violente d'un vaste assaut autoritaire contre l'ordre fondé sur les règles et ceux qui cherchent à le défendre.
    Les sanctions ciblées ont montré qu'elles étaient un outil puissant pour repousser les assauts. Les sanctions telles les interdictions de visas, la saisie d'actifs et les interdictions de transactions isolent les architectes de la répression, en faisant d'eux des parias mondiaux et en coupant les flux financiers qui alimentent leur oppression.
    Les sanctions protègent aussi la souveraineté canadienne contre les effets corrosifs des capitaux étrangers corrompus et contre les atteintes aux droits venant de ceux qui cherchent à s'unir pour miner notre démocratie et nos établissements financiers. Ces sanctions garantissent ainsi que nos marchés et notre économie ne contribuent pas aux abus ou aux agressions à l'étranger.
    Honorables députés, toutes ces sanctions constituent des succès mesurables. En effet, l'adoption de la loi de Magnitski en 2017 par le Canada a changé la donne. Cette loi a abaissé le seuil d'imposition de sanctions autonomes, qui était une « rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui est susceptible d'entraîner ou a entraîné une grave crise internationale » afin de permettre aussi l'application de la loi lorsque sont perpétrés des violations graves et systématiques des droits de la personne et des actes de corruption.
    Ainsi, notre centre emploie le terme « sanctions de Magnitski » pour renvoyer aux mesures prises à partir de ces seuils plus bas depuis 2017 en vertu de la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus et de la Loi sur les mesures économiques spéciales.
    D'après ces nouveaux seuils, plus de 2 000 sanctions ciblées ont été prises depuis l'adoption de la loi de Magnitski en 2017. Parmi celles‑ci, 482 sont des sanctions de type Magnitski en raison de violations des droits de la personne et de corruption. Parmi les quelque 35 pays qui ont une loi de ce type, le Canada est un chef de file dans la mise en œuvre de sa loi de Magnitski. Il arrive tout juste derrière les États‑Unis et loin devant tous les autres pays. C'est d'autant plus admirable que nous n'avons qu'une fraction de leurs ressources.
    Cependant, les décisions découlant de lois de Magnitski sont très majoritairement prises unilatéralement et sans coopération structurée entre les alliés, malgré nos intérêts et nos valeurs partagés, malgré les menaces auxquelles nous pourrions tous vouloir réagir. Concrètement, une telle pratique peut mener un individu sanctionné à blanchir ses gains mal acquis et à faire des affaires dans un autre pays quand il est sanctionné par le Canada. La décision peut perdre de son poids et le pays risque de voir sa réputation entachée si les sanctions sont perçues comme une aberration parmi les autres démocraties, jugées plus raisonnables, au lieu d'être vues comme une réussite dans la quête de justice et de reddition de comptes.
    Par conséquent, le Centre Raoul Wallenberg propose de mettre sur pied un groupe contact de pays qui appliquent leur loi de Magnitski. Un tel groupe aiderait grandement à coordonner les sanctions et à leur donner un caractère multilatéral, en plus de créer un forum de partage sur les pratiques exemplaires.
    Par ailleurs, le Canada devrait prendre une approche pangouvernementale pour imposer des sanctions et créer un point de convergence pour garantir la coopération entre les ministères et avec les alliés internationaux. Il existe à ce propos des précédents bien établis. Aux États-Unis, il y a le Treasury Department's Office of Foreign Assets Control. Au Royaume‑Uni, il s'agit du State Department's Special Envoy on Sanctions. Je pense qu'il existe nombre d'excellents modèles internationaux dont nous pouvons nous inspirer pour rester en tête.
    Nous pourrions jouer un rôle unique de leader en réunissant nos alliés internationaux pour que nos politiques en matière de sanctions contribuent à l'avancement de nos priorités de politique étrangère. Par exemple, nous pourrions employer des sanctions pour donner du mordant à notre leadership dans la mise en œuvre de la Déclaration contre la détention arbitraire dans les relations d'État à État et ainsi changer la donne en matière de prise d'otages.
    À une époque où l'ordre mondial fondé sur les règles est attaqué et où les institutions multilatérales sont compromises, nous pourrions employer notre régime de sanctions pour montrer notre confiance envers ces institutions et la force exécutoire des normes internationales en utilisant les décisions découlant de procédures spéciales des Nations unies, notamment celles du Groupe de travail sur la détention arbitraire, ou encore les mécanismes de surveillance des traités internationaux, comme le Comité contre la torture, pour justifier l'application de sanctions.
    En terminant, honorables députés, je signale qu'il est particulièrement important d'améliorer notre régime de sanctions grâce à la surveillance essentielle que chacun de vous exerce ici. Au bout du compte, certaines des politiques les plus marquantes ont germé dans la société civile avant d'être portées par le Parlement. On ne pourrait que renforcer cette relation en l'officialisant.
    Notre mémoire rédigé à l'intention de votre comité présente ces propositions plus en détail, en particulier la dernière, qui met de l'avant le précédent parlementaire, en plus d'usages comme les questions à inscrire au Feuilleton, le dépôt de pétitions d'intérêt public et d'autres procédures du genre. Nous en discuterons avec vous avec plaisir durant la période de questions ou plus en profondeur dans un autre contexte que la présente audience.
    Merci à tous du rôle important que vous jouez pour orienter la politique étrangère du Canada. Je vous remercie de l'occasion et du privilège qui nous ont été donnés de témoigner devant vous aujourd'hui.
    Merci.

  (1115)  

    Merci beaucoup, monsieur Silver.
    Si je comprends bien, nous allons maintenant passer à Mme Mason. Est‑ce exact?
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. La sonnerie se fera entendre sous peu. Serait‑il possible d'obtenir le consentement unanime pour régler cette question?
    Est‑ce la volonté du Comité?
    Des députés: D'accord.
    Merci, madame McPherson.
    Nous passons maintenant à Mme Mason.
    Vous avez cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
    Je vous remercie d'avoir invité l'Association des banquiers canadiens et la Banque Royale du Canada à comparaître ce matin pour participer à l'examen du régime de sanctions du Canada.
    Je m'appelle Angelina Mason et je suis avocate générale et vice-présidente principale, Affaires juridiques et risques, à l'ABC. Je suis accompagnée aujourd'hui de Stephen Alsace, responsable mondial des sanctions économiques à la Banque Royale du Canada.
    Les changements législatifs proposés récemment et le budget accordé par le gouvernement fédéral dans le domaine des sanctions soulignent l'engagement continu du gouvernement fédéral à l'égard des objectifs stratégiques méritoires qui sous-tendent le régime, à savoir la défense des droits de la personne, la lutte contre la corruption répandue et le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
    Les banques ayant des activités commerciales au Canada ont consenti énormément d'efforts pour se conformer au régime qui continue d'évoluer et, par le fait même, le soutenir. Nos membres travaillent en étroite collaboration avec Affaires mondiales Canada et la GRC en vue d'être conformes aux exigences en matière de sanctions. Par ailleurs, elles ont mis en place des systèmes et des procédures pour gérer les risques liés aux sanctions et elles vérifient régulièrement les listes de sanctions.
    L'aide fournie par le gouvernement nous est d'un soutien précieux dans notre travail. Nous reconnaissons l'utilité de la Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes d’AMC. Nous soulignons également la volonté croissante des responsables d’AMC de collaborer avec les intervenants, dont nos membres, sur les questions relatives aux sanctions, ainsi que leurs efforts de sensibilisation du public. De plus, l’annonce par le gouvernement fédéral d’un investissement de 76 millions de dollars pour la création d’un bureau de sanctions spécialisé au sein d’AMC et un soutien supplémentaire à la GRC constitue un premier pas important en vue de doter le régime en expansion des ressources nécessaires à son fonctionnement efficace.
    Compte tenu de leur rôle dans le système financier mondial, nos membres ont noté plusieurs façons dont le régime de sanctions du Canada doit poursuivre son évolution. Essentiellement, à mesure que le régime continue d'évoluer et de devenir plus complexe — y compris avec la récente proposition de dispositions sur le contrôle réputé qui contiennent des éléments hautement subjectifs dans le projet de loi C‑47 —, il faudra des lignes directrices écrites et accessibles au public.
    Ce besoin est parfaitement compris. Il a été souligné dans le rapport publié par votre comité en 2017, de même que dans le récent rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international à l'issue de son étude du régime. Il s’agit également d’une pratique courante des autorités responsables de l’application des sanctions dans d’autres pays, comme le Royaume-Uni et les États-Unis, ainsi que dans d’autres contextes réglementaires au Canada.
    Pour répondre à ce besoin et s’aligner sur les pratiques exemplaires nationales et internationales, nous encourageons Affaires mondiales Canada à élaborer ces lignes directrices écrites en consultation avec les parties prenantes. Les lignes directrices fourniront de la clarté et de la transparence aux parties prenantes — en particulier à celles qui n’ont pas ou ne peuvent pas se permettre l’accès à des ressources coûteuses pour soutenir leurs activités — afin d’atténuer les risques opérationnels et réglementaires qui peuvent découler de l’opacité réglementaire lorsqu’elles font des affaires à l'étranger. Les lignes directrices contribueront également à garantir que la Loi de Sergueï Magnitsky et la LMES seront mises en œuvre comme prévu et que leurs objectifs seront atteints efficacement.
    En plus de fournir des lignes directrices écrites — comme le recommande le rapport du comité sénatorial —, le gouvernement devrait également sensibiliser la population canadienne à la nature des lois canadiennes sur les sanctions, ainsi qu'à leur raison d'être et leurs répercussions. Dans le contexte actuel, les entités du secteur privé, comme nos membres, sont souvent tenues de répondre aux questions et aux préoccupations de leurs clients. Nous pensons que le gouvernement fédéral est le mieux placé pour répondre à ces questions, car nos membres et d'autres intervenants essaient toujours de comprendre les répercussions de la loi sur leurs propres entreprises, et le public a besoin de renseignements exacts, à jour et cohérents.
    Nous voyons aussi la possibilité d'améliorer l'efficience et l'efficacité des rapports sur les sanctions. Plus précisément, nos membres fournissent actuellement des rapports sur les sanctions à divers organismes gouvernementaux. Les amendements au projet de loi C‑47 proposés récemment par le gouvernement et visant à créer des exigences supplémentaires en matière de déclaration au CANAFE ouvrent la voie à un échange utile entre l'organisme de réglementation et l'industrie. Ils apportent des précisions quant aux exigences en matière de déclaration afin que celles‑ci soient conformes à l'esprit des amendements législatifs.
    De plus, il faudrait que le gouvernement fédéral se penche sur le fonctionnement du système de permis. Nous savons que d'autres pays ont mis en place des mécanismes simplifiés pour les permis ou certificats afin d'autoriser certaines activités ou transactions précises qui sont par ailleurs interdites. Par exemple, les États-Unis ont des dispositions relatives aux licences générales qui autorisent certains types de transactions pour une catégorie de personnes, sans qu'il soit nécessaire de demander une licence particulière. Cette catégorie générale n'a pas été retenue au Canada, bien qu'elle soit possible aux termes de la loi.

  (1120)  

    Nous croyons savoir qu'AMC a été inondé de demandes de permis en raison du manque d'orientation et de clarté de la loi. Il semble que ce volume accru ait créé un arriéré de demandes, ce qui fait que les Canadiens attendent des réponses officielles dans des délais incertains. Ces permis ne sont pas toujours demandés par les grandes entreprises. Souvent, ce sont des Canadiens ordinaires qui demandent ces permis, comme des clients des services bancaires de détail qui tentent de faire un virement à des membres de leur famille dans les pays touchés par les sanctions.
    Nous suggérons qu'AMC s'aligne sur l'approche adoptée dans d'autres pays. De plus, nous recommandons également à AMC de recruter des employés qui s’occuperont spécifiquement des demandes de permis et, idéalement, seront mandatés de répondre à toutes les demandes de permis dans un délai raisonnable.
    Enfin, comme le recommande le rapport du Sénat, il faut investir suffisamment dans le Bureau des sanctions d'AMC et dans les autres ministères fédéraux qui participent au régime. Nous saluons et appuyons les engagements budgétaires précédents du gouvernement pour AMC et comprenons que le gouvernement envisage de confier à d'autres organismes gouvernementaux un rôle dans le régime des sanctions.
    Compte tenu de la complexité du régime, il est essentiel que tout ministère ou organisme gouvernemental qui participe au régime, y compris AMC, dispose des ressources nécessaires et que le personnel reçoive une formation approfondie sur cet aspect très technique de la loi et en ait une connaissance suffisante.
    Cette approche contribuera à faire en sorte que la surveillance soit adaptée et reflète le caractère unique du régime et qu'elle ne soit pas confondue avec d'autres domaines législatifs, comme la lutte contre le blanchiment d'argent au Canada...
    Madame Mason, puis‑je vous demander de conclure? Vous avez dépassé votre temps d'une minute et demie.
    Je m'excuse.
    Merci. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci.
    Vous aurez l'occasion de compléter vos propos lorsque les députés vous poseront des questions.
    J'en étais à ma dernière phrase.
    Parfait.
    Les membres du Comité pourront maintenant poser leurs questions.
    Le premier intervenant est M. Hoback.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Madame Mason, je vais commencer par vous.
    Vous avez parlé de lignes directrices écrites. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    À l'heure actuelle, lorsque vous avez comme client une entreprise canadienne qui cherche à faire des affaires dans un autre pays, quelles ressources existe‑t‑il pour vous guider? Étant donné l'absence de lignes directrices, l'entreprise risque‑t‑elle de recevoir des conseils différents d'une institution à une autre?
    Donnez-moi simplement quelques...
    Bien sûr.
    Comparativement à ce qui se fait ailleurs, les lignes directrices sont très détaillées. On y présente des scénarios factuels précis et c'est certainement beaucoup plus structuré. Par conséquent, les gens peuvent interpréter la sanction de diverses façons.
    Un ensemble de lignes directrices constituerait la meilleure façon d'assurer la clarté et la cohérence de l'approche.
    Ne reviendrait‑il pas aux tribunaux de le faire, ou est‑ce quelque chose qui devrait figurer dans la loi?
    Les lignes directrices sont monnaie courante, non seulement dans le domaine des sanctions, mais aussi dans d'autres domaines réglementés au Canada, qu'il s'agisse du BSIF ou du régime de protection des consommateurs. Les organismes de réglementation publient fréquemment des lignes directrices sur les dispositions d'une loi ou d'un règlement, parce qu'il y aura immanquablement des scénarios factuels qu'on ne peut pas envisager à la simple lecture d'un texte de loi.
    Quelles sont les conséquences pour vous, alors, si vous commettez une erreur parce que vous n'avez pas reçu de lignes directrices?
    Eh bien, voilà pourquoi nous voulons nous assurer que des lignes directrices sont fournies. Ce qui se passe, c'est que par mesure de précaution, on finit par ne pas pouvoir aller de l'avant parce que les choses ne sont pas claires en ce qui a trait aux exceptions.
     Nous avons aidé nos clients qui voulaient obtenir un permis, mais ce sont deux facettes d'un même problème. Si les lignes directrices sont meilleures, moins de gens auront à demander un permis. Autrement, les gens doivent faire une demande de permis pour savoir si leurs transactions sont autorisées ou non.

  (1125)  

    D'accord. Merci.
     Monsieur Silver, je tiens à dire que nous vous sommes vraiment reconnaissants de votre travail et que nous sommes aussi vraiment reconnaissants du travail que votre organisation et M. Cotler accomplissent dans ce dossier.
     Vous avez parlé un peu de la fuite d'actifs. Je me demande si vous avez des exemples de la forme que cela peut prendre. Vous avez ensuite parlé de l'idée de créer un point de convergence pour prévenir certains des problèmes. Je vous invite à nous en dire davantage à cet égard, si vous le voulez bien.
    Je vous remercie de vos bons mots et de vos questions importantes, monsieur Hoback.
    En ce qui concerne la multilatéralisation et la loi de Magnitski, l'idée, c'est que lorsqu'il s'agit de l'imposition de sanctions, de gels d'avoirs et d'interdictions de visa, le tout devrait idéalement se faire de façon coordonnée entre plusieurs pays ayant des lois semblables. Si le Canada sanctionne un individu et qu'il est le seul pays à le faire, il peut facilement utiliser des systèmes bancaires parallèles — les mêmes services et droits que l'on cherche à refuser à ses compatriotes — et jouir de ces droits à l'étranger.
    Selon les statistiques canadiennes, 79 % des sanctions qui sont imposées par notre pays constituent un effort unilatéral. Cela signifie que pour la plupart des sanctions que nous prenons, il y a des éléments importants consistant à nommer et à dénoncer les individus et à protéger nos systèmes financiers nationaux et notre démocratie contre les pratiques abusives d'entités ou de ressortissants étrangers qui ont un comportement malveillant. Or, cela signifie également que les sanctions sont moins efficaces parce qu'ils peuvent aller au Royaume-Uni, aux États-Unis, dans des pays membres de l'Union européenne ou dans l'un de quelque 30 autres pays qui ont une loi de Magnitski.
    En ce qui concerne les 21 % de sanctions canadiennes qui constituent un effort multilatéral — c'est‑à‑dire qui ne sont pas imposées que par nous —, nous collaborons généralement avec un seul partenaire, de sorte qu'elles n'ont pas un caractère multilatéral. Lorsque nous disons que nous n'entreprenons pas quelque chose unilatéralement, nous le faisons généralement bilatéralement, c'est‑à‑dire que le Canada fera une annonce avec le Royaume-Uni, les États-Unis ou l'Union européenne. Sur ces 21 % de sanctions prises de façon multilatérale, 14 % constituent un effort bilatéral, ce qui signifie que seul un faible pourcentage des sanctions imposées par le Canada ont une portée véritablement internationale.
     Il y a ici en quelque sorte un lien avec notre recommandation de créer ce groupe de coordination diplomatique. Si le Canada participe à un effort concerté et coordonné pour la communication de renseignements, la mise en œuvre de la loi de Magnitski et la prise de mesures diplomatiques avec des États aux vues similaires, nous pouvons vraiment serrer la vis aux auteurs de violations des droits et augmenter la pression exercée sur eux, à la fois sur le plan de la réputation et de la rhétorique — parce que différentes démocraties les sanctionneraient —, et de façon concrète, en les privant de la possibilité d'accéder aux lieux de vacances ou aux universités où leurs familles veulent souvent à aller, ainsi qu'au secteur bancaire, aux marchés et aux économies du Canada, des États-Unis et du Royaume-Uni. Si nous agissons de manière concertée, nous pouvons avoir une bien meilleure incidence.
    J'imagine que mon temps est écoulé.
    Je suis désolé. S'il vous reste du temps, pourriez-vous répéter votre deuxième question?
    Le temps de M. Hoback est écoulé.
    Nous passons maintenant à Mme Bendayan.
    Vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Le Canada et ses alliés ont imposé des sanctions sans précédent à la Russie, et elles touchent presque tous les aspects de son économie. Notre objectif est très clair: limiter l'accès de la Russie au financement.
    Il y a une sanction que je trouve très intéressante: on a retiré les principales banques russes du réseau international de transfert financier SWIFT. J'aimerais avoir les commentaires des témoins, surtout ceux de l'Association des banquiers canadiens, sur ce point en particulier.

[Traduction]

    Madame Mason, j'aimerais peut-être que vous interveniez d'abord sur la question des sanctions liées au réseau SWIFT que le Canada a imposées avec ses alliés. M. Silver vient de souligner qu'il est important de travailler avec de nombreux alliés. Dans le cas de SWIFT, nous avons collaboré avec un certain nombre d'alliés importants à cet égard. Je me demande si vous pourriez nous parler un peu de votre point de vue sur l'efficacité de ces sanctions liées à SWIFT.

  (1130)  

    Oui. Leur retrait du réseau SWIFT a certainement refroidi leur ardeur et a créé quelques difficultés quant à la gestion de certaines répercussions sur les Canadiens.
     Je vais céder la parole à mon collègue, Stephen Alsace. Il peut dire quelques mots sur ce dont nous parlions concernant les lignes directrices et l'incertitude qui plane lorsqu'on n'est pas en mesure de faire affaire avec certaines banques et les répercussions sur les Canadiens.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, en effet, nous retirons de SWIFT certaines des plus grandes banques russes. Par conséquent, toutes les transactions ont été bloquées. La plupart des banques canadiennes n'ont plus d'accès direct à la Russie pour simplifier les paiements. La mesure a eu un effet positif en ce sens qu'elle a empêché certaines des plus grandes banques, comme la VEB, la VTB et la Sberbank, d'accéder aux capitaux occidentaux, mais elle a eu des conséquences inattendues pour des Canadiens ordinaires, et c'est en partie la raison pour laquelle Affaires mondiales Canada a reçu un grand nombre de demandes de permis.
     Les Canadiens ordinaires ne sont plus en mesure d'envoyer facilement de l'argent en Russie — par exemple pour payer la pension alimentaire d'un enfant — ou de recevoir des paiements de pension. Ou, dans le cas de hockeyeurs qui jouent en Amérique du Nord, s'il se trouve que leur employeur est la propriété d'une entité sanctionnée, la paie a été coupée. C'est l'une des conséquences de la situation.
     Un autre point que j'aimerais soulever par rapport aux observations de M. Silver, c'est que, bien que nous soyons très favorables à l'imposition de sanctions de Magnitski et que nous convenions qu'il est important d'améliorer la coordination entre les pays, la plupart des grandes banques canadiennes ont des activités à l'étranger. Dans notre cas, par exemple, nous devons nous conformer aux exigences en matière de sanctions qui s'appliquent aux États-Unis, dans les pays de l'Union européenne, au Royaume-Uni et dans d'autres pays. Bien que ce ne soit pas inscrit dans nos lois ici, au Canada, nous respectons également les autres pays dans lesquels nous menons des activités.
    Merci.
    Avez-vous vu émerger des systèmes concurrents comme solution de rechange à SWIFT?
    Oui. En Chine, il y a le CIPS, et en Russie, le SPFS. Nous n'avons pas vu une augmentation importante des activités, mais je pense que sur le plan des solutions de rechange à SWIFT, il y a une hausse, et il y a certainement un risque de fuite de capitaux de ce système.
     Pouvez-vous indiquer au Comité ce que nous pourrions faire de plus pour nous assurer que la Russie est exclue du système financier occidental?
    C'est un peu difficile. Il s'agit en grande partie de diplomatie, n'est‑ce pas? Je pense que nous devons nous concentrer sur les pays — pas nécessairement le G20, mais... Nous savons que certains pays échappent aux sanctions, comme les Émirats arabes unis. Nous voyons la possibilité de transactions en Inde et en Chine. Je pense que nous devons nous concentrer sur certains de ces autres pays.
    Monsieur Alsace, vous avez dit précédemment que les choses étaient un peu difficiles lorsqu'il s'agit de fournir des orientations réglementaires à des institutions financières telles que la vôtre. Concernant l'idée de créer un bureau de sanctions spécialisé — et je comprends ce que vous dites, madame Mason, sur l'importance qu'il y ait des lignes directrices écrites —, pouvez-vous nous expliquer ce dont vous pensez avoir besoin exactement?
    Il serait utile d'avoir des conseils d'interprétation. À titre d'exemple, si l'on regarde du côté des États-Unis et de leur Bureau de contrôle des avoirs étrangers, la foire aux questions comprend quelque chose comme 1 300 questions.
    Certains des éléments d'interprétation du projet de loi C‑47 portent sur des modifications relatives à la propriété effective. Or, au lieu d'utiliser la règle des 50 % plus un du Bureau de contrôle des avoirs étrangers, ils ont choisi d'aller encore plus loin que l'Union européenne et le Royaume-Uni, ce qui va vraiment compliquer les choses quant au critère du contrôle qu'ils proposent. C'est un élément pour lequel nous aurons assurément besoin de précisions quant au degré de diligence raisonnable qui sera requis, car d'un point de vue opérationnel, il sera impossible de bloquer chaque paiement, puis de l'examiner et de faire preuve d'une diligence raisonnable renforcée.
    Dans le même ordre d'idée, monsieur Alsace, il est également impossible...
    Madame Bendayan, votre temps est écoulé.
    Mme Rachel Bendayan: Merci, monsieur le président.
    Le président: C'est maintenant au tour de M. Garon.

[Français]

    Monsieur Garon, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais adresser mes questions à M. Silver.
    Monsieur Silver, vous avez parlé des sanctions de style Magnitski et dit qu'elles avaient changé la donne. Vous avez souligné — je crois que c'est dans le cas du Canada — qu'il y aurait eu 482 sanctions de cet ordre. J'avais l'impression que le Canada n'avait pas imposé ce genre de sanctions depuis 2018, année où il les a utilisées contre 17 ressortissants saoudiens en raison de la torture infligée au journaliste Jamal Khashoggi et de l'exécution de ce dernier.
    Y a-t-il des raisons qui expliquent le fait qu'on ait ralenti l'imposition de ce genre de sanctions et comment expliquez-vous cela?

  (1135)  

    Merci de la question, monsieur le député Garon. C'est un point important.
    Les données que notre centre a soumises au Comité résultent des modifications apportées à la Loi sur les mesures économiques spéciales, dans le cadre des droits de la personne et de la lutte contre la corruption.
    La loi Magnitski a été utilisée un peu plus de 60 fois. Cependant, les modifications que cette loi a entraînées à la Loi sur les mesures économiques spéciales ont fait en sorte que notre système de sanctions peut être utilisé de manière beaucoup plus claire et définitive pour lutter contre la violation des droits de la personne et la corruption.

[Traduction]

    Les données que nous avons soumises, les 482 sanctions, correspondent à celles qui n'auraient été possibles qu'après 2017. Avant cette date, le seuil d'imposition des sanctions était une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales susceptible d'entraîner ou ayant entraîné une crise internationale. Ce changement relatif au seuil a conduit à une utilisation beaucoup plus étendue des sanctions qui, selon nous, arrive à point nommé compte tenu de la résurgence de l'autoritarisme, du populisme néolibéral et des actes d'agression dans le monde. Le fait que ces lois aient été modifiées en conséquence est quelque chose d'extrêmement important.
    La désuétude de la loi de Magnitski telle qu'elle est, par rapport aux seuils inférieurs prévus par la Loi sur les mesures économiques spéciales, est une question intéressante que nous explorons plus en profondeur dans les observations écrites que nous avons soumises au Comité. Nous affirmons qu'il s'agit d'une question de rhétorique plutôt que de substance. Les lois sont en grande partie équivalentes. Il existe quelques distinctions mineures entre elles — vous savez, la possibilité de sanctionner des entités en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales, mais seulement des individus en vertu de la loi de Magnitski —, mais dans l'ensemble, nous demandons en fait, pour cette raison, un changement dans l'utilisation des termes afin de favoriser une meilleure coordination entre nos alliés et d'utiliser la résonance importante qu'a le mot « Magnitski », de sorte que nous appelons « lois de Magnitski » à la fois la Loi sur les mesures économiques spéciales et la mise en œuvre de la loi de Magnitski pour la défense des droits de la personne et la lutte contre la corruption.

[Français]

    Monsieur Silver, je me permets de vous interrompre, car j'ai peu de temps.
    Vous avez parlé de multilatéralisme. Comme on le sait, le capital est très mobile. Vous avez aussi parlé de fuites de capitaux et affirmé que ce problème pouvait survenir lorsqu'un territoire impose unilatéralement des sanctions.
    A-t-on une idée de l'ampleur des fuites de capitaux qui découlent des sanctions prises de cette façon?
    Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de l'inefficacité des sanctions prises de façon unilatérale, notamment par le Canada?
    L'ampleur des fuites est difficile à établir, mais on peut se fier aux circonstances. Comme je l'ai mentionné à votre collègue, la plupart des sanctions canadiennes sont unilatérales. Il est important d'établir des normes et de laisser savoir à ceux qui ne respectent pas les droits de la personne que le Canada ne va pas les laisser continuer ainsi. Il faut que le pays se tienne debout, même si ses alliés ne le font pas.
    Nous ne nous opposons pas à l'utilisation de sanctions unilatérales, car il s'agit de mesures importantes. Nous sommes parfois des leaders à cet égard. Je vais donner un bon exemple, soit le cas de M. Vladimir Kara‑Murza. Ce dernier a témoigné à plusieurs reprises devant le Comité et son témoignage a été essentiel relativement à l'adoption de la loi Magnitski. D'ailleurs, s'il est présentement emprisonné à Moscou, pour 25 ans, c'est parce qu'il a témoigné devant un comité de la Chambre des communes.
    Le Canada est le premier pays à sanctionner les juges et les procureurs corrompus ainsi que ceux qui offrent de faux témoignages et à envoyer le signal qu'il agit en solidarité avec les défenseurs des droits de la personne, partout sur la planète. À cause de cette sanction unilatérale...

  (1140)  

[Traduction]

    Monsieur Silver, je crains que votre temps soit écoulé. J'en suis désolé. Vous avez dépassé le temps d'intervention de 40 secondes. Nous allons devoir passer à la prochaine députée.
    Madame McPherson, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci beaucoup à tous nos témoins d'être présents aujourd'hui et de nous faire bénéficier de leur expertise. Je pense qu'il ressort clairement de toutes les questions que nous avons entendues jusqu'à présent que tout le monde souhaite s'assurer que le régime de sanctions du Canada est aussi solide, efficace et coordonné que possible.
     Madame Mason, j'ai bien entendu ce que vous avez dit au sujet des difficultés qui se posent concernant les rapports et les permis.
    Monsieur Silver, vous avez parlé de la création d'un point de convergence. Je pense que c'est une excellente suggestion. Pourriez-vous nous en parler? Je sais qu'il serait utile lorsqu'il s'agit de déterminer qui est sanctionné, mais pour ce qui est d'appliquer les sanctions et de mesurer l'efficacité de notre régime de sanctions, serait‑il également utile à cet égard?
    C'est exactement ce que nous envisageons, madame McPherson, et nous l'avons quelque peu expliqué dans nos observations écrites.
    Dans d'autres pays, il y a un organisme qui a une responsabilité interorganisationnelle en matière de coordination, comme le Bureau de contrôle des avoirs étrangers aux États-Unis, ou le nouveau bureau qui a été établi au Royaume-Uni. Le Canada a la possibilité de faire de même.
     Dans le cadre de la loi d'exécution du budget, le gouvernement a annoncé l'affectation de 75 millions de dollars... la création d'un groupe de travail sur les crimes financiers. Il y a là une occasion, peut-être, pour ce groupe de travail, d'assurer non seulement une coordination interministérielle, mais aussi une coordination à l'échelle internationale. Lorsque nos alliés s'adressent à nous pour des questions de sanctions, il semble que ce soit en grande partie de façon ponctuelle et pour un sujet spécifique, plutôt que de manière globale et multilatérale.
     Disposer d'un point de convergence peut contribuer à renforcer cette coordination et favoriser la coordination entre les nombreux ministères et organismes gouvernementaux qui sont souvent malheureusement dissemblables et isolés les uns des autres, qu'il s'agisse du CANAFE, de la GRC, du SCRS, du ministère de la Justice, d'Affaires mondiales Canada et d'autres organismes de ce type. Le fait de disposer d'un point de convergence, tant au sein du Canada que pour nos alliés à l'étranger, peut contribuer à simplifier les choses et à résoudre certains des problèmes.
    Des représentants de l'Association des banquiers canadiens ont parlé de ces questions et, en particulier, en raison du caractère diffus des engagements, c'est la société civile qui a fait la collecte de données. Au début de ma déclaration préliminaire, j'ai mentionné que nous coprésidions un groupe d'environ 400 grandes ONG internationales qui agissent en ce qui concerne les sanctions, et les données et les indicateurs dont je vous ai parlé tout à l'heure ont été en grande partie colligés par la société civile, parce que nous avons dû combler le vide qui devrait être essentiellement comblé par le gouvernement. Le gouvernement devrait recueillir ces chiffres et les utiliser pour améliorer ses mesures.
     Si vous le permettez, madame McPherson, j'utiliserai le reste de mon temps pour parler du cas de Vladimir Kara-Murza, car vous avez joué un rôle de premier plan dans cette affaire, tous partis confondus. Je sais que M. Garon et son collègue, Alexis Brunelle-Duceppe, ont demandé de concert la libération de Vladimir Kara-Murza. Je disais tout à l'heure dans ma réponse que c'était un bon exemple de situation où, parfois, nous ne pouvons pas agir de façon coordonnée avec nos alliés, mais où nous prenons les devants. Le Canada a sanctionné toutes les personnes liées à cette affaire et a demandé à ses alliés de faire de même. C'est l'un des rares cas où le département du Trésor américain et le Royaume-Uni ont tous deux imposé des sanctions à des gens liés à l'affaire Kara-Murza, et tous deux ont déclaré publiquement qu'ils suivaient l'exemple du Canada.
    C'est l'un des exemples où une mesure unilatérale a été utile, combinée à des efforts multilatéraux de défense des droits. Le Canada a pris l'initiative et tous nos alliés l'ont suivi.
    Bien sûr, j'ai été très honorée de faire partie de ce groupe de travail et de continuer à faire pression pour que l'on accorde à Vladimir Kara-Murza la citoyenneté honoraire.
     Je comprends le point que vous soulevez, cependant, lorsque vous parlez du fait que les choses se font de façon ponctuelle. C'est ce que nous a dit l'ASFC. La GRC nous l'a dit lors de la dernière réunion, soit que l'on ne coordonne pas les efforts, ce qui rend les choses très difficiles. En fait, j'ai fait inscrire des questions aux Feuilleton auxquelles je n'ai pas reçu de réponses satisfaisantes, parce que je ne pense pas qu'il y ait des mécanismes en place.
     Pour la dernière minute qu'il me reste, je demanderai peut-être à Mme Mason d'en dire un peu plus sur le fait qu'Affaires mondiales Canada est débordé. Il y a du retard et de la confusion.
     Pourriez-vous nous dire de quelle manière le problème peut être corrigé, à votre avis? Comment pourrait‑on y remédier?
    C'est une question de ressources. Dans un budget aussi important, nous voyons des signes très prometteurs qu'avec des ressources, vous disposerez de l'expertise nécessaire pour fournir des lignes directrices et traiter les demandes de permis.
    De plus, nous sommes d'accord avec notre collègue, M. Silver, sur la nécessité d'assurer une coordination entre les différents intervenants au sein du gouvernement. Les sanctions comportent différents aspects et il est important de garantir qu'il existe un guichet unique qui nous permet de bien comprendre, qui fournit des données et du soutien.

  (1145)  

    Je dirais que c'est compliqué pour les parlementaires. C'est compliqué pour le secteur bancaire. Il est aussi évidemment très difficile pour les Canadiens de comprendre comment cela fonctionne. Merci beaucoup de cette précision.
    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à...
    Monsieur le président, j'aimerais faire un bref rappel au Règlement.
    La convention veut que nous attendions 10 minutes après un vote avant de reprendre la séance.
    De toute évidence, nous votons tous à l'aide de l'application. Je me demande donc s'il y aurait un consentement unanime pour reprendre la séance du Comité immédiatement après le vote.
    Est‑ce que tout le monde est d'accord?
    Des députés: D'accord.
    Le président: D'accord, oui.
    Pour cette série‑ci, nous disposons de deux minutes.
    Madame Kramp-Neuman, vous avez deux minutes.
    Monsieur Silver, j'aimerais compléter certaines questions qui ont été posées plus tôt. Croyez-vous que le fait d'accorder la citoyenneté canadienne honoraire à Vladimir Kara-Murza aurait une incidence sur sa situation?
    Il s'agit d'une question extrêmement importante. Nous sommes au Parlement pour demander que l'on accorde la citoyenneté honoraire à M. Kara-Murza, parce que nous croyons que cela pourrait lui sauver la vie.
    Il a écrit de la prison pour dire que... soit dit en passant, cela démontre l'efficacité des sanctions ciblées. Ses geôliers sont les mêmes qui ont essayé de l'assassiner à deux reprises. Il a survécu, par miracle, et ils n’ont pas essayé de l’assassiner une troisième fois, parce qu’ils savent que le monde les regarde et se soucie de lui. Ces sanctions ont été utiles dans ce cas.
    Il est possible que cette attention s'étiole. Les actes d'agression et les crises mondiales peuvent évoluer. Nous devons montrer que nous continuons d'appuyer l'expression des valeurs canadiennes envers quelqu'un qui a témoigné devant ce comité et qui a contribué à rendre la politique étrangère de notre pays plus efficace et plus humaine. En adoptant les sanctions dont nous discutons aujourd'hui, nous faisons preuve de solidarité et affichons notre soutien — ce que M. Kara-Murza mérite — au nom de nos valeurs communes. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit de mesures qui lui sauveront la vie.
    Les gardiens de sa prison lui ont souvent dit, et il a écrit à ce sujet depuis la prison, qu'il devait s'assurer qu'ils ne seraient pas visés par les sanctions Magnitski et qu'on ne parlerait pas d'eux dans les déclarations internationales. Ceux qui tiennent sa vie entre leurs mains regardent ce que fait le Parlement. L'adoption d'une motion par consentement unanime à la Chambre pour lui accorder la citoyenneté honoraire pourrait très bien lui sauver la vie et refléterait certainement ce que le Parlement défend.
    C'est excellent, je vous remercie.
    Ma dernière question porte sur les sanctions Magnitski. Comment évaluez-vous l'efficacité de ces sanctions par rapport à d'autres formes de pression diplomatique ou économique, comme les sanctions traditionnelles ou une mobilisation ciblée? Y a‑t‑il des leçons apprises ou des pratiques exemplaires que le Canada peut partager avec d'autres pays qui envisagent d'adopter des mesures semblables?
    Ces sanctions viennent compléter d'autres mesures. Nous croyons que, souvent, elles peuvent servir à promouvoir les objectifs de la politique étrangère canadienne.
    Nous en avons parlé plus tôt, et nous abordons ce sujet dans nos mémoires. Par exemple, dans la lutte contre les détentions arbitraires, des sanctions ciblées contre les personnes directement responsables d'actes de détention arbitraire peuvent aider à modifier ce qui est pris en compte lors de la prise d'otages. C'est très important pour les familles des personnes prises en otage. Des gens comme Richard Ratcliffe et Nazanin Zaghari-Ratcliffe, qui ont témoigné devant ce comité il y a quelques années, en ont également parlé. La combinaison de l'engagement diplomatique et de sanctions ciblées peut aider à faire avancer les priorités d'un pays en matière de politique étrangère, et ce n'est qu'un exemple.
    De plus, au Canada, nous avons une stratégie nationale de lutte contre le racisme...
    Monsieur Silver, je m'excuse de devoir vous interrompre une fois de plus, mais nous devons poursuivre, car nous avons très peu de temps et vous avez dépassé le temps qui vous était imparti.
    Nous passons maintenant à M. Sarai pour deux minutes.
    Je vous remercie.
    Compte tenu de l'heure, je vais poser à Mme Mason des questions qui n'ont probablement pas encore été posées.
    Y a‑t‑il des mesures qui peuvent empêcher que des victimes innocentes soient lésées par les sanctions, en particulier en ce qui concerne les services bancaires? Vous voyez probablement des familles qui vendent leurs biens, ou des entreprises qui ont vendu des marchandises avant qu'une sanction ne soit appliquée, qui reçoivent de l'argent et qui voient ensuite leurs fonds bloqués.
    Y a‑t‑il des moyens et des pratiques exemplaires qui ont été employés dans d'autres pays et dont notre Parlement peut s'inspirer pour créer des mesures qui feront en sorte que des victimes innocentes ne seront pas lésées par ces sanctions?
    Je peux vous parler des États-Unis, où, au lieu de devoir obtenir un permis pour un cas de figure précis, une licence d'application générale est délivrée. Ce permis d'application générale qui cible un cas de figure général pourrait être délivré aux Canadiens touchés. Il s'agit de quelque chose d'aussi simple que ce que M. Alsace a dit au sujet des retraités qui peuvent recevoir leur argent et leurs pensions.
    Dans le cas de la succession que vous avez mentionnée, il y a soit un permis d'application générale, ce qui offre une grande souplesse, soit des directives, qui traiteront de ce cas de figure précis.

  (1150)  

    Y a‑t‑il des failles dans la loi de Magnitski qui peuvent être comblées, ou des choses qui pourraient être faites pour combler ces failles et celles qui pourraient apparaître et qui ne sont pas couvertes par la loi à l'heure actuelle?
    Il s'agit vraiment de veiller à ce que l'on respecte les exigences énoncées dans la politique. Généralement, ces sanctions sont rédigées de manière assez générale, ce qui est normal. Il s'agit alors d'interpréter ces sanctions. Conformément à d'autres types d'examens réglementaires, les organismes de réglementation fourniront des directives sur ce qui n'est pas censé être visé par une formulation peut-être générale qui, à première vue, englobe tout.
    Je vous remercie.
    Je cède maintenant la parole à M. Garon.
    Vous avez une minute.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Mason, vous avez beaucoup parlé de l'absence de lignes directrices pour ce qui est de l'application des sanctions ou du fait que les lignes directrices sont rédigées de façon assez large.
    Seriez-vous disposée à soumettre au Comité un mémoire comprenant des recommandations quant aux lignes directrices sur l'application des sanctions?
    J'aimerais que vous nous fournissiez une liste ou que vous nous expliquiez les types de lignes directrices dont vous avez besoin au quotidien pour appliquer les sanctions.

[Traduction]

    Bien sûr. Nous serons heureux de vous donner des exemples tirés d'autres marchés.

[Français]

    Avez-vous des exemples à nous donner? Cela pourrait guider notre réflexion.

[Traduction]

    Veuillez répondre très brièvement, s'il vous plaît.
    Oui, bien sûr.
    Comme l'a mentionné mon collègue, il y a plus de 1 300 questions et réponses sur le site américain. Certaines questions, si elles étaient incluses dans une évaluation de notre régime de sanctions, seraient d'une grande utilité.
    Je vous remercie.
    Nous passons à Mme McPherson pour la dernière intervention d'une minute.
    Je vous remercie de me donner ce temps généreux.
    Cette question s'adresse aux représentants de l'Association des banquiers canadiens. En 2012, les changements apportés par le gouvernement Harper ont entraîné la fermeture soudaine de comptes bancaires canadiens en raison des sanctions économiques imposées par Ottawa contre l'Iran. Les Canadiens d'origine iranienne touchés, dont beaucoup n'avaient aucun lien avec le régime iranien, ont éprouvé une grande frustration à l'époque.
     Est‑ce que ce problème a été réglé au cours des 10 dernières années, ou êtes-vous au courant de problèmes persistants qui font que des comptes bancaires de Canadiens innocents peuvent être touchés par des sanctions? Si c'est le cas, quelle est la solution?
    À notre connaissance, ce n'est pas un problème qui persiste. Je pense qu'en 2012, le problème était en partie lié à un manque de directives de la part d'Affaires mondiales Canada quant à l'interprétation de certaines de ces sanctions. C'est pourquoi il est si important d'avoir des directives écrites ou de s'assurer d'avoir des discussions et un dialogue continus avec Affaires mondiales Canada pour éviter ce genre de problèmes à l'avenir.
    Ma minute est écoulée.
    Oui, je vous remercie. C'était exactement une minute.
    Nous allons bientôt devoir voter. Permettez-moi de remercier nos trois témoins, M. Silver, Mme Mason et M. Alsace. Nous vous sommes très reconnaissants pour le temps que vous nous avez consacré et pour votre expertise.
    Je suis convaincu que vos points de vue figureront dans notre rapport final. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Nous allons suspendre la séance pour aller voter. Puis, comme l'ont décidé tous les députés, nous reprendrons la séance tout de suite après le vote.

  (1150)  


  (1210)  

     Bienvenue à tous. Nous poursuivons notre étude du régime de sanctions.
    Je suis très heureux d'accueillir plusieurs témoins au Comité. Nous accueillons, à titre personnel, Me Anaïs Kadian, avocate; Mme Erica Moret, recherchiste en chef et coordinatrice au Sanctions and Sustainable Peace Hub du Geneva Graduate Institute; et M. Zaw Kyaw, porte-parole du Gouvernement en exil de la République de l'Union du Myanmar.
    Chers témoins, je tiens à préciser que vous disposerez de cinq minutes chacun pour vos déclarations préliminaires. Après vous avoir entendus, nous passerons aux questions des membres du Comité.
    Maître Kadian, nous allons commencer avec vous. Vous disposez de cinq minutes.

  (1215)  

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Honorables membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Anaïs Kadian. Je suis avocate en litige civil et commercial à Montréal. J'ai également un baccalauréat en études internationales. Plus récemment, je me suis prononcée avec d'autres avocats et professionnels en faveur des droits de la personne dans les dossiers relatifs à la situation désolante des Arméniens du Haut‑Karabakh.
    Il n'y a pas si longtemps, deux de nos mémoires ont été soumis au Comité. L'un porte sur l'examen des permis d'exportation vers la Turquie et l'autre concerne le statut du Haut‑Karabakh en vertu du droit international.

[Traduction]

    Aujourd'hui, je voudrais parler du rapport préparé par le réseau de la société civile Hayren Partners for Humanity, qui a été soumis à ce comité. Ce rapport traite de l'occasion importante qui est donnée au Canada de répondre concrètement à la crise des droits de la personne créée au Haut-Karabakh à l'aide de sanctions économiques ciblées contre le régime azerbaïdjanais.
    Puisque la motion de ce comité était d'« examiner la nécessité de formuler de nouvelles recommandations... découlant de la réponse du Canada à la situation en Ukraine et autres situations depuis 2017 », je vous soumettrais que le Haut-Karabakh est l'une de ces autres situations pour lesquelles de nouvelles recommandations devraient être formulées quant à la réponse du Canada.
    De fait, l'absence de mesures concrètes, telles que des sanctions, n'a malheureusement servi qu'à enhardir le régime autoritaire azerbaïdjanais à continuer de violer le droit international et les droits de la personne, et ce, sans entrave.
     Parmi les exemples récents, citons la capture et la torture de prisonniers de guerre arméniens à l'automne 2022, comme l'a rapporté Human Rights Watch; la détention de plus de 100 prisonniers de guerre et leur soumission à des traitements inhumains; les attaques et les meurtres de civils dans les villages frontaliers et au Karabakh presque toutes les semaines; l'attaque illégale de l'Arménie l'automne dernier, qui a entraîné des centaines de morts et la saisie de 140 kilomètres carrés de territoire souverain; et le blocus illégal du corridor de Latchine, qui isole 120 000 Arméniens ethniques autochtones du reste du monde depuis décembre dernier.
    Le Genocide Watch a qualifié le blocus du corridor de Latchine de « tentative évidente du gouvernement azerbaïdjanais d'affamer, de bloquer et finalement d'expulser les Arméniens du Haut-Karabakh. »
    Le Lemkin Institute for Genocide Prevention a émis un signal d'alerte au sujet du génocide, déclarant que « seul l'État azerbaïdjanais, et particulièrement le régime du président Ilham Aliyev, est responsable de cette crise humanitaire. »
    En février 2023, la Cour internationale de justice a ordonné à l'Azerbaïdjan de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir une circulation sans entrave dans le corridor de Latchine. L'Azerbaïdjan a ignoré cette ordonnance. Il reste à ce jour en violation flagrante des décisions de la Cour internationale de justice.
    Ces violations des droits de la personne et du droit international sont directement visées par l'article 4 de la Loi sur les mesures économiques spéciales du Canada et justifient également l'application de la loi de Magnitski du Canada.
    L'appel à des sanctions contre l'Azerbaïdjan a également été lancé récemment par les organismes gouvernementaux et les fonctionnaires suivants: le Parlement européen, en mars 2023, qui a demandé au Conseil d'imposer des sanctions ciblées contre les dirigeants azerbaïdjanais pour ne pas avoir respecté l'ordonnance de la Cour internationale de justice; le président du Comité des relations étrangères du Sénat américain, en mai; le Sénat français et l'Assemblée nationale française; et l'ambassadeur de l'Arménie au Canada, qui a témoigné devant ce comité en janvier. Le Genocide Watch et le Lemkin Institute ont également réclamé que des sanctions soient prises contre les représentants du régime azerbaïdjanais.
    De même, ce comité devrait recommander l'imposition de sanctions ciblées contre le régime azerbaïdjanais afin de faire respecter les droits de la personne, le droit international et la justice. Les lois du Canada lui permettent d'appliquer des mesures précises de façon équilibrée, tout en maintenant des relations diplomatiques. Sans reddition de comptes, il n'y a pas de justice, et sans justice, il ne peut y avoir de paix.

[Français]

    Le Canada a affirmé à plusieurs reprises son engagement à promouvoir la justice internationale et le respect des droits de la personne. Je pense que les Canadiennes et les Canadiens s'attendent à ce que le Canada donne l'exemple afin de protéger les droits des Arméniens du Haut‑Karabakh et de l'Arménie, comme il le fait dans des contextes similaires.
    Je salue le travail difficile, mais si crucial de ce comité, qui s'est engagé à étudier ces questions parmi tant d'autres afin de réviser l'application par le Canada du régime de sanctions.
    Je vous remercie de votre attention et je demeure à votre disposition pour toute question.

  (1220)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, maître Kadian.
    Nous entendrons maintenant M. Kyaw.
    Vous disposez de cinq minutes, monsieur.
    Monsieur le président, messieurs les vice-présidents, honorables membres du Comité, je m'appelle Zaw Kyaw. Je suis un Canadien originaire du Myanmar qui vit au Canada depuis 1991.
    Durant la brève période de démocratisation du Myanmar, j'ai été président-directeur général de la zone économique spéciale qui a connu le plus de succès au Myanmar. À l'heure actuelle, j'agis à titre de porte-parole du gouvernement d'unité nationale du Myanmar.
    Je suis honoré d'avoir l'occasion de témoigner dans la cadre de l'étude du Comité sur le régime de sanctions du Canada, en ce qui concerne particulièrement le Myanmar, ou Birmanie.
    Le 1er février 2021 au matin, l'armée du Myanmar a lancé une tentative de coup d'État contre le gouvernement élu démocratiquement, mettant fin à la fragile transition du pays vers la démocratie.
    Dans la foulée de ce coup d'État, le peuple du Myanmar a envahi les rues pour faire d'immenses manifestations pacifiques. L'armée a répliqué par la violence, tuant de nombreuses personnes et imposant une campagne de terreur en investissant des demeures et en arrêtant quiconque était soupçonné de soutenir la démocratie.
    Face à une résistance et à une opposition généralisées, l'armée n'a pu consolider son contrôle du pays. Elle s'est livrée à une violence de plus en plus brutale pour écraser l'opposition, mais la résistance du peuple demeure forte et prend de l'ampleur.
    Depuis le coup d'État de l'armée, plus de 3 600 civils ont été tués, près de 23 000 citoyens ont été arbitrairement arrêtés et plus de 60 000 propriétés, dont des établissements religieux, des hôpitaux et des écoles, ont été brûlés. Il y aurait plus de 1,7 million de personnes déplacées au pays.
    Le Canada n'a pas hésité à sévir contre l'armée du Myanmar. En décembre 2007, le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Birmanie est entré en vigueur en réaction à la crise humanitaire et à la situation des droits de la personne au Myanmar, ou Birmanie. Les sanctions du Canada formaient à l'époque un des régimes de sanctions les plus sévères.
    La situation s'étant améliorée au Myanmar, le Canada a relâché ses sanctions économiques en avril 2012, tout en maintenant ses sanctions contre une liste de personnes et d'entités et son embargo sur les armes.
    Le règlement a été amendé en 2018 pour ajouter sept hauts gradés de l'armée qui occupaient des postes d'autorité pendant les opérations de nettoyage contre les Rohingyas de l'État de Rakhine.
    Le Canada a été un des premiers pays à imposer de nouvelles sanctions à la suite du coup d'État du 1er février 2021. Depuis lors, il a imposé des sanctions supplémentaires à six reprises, prenant ainsi des mesures contre 95 personnes et 63 entités. Le Canada est le premier pays à imposer des sanctions aux fournisseurs de carburant des jets militaires du Myanmar.
    Malgré les sanctions prises par le Canada et l'Occident, l'armée est encore capable d'accroître sa campagne de terreur contre les civils. Ses partenaires étrangers et les nouvelles sociétés-écrans peuvent aisément éluder les nouvelles sanctions.
    En septembre 2022, la junte du Myanmar a fermé l'accès public au registre d'entreprises de Myanmar Companies Online, ou MyCO, afin de cacher les renseignements sur les actionnaires et les nouvelles sociétés-écrans. Voilà qui montre qu'il faut renforcer le régime de sanctions actuel.
    Même si je pense que les sanctions constituent un outil utile pour exercer de la pression sur l'armée brutale, il est possible d'améliorer le régime de sanctions du Canada contre le Myanmar afin de le rendre plus sévère et plus efficace.
    Hier, Nikkei a publié un rapport indiquant que des pièces de tanks et de missiles, rachetées aux Russes et exportées au Myanmar et en Inde, seraient utilisées par la Russie en Ukraine. L'armée du Myanmar est maintenant une menace à la sécurité mondiale. Le Canada et l'Occident doivent se coordonner pour cibler les fournisseurs et les courtiers en armement.
    Le Canada doit cibler les fournisseurs de carburant d'aviation et coordonner ses interventions avec ses alliés pour empêcher les groupes de protection et d'indemnisation d'offrir des assurances pour les navires qui transportent du carburant d'aviation jusqu'aux ports du Myanmar.

  (1225)  

    Le Canada et les pays démocratiques pourraient renforcer les sanctions pour couper les vivres au régime militaire en ciblant les sources de revenus étrangères de la junte, comme la Myanma Foreign Trade Bank, ou MFTB, et la Myanma Oil and Gas Enterprise, ou MOGE.
    Je suis très préoccupé par l'achat de la participation de Chevron dans le gaz extracôtier de Yadana, dont Chevron est propriétaire à 41 %, par la filiale canadienne de MTI Energy, une société peu connue appelée Et Martem Holdings. Soit dit en passant, le champ gazier de Yadana est le plus grand champ gazier du Myanmar.
    Je me ferai un plaisir d'en discuter davantage. Merci beaucoup de m'avoir offert l'occasion de témoigner.
    Merci, monsieur le président.
    Tout le plaisir est pour nous. Merci, monsieur Kyaw.
    Vous aurez amplement l'occasion de répondre aux questions des députés.
    Nous entendrons maintenant Mme Moret.
    Madame Moret, vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
    Monsieur le président et distingués membres du Comité, je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui.
    J'étudie les sanctions multilatérales et autonomes depuis une vingtaine d'années. Au cours de cette période, j'ai examiné les questions relatives aux effets, à l'efficacité et à la coordination des régimes de sanctions, comme ceux qui ciblent la Russie, la Syrie, l'Afghanistan, l'Iran, la Corée du Nord et d'autres pays.
    J'ai également effectué des recherches sur les sanctions dans des domaines comme le recours aux armes chimiques, la non-prolifération des armes nucléaires, la cybersécurité, l'esclavage moderne et la traite des personnes, et les considérations humanitaires. Je coordonne également plusieurs initiatives multipartites sur les sanctions au nom de l'Union européenne, du ministère des Affaires étrangères de la Suisse et des Nations unies. Au cours des dernières années, j'ai également témoigné au sujet des sanctions devant le Congrès américain, les deux Chambres du Parlement du Royaume-Uni, le Sénat canadien et le Parlement européen.
    En 2020, j'ai fourni des recherches et des conseils stratégiques à la nouvelle unité des sanctions d'Affaires mondiales Canada, lui remettant notamment une liste de sanctions proposées et des suggestions sur les domaines où le Canada pourrait jouer un rôle de leadership positif en matière de sanctions sur les forums mondiaux, en tirant parti de sa position unique dans le monde. Je m'inspirerai aujourd'hui de ce travail et du témoignage que j'ai livré au Sénat canadien en décembre 2022.
    J'aimerais vous faire part aujourd'hui de mes réflexions sur deux domaines clés dont je me sens particulièrement qualifiée pour parler et qui ont un lien avec les recommandations que le Comité a formulées en avril 2017 dans le cadre de l'examen parlementaire des sanctions canadiennes, à la suite duquel Affaires mondiales Canada s'est vu accorder plus de capacités et de souplesse sur le plan des sanctions autonomes.
    Dans le premier domaine, la recommandation propose de « réformer les structures chargées des régimes de sanctions [du Canada] et leur accorder des ressources adéquates. »
    On a critiqué plus tôt le fait que le gouvernement canadien n'avait pas les ressources adéquates pour mettre en œuvre et appliquer un régime de sanctions efficace ou pour assurer une surveillance indépendante des procédures de sanctions du Canada. Des mesures importantes semblent avoir été prises dans la bonne direction au cours des dernières années grâce à la création de la Division de la coordination des politiques et des opérations des sanctions, à l'augmentation des ressources et aux réformes législatives. D'après mon expérience, cette division est composée d'employés extrêmement dévoués, experts et travaillants, qui se sont bien adaptés à l'évolution rapide du contexte des sanctions mondiales.
    En réponse aux critiques formulées plus tôt sur le fait qu'il est difficile de naviguer entre les listes de sanctions, Affaires mondiales Canada a maintenant regroupé les listes de sanctions autonomes et celles de l'ONU sur son site Web, et d'autres sites, comme celui du Parlement du Canada, fournissent également des renseignements utiles sur les ressources en matière de sanctions. D'après ce que je comprends, des examens réguliers sont effectués, et le Canada a également contribué à un certain nombre d'études détaillées et à la conception d'outils qui facilitent l'élaboration de sanctions, tant au Canada qu'à l'échelle mondiale.
    Un autre changement notable a été la montée en grade du Canada sur le plan de la pratique des sanctions autonomes, en étroite collaboration avec l'Union européenne, le Royaume-Uni et les États-Unis, ainsi que d'avec d'autres pays. Je vois cela comme un progrès positif qui va dans le sens des recommandations selon lesquelles une collaboration plus étroite était nécessaire. L'officialisation et la rationalisation de ce genre de collaboration sont attribuables à la participation du Canada, à mon avis.
    Grâce à cette collaboration étroite avec des partenaires internationaux, je dirais que l'utilisation des sanctions par le Canada est de plus en plus « multilatérale », pour emprunter le terme de l'Organisation mondiale du commerce, et vraiment pas particulièrement unilatérale, comme l'ont indiqué certaines critiques des sanctions autonomes, puisque de 30 à 40 pays travaillent ensemble. Vu l'impasse dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui au chapitre des sanctions au Conseil de sécurité de l'ONU, cette collaboration permet au Canada de s'unir à ses alliés pour lutter contre les violations du droit international et de jouer en quelque sorte un rôle de chef de file dans le domaine de la politique étrangère internationale et de la politique de sécurité. Cela sert aussi, bien sûr, de multiplicateur de force puisqu'on travaille ensemble.
    Il y a aussi l'officialisation et d'autres genres de collaboration, en passant par exemple par l'entremise du groupe de travail sur les élites, les mandataires et les oligarques russes, qui est un effort multilatéral qui utilise l'échange de renseignements et la coordination pour cibler des personnes et les entités russes sanctionnées et exercer des pressions sur elles. Bien entendu, le Canada en est membre, tout comme un certain nombre d'autres pays et la Commission européenne.
    Une augmentation des effectifs, de la formation, de la capacité et des ressources semble justifiée, du moins à mon avis, non seulement au Canada, mais aussi ailleurs, compte tenu de la montée en flèche des sanctions dans le monde aujourd'hui, plus particulièrement à la suite de l'invasion massive de l'Ukraine par la Russie en 2022.
    Si nous prenons quelques exemples d'autres pays, l'unité des sanctions du Royaume-Uni a connu une croissance spectaculaire ces derniers temps et compte maintenant environ 160 personnes. Les Pays-Bas viennent de créer et d'étoffer leur propre unité des sanctions. Cette tendance s'observe ailleurs également. Voilà qui illustre la nécessité de disposer de ressources adéquates dans tous les domaines.

  (1230)  

    Je vais conclure très rapidement en parlant de la recommandation voulant qu'Affaires mondiales Canada fournisse aux secteurs public et privé des directives écrites complètes et accessibles au public concernant l'interprétation de la réglementation sur les sanctions afin d'optimiser la conformité.
    Bien entendu, le Canada n'a pas d'organisme d'enquête ou d'application de la loi comme le Bureau de contrôle des avoirs étrangers du Trésor américain. Par ailleurs, nous savons que la Russie et d'autres acteurs utilisent des techniques poussées d'évasion et de contournement en coordination avec d'autres pays ciblés par des sanctions, comme la République populaire démocratique de Corée, l'Iran et d'autres États, de sorte que l'application de la loi est maintenant le nœud du problème. Je pense que nous pouvons tirer des leçons de ce que font les autres pays.
    Nous avons vu le Trésor américain collaborer avec celui du Royaume-Uni pour élaborer des approches communes au chapitre des pouvoirs d'application de la loi et d'enquête. Nous voyons aussi l'Union européenne et les États-Unis...
    Madame Moret, je vous demanderais de conclure en une vingtaine de secondes.
    Bien sûr.
    Nous constatons que les États-Unis et l'Union européenne sont plus sensibilisés au problème, ce qui permet également de réduire la conformité excessive, qui est devenue un problème croissant, surtout en ce qui concerne l'élimination des risques dans le secteur financier. Mais ici encore il faut vraiment des ressources et une capacité adéquates.
    Merci beaucoup, madame Moret.
    Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité, en commençant par M. Genuis.
    Monsieur Genuis, vous disposez de quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous faire part d'un bref avis de motion qui fait suite aux discussions que nous avons eues au cours de la dernière heure:
Que le Comité fasse rapport à la Chambre qu'il souhaite que la citoyenneté canadienne honoraire soit accordée à Vladimir Kara-Murza et demande la libération immédiate de M. Kara-Murza.
    Je sais qu'il y aura d'autres discussions entre les partis, mais je veux donner avis de cette motion pour donner des options.
    Maître Kadian, nous avons parlé au Comité de l'importance de rouvrir le corridor de Latchine. C'est ce que nous avons demandé. Le Comité attend que le gouvernement réponde à un rapport à la Chambre à ce sujet, et j'espère que cette réponse arrivera très bientôt.
    À votre avis, quels genres de sanctions ciblées auraient une incidence sur la réouverture du corridor de Latchine ou augmenteraient les chances que cette réouverture se produise?
     Les sanctions qui pourraient être utiles seraient celles dirigées contre les représentants du régime impliqués dans le barrage routier, autant ceux qui commandent les opérations que ceux qui les exécutent. Certains types de sanctions peuvent s'appliquer à des individus en particulier. Elles peuvent être très ciblées. Elles envoient aussi un message très fort parce que...
    Je suis désolé de vous interrompre, mais si je comprends bien, nous assistons à une sorte de mascarade jouée par de prétendus activistes environnementaux qui disent ne rien avoir à faire avec le régime. Ces allégations qui ne sont évidemment pas plausibles compliquent la mise en œuvre de votre proposition consistant à cibler les représentants du régime. Y a‑t‑il moyen de savoir qui sont les têtes dirigeantes?
    Des informations de sources ouvertes à ce sujet ont été produites par de différents organismes et différents partenaires. La Cour internationale de justice a ordonné au régime azerbaïdjanais de débloquer le corridor.
    Des ONG comme le Lemkin Institute et Genocide Watch ont, elles aussi, exhorté le régime à dégager le corridor. Toute autre information qui viendrait brouiller les cartes proviendrait probablement de sources qui ne sont pas dignes de foi.

  (1235)  

    Merci.
    Je vais m'adresser à un autre témoin, mais vous pourriez peut-être fournir plus tard par écrit des informations supplémentaires telles que des noms et d'autres détails sur l'identité des individus et des institutions qui devraient être sanctionnés pour ce motif.
    Monsieur Kyaw, votre témoignage indique clairement que les sanctions imposées jusqu'à présent contre la Birmanie sont inefficaces.
    Je me demandais si vous étiez d'accord avec cette constatation et si vous aviez quelque chose à suggérer sur la manière de combler les lacunes de notre régime de sanctions.
    De plus, si le temps le permet, pourriez-vous parler de la collaboration entre la junte militaire et la Russie? J'aimerais aussi que vous nous décriviez comment les lacunes des sanctions peuvent servir de mécanismes permettant de faire passer en Russie des équipements qui sont par la suite utilisés pour l'invasion de l'Ukraine.
    La junte militaire intensifie ses attaques sur les civils au moyen, par exemple, d'avions de chasse et d'hélicoptères de combat. Seulement l'année dernière, environ 600 frappes aériennes ont été menées contre des civils. Les avions avaient été fournis par la Chine et la Russie. Comme l'a mentionné M. Genuis, le Canada a sanctionné la fourniture de carburant d'aviation, mais ces sanctions sont contournées. Le Canada et ses alliés devraient faire appel aux clubs de protection et d'indemnisation pour bannir les assurances des navires qui fournissent du carburant d'aviation au Myanmar. Les militaires du Myanmar dépendent entièrement des importations de carburant. En leur coupant les vivres, vous protégerez la vie des civils.
    La Russie éprouve des difficultés en ce moment en raison des sanctions mondiales qui lui sont imposées concernant l'achat d'armes. Elle se sert donc du Myanmar pour acheter des armes, mais seulement des pièces et des munitions. Elle rachète également et réimporte du Myanmar des pièces pour les chars et des missiles. La Russie utilise ensuite ces armes en Ukraine.
    Ces informations viennent d'un rapport récent, mais ce stratagème a cours depuis des mois. Voilà pourquoi le Canada et ses alliés devraient régler les lacunes et imposer des sanctions aux courtiers en armes. Nous pouvons vous fournir une liste de ces courtiers. Quant au régime militaire, leur principale source de revenus provient du secteur pétrolier et gazier. La société Myanma Oil and Gas Enterprise rapporte à elle seule 1,5 milliard de dollars. Le Canada et l'Occident pourraient la sanctionner.
    Merci.
    Merci.
    Nous passons à M. Zuberi.
    Vous avez quatre minutes.
    Merci aux témoins de leur présence aujourd'hui.
    Monsieur Kyaw, la plupart de mes questions vont s'adresser à vous. Je sais que vous êtes le porte-parole en exil du gouvernement d'unité nationale, ou GUN, pour le Myanmar et que vous luttez contre la junte militaire dans ce pays. Je pense que votre témoignage sur cette lutte est important.
    J'aimerais vous demander quelques précisions sur les politiques du GUN, qui comprend désormais le parti d'Aung San Suu Kyi et d'autres groupes formés de minorités ethniques et de partis minoritaires. Quelle est la position du GUN sur les Rohingyas?
     Je voudrais souligner que le GUN n'est pas un gouvernement en exil. En fait, le président par intérim, le premier ministre et un bon nombre de ministres se trouvent au Myanmar. De plus, le GUN... Le GUN est formé d'anciens députés, mais il comprend également des représentants de minorités. Environ 46 % des membres du GUN sont d'anciens députés et plus de 50 % sont des représentants de groupes ethniques. Il y a aussi des ONG.
    Le président par intérim est membre de la minorité ethnique Kachin et le premier ministre est membre de la minorité Karen.
    Pour répondre à vos questions, le ministre des droits de la personne du GUN a présenté un document au Conseil des droits de l'homme des Nations unies. Le GUN a également diffusé un document de politique sur les Rohingyas qui reconnaît clairement le droit des Rohingyas à la citoyenneté et le droit de retourner dignement dans leur village et dans leur maison.
    La représentation rohingya au GUN s'agrandit petit à petit. Un autre point à soulever est la loi sur la citoyenneté, qui est discriminatoire envers les Rohingyas et envers d'autres minorités ethniques. Le GUN a décidé de l'abolir et de la remplacer par une loi plus démocratique et plus acceptable selon les normes internationales.
    Quelques grands dossiers occupent le GUN en ce moment. Il y a par exemple le cyclone Mocha qui a gagné l'État de Rakhine et dont les victimes sont pour la plupart des réfugiés rohingyas. De plus, nous soutenons les réfugiés en collaboration avec la société civile locale. Voilà comment notre gouvernement veut instaurer l'égalité et l'autodétermination, y compris pour les Rohingyas.

  (1240)  

     Merci.
    Pour continuer dans cette lancée, je crois que vous avez mentionné comment vous alliez inclure divers groupes dans les futurs gouvernements. Pourriez-vous nous expliquer comment vous allez vous y prendre pour inclure ces groupes, y compris les Rohingyas?
    Pour commencer, le GUN sera le gouvernement provisoire. Il formera ensuite le gouvernement de transition après que l'Assemblée populaire aura approuvé la nouvelle Constitution.
    En tant que gouvernement provisoire, le GUN commencera à travailler avec les communautés rohingyas. Nous nommerons des Rohingyas au cabinet ministériel. Plus tard, le gouvernement de transition sera lui aussi inclusif.
    En passant, le GUN est le gouvernement le plus inclusif de l'histoire de la Birmanie. Les Bamars, le groupe ethnique dominant au pays forme 70 % de la population, mais seulement 40 % des membres du GUN appartiennent à cette ethnie. Plus de 60 % — presque 70 % — du GUN se composent d'autres ethnies, mais le cabinet ne compte pas encore de Rohingyas. Nous nous efforçons de corriger cela en collaboration avec les communautés rohingyas.
    À propos de la crise des réfugiés...
    Malheureusement, votre temps est écoulé.
    Nous passons à M. Garon.
    Vous avez quatre minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais adresser mes questions à Mme Moret.
    Madame Moret, en décembre 2022, vous avez déclaré au Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international que les méthodologies et les outils servant à mesurer l'incidence et l'efficacité des sanctions autonomes du Canada n'existaient toujours pas.
    Par exemple, j'ai demandé plus tôt aujourd'hui à un témoin si on avait réussi à quantifier les fuites de capitaux dues à des sanctions unilatérales.
    Ce genre de mesures de l'incidence existent-elles ailleurs? Où en est le Canada à cet égard? Si le Canada n'est pas suffisamment avancé, à quel type de mécanisme devons-nous réfléchir concrètement?
    Merci beaucoup de cette question.

[Traduction]

    Ce problème touche aussi bien les pays qui imposent des sanctions de façon autonome que les Nations unies. Les mécanismes ou les outils permettant d'évaluer l'efficacité et les répercussions sont encore très rudimentaires.
    Néanmoins, certaines méthodologies pourraient être adaptées dans les États qui le souhaitent. Sans ces éléments, il est passablement ardu de réaliser une évaluation exacte et fiable des répercussions des sanctions.
    Je fais une parenthèse pour dire qu'il est aussi excessivement difficile sur le plan méthodologique de trouver les causes et les corrélations étant donné les facteurs nombreux et complexes qui sont en jeu dans n'importe quel contexte, particulièrement lors de conflits armés ou d'urgences humanitaires.

[Français]

    Je comprends que cela peut être complexe sur le plan méthodologique, mais perfectionner notre capacité à mesurer l'incidence des sanctions pourrait-il aussi aider un pays comme le Canada à éviter des effets imprévus et probablement indésirables des sanctions, notamment sur les civils, par exemple, ou sur les flux financiers?

  (1245)  

[Traduction]

    Oui. Il y a certainement une foule de choses qui pourraient être faites et qui pourraient s'inspirer de méthodes mises au point ailleurs.
    Parallèlement à cela, je pense qu'il y a des choses vraiment importantes que le Canada pourrait faire, dont certaines ont déjà été entreprises. La première serait de créer un groupe trisectoriel au pays. Les groupes de cette nature sont formés normalement de représentants des gouvernements, des personnes qui instaurent les sanctions et des organismes de réglementation, mais aussi des ONG, du secteur bancaire et du reste du secteur privé. Le groupe ainsi formé se réunirait régulièrement. Certains pays ont jugé important de mettre en place des mécanismes d'échanges réguliers entre les parties prenantes concernées. Ces mécanismes doivent être assez souples pour tenir compte des situations changeantes sur le terrain et permettre la modification de politiques au besoin.
    La participation aux discussions internationales est cruciale également. Les excellentes études qui ont été publiées depuis les 10 dernières années et les dialogues multisectoriels qui se sont tenus ont donné lieu à des recommandations. Certaines d'entre elles...

[Français]

    Madame Moret, je suis désolé de vous interrompre, mais nous avons peu de temps.
    Vous pavez un peu la voie à ma dernière question. En matière de sanctions, le Canada agit rarement seul, car il favorise quand même le multilatéralisme. Vous avez déjà suggéré que le Canada officialise ses canaux de coordination et de planification stratégique.
    De quoi aurait l'air l'officialisation de ces canaux sur le plan institutionnel?

[Traduction]

     Dans une certaine mesure, ce travail a déjà été amorcé par la coordination des sanctions contre la Russie. Je ne pense pas me tromper en disant que certaines relations ou certains mécanismes sont dans la plupart des cas informels et dépendent de personnes qui occupent certains postes. Plus tard, lorsque les choses évoluent, il faut recréer certains de ces liens.
    Aujourd'hui, les échanges et les interactions sont particulièrement réguliers et beaucoup mieux coordonnés qu'auparavant. Toutefois, étant donné que selon toute vraisemblance les sanctions imposées par le Canada seront planifiées en étroite collaboration avec les trois acteurs que j'ai mentionnés — le Royaume-Uni, les États-Unis et l'Union européenne, auxquels s'ajouteront probablement de nombreux autres pays, dont l'Australie —, plus il y aura de mécanismes et de processus formels en place pour permettre laplanification conjointe, la surveillance et ainsi de suite — abstraction faite des préoccupations liées à la souveraineté des pays —, mieux ce sera pour l'efficacité des mesures.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à Mme McPherson.
    Vous avez quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci aux témoins de leur présence parmi nous.
    Madame Moret, je vais poursuivre avec les questions que mon collègue vient de vous poser.
    Nous avons ajouté plusieurs noms à la liste des sanctions. Comme vous l'avez mentionné dans votre témoignage, l'utilisation de mécanismes de sanctions a monté en flèche à l'échelle mondiale. De toute évidence, cette augmentation est due aux événements en Ukraine. L'ajout de noms et l'application des sanctions sont deux choses. Sans mécanismes d'application, les listes ne sont pas aussi utiles qu'elles le devraient.
    Au Canada, la GRC rapporte environ 136 millions de dollars en actifs gelés et 292 millions de dollars en opérations financières bloquées.
    J'aimerais connaître votre point de vue. Comment évaluez-vous l'efficacité du Canada lorsque vient le temps d'appliquer ses sanctions? Quelles sont les mesures exactes que nous devrions prendre pour que l'application des sanctions soit proportionnelle à l'ajout de noms sur la liste de sanctions?
    Je pense que cet aspect est un défi énorme dans d'autres pays, pas seulement au Canada.
    Tout d'abord, le Canada ne dispose pas des mêmes capacités d'enquête ou d'application des sanctions que l'Office of Foreign Assets Control du Trésor américain. Aux États-Unis, des centaines d'agents emploient des techniques qui sont peaufinées depuis de nombreuses années.
     Je pense que c'est le premier point à soulever. Il est essentiel d'avoir la capacité de mener des enquêtes et d'appliquer les sanctions. Pour l'heure, je crois que tout ce travail — les décisions sur les nouvelles sanctions et les activités liées aux enquêtes sur le secteur privé — est exécuté par une petite équipe au sein d'Affaires mondiales Canada. Cette équipe ne peut tout simplement pas tout faire. Si quelque chose devait changer, il faudrait selon moi réclamer des capacités plus spécialisées.
    Un autre point à retenir est l'importance de travailler avec des partenaires. Ce n'est pas pour rien que les envoyés spéciaux des États-Unis et de l'Union européenne, Jim O’Brien et David O’Sullivan, travaillent ensemble pour encourager les pays tiers à sévir contre le contournement, ou au moins à ne pas soutenir l'évasion et ainsi de suite. Il est capital également de collaborer avec des partenaires internationaux.
    Je dirais en dernier lieu que la capacité des pays tiers est un élément primordial. Certains pays dont on pourrait espérer qu'ils aident à remédier aux lacunes ou au moins à appliquer les sanctions manquent cruellement de capacités. Il en manque non seulement dans les ministères, mais aussi dans les douanes, les services de renseignement, les forces policières et ainsi de suite.
    Il faut vraiment que des efforts considérables de renforcement des capacités à l'étranger soient déployés collectivement avec d'autres partenaires.

  (1250)  

    Merci beaucoup.
    Selon ce que vous avez dit, les capacités devraient être renforcées aussi au Canada. Vous avez mentionné que des centaines de personnes font ce travail aux États-Unis comparativement à un nombre très limité d'employés — 7 ou 12 personnes — au pays. Je pense que les ressources sont une priorité majeure.
    J'aimerais poser une question au témoin du Myanmar ou de la Birmanie.
    Vous avez touché un mot sur les armes et les militaires au Myanmar. Pourriez-vous nous dire comment le Canada devrait s'y prendre pour que toutes les armes, y compris les pièces et les technologies à double usage canadiennes, ne se retrouvent pas entre les mains de personnes ou de gouvernements visés par des sanctions?
    Merci.
    C'est vraiment malheureux que des pièces et des fournitures soient encore envoyées aux militaires du Myanmar, y compris par des Occidentaux. Je ne sais pas ce qu'il en est au Canada, mais des entreprises en Europe et aux États-Unis leur en envoient directement ou indirectement.
     Voilà pourquoi nous devons imposer des sanctions aux courtiers en pièces d'armes. Ces individus utilisent différents canaux. Il faut viser les courtiers en armes, et non pas seulement les fournisseurs d'armes. Le Canada doit se coordonner avec ses alliés pour imposer des sanctions visant expressément les courtiers. De cette manière, la junte militaire ne recevrait pas de ces pièces ou de ces armes qu'elle utilise pour tuer des gens ou qu'elle réexporte vers la Russie, qui elle, les utilise pour tuer des Ukrainiens et des Russes.
     Merci beaucoup.
    Je pense que mon temps est écoulé.
    Merci.
    Nous allons passer à la deuxième série de questions. Ce seront des questions de trois minutes.
    Monsieur Genuis, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Kyaw, j'aimerais revenir à vos commentaires sur les courtiers en armes. Seriez-vous en mesure de fournir par écrit au Comité des informations telles que des noms et des détails sur l'identité de courtiers en armes en particulier et des suggestions sur les sanctions que nous pourrions leur imposer?
    Oui. Je vais fournir ces informations après la réunion. Un certain nombre de courtiers font déjà l'objet de sanctions au Canada et aux États-Unis, mais plusieurs autres sévissent encore. Comme je l'ai mentionné, certains d'entre eux parviennent à éviter les sanctions.
    Merci.
    En une minute ou deux, pouvez-vous nous en dire plus sur les sanctions relatives au pétrole et au gaz? Comment devrions-nous nous y prendre pour cibler ce secteur, et quelles mesures sont efficaces?
    Les sanctions relatives au pétrole et au gaz placent l'armée du Myanmar dans une situation de vulnérabilité. Oui, le Canada a pris beaucoup de sanctions, dont bon nombre sont symboliques. Toutefois, à elle seule, la Myanma Oil and Gas Enterprise génère des recettes de 1,5 milliard de dollars. C'est l'unique source de recettes et de devises étrangères de l'armée du Myanmar. L'Union européenne impose déjà des sanctions à la Myanma Oil and Gas Enterprise, mais comme les autres témoins l'ont dit, les sanctions doivent être coordonnées, sinon le pays peut exploiter des failles. Le Canada, les États-Unis et l'Union européenne devraient tous prendre des sanctions contre la Myanma Oil and Gas Enterprise.
    Par rapport aux failles, est‑ce que le problème, c'est que des sanctions sont imposées, mais qu'elles ne sont pas appliquées efficacement? Ou est‑ce plutôt que des sanctions sont prises contre certains groupes, mais pas d'autres, ce qui permet de contourner les sanctions sans enfreindre la loi en faisant affaire avec des groupes non visés par des sanctions?
    C'est le contraire. À titre d'exemple, le Canada et l'Occident imposent déjà des sanctions à l'Asia Sun Group, un autre fournisseur d'armes. Cependant, d'après nos renseignements, cette entreprise exploite une société-écran, Shoon Energy, et c'est Shoon Energy qui importe les armes.
    Ce que je me demande, c'est s'il est illégal d'avoir recours à des sociétés-écrans comme celle‑là. Les sanctions sont-elles contournées par des moyens licites ou illicites?
    Nous l'ignorons. C'est peut-être illégal étant donné les sanctions. Les sanctions sont éludées. Est‑ce par des moyens illicites...
    Je vous remercie.
    Brièvement, maître Kadian, j'aimerais profiter du temps qu'il me reste pour vous demander votre avis sur l'implication éventuelle de responsables du gouvernement turc dans les violations des droits de la personne commises durant le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Recommanderiez-vous d'imposer des sanctions à des responsables affiliés au régime turc? Avez-vous des observations à nous présenter là‑dessus, rapidement? Vous pouvez aussi nous envoyer une réponse écrite, si vous voulez.

  (1255)  

    Je vous prie d'être très brève. Vous disposez de moins de 15 secondes.
    Il ne fait aucun doute que la Turquie entretient des liens avec l'Azerbaïdjan et qu'elle joue un rôle de soutien dans la crise des droits de la personne. Nous pourrons vous fournir d'autres noms après la réunion.
    Merci.
    Madame Fry, vous disposez de trois minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de leur présence.
    Je suis particulièrement préoccupée par les observations de Mme Moret, malgré les défis. Pour que les sanctions portent des fruits, avons-nous... Nous ne pouvons pas en évaluer les effets. Au Myanmar, les sanctions semblent n'avoir rien donné. Au contraire, la situation a empiré.
    Y a‑t‑il des indicateurs dont nous pouvons nous servir, par exemple, pour mesurer et évaluer les progrès réalisés par rapport à nos objectifs? Qu'arrive‑t‑il si l'on impose des sanctions à un pays, et ce pays continue notamment à intensifier ses attaques contre les droits de la personne? Si tel est le cas, comment le savons-nous? Comment pouvons-nous corriger les failles, par exemple? Si nous n'avons ni indicateurs ni mesures, il se peut que nous dépensions une fortune en vaines tentatives.
    Connaissez-vous un pays ayant établi un ensemble d'indicateurs ou de mesures de référence dont nous pourrions nous servir pour évaluer, ne serait‑ce qu'approximativement, les effets de nos efforts?
    C'est une très bonne question.
    Je dirais que tous les gouvernements utilisent probablement des mesures de référence internes quelconques. Ces méthodes sont-elles bien définies ou très rigoureuses? Je ne sais pas. D'après moi, il est certainement possible de réfléchir aux différents effets que peuvent avoir les mesures. Pour moi, la question est là, car il n'y a pas un seul type d'effet. Bien sûr, un des effets est le message qu'on envoie, la fonction politique de montrer que des mesures décisives sont prises. Un autre effet est la restriction de l'accès aux ressources clés.
    D'après moi, cet effet se manifeste très clairement en Russie en ce moment. Le fait que la Russie est obligée de se tourner vers la Corée du Nord pour se procurer des munitions et des roquettes ou encore vers l'Iran pour acheter des drones montre qu'elle doit maintenant faire des pieds et des mains pour avoir accès à certains biens à double usage difficiles à obtenir par d'autres moyens.
    Je vous remercie, madame Moret.
    Je n'ai pas beaucoup de temps et j'aimerais vous poser une autre question.
    Tout d'abord, d'autres pays ont-ils défini des indicateurs leur permettant de mesurer l'incidence des mesures? Voilà la première partie de ma question.
    La deuxième partie de ma question est la suivante: devrions-nous également imposer des sanctions aux pays qui... Nous avons déjà pris des sanctions contre le Myanmar, mais devrions-nous en imposer également aux pays qui servent d'intermédiaires à ceux visés par des sanctions? Comment faut‑il s'y prendre? Comment peut‑on savoir ce qui se passe?
    Pour répondre à votre question sur les autres pays, ce qu'il faut savoir, c'est que, d'après ce que je comprends, les États-Unis et l'Union européenne travaillent sur divers projets en ce sens. Je sais aussi que le Canada participe activement à certaines de leurs discussions. À mes yeux, c'est très positif.
    Quant à votre question sur la possibilité d'imposer des sanctions aux pays servant d'intermédiaires, c'est certainement un sujet de discussion ailleurs dans le monde en ce moment. Il va sans dire que c'est l'objectif de beaucoup de sanctions extraterritoriales américaines. Le Canada ferait un grand pas en avant en entrant dans cette arène, étant donné qu'il s'oppose depuis longtemps à de telles mesures, tout comme l'Union européenne. En même temps, à mon avis, il y a d'autres façons de collaborer avec d'autres pays pour empêcher le contournement des sanctions.
    Au bout du compte, pour modifier un comportement... Les sanctions permettent difficilement d'atteindre un tel objectif. Dans de nombreux cas, les sanctions réussissent mieux lorsqu'elles sont utilisées pour restreindre l'accès à des ressources essentielles comme les armes, le financement, etc.
    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à M. Garon, pour une minute et demie.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Moret, dans un récent article publié dans La Presse, vous évoquez le régime américain et son bureau de contrôle des actifs étrangers, qui a beaucoup de personnel et qui compte plusieurs divisions pour faire les enquêtes et le suivi quant à l'application des sanctions.
    Quelle est la différence entre ce bureau et la façon dont nous fonctionnons au Canada? Si c'est différent, quel avantage le Canada pourrait-il tirer du fait de se doter d'un bureau comme celui-là?

  (1300)  

[Traduction]

    Premièrement, il faut apprendre ce qu'il ne faut pas faire. L'incidence qu'ont les sanctions américaines depuis une dizaine d'années est le résultat de la conformité excessive en ce qui a trait à l'élimination des risques dans le secteur financier. Cette pratique a de vastes répercussions allant bien au‑delà des fonctions prévues des sanctions. La première leçon consiste à trouver l'équilibre très délicat entre la conformité — c'est‑à‑dire assurer une conformité adéquate — et l'autre extrémité, soit la conformité excessive.
    Je le répète, le Bureau de contrôle des avoirs étrangers dépend de centaines de personnes, y compris du personnel d'autres organismes gouvernementaux. D'après ce que je comprends, aux États-Unis, les relations de travail entre différents ministères sont extrêmement étroites.
    C'est là un autre élément essentiel: la collaboration entre les intervenants jouant différents rôles. Cette collaboration est souvent absente quand la responsabilité de prendre les décisions, ou du moins d'appliquer les sanctions incombe à un secteur particulier du gouvernement. La collaboration intersectorielle est essentielle.
    Merci, madame Moret.
    Madame McPherson, la parole est à vous pour la dernière minute et demie.
    Merci beaucoup.
    La discussion est très intéressante et instructive. Je remercie les témoins de s'être mis à notre disposition.
    Madame Moret, l'un des éléments qui ressort de votre témoignage, c'est le besoin de précision et de transparence. À l'heure actuelle, les détails sont plutôt obscurs. On ne comprend pas bien comment les gens sont sélectionnés et inscrits sur la liste ni comment les sanctions sont appliquées et en quoi elles consistent.
    Pouvez-vous nous parler brièvement des pratiques exemplaires? Comment le Canada peut‑il assurer la participation de la société civile et de la diaspora, ainsi que la transparence et l'efficacité du système?
    Certainement. C'est le point focal d'une grande partie de mon travail.
    Premièrement, il faut des échanges réguliers dans un forum de confiance où l'on emploie un langage commun, car il faut du temps. D'après mon expérience, il peut falloir plusieurs années pour bâtir la confiance nécessaire à la communication efficace entre différents secteurs sur ces enjeux délicats. C'est le premier élément. Des représentants d'ONG peuvent aussi contribuer à la rationalisation des échanges. Il en va de même, bien entendu, pour les banques et l'ensemble du secteur privé en ce qui touche les questions relatives au commerce, aux chaînes d'approvisionnement mondiales et plus encore, domaines dans lesquels le Canada joue un rôle.
    Deuxièmement, il faut tirer parti de la technologie. Le Canada est réputé pour son secteur de la technologie financière et ses idées novatrices. Beaucoup de mesures peuvent être prises pour tirer parti des aspects positifs de la technologie afin de réduire les obligations de vigilance, d'améliorer la transparence, de faciliter le transfert de fonds d'aide humanitaire, etc.
    Troisièmement, il faut désigner un point de contact auquel les ONG, la société civile et tous les autres peuvent poser leurs questions. Les groupes comme les banques doivent aussi avoir un endroit vers lequel se tourner lorsqu'ils ont des questions sur la nature des activités donnant droit à commission, sur les libellés et plus encore.
    Je crois que mon temps de parole est écoulé.
    Voilà qui met fin à la période de questions.
    Permettez-moi de remercier Me Kadian, M. Kyaw et Mme Moret pour leur expertise. Comme les membres du Comité l'ont bien montré, vos témoignages nous seront très utiles.
    Avant de lever la séance, je souligne, pour les membres du Comité, que nous allons laisser tomber les 10 minutes consacrées aux travaux du Comité, car il y a consentement unanime pour apporter des changements à l'horaire.
    Tous les membres du Comité ont convenu de consacrer le reste des réunions de la session au régime des sanctions, à l'exception de la réunion de mardi prochain. Mardi prochain, durant la première heure, nous aurons une discussion sur le Groupe Wagner avec des représentants d'Affaires mondiales Canada; ensuite, durant la deuxième heure, nous recevrons le sous-ministre des Affaires étrangères de la Lituanie dans le cadre de notre étude sur l'Ukraine.
    Aussi, étant donné les changements apportés à l'horaire, nous avons reporté l'échéance pour recommander des témoins pour l'étude sur le Groupe Wagner à mardi prochain, avant la fin de la journée.
    Avez-vous des questions? Est‑ce que tout est beau?
    La séance est levée.
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