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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 10 mai 2023

[Enregistrement électronique]

  (1635)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la réunion no 65 du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.
    Conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 8 mars 2023, le Comité se réunit en séance publique pour poursuivre son étude du projet de loi C‑295, Loi modifiant le Code criminel.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les membres y assistent en personne et à distance à l'aide de l'application Zoom.
    J'aimerais formuler quelques observations pour la gouverne des témoins et des membres.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de vous exprimer. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro et le mettre en sourdine lorsque vous n'avez pas la parole.
    Pour les services d'interprétation, ceux qui utilisent Zoom ont le choix au bas de leur écran du parquet, de l'anglais ou du français. Veuillez sélectionner le canal souhaité. Ceux qui sont dans la salle peuvent utiliser l'écouteur et sélectionner le canal souhaité.
    Je vous rappelle que vous devez toujours vous adresser à la présidence. Les députés présents dans la salle sont priés de lever la main s'ils souhaitent prendre la parole. Les députés qui participent sur Zoom doivent utiliser la fonction « Lever la main ». Le greffier et moi-même allons faire de notre mieux pour gérer l'ordre des interventions. Nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins, qui comparaissent tous par vidéoconférence aujourd'hui.
    Premièrement, nous accueillons, de la BC Care Providers Association, Terry Lake, directeur général...

[Français]

    Monsieur le président, est-ce que tous les tests requis ont bien été faits et est-ce que tous les témoins sont prêts à témoigner?

[Traduction]

    Madame Larouche, oui, toutes les connexions ont été testées, alors tout devrait bien se dérouler.
    Ceux qui sont en ligne ne nous entendent plus.
    Attendez un instant. Nous allons demander au greffier de trouver le problème.
    M'entendez-vous maintenant? Avez-vous entendu mes observations préliminaires?
    D'accord, pour ceux qui ne sont pas des membres, au bas de votre écran, veuillez sélectionner le service d'interprétation que vous voulez. Il y a l'anglais, le français ou le parquet, si vous êtes bilingues. Si vous voulez poser une question, veuillez utiliser la fonction « Lever la main » si vous êtes en ligne, et le greffier et moi ferons de notre mieux pour vous céder la parole.
    Je m'apprêtais à présenter nos témoins.
    De BC Care Providers, nous recevons Terry Lake, directeur général, par vidéoconférence.
    Nous avons un témoin de l'Association canadienne des soins de longue durée. Jodi Hall, merci et bienvenue.
    De la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers, nous recevons Linda Silas.
    Je vais commencer par céder la parole à Terry Lake, un bon ami et fréquent visiteur à ce comité et à d'autres comités, pour cinq minutes, puis nous entendrons le témoin suivant. Par après, nous procéderons à une série de questions.
    La parole est à vous, monsieur Lake.
    Merci, monsieur le président, et bonjour aux membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
    Je m'adresse à vous aujourd'hui depuis la belle ville de Kamloops, en Colombie-Britannique, de Secwépemcúl'ecw, le territoire traditionnel de la Première Nation de Tk'emlúps te Secwe̓pemc.
    Je suis Terry Lake. Je suis le directeur général de la BC Care Providers Association, qui est la plus grande organisation qui représente les fournisseurs contractuels de soins de longue durée et d'aide à la vie autonome en Colombie-Britannique. Nous comptons des organisations à but lucratif et à but non lucratif et, par l'entremise de notre branche opérationnelle, EngAgeBC, nous représentons également des fournisseurs privés de soins de santé à domicile et des fournisseurs indépendants.
    J'occupe ce poste depuis deux ans et demi, mais auparavant, de 2013 à 2017, j'ai été ministre de la Santé de la Colombie-Britannique responsable des soins aux personnes âgées dans la province. Dans notre province, les soins de longue durée sont fournis par les autorités sanitaires, les sociétés à but non lucratif et les sociétés à but lucratif, chacune étant responsable d'environ un tiers des résidents des établissements de soins de longue durée, qui sont au nombre d'environ 30 000.
    Pourquoi ce projet de loi? À la suite de la première vague de COVID‑19, avant que la vaccination soit disponible, l'incidence du virus sur les résidents vulnérables des établissements de soins de longue durée a suscité de vives inquiétudes. Environ 80 % des décès survenus au Canada après cette première vague ont eu lieu dans ces établissements, et nous avons assisté à des scènes terribles, en particulier dans les provinces de l'Ontario et du Québec, où le personnel des Forces armées canadiennes a été déployé pour s'occuper des résidents.
    Les établissements chroniquement sous-financés étaient déjà aux prises avec des problèmes de personnel avant la pandémie, et comme de nombreux membres du personnel sont tombés malades à cause du virus ou ont simplement eu trop peur d'aller travailler, les résidents ont parfois été laissés dans des circonstances terribles. Il est facile de comprendre pourquoi il est nécessaire d'agir pour éviter que ces terribles situations ne se reproduisent. Le discours du Trône de 2020 indiquait que le gouvernement était sur le point d'agir en ce sens et, à l'époque, j'ai présenté un mémoire à ce comité dans lequel je signalais que des dispositions du Code criminel prévoyaient déjà des mesures très semblables à celles que ce projet de loi vise à mettre en oeuvre. Ces dispositions se trouvent aux articles 219, 220 et 221.
    Il y a négligence criminelle lorsque, premièrement, une personne a un devoir imposé par la loi, ce qui inclut, bien sûr, la réglementation des établissements de soins; deuxièmement, une personne fait quelque chose ou omet de faire quelque chose et, par conséquent, fait preuve d'une insouciance déréglée ou d'un mépris total à l'égard de la vie ou de la sécurité d'autrui; et, troisièmement, une personne cause ainsi la mort ou des lésions corporelles.
    De plus, l'article 217 du Code criminel actuel stipule qu'une personne qui a le pouvoir de diriger la manière dont une autre personne effectue un travail a l'obligation légale de prendre des mesures raisonnables pour éviter que cette personne subisse des lésions corporelles ou qu'une autre personne ne subisse des lésions corporelles du fait de ce travail.
    C'est le Code criminel existant, mais bien entendu, chaque province et territoire dispose d'une législation et d'une réglementation qui obligent les exploitants et les employés à rendre compte de toute négligence entraînant des préjudices pour les résidents. En Colombie-Britannique, la Community Care and Assisted Living Act et ses règlements comprennent une section intitulée « Harmful actions not permitted », ou « Actes préjudiciables non permis », qui figure dans le règlement 52:
(1) Le titulaire de la licence doit s'assurer que la personne qui reçoit des soins n'est pas, pendant qu'elle est sous les soins ou la supervision du titulaire de la licence, soumise à l'un des éléments suivants:
a) l'un des types d'abus ou de négligence suivants, tels que décrits à la section 1 de l'Annexe D
    Il s'agit notamment d'abus émotionnels, d'abus financiers, de négligence, d'abus physiques, d'abus sexuels et de privation de nourriture ou de liquides comme forme de punition.
    Jodi Hall, ma collègue de l'Association canadienne des soins de longue durée, discutera de l'effet dissuasif que les modifications proposées au Code criminel pourraient avoir, et auraient probablement, sur le recrutement et le maintien en poste des travailleurs dans le secteur des soins de longue durée, mais permettez-moi de dire que la dotation en personnel est le principal défi auquel nous sommes confrontés dans la prise en charge de nos aînés. C'était le cas avant la pandémie, et ça l'est toujours. Tout ce qui exacerbe ce défi se traduira en fait par moins de soins, et non par plus de soins.
    Je sais que ce projet de loi n'a pas été présenté pour aggraver la situation, évidemment. Ce que je suggère donc, c'est que si le gouvernement estime que les personnes âgées dans les établissements de soins manquent de protection quelconque, il devrait présenter son propre projet de loi en s'appuyant sur une stratégie d'engagement solide pour comprendre les conséquences positives et négatives potentielles.
    Je rappelle au Comité que les autorités sanitaires provinciales et les municipalités seraient touchées par ce projet de loi et, qu'à l'heure actuelle, il n'y a pratiquement aucune information sur ce projet de loi. Les représentants des autorités sanitaires de la Colombie-Britannique ont exprimé leur surprise lorsque j'ai fait part de mes préoccupations à une réunion régulière entre les autorités sanitaires et le ministère, et ce n'est que maintenant qu'ils font preuve de diligence raisonnable à l'égard de ce projet de loi.
    Tous les Canadiens et certains fournisseurs de services de soins de longue durée se soucient profondément des adultes vulnérables qui ont besoin de soins complexes dans les foyers pour personnes âgées. Les exploitants ont contribué à l'élaboration de normes nationales, ont soutenu les efforts visant à former davantage de professionnels de la santé et sont déterminés à améliorer en permanence notre système de soins. Tous les exploitants et toutes les organisations, comme la BC Care Providers Association, continueront à travailler avec diligence avec tous les niveaux de gouvernement pour s'assurer que cela se produise.

  (1640)  

    Sur ce, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Lake.
    Avant que vous poursuiviez, je tiens à souhaiter à tout le personnel infirmier une bonne Semaine nationale des soins infirmiers. Félicitations, et nous célébrons tout leur excellent travail. Surtout durant la pandémie, tout le monde a pris conscience du travail difficile et important que le personnel infirmier fait.
    Notre prochain témoin est Jodi Hall, de l'Association canadienne des soins de longue durée.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je veux d'abord vous remercier de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui pour discuter du secteur des soins de longue durée du Canada.
    Je suis Jodi Hall, et je suis la première directrice générale de l'Association canadienne des soins de longue durée. L'association s'engage à garantir des soins de longue durée de qualité pour tous, et nous défendons les intérêts des personnes âgées qui vivent dans des établissements de soins de longue durée et de nos membres. Nous comptons parmi nos membres de nombreuses associations provinciales de soins de longue durée ainsi qu'un vaste éventail d'exploitants d'établissements de soins de longue durée issus d'organisations à but non lucratif, confessionnelles et privées.
    L'association est reconnaissante que l'esprit du projet de loi proposé consiste à protéger les adultes vulnérables, et nous appuyons la présentation d'une mesure législative qui s'attaquerait à la maltraitance des personnes âgées au Canada. Cependant, le projet de loi dont le Comité est saisi ne permet pas d'atteindre cet objectif. S'il était adopté dans sa forme actuelle, je pense qu'il aurait probablement une incidence dévastatrice sur le secteur des soins de longue durée dans tout le pays.
    Les établissements de soins de longue durée sont actuellement confrontés à un certain nombre de problèmes qui ont une incidence sur leur capacité à être durables. Tout d'abord, la crise des ressources humaines dans le secteur de la santé constitue un défi de taille. Les plus récentes données de Statistique Canada pour le dernier trimestre de 2022 indiquent qu'il y a plus de 38 000 postes vacants dans les établissements de soins de longue durée au Canada. Cela représente plus du double du nombre de postes vacants en 2019.
    Les provinces font des investissements dans les soins de longue durée, et les dirigeants et les équipes de première ligne des établissements de soins de longue durée restent déterminés à fournir chaque jour des soins de qualité élevée aux résidents. Toutefois, ils le font avec des ressources limitées, et bon nombre d'entre eux se trouvent dans des foyers dont l'infrastructure est vieillissante.
    Notre secteur a besoin de soutien. Nous sommes confrontés à des problèmes systémiques importants, notamment des pénuries de personnel généralisées, des infrastructures vieillissantes et un sous-financement chronique. Ces problèmes ne sont pas nouveaux. Des décennies de sous-investissement ont jeté les bases d'une tempête parfaite, qui s'est malheureusement déroulée pendant la pandémie et qui a laissé les établissements en proie à des difficultés aujourd'hui encore.
    Aux dernières élections, le gouvernement s'est engagé à investir 9 milliards de dollars dans les soins de longue durée sur cinq ans. Malheureusement, nous attendons toujours que cet engagement soit honoré. Ces fonds pourraient servir à soutenir le recrutement de personnel, à améliorer nos normes de soins et à investir dans les infrastructures indispensables.
    Bien que les soins de longue durée aient reçu plus d'attention récemment, notre pays ne s'est pas réuni pour discuter de la création d'un secteur des soins de longue durée. Dans les 15 prochaines années, le Canada comptera 10 millions d'aînés de plus. Nous devons nous pencher sur les questions relatives à la viabilité des soins de longue durée, mais aujourd'hui, nous sommes ici pour discuter du projet de loi C‑295.
    Les membres de l'association dénoncent sans équivoque la maltraitance des personnes âgées sous toutes ces formes. Ce projet de loi pourrait avoir une incidence dévastatrice sur les établissements de soins de longue durée, sans pour autant tenir compte des multiples facettes qui sont nécessaires à une mesure législative sur la maltraitance des personnes âgées au Canada.
    De plus, le terme « gérant » est si largement défini dans ce projet de loi qu'il englobe la quasi-totalité du personnel de soins de longue durée. À l'heure actuelle, le projet de loi se concentre sur les employés des établissements de soins de longue durée et uniquement sur ces établissements, car les autres structures — par exemple, un hôpital — qui fournissent des soins semblables avec des employés semblables, souvent des personnes qui attendent d'être admises dans un établissement de soins de longue durée, ne sont pas prises en compte.
    Nous croyons que cela fera accroître les difficultés liées au recrutement et au maintien en poste. Ce n'est pas en créant de nouveaux obstacles au recrutement et au maintien en poste dans le secteur des soins de longue durée que l'on améliorera la qualité et la sécurité dans les établissements.
    Tous les niveaux de gouvernement ont la possibilité de collaborer avec le secteur des soins de longue durée pour construire une voie résiliente vers l'avenir. Malheureusement, je pense que le projet de loi tel qu'il est présenté ne profite pas de cette possibilité. Pour aller de l'avant, le gouvernement devrait lancer des consultations exclusives avec les résidents, les familles, les fournisseurs et les autres intervenants du système de santé, afin de relever les lacunes existantes dans les protections contre la maltraitance des aînés et la meilleure façon de combler ces lacunes, sans causer de répercussions involontaires, comme le fera ce projet de loi d'initiative parlementaire.
    Si le Comité décide d'adopter le projet de loi, nous demandons à tout le moins que le champ d'application du projet de loi ne soit pas limité aux établissements de soins de longue durée et aux gérants de ces établissements, mais qu'il couvre tous les milieux de soins et tous les professionnels de la santé. Ainsi, on évite que les inégalités en matière de recrutement et de maintien en poste ne visent que les établissements de soins de longue durée.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

  (1645)  

    Merci, madame Hall.
    Nous allons maintenant entendre Linda Silas, présidente de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers.
    Merci, monsieur le président, et merci d'avoir souligné la Semaine nationale des infirmières et des infirmiers.
    Je suis Linda Silas, présidente nationale de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et infirmiers. La fédération est la plus grande organisation de personnel infirmier au Canada — à vrai dire, en Amérique du Nord — qui compte 250 000 infirmières et étudiants en sciences infirmières.
    C'est un honneur de m'adresser à vous aujourd'hui, et je vous remercie de l'invitation.
    Je vais d'abord souligner l'importance de la promotion de ce projet de loi par celle qui l'a présenté, la Dre Hedy Fry, qui a mis sa conviction en oeuvre en faisant avancer ce projet de loi au Parlement.
    Comme la Dre Fry, j'ai moi aussi été mortifiée par ce que j'ai vu dans les secteurs des soins de longue durée dans les mois qui ont suivi le début de la pandémie de COVID‑19. J'ai également exprimé de profondes inquiétudes quant à la qualité des soins fournis dans ce secteur bien avant la pandémie de COVID‑19. En 2015, la fédération a commandé un rapport intitulé « Before It's Too Late: a National Plan for Safe Seniors' Care » — Avant qu'il soit trop tard: un plan national pour la sécurité des soins aux aînés —, car nous savions qu'en raison du vieillissement de la population et du manque criant de personnel dans les établissements de soins de longue durée, nous devions veiller à ce que les aînés reçoivent les soins qu'ils méritent. En 2015, nous avons tiré la sonnette d'alarme.
    Depuis la publication de ce rapport, peu de choses ont changé. Les résidents de ces établissements de soins de longue durée ont beaucoup souffert. Les infirmières se sont réjouies de la publication de la norme sur les services de soins de longue durée au début de l'année, mais nous savons qu'il reste encore beaucoup à faire. Les normes ne sont pas obligatoires, donc sans loi qui oblige les établissements à assurer la qualité des soins dans tous les domaines, y compris un minimum de 4,1 heures de soins directs par résident et par jour, les aînés restent vulnérables.
    La Dre Fry nous permet de continuer à mettre en lumière les soins de longue durée. Je soutiens fermement l'intention du projet de loi d'apporter la sécurité et le bien-être aux résidents.
    Je ne vais pas citer un passage du Code criminel. Toutefois, les infirmières sont très préoccupées par la définition du terme « gérant » dans le projet de loi. Elle créerait une situation dans laquelle les travailleurs de ces établissements, qui n'ont pas de responsabilités en matière de prise de décisions, pourraient être tenus criminellement responsables de la qualité des soins reçus par les résidents.
    Les tâches associées à la définition de « gérant » dans le projet de loi reflètent les tâches effectuées par les infirmières syndiquées dans ces établissements. Par exemple, les infirmières réglementées assument des fonctions de direction dans les établissements de soins de longue durée. Elles participent à des activités telles que la formation et la supervision du personnel. Elles peuvent participer à l'embauche et à l'établissement des horaires du personnel et diriger la planification et la coordination de la prestation des soins aux résidents. Ces infirmières ne sont pas responsables d'établir le budget de l'établissement dans lequel elles travaillent, ce qui conduit au nombre d'employés embauchés, à l'étendue de la formation qu'ils reçoivent et à d'autres conditions au sein de ces établissements qui ont donné lieu à des résultats désastreux pour les résidents. Les propriétaires de ces établissements, qui prennent les décisions clés en matière de ressources et de qualité des soins, se situent souvent à un niveau supérieur à celui des infirmières sur le terrain.
    Nous savons que dans les établissements de soins de longue durée à but lucratif, la recherche du profit est en concurrence directe avec l'obligation de fournir des soins optimaux. En Ontario, les données montrent que ces établissements, qui affichent des taux de décès liés à la COVID‑19 nettement plus élevés, emploient en moyenne 17 % de travailleurs de moins que les foyers municipaux à but non lucratif, mais qu'ils peuvent se permettre de verser des dividendes à leurs actionnaires. Alors que le pays connaît une pénurie sans précédent d'infirmières dans tous les domaines, le libellé actuel de ce projet de loi pourrait amener davantage d'infirmières à quitter les soins de longue durée et constituer un obstacle au recrutement en cette période particulièrement difficile.
    Au nom des infirmières du Canada, je demande à ce comité de recommander des modifications à la définition du terme « gérant » pour qu'il désigne toute personne ayant une responsabilité de haut niveau en matière de prise de décisions d'ordre financier ou autre concernant l'ampleur de la responsabilité au sens de la définition dans le projet de loi.
    Je vous remercie, et je répondrai à vos questions, au besoin.

  (1650)  

    Merci.
    Nous allons entreprendre notre première série de questions. Pour ceux qui ne me connaissent pas, j'utilise des cartons: un carton jaune que je lève lorsqu'il reste 30 secondes à l'intervention et un carton rouge lorsqu'il ne reste plus de temps. Je vous demanderais de conclure lorsque vous le voyez. Je n'aime pas devoir vous interrompre.
    Nous allons d'abord entendre M. Moore, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de comparaître devant nous dans le cadre de notre étude sur le projet de loi d'initiative parlementaire. Votre expertise nous sera certainement utile.
    Je dirai, pour commencer, que nous sommes évidemment tous contre la maltraitance des aînés, mais nous voulons veiller... Je crois qu'un des témoins a parlé de « conséquences involontaires ». Nous voulons veiller à ce que les mesures parlementaires nous permettent d'atteindre les objectifs souhaités et n'entraînent pas de conséquences négatives.
    Ma question s'adresse à Jodi Hall.
    Vous avez parlé des problèmes avec la mesure législative en soi. Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, mais le Comité a l'occasion d'entendre les propositions des témoins en vue de sa modification. Avez-vous des suggestions à faire pour rendre le projet de loi plus acceptable ou plus utile?
    Nous ne voulons évidemment pas que le projet de loi décourage les gens d'accepter un emploi dans un domaine où les besoins sont criants. Avez-vous des propositions à faire à cet égard?
    Nous nous préoccupons grandement de la portée générale du projet de loi C‑295 tel qu'il est présenté. Nous croyons que bon nombre de ces enjeux sont déjà abordés par les lois provinciales et par le Code criminel.
    Notre premier choix serait de ne pas adopter ce projet de loi. Toutefois, si le Comité choisit d'aller de l'avant, nous lui demandons de revoir la définition du terme « gérant », qui s'applique uniquement aux soins de longue durée, de même que la définition d'« établissement de soins de longue durée ». Nous croyons qu'il faut en élargir la portée à l'ensemble du système de soins de santé.
    À notre avis, puisque le projet de loi vise à lutter contre la maltraitance des aînés et que des soins fort similaires peuvent être offerts par du personnel semblable dans un contexte hospitalier, par exemple, il ne devrait pas viser uniquement la maltraitance dans un environnement de soins de longue durée.
    En ce qui a trait aux amendements, nous croyons qu'ils devraient viser à élargir la portée du projet de loi, afin qu'il tienne compte d'un plus grand nombre de professionnels et d'environnements.

  (1655)  

    Permettez-moi de rapprocher deux éléments. D'un côté, j'entends des témoins parler d'élargir la portée du projet de loi, mais de l'autre, on parle d'en réduire la portée. Est‑il juste de parler d'une réduction quant à la façon dont la loi s'appliquerait au sein d'un établissement et aux personnes qui seraient visées, mais aussi d'un élargissement afin d'éviter de créer deux normes différentes pour des établissements qui offrent les mêmes services — avec l'exemple d'un hôpital et d'un établissement de soins de longue durée —, de sorte que l'un ne soit pas désavantagé par rapport à l'autre en ce qui a trait au recrutement et aux normes à respecter? Est‑ce que vous souhaiteriez vous aussi que l'on en réduise la portée de cette façon?
    Je tiens à être très claire: nous n'appuyons pas le projet de loi tel qu'il est présenté.
    Il y a de nombreux problèmes graves en matière de soins de longue durée. À notre avis, les risques associés au recrutement et à la conservation du personnel dans le secteur des soins de longue durée sont importants. Le Code criminel prévoit déjà des mécanismes de responsabilisation, tout comme les lois, les normes, la réglementation et les inspections à l'échelon provincial.
    Toutefois, si le Comité est déterminé à aller de l'avant avec le projet de loi, alors nous lui demandons d'en élargir la portée à l'ensemble du secteur des soins de santé afin d'éviter de créer des inégalités en ne visant que le secteur des soins de longue durée, surtout si l'objectif est de lutter contre la maltraitance des aînés.
    Je comprends. C'est logique.
    Le Comité a entrepris une étude sur la maltraitance des aînés il y a quelques années. Les opinions au sujet de la modification du Code criminel étaient divergentes. Il y avait toutefois un consensus au sujet de la prévention de la maltraitance. Je crois que vous en avez parlé.
    Lorsqu'on étudie de telles mesures, on a parfois l'impression d'être devant un vide législatif, mais vous avez parlé de la réglementation provinciale qui est déjà en place. Pouvez-vous nous en dire davantage?
    Oui, il y a des mesures de responsabilisation exhaustives en place à l'échelon provincial. Il est de la responsabilité des gouvernements provinciaux d'assurer la surveillance des établissements de soins de longue durée.
    Sans égard à leur type, tous les établissements de soins de longue durée sont assujettis aux règlements et normes des provinces. Il ne faut pas oublier les autres mesures législatives qui entrent en jeu, comme celles sur la santé et la sécurité au travail.
    Il ne me reste plus de temps, mais je tiens à remercier tous les témoins.
    Merci, monsieur Moore.
    Nous allons maintenant entendre Mme Diab, qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à tous les témoins.
    Je crois que nous sommes tous d'avis — les membres du Comité et les témoins — que la motivation derrière le projet de loi est claire. La marraine du projet de loi aborde la question de la négligence des adultes vulnérables, surtout dans les établissements de soins de longue durée, en raison des événements qui se sont produits pendant la pandémie et de l'état de nos installations de soins de longue durée à ce moment‑là.
    Ce que nous voulons, c'est d'éviter que les tragédies qui ont été rapportées par les membres des forces armées lorsqu'ils ont été déployés ne se reproduisent.
    J'aimerais connaître l'opinion de M. Lake sur le sujet. Croyez-vous que le projet de loi peut nous permettre d'éviter de telles tragédies?
    Est‑ce que le projet de loi tient les bonnes personnes responsables de ces enjeux? À votre avis, qui est responsable?

  (1700)  

    La question est complexe, et je crois que c'est la raison pour laquelle il faut des consultations exhaustives pour bien la comprendre. Nous comprenons tous la motivation derrière le projet de loi, mais il faudrait consulter les intervenants de manière exhaustive pour déterminer le meilleur mécanisme à utiliser pour atteindre les objectifs souhaités.
    Si l'on se replonge en mars 2020 — nous avons tous perdu la notion du temps, mais essayez d'y revenir —, on se souviendra que nous ne savions rien, sauf qu'il y avait un virus mortel, surtout pour les personnes âgées.
    Mettons-nous à la place des travailleurs dans un établissement de soins de longue durée du Québec ou de l'Ontario, par exemple, au moment où la prévalence du virus dans les résidences pour personnes âgées était élevée. Évidemment, ceux qui étaient malades n'allaient pas travailler. Toutefois, ceux qui n'étaient pas malades, mais qui avaient peur pour leur famille ne savaient pas trop quoi faire.
    Je ne crois pas que la présente mesure législative aurait forcé ces gens à se rendre au travail s'ils avaient peur de le faire. Heureusement, la grande majorité de ces travailleurs se sont rendus au travail et ont agi en héros, en assurant le bien-être et la sécurité de nos aînés.
    Je crois qu'il y a de meilleurs mécanismes à adopter; Mme Hall en a évoqué quelques-uns.
    Le financement adéquat des établissements de soins de longue durée en est un. Comme vous le savez, les soins de longue durée ne sont pas couverts en vertu de la Loi canadienne sur la santé. Toutefois, de façon générale, la province paie une partie des coûts associés à ces soins; le patient et sa famille paient l'autre partie. Ces coûts sont souvent déterminés en fonction du revenu.
    Il y a toutefois un manque de personnel chronique au sein du système. Les professionnels de la santé qui travaillent dans le domaine des soins de longue durée sont parfois stigmatisés; certains choisissent donc plutôt les soins actifs en pensant qu'il s'agit d'un meilleur domaine. L'âgisme est un facteur qui peut avoir une incidence sur leur décision. Cela ne fait aucun doute.
    La difficulté de recruter du personnel dans le domaine des soins de longue durée a toujours été un défi. Les gens y pensent à deux fois avant d'accepter de travailler en soins de longue durée — ou dans les résidences pour personnes âgées, puisqu'elles seraient également visées par le projet de loi — et risquent de choisir un autre domaine.
    Je crois que nous pourrions prendre de nombreuses mesures pour protéger les aînés, notamment en investissant davantage dans le domaine, en augmentant le nombre d'heures de soins et en améliorant les mesures incitatives ainsi que les stratégies de recrutement et de conservation du personnel... Les provinces travaillent actuellement à toutes ces mesures, soit dit en passant.
    Comme le dit souvent le Dr Samir Sinha lorsqu'il s'adresse aux médias, le financement des soins pour les aînés au Canada est de 15 % inférieur à celui des autres pays de l'OCDE.
    J'ai une autre question, mais je ne sais pas exactement à qui l'adresser.
    Étant donné les structures de dotation complexes et le nombre de personnes qui interagissent avec les résidants des établissements, qui devrait être tenu responsable en cas de problème, selon vous?
    Ensuite, je crois que vous avez tous dit que des dispositions du Code criminel et des lois provinciales abordaient ces questions. Nous avons 10 provinces et territoires. Leurs lois comportent certainement des éléments qui diffèrent. Qu'est‑ce qui manque? Quel est le chaînon manquant, qui nous permettrait d'atteindre notre objectif?
    Madame Silas, vous pouvez peut-être me répondre. Je sais que vous représentez les syndicats d'infirmières, mais nous ne vous avons pas encore entendue. Que répondriez-vous à cela?

  (1705)  

    Merci.
    Pour ajouter aux propos de M. Lake, je dirais ceci: nous savons ce que nous avons à faire. Nous avons des normes en matière de santé et de sécurité qui ont été approuvées dans l'ensemble du pays. Nous avons des normes de contrôle des infections qui sont approuvées et reconnues partout au pays également. Nous avons de plus des mécanismes de dotation approuvés. Ce qui manque, c'est un financement approprié pour les soins de longue durée et les soins à domicile, et tous les règlements et normes obligatoires.
    Le gouvernement actuel vient d'adopter des normes nationales pour les soins de longue durée, mais elles ne sont pas obligatoires; elles doivent l'être.
    Il faut reconnaître que, dans le cadre des soins de longue durée — et Mme Hall a expliqué la différence entre les soins à domicile, les soins en résidence et les soins de longue durée —, il y a des personnes qui sont malades. On ne parle plus des mêmes niveaux qu'avant, où un résidant de niveau 1 était capable de se déplacer et même de sortir magasiner, par exemple. La plupart des résidants des établissements de soins de longue durée sont au niveau 4 et nécessitent 4,1 heures de soins.
    L'Ontario est la seule province qui a prévu d'établir quatre heures de soins d'ici 2025, mais est‑ce qu'elle mettra cette mesure en œuvre? Il faudra pour cela augmenter le financement des soins de longue durée, et établir des normes et des règlements afin d'éviter les catastrophes qui se sont produites au début de la pandémie... Et soyons honnêtes: tout n'était pas rose avant la pandémie non plus.
    Merci, madame Silas. Merci, madame Diab.
    Nous allons maintenant entendre Mme Larouche, qui dispose de six minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les trois témoins d'être présents aujourd'hui.
    Je prends à mon tour un instant pour souligner la Semaine nationale des soins infirmiers. Cela concerne les témoins d'aujourd'hui. Les infirmières et les infirmiers accomplissent un travail exceptionnel.
    Pour faire suite à ce que M. Lake a dit en réponse à une question, je demeure convaincue que ce ne sont pas seulement les soins de santé offerts aux aînés qui sont sous-financés, mais bien tous les soins de santé offerts en général au Canada. C'est pourquoi je lance un cri du cœur et que, en toute solidarité avec le personnel infirmier, je continue à réclamer une hausse des transferts en santé. Cela fait partie des positions du Bloc québécois, et le sujet d'aujourd'hui est directement lié à cette hausse. Nous avons parlé de l'importance de la hausse réclamée pour que la part fédérale du financement atteigne jusqu'à 35 %. On ne peut pas penser à mieux financer et à mieux soutenir le personnel si on ne pense pas aussi à mieux soutenir le système de la santé et à lui offrir plus de ressources financières.
    Voilà, c'était mon petit mot d'introduction.
    J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Hall.
    En réponse à certaines questions, vous avez dit que le projet de loi C‑295 ne visait que des types d'établissements bien précis et qu'il ne répondait donc pas à tous les besoins en matière de maltraitance. En effet, celle-ci ne s'observe pas que dans des CHSLD ou dans un seul type de résidence. On assiste d'ailleurs à une diversification des types de lieux où vivent les aînés, et il faut en tenir compte lorsqu'il est question de maltraitance. Je sais qu'au Québec, notamment, on examine beaucoup la question des soins à domicile.
    Vous dites aussi dans votre mémoire que le projet de loi C‑295 ne vise qu'un type de maltraitance précis, soit la maltraitance physique, alors qu'il existe beaucoup d'autres types de maltraitance, notamment la maltraitance financière et la maltraitance psychologique.
    Pourriez-vous nous fournir quelques commentaires sur les lacunes du projet de loi C‑295 à cet égard et sur les mesures qui pourraient être prises?

[Traduction]

    Je vous remercie pour votre question.
    Comme nous le faisons valoir dans le mémoire que nous vous avons présenté, nous croyons qu'il faut absolument s'attaquer à la violence contre les aînés au Canada. Nous devons établir une définition officielle, qui doit être prise en compte de façon uniforme dans l'ensemble du pays.
    De plus, il faut réaliser que la maltraitance des aînés va bien au‑delà de la violence physique. Nous devons tenir compte de la maltraitance sociale, psychologique et financière. Ce sont des enjeux complexes, qui n'émanent pas d'un milieu en particulier, mais que vivent tous les aînés dans l'ensemble du pays.
    Nous sommes en faveur d'une loi pour lutter contre la maltraitance des aînés qui serait rédigée à la suite de consultations exhaustives avec les intervenants clés du pays, notamment les services de police et bon nombre d'autres organisations, afin d'aborder ce problème de plus en plus important.

  (1710)  

[Français]

     Dans le rapport intitulé « La maltraitance à l'égard des aînés: cerner l'enjeu et lutter contre toute forme d'abus », publié en 2021, la recommandation 4 du Comité demande « que le gouvernement fédéral définisse et mette en œuvre des mécanismes de protection des lanceurs d'alerte dans les milieux de soins de longue durée ».
    Croyez-vous que le projet de loi C‑295 va aider les lanceurs d'alerte tels que les employés à porter plainte en cas de maltraitance envers une personne aînée?

[Traduction]

    Non, je ne crois pas que le projet de loi améliorera les structures de reddition de comptes qui sont en place à l'échelon provincial.
    On peut aussi penser au Code criminel. Il y a des exemples de précédents juridiques. Je ne suis pas avocate, mais je peux vous rapporter ce qu'on m'a dit. Je peux vous parler des précédents qui ont été établis lors de la catastrophe de la mine Westray et de la capacité à déterminer quel est le cerveau derrière certaines opérations lorsqu'il est question d'accusations criminelles. Je dirais que ce sont des façons d'assurer la reddition de comptes aujourd'hui.

[Français]

    C'est très bien, merci.
    Tantôt, ma première question portait surtout sur les types de maltraitance. Maintenant, j'aimerais revenir sur la définition d'un établissement de soins de longue durée. Le projet de loi C‑295 propose la définition suivante: « Établissement résidentiel, ou partie d'un établissement résidentiel, qui vise principalement à fournir de l'hébergement à long terme, des repas, de l'aide et des soins à au moins trois adultes qui y résident [...] »
    Elle comporte bien quelques mots clés. Selon vous, est-elle complète ou y aurait-il des ajouts à y apporter?

[Traduction]

    Je crois que la définition des établissements de soins de longue durée est d'une très grande portée. Elle viserait presque tous les types d'organisations du continuum des soins de longue durée. Elle ne se centre pas nécessairement sur les organisations qui prennent soin des personnes âgées seulement, mais vise aussi un large éventail d'organisations communautaires qui offrent des soins prolongés.
    La définition est incroyablement vaste et le Comité doit déterminer si c'est son intention.
    Merci.
    Nous allons maintenant entendre M. Garrison, qui dispose de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie aussi les témoins d'être avec nous aujourd'hui. Je sais que bon nombre d'entre eux n'ont reçu qu'un court préavis en vue de leur comparution, alors je leur suis reconnaissant d'être ici.
    J'aimerais dire, pour commencer et avec tout le respect que je dois à mes collègues et aux témoins, que le projet de loi ne semble pas émaner de la grande question des soins ou de la maltraitance des aînés, mais plutôt de la crise de la COVID, alors que le Canada a dû faire appel aux forces armées pour aider les établissements de soins de longue durée. Mon but n'est pas de dénigrer les autres préoccupations, mais je crois qu'il était assez clair, d'après nos discussions avec Mme Fry lors de la dernière réunion, que c'était l'objectif de ce projet de loi.
    Ce qui est clair, c'est que les travailleurs des établissements de soins de longue durée ont travaillé avec acharnement pendant la crise pour offrir les soins nécessaires aux résidants, mais que malgré leurs efforts, nous avons affiché l'un des plus hauts taux de décès attribuables à la COVID dans les établissements de soins de longue durée des pays riches.
    Cela m'amène à la question suivante: qu'est-ce qui s'est passé? On a formulé cette question de diverses façons. On demande souvent: « Pourquoi les travailleurs n'ont-ils pas fait leur travail? » Je crois qu'il faudrait plutôt se demander: « Pourquoi les travailleurs n'ont-ils pas été en mesure d'offrir ces soins? »
    J'aimerais entendre la réponse de Mme Silas à cette question. Pourquoi avons-nous affiché un si piètre bilan pendant la COVID? Pouvez-vous nous parler de la façon de poser la question?

  (1715)  

    Une seule réponse: la dotation. Vous savez, si nous voulons mettre les aînés au cœur de l'équation et prévenir la négligence dans les soins aux aînés, ce ne sera pas par l'entremise du Code criminel. Soyons honnêtes.
    Le respect des soins aux aînés doit être prioritaire, ce qui veut dire qu'il faut respecter les travailleurs, qui adorent leurs aînés. Il s'agit probablement de l'un des domaines des soins infirmiers — et je donne au terme un sens large, parce que cela inclut les préposés aux bénéficiaires, les bénévoles et les familles — où les travailleurs ont un amour viscéral pour ce qu'ils font. Ils n'ont pas de ressources; ils n'obtiennent pas de respect. La modification du Code criminel ne changera rien. Il faut vraiment donner la priorité aux soins aux aînés.
    Dans le contexte précis de la COVID‑19, quelle a été, selon vous, qui représentez des infirmières, la cause des taux de mortalité dans les établissements de soins de longue durée, qui ont été ici plus élevés que dans d'autres pays?
    Elles ont sans arrêt travaillé en coulisses. Personne ne s'est occupé du problème.
    Comme nous l'avons dit, nous avons publié en 2015 un rapport portant sur la sous-dotation, le manque de formation, la pénurie de personnel, etc., et personne n'en a tenu compte pour des raisons financières. Personne n'a parlé des soins offerts aux aînés. Au fil des ans, on a vu les marges de profit grimper; ce fut le cas pendant la COVID‑19. C'était tout simplement insultant pour tous les travailleurs de la santé que certains établissements à but lucratif enregistrent des profits et les redistribuent à leurs actionnaires, alors que... Il faut nous souvenir que la plupart des travailleurs de la santé qui sont décédés en raison de la COVID‑19 étaient dans le secteur des soins de longue durée. Il s'agit donc d'une question de respect, de dotation adéquate et de la nécessité d'offrir à nos aînés les soins qu'ils méritent dans les dernières années de leur vie.
    Lorsque vous avez comparé les statistiques des établissements de soins de longue durée publics et sans but lucratif avec celles des résidences à but lucratif, vous avez parlé du taux de mortalité plus élevé et du plus faible nombre d'employés par patient. Pourriez-vous expliquer en quoi cela se rapporte aux problèmes dont nous discutons?
    Nous avons entendu dire, tout au long de la pandémie, que les résidences à but lucratif étaient encore plus restrictives relativement à l'équipement de protection individuelle, ou EPI, par exemple. C'était l'époque où l'on voyait des histoires d'EPI mis sous clé, parce qu'on disait que les respirateurs N95 étaient beaucoup plus dispendieux que les masques en papier. Ce sont les aspects où nous avons vu... Des syndicats comme le Service Employees' International Union ont mené des études approfondies sur la question. J'encourage les membres du Comité à leur demander un exposé comparant les résidences à but lucratif et celles à but non lucratif.
    Les établissements à but non lucratif et ceux qui sont dirigés par la municipalité ou par des organismes religieux sont enracinés dans leur communauté et font attention aux soins prodigués, comparativement aux établissements à but lucratif — une appellation qui en dit long sur ce qu'ils sont. Comme je l'ai affirmé dans mon allocution, ces études y ont constaté un niveau de mortalité plus élevé.
    Vous avez raison, monsieur Garrison: notre bilan, le pire parmi tous les pays développés, est attribuable à notre système de soins de longue durée. C'est la raison pour laquelle tout le monde se penche sur la question en ce moment.
    Dans votre exposé, vous avez parlé du fait que bien des gens qui correspondent à la définition de « gérant » de ce projet de loi n'ont aucun pouvoir décisionnel ni aucun contrôle sur les décisions cruciales relatives à l'embauche ou à la formation. Pourriez-vous nous expliquer ce que cela veut dire sur le plan pratique?
    Oui. Je suis certaine que Mme Hall pourrait vous expliquer les lois de toutes les provinces, mais la plupart des lois provinciales exigent l'affectation d'une infirmière autorisée 24 heures par jour. Toutefois, il arrive que cette infirmière autorisée soit la directrice des soins infirmiers et qu'elle soit chez elle au milieu de la nuit. Dans ce cas, c'est l'infirmière autorisée affectée à l'unité, ou une infirmière auxiliaire autorisée, ou parfois simplement les préposés aux bénéficiaires, avec l'appui d'une personne sur appel.
    En ce qui concerne le Code criminel — et Mme Hall a mentionné la loi Westray —, l'objectif est de savoir qui prend la décision ultime, et nous pouvons garantir aux membres du Comité que ce n’est pas l'infirmière ou le préposé aux bénéficiaires de l'hôpital ou de l'établissement de soins de longue durée. Souvent, ce n'est même pas la directrice des soins infirmiers de l'établissement ou son directeur. Selon la situation, ce sont les actionnaires ou le conseil d'administration. Le projet de loi dans sa version actuelle ne fonctionne pas, parce qu'il met en cause les gérants qui dirigent les activités au quotidien, même si, en réalité, ce ne sont pas vraiment eux qui les dirigent. Il faut donc trouver qui les dirige réellement.

  (1720)  

    Merci.
    Merci.
    Merci, monsieur Garrison.
    Nous passons au prochain tour, pour cinq minutes. Commençons avec M. Van Popta.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici et de nous livrer des témoignages d'experts très importants sur cet enjeu primordial.
    Avant de poursuivre, j'aimerais m'adresser à la présidence. J'étais impatient de passer au second groupe de témoins réunissant des représentants ministériels, parce que j'avais des questions techniques importantes au sujet du nombre de condamnations, des failles de la législation actuelle et des améliorations que permettrait le projet de loi. D'après ce que je comprends, ils ne comparaîtront pas.
    J'en suis particulièrement préoccupé, parce que nous obtenons aujourd'hui des témoignages concurrents. Ces témoignages sont très précieux — je vous en remercie —, mais un témoin affirme que nous devons élargir la définition de « gérant », alors qu'un autre nous dit qu'il faut la restreindre. Nous avons donc besoin de l'aide d'experts, et je suis préoccupé par le fait que nous ne pourrons l'obtenir aujourd'hui.
    Nous avons toutefois des témoins importants devant nous, alors je leur poserai quelques questions.
    Mme Silas, dans son témoignage, a défendu l'idée d'une définition plus restreinte de « gérant ». Elle affirme qu'elle n'y inclurait pas les travailleurs de bas niveau, comme les préposés aux horaires et aux achats, et peut-être même pas la directrice des soins infirmiers, et que la définition devrait cibler uniquement la personne qui prend les décisions d'ordre financier. Elle a aussi affirmé dans son témoignage que le bilan des résidences à but lucratif en matière de négligence des aînés est pire que celui des résidences à but non lucratif.
    Ma question est pour Jodi Hall et Terry Lake. Est‑ce que cela correspond à ce que vous vivez dans votre domaine et dans vos associations?
    Je réponds d'abord, si vous voulez bien, madame Hall.
    En Colombie-Britannique, où un tiers des établissements sont détenus et administrés par l'État, un tiers sont à but lucratif et un tiers, à but non lucratif, il n'y a pas eu de différence remarquable dans l'incidence de la mortalité au sein des résidences de soins selon le type de propriété.
    J'aimerais soulever une objection. À mon avis, il s'agit d'une distraction. Nous passons beaucoup de temps à discuter de cet enjeu plutôt que de la façon d'améliorer les soins aux aînés. Au Québec, par exemple, où se sont rendues les Forces armées canadiennes et où elles ont été témoins de situations terribles, on constate que 80 % des établissements de soins de longue durée sont détenus, administrés et financés par la province.
    On peut aussi parler de la situation de l'Ontario, où l'on trouve une grande proportion de fournisseurs à but lucratif, dont les résidences n'ont pas reçu de financement gouvernemental destiné aux nouveaux établissements depuis longtemps.
    Des études américaines démontrent que le modèle de propriété n'est pas un facteur déterminant. C'est plutôt par l'âge et la taille de la résidence que l'on explique la différence de mortalité.
    Je mettrais le Comité en garde contre les commentaires affirmant que le Canada fait piètre figure comparativement à d'autres pays semblables. L'Institut de recherche en politiques publiques a publié un article au cours des derniers mois démontrant que le taux de mortalité dans les établissements de soins de longue durée au Canada était de 26 pour 1 000, un taux en réalité meilleur que celui de deux tiers des pays semblables à l'échelle mondiale.
    Quatre-vingts pour cent des décès sont survenus dans ces établissements, parce que le taux de mortalité dans la population générale était beaucoup plus faible qu'ailleurs, alors il faut prendre garde aux données que l'on utilise pour tirer des conclusions. Comme je l'ai dit, il s'agit, à mon avis, d'une distraction, car, comme l'a souligné Mme Silas, pour améliorer les soins dans les établissements de soins de longue durée, il est essentiel d'investir. Il faut simplement investir pour nous assurer d'avoir une dotation adéquate.
    Bien. Merci.
    Je souhaiterais que Jodi Hall réponde aussi à la question.
    Oui, et je suis tout à fait d'accord avec M. Lake. Tous les types de résidences de soins de longue durée au Canada ont subi les répercussions de la COVID‑19. Il n'y a aucune exception.
    Nous savons que la situation de chacune a été modelée par l'âge des infrastructures et par la capacité de l'établissement à mettre en œuvre des protocoles de prévention et de contrôle des infections, ainsi que par la superficie des aires communes et la quantité de personnel disponible, particulièrement au début.
    L'accès du personnel à de l'équipement de protection individuelle et à de la formation était limité, mais cela était largement attribuable à une pénurie d'EPI à l'échelle mondiale. Si l'on se remémore cette période, qui peut sembler très lointaine, on se souvient qu'il était incroyablement difficile d'avoir accès à l'EPI requis et d'avoir les fonds nécessaires pour en faire l'achat.
    L'autre élément...

  (1725)  

    Je vous arrête parce qu'il ne me reste presque plus de temps et que j'aimerais donner à Mme Silas l'occasion de répondre.
    Est‑ce acceptable, monsieur le président? Puis‑je avoir 30 secondes?
    Je vous en donne 15.
    Merci.
    Mme Hall a probablement tout à fait raison au sujet de l'accès à l'équipement de protection individuelle, car, je le répète, nous n'avons jamais accordé la priorité aux soins aux aînés dans ce pays. Comparativement aux unités de soins intensifs, les soins de longue durée étaient au dernier rang pour avoir accès à de l'EPI. Je suis d'accord.
    Je n'ai pas les références. Le préavis a été court. Dans notre mémoire, nous enverrons les références de la comparaison entre les établissements de soins de longue durée à but lucratif et à but non lucratif, pour les décès et les blessures des travailleurs de la santé. Je m'y engage.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Zuberi, pour cinq minutes.
    J'aimerais remercier les témoins pour leur présence aujourd'hui et pour vos années de travail à défendre la bonne santé de tous les membres de la société, y compris les aînés. À mes yeux, votre témoignage est très précieux, car il souligne que nous devons examiner certaines des définitions, potentiellement trouver des façons d'élargir la portée et nous assurer de ne pas inclure autrement des personnes qui ne sont pas des gérants.

[Français]

    J'aimerais aussi dire que, pendant la pandémie, la réalité des établissements de soins de longue durée au Québec et en Ontario était différente de celle du reste du Canada.
    Au Québec, on a mené une enquête sur la façon dont les personnes du troisième âge étaient traitées dans ces établissements, et on a découvert que 4 000 personnes y ont perdu la vie.

[Traduction]

    Cette constatation est importante. M. Garrison l'a mentionnée comme l'une des motivations derrière le dépôt de ce projet de loi. Je crois qu'il s'agit du contexte dans lequel nous nous trouvons, mais vous avez signalé un point important, celui de l'élargissement de la portée du projet de loi au‑delà des résidences, pour inclure d'autres lieux où l'on prend soin d'aînés.
    Je m'adresse à tous les témoins. Je présume que vous voulez que nous élargissions la portée du projet de loi pour inclure d'autres établissements et domaines où l'on prend soin d'aînés. Est‑ce exact?
    Veuillez répondre brièvement.
    Si le projet de loi était adopté, oui, ce serait exact.
    Je présume que vous avez l'impression qu'il s'agit d'une lacune ou d'un aspect sur lequel il faut légiférer, étant donné ce qui s'est passé pendant la pandémie de COVID et ce qui a été constaté relativement aux soins aux aînés.
    Diriez-vous que nous devons combler cette lacune et veiller à ce que les aînés reçoivent des soins convenables par l'entremise d'une mesure législative qui inclut non seulement les personnes dont il a été question — les gérants dont nous parlons ici, dans les résidences de soins de longue durée —, mais aussi celles dans d'autres lieux? Seriez-vous favorables à cela?
    Je ne suis pas certain d'être en accord.
    Nous réagissons émotivement à une situation terrible, ce qui est compréhensible, mais il nous faut examiner pourquoi cette situation s'est produite. Tous les témoins présents aujourd'hui ont énoncé ces raisons: la sous-dotation, le manque d'EPI — fourni par le gouvernement, soit dit en passant, et à l'époque il n'était tout simplement pas disponible —, la terreur qu'inspirait le virus, le fait que les gens étaient si nombreux à tomber malades et le fait que le personnel était déjà réduit au strict minimum, étant donné qu'il était très difficile d'attirer des travailleurs dans le secteur, alors tout ce qu'on fera...
    À ce propos, toutefois, il faut dire que le projet de loi ne cible pas les employés de la base. Il cible les gestionnaires et les propriétaires qui portent la responsabilité.
    Croyez-vous que cette responsabilité devrait retomber sur leurs épaules et qu'ils doivent être tenus responsables quand il y a des morts? Ne croyez-vous pas qu'il faut combler cette lacune?

  (1730)  

    D'abord, je crois que la définition est si large qu'elle inclut involontairement certaines personnes. Le fait de restreindre la définition au contexte des soins de longue durée...
    Présumons que nous restreignions la définition, comme vous le suggérez, dans un sens, de manière à ne pas inclure ceux qui ne sont pas des gérants, et que nous l'élargissions dans un autre sens, de manière à inclure les gérants et les propriétaires dans d'autres secteurs qui prodiguent des soins aux personnes âgées.
    Si nous apportions ces modifications, ne croyez-vous pas que cette loi serait salutaire?
    Ce serait une grande amélioration par rapport aux dispositions actuelles, oui.
    Voilà qui est très utile, à mon avis, pour nous aider à réfléchir à des amendements, parce que notre comité peut modifier ce qui est proposé sur papier. Vos commentaires sont très utiles.
    Vous avez environ 30 secondes. Quelqu'un aimerait‑il parler des aînés qui ne sont pas dans des résidences de soins ou dans des hôpitaux, mais qui sont isolés chez elles ou dans leur communauté?
    J'interviens rapidement pour dire simplement que nous soutenons l'élaboration de mesures législatives contre la maltraitance des aînés au Canada qui sont multidimensionnelles, rattachées à la notion de personne âgée et non à un lieu ou contexte particulier.
    Je veux aborder rapidement le concept de propriétaire, parce que le projet de loi tel que proposé n'inclut pas de définition de propriétaire d'un établissement de soins de longue durée, et il existe une multitude de définitions possibles selon ce qui se passe dans chaque région du pays. Les propriétaires de ces résidences sont des gouvernements provinciaux, des régies régionales de la santé, des gouvernements municipaux, des collectivités autochtones, des conseils communautaires sans but lucratif, des organismes confessionnels et un éventail de sociétés privées, alors il n'est pas simple de définir ce qu'est un propriétaire, et cette définition ne se trouve pas dans le projet de loi tel que proposé.
    Merci. Voilà qui est très utile.
    Merci, monsieur Zuberi.
    Nous passons maintenant à nos deux derniers tours de deux minutes et demie, en commençant par Mme Larouche.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui pour cette étude sur un sujet extrêmement important, qui me touche particulièrement, comme je l'ai mentionné, puisque j'ai travaillé sur l'enjeu de la maltraitance avant d'être élue.
    J'ai entendu des choses intéressantes.
    Madame Silas, vous avez parlé des normes. Cela, il y en a déjà. Ce constat a été fait dans le rapport des forces armées. Un des témoins a également dit que, au Québec, 80 % des établissements de soins de longue durée sont publics et relèvent du système de santé. Des normes ont été mises en place par le gouvernement du Québec, qui a la compétence pour agir sur la question des établissements de soins de longue durée. Ce qu'il manque, ce sont les moyens financiers.
    Ce qui relève du fédéral, par contre, c'est toute la question de l'approvisionnement et de l'équipement de protection individuelle. Or, on a reconnu qu'il y avait eu une déficience à cet égard pendant la pandémie, alors que ces éléments auraient pu contribuer à éviter en bonne partie la transmission du virus.
    Madame Silas, vous allez pouvoir faire un commentaire à ce sujet, si vous le voulez, mais j'ai aussi d'autres questions à vous poser.
    Pensez-vous que les personnes aînées qui vivent dans les établissements de soins de longue durée sont forcément incapables de pourvoir aux choses nécessaires à leur propre existence?
    Pensez-vous que certains aînés qui sont autonomes, mais en situation de précarité et sans réseau familial, peuvent choisir d'aller dans un établissement de soins de longue durée?
    Quelle est la réalité démographique des personnes qui vivent dans ce type d'établissements?
    Votre question est lourde, madame la députée.
    Avant tout, je dois dire que je ne représente pas les infirmières et les infirmiers du Québec. Le système du Québec est complètement différent de celui du reste du Canada, c'est sûr et certain. Je ne suis pas apte à répondre à ces questions.
    Ce qu'on sait, comme je l'ai mentionné, c'est que les soins de longue durée, les soins offerts à nos personnes âgées, ne sont une priorité dans aucune province ni aucun territoire. Mme Hall a bien expliqué que la responsabilité relève de plusieurs acteurs, qu'il s'agisse du gouvernement, de la municipalité, des communautés autochtones ou du secteur privé.
    Il est important que le gouvernement fédéral se penche sur des normes. D'ailleurs, il vient juste d'annoncer des normes, qui sont très bien, mais qui ne sont pas obligatoires. La province de Québec et ma province, le Nouveau‑Brunswick, ne font que regarder ces beaux documents, puisque les normes ne sont pas obligatoires et ne sont pas rattachées au financement. C'est pourtant ce qu'on doit faire: on doit rattacher les normes au financement. Par la suite, on pourra songer, si nécessaire, à apporter des changements au Code criminel.

[Traduction]

    Merci, madame Silas.
    J'espère avoir respecté votre temps, madame Larouche. Mon chronomètre était un peu déréglé, mais j'estime que je vous ai accordé environ deux minutes et demie.
    Monsieur Garrison, vous avez deux minutes et demie.

  (1735)  

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je souhaite revenir à Mme Silas à propos de la différence réfutée par M. Lake entre les établissements publics et privés, car, à ma connaissance, les études indiquent toutes un taux de mortalité due à la COVID plus élevé chez les travailleurs des établissements de soins de longue durée et chez leurs bénéficiaires.
    Je sais que vous n'avez pas toutes les statistiques à portée de main, mais pourriez-vous simplement nous parler un peu de ce que vous avez entendu sur ces études en particulier quant aux différences entre les établissements de soins de longue durée privé, à but lucratif et à but non lucratif?
    Merci pour votre question.
    Nous travaillons avec un taux de mortalité pour les établissements à but lucratif qui est deux fois plus élevé que celui observé dans les autres établissements de soins de longue durée. J'ai mentionné une différence de 17 % dans mon allocution. Ce sont les chiffres avec lesquels nous travaillons.
    Les gens sur le terrain nous disent que c'est le jour et la nuit entre les établissements de soins de longue durée privés, à but lucratif, et les établissements communautaires ou confessionnels.
    Dans nos échanges avec les gouvernements provinciaux, nous estimons qu'il peut y avoir un établissement de soins de longue durée privé, mais que les établissements à but lucratif ne devraient jamais assurer les soins des enfants ou des aînés, comme c'est le cas dans notre système de soins de santé public. C'est ce que nous recommandons. C'est toujours là que le bât blesse. Quand nous entamons des négociations avec un établissement à but lucratif, il parle un langage différent des établissements communautaires.
    J'ai une question, quoiqu'il reste très peu de temps.
    Êtes-vous au courant de tout autre pays riche qui a dû envoyer les forces armées offrir de l'aide dans des établissements de soins de longue durée privés?
    Non. Les travailleurs de la santé qui ont dû demander de l'aide urgente aux propriétaires et à leurs gestionnaires ont trouvé cela très difficile. Quand le rapport sur la présence des forces armées est sorti, et je suis persuadée que c'était la même chose pour Mme Hall et M. Lake, nous étions tous bouleversés. C'était une lecture déchirante. Nous nous sommes tous engagés, à titre de fournisseurs de soins, de propriétaires et de décideurs, à mieux faire.
    Aujourd'hui, toutefois, nous nous demandons si, pour les infirmières, la meilleure façon de faire est de passer par le Code criminel. Cette décision vous revient en tant que comité, mais nous devons absolument obtenir des éclaircissements sur la décision relative à la personne responsable et à la personne couverte dans le cadre de ce projet de loi d'initiative parlementaire. Actuellement, n'importe quelle infirmière qui travaille dans un établissement de soins de longue durée peut être prise pour cible.
    Merci, monsieur Garrison.
    Je tiens à remercier tous nos témoins et vous faire part d'une petite histoire. J'ai grandi dans un foyer pour personnes âgées. Ma mère travaillait là. J'étais confié à une gardienne pendant environ une heure entre les quarts de travail. Je me souviens très nettement de tout ce travail acharné pendant ma petite enfance et mes années de primaire, ainsi que des liens que beaucoup de membres du personnel tissaient avec leurs patients dans ces établissements de soins de longue durée. Merci à tous pour l'excellent travail que vous faites dans vos secteurs respectifs.
    Vous pouvez maintenant partir. Vous êtes bien sûr les bienvenus si vous voulez assister aux dernières minutes de la réunion, qui demeure publique.
    Nous allons maintenant traiter des affaires du Comité pour le reste de la réunion.
    Nous avons le rapport du sous-comité. Est‑ce que tout le monde l'a lu?
    Vous convient‑il? Doit‑on le répéter ou c'est bon?
    Des députés: Oui.
    Le président: D'accord. Le rapport est approuvé.
    Il y a les déplacements en Europe. Je crois que le budget de voyage a été remis à tout le monde. Il est légèrement plus élevé que la dernière fois. Il est d'environ 15 000 $. C'est en fait M. Garrisson qui a proposé que l'on s'assure qu'il y a des ententes commerciales. Espérons que cela vous conviendra. Nous allons essayer une dernière fois pour voir.
    Est‑ce que tout le monde est d'accord?
    Des députés: Oui.
    Le président: Je crois que c'est bon.
    M. Garrisson souhaite prendre la parole.
    Je crois que M. Van Popta a soulevé un point important aujourd'hui à propos de l'annulation du deuxième groupe de témoins. Aucun fonctionnaire ne comparaît. Il me semble évident que les membres du Comité souhaitent que des fonctionnaires comparaissent. Quand un comité demande des conseils au ministère de la Justice, je n'ai jamais vu cette demande être traitée comme facultative pour les fonctionnaires.
    Je souhaite obtenir l'assurance que, même s'ils ne sont pas présents aujourd'hui, ils seront là pour nous donner des conseils sur ce projet de loi.

  (1740)  

    Pour votre information, j'en ai fait la demande. On m'a répondu que, puisqu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, ils estimaient ne pas vraiment pouvoir être partisans ou peu importe. Je vais refaire une demande.
    Je vais demander à M. Anandasangaree.
    Évidemment, nous avons des fonctionnaires incroyables, et ils décident pour eux-mêmes, mais si c'est la volonté du Comité, nous serions nous aussi en faveur de leur présence. Nous pourrions peut-être présenter une demande commune de tous les partis.
    Je donne la parole à M. Caputo, qui a la main levée.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis du même avis. C'est un sujet sur lequel nous avons besoin d'une certaine expertise.
    Je sais que mon collègue, M. Zuberi, a posé une question sur le fait que ce soit une loi et que nous devrions interpeller les propriétaires. Nous ne devons pas oublier qu'il s'agit d'une modification au Code criminel. Toutes les lois pénales exigent qu'on prouve l'intention ou quelque chose qui puisse se substituer à l'intention. Pardonnez-moi, ce n'est pas le meilleur mot. Il s'agit de négligence ou de témérité.
    Les gens ne se présentent habituellement pas au Comité avec une connaissance pointue de ce type de sujet. Je crois que nous avons besoin de pas mal d'expertise là‑dessus. En somme, ce que j'essaie de dire, c'est que nous avons besoin de l'encadrement des fonctionnaires du ministère de la Justice là‑dessus, car il n'est pas évident de s'y retrouver.
    Merci, monsieur Caputo.
    Allez‑y, monsieur Garrison.
    Je dirais également que, si on a laissé entendre que le ministère n'est jamais représenté quand il s'agit de projets de loi d'initiative parlementaire, mon expérience au sein de ce comité et d'autres m'empêche d'y croire. Je ne crois pas que ce soit vrai.
    Les projets de loi d'initiative parlementaire ne sont pas partisans, même s'il arrive qu'ils traitent de sujets de nature politique. Ils suivent le processus législatif comme tout autre projet de loi et deviennent partie intégrante de nos lois. Si nous établissons ainsi une sorte de précédent où nous n'obtenons pas de conseils techniques du ministère sur les projets de loi d'initiative parlementaire, cela me paraît très dangereux.
    Je vais le leur redemander. Avant de les sommer à comparaître ou de prendre d'autres mesures plus strictes, je vais demander leur retour avec vigueur. J'espère qu'ils viendront. S'il y a un problème, je vous le ferai tous savoir.
    Merci. La séance est levée.
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