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CHER Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 11 février 1999

• 1112

[Traduction]

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien.

[Français]

L'étude du projet de loi C-48,

[Traduction]

Loi concernant les aires marines de conservation

[Français]

est à l'ordre du jour.

[Traduction]

Je m'excuse du petit nombre de députés présents; ils sont en route. Beaucoup de comités siègent. J'étais moi-même à un autre comité et il faut du temps pour se rendre ici. Mais au lieu de retarder la séance, je propose que nous commencions.

Nous accueillons aujourd'hui, du Conseil canadien des pêches, M. Patrick McGuinness. Nous avons aussi, de l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture, M. Marc Kielley, qui est le directeur exécutif à Terre-Neuve; M. Pierre Stang, directeur exécutif de l'Alliance; et le Dr Myron Roth, directeur exécutif adjoint du Salmon Health Consortium.

J'invite M. McGuinness à faire son exposé au comité.

M. Patrick McGuinness (vice-président, Conseil canadien des pêches): Merci beaucoup, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. C'est un plaisir pour moi de comparaître devant le comité, au nom du Conseil canadien des pêches, pour discuter du projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.

Le Conseil canadien des pêches est une association professionnelle qui représente les associations provinciales des pêches dans le Canada atlantique et en Ontario. De plus, le Conseil canadien des pêches représente trois importants secteurs de pêche: le poisson de fond en haute mer, la crevette nordique et le pétoncle.

Je ferai d'abord quelques observations générales, après quoi j'aborderai certains éléments précis du projet de loi.

Je dirai tout d'abord que ce projet de loi représente un dilemme pour nous dans le secteur de la pêche. Nous sommes contre le projet de loi en principe. Par contre, nous y voyons également un bon exemple de la mise en place de contrôles législatifs faisant contrepoids aux pouvoirs des ministres et des fonctionnaires.

Si l'on juge nécessaire de légiférer pour établir des aires marines de conservation, nous sommes d'avis qu'il faudrait intégrer les mesures législatives voulues à la Loi sur les océans récemment adoptée et qui relève du ministre des Pêches et des Océans et est administrée par le ministère des Pêches et des Océans. C'est tout simplement faire preuve d'inefficacité et de lourdeur dans l'administration des affaires publiques que d'introduire cette initiative des AMC dans une loi distincte relevant d'un ministre séparé et administrée par un ministère séparé.

Le secteur de la pêche, par exemple, travaille de concert avec le ministre des Pêches et des Océans et avec les fonctionnaires des Pêches à l'élaboration d'une stratégie canadienne sur les océans et d'une approche pour la mise en place des aires marines de conservation. Ces tâches résultent de l'adoption en 1996 de la Loi sur les océans, laquelle stipule à la partie II, article 29, que le ministre des Pêches et des Océans:

    [...] dirige et favorise l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale de gestion des écosystèmes estuariens, côtiers et marins [...]

• 1115

En plaçant cette initiative sur les AMC sous l'égide du ministre du Patrimoine canadien, et en confiant l'administration aux fonctionnaires de Patrimoine Canada, on sape le rôle de chef de file en matière d'océans qui est confié par la Loi sur les océans au ministre des Pêches et des Océans.

Si le défi qui se pose à l'industrie canadienne en cette ère de mondialisation est d'atteindre la plus grande efficacité en rationalisant ses activités, nous devrions pouvoir exiger des structures gouvernementales qui sont également rationnelles et bien ciblées. Quels que soient les mérites des AMC, de cette initiative, la manière dont on s'y prend entraînera de la confusion, du double emploi et des conflits lors de la mise en oeuvre.

Les aires marines de conservation ne sont pas des parcs. S'il est justifié de créer une aire marine de conservation dans un secteur donné, cette aire devrait être approuvée seulement dans le cadre d'un plan de gestion intégrée des océans. Le travail d'élaboration de ces plans est maintenant en cours, sous les auspices de la Loi sur les océans et la direction du ministère des Pêches et des Océans, le tout dans le cadre d'une approche fondée sur les écosystèmes. L'adoption d'une loi distincte de la Loi sur les océans pour créer les aires marines de conservation, serait aux yeux des Canadiens et de tous ceux qui s'intéressent au domaine des océans dans le monde entier, un exemple flagrant d'inefficacité gouvernementale. Si les AMC doivent être une initiative importante pour le Canada, intégrons cette initiative dans la stratégie canadienne en matière d'océans, ce qui permettrait d'évaluer l'outil que constituent les AMC au regard d'autres outils, par exemple les zones de protection marine.

Enfin, Patrimoine Canada n'a pas les compétences scientifiques voulues pour évaluer si une AMC est écologiquement justifiée ou pas. Ce savoir-faire est présent au ministère des Pêches et des Océans.

Nous avons maintenant quelques observations précises à faire sur le texte du projet de loi.

Mettons de côté pour l'instant nos observations liminaires et nos objections au projet de loi; il n'en reste pas moins que le texte même du projet de loi est louable à bien des égards. Nous appuyons sans réserve les dispositions prévues aux articles 5 et 7 permettant au gouverneur en conseil d'établir une aire marine de conservation—cela ne relève donc pas du ministre—mais seulement après que les comités compétents de la Chambre des communes et du Sénat aient eu la possibilité d'examiner la proposition relative à l'AMC.

Nous faisons toutefois les recommandations suivantes. Au paragraphe 5.(1), nous proposons d'ajouter ceci après la dernière phrase:

    Il ne peut toutefois modifier l'annexe 1 conformément au présent article en ce qui a trait à la constitution ou l'agrandissement d'une aire marine de conservation susceptible d'influer sur une pêche commerciale existante que s'il est convaincu que le ministre des Pêches et des Océans est d'accord avec la modification proposée.

Nous avons une autre recommandation portant sur le paragraphe 7.(1). Nous proposons d'ajouter à cette disposition la phrase suivante:

    Dans le cas d'une modification proposée qui est susceptible d'influer sur une pêche commerciale existante, la modification proposée est renvoyée au comité permanent de chaque chambre du Parlement qui est habituellement chargé des questions relatives aux pêches.

Nous appuyons sans réserve le paragraphe 9.(4) qui stipule que les plans de gestion des AMC relativement à la pêche, l'aquaculture, la gestion des pêches et la navigation et sécurité maritimes sont assujettis à l'accord du ministre des Pêches et des Océans.

Nous appuyons également sans réserve le paragraphe 11.(1) qui stipule que, pour chaque AMC, on doit créer un comité consultatif chargé de conseiller sur l'établissement, la révision et la mise en oeuvre du plan de gestion de l'AMC. Nous appuyons aussi le paragraphe 16.(2) qui exige que les règlements qui ont trait à la gestion et à la protection des pêches ou qui limitent ou interdisent la pêche, l'aquaculture, la navigation maritime ou toutes autres activités liées à la sécurité maritime soient pris sur les recommandations conjointes du ministre du Patrimoine canadien et du ministre des Pêches et des Océans.

En terminant, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, le Conseil canadien des pêches s'oppose fermement au projet de loi dans sa forme actuelle. Le projet de loi doit être retiré. Il faut amorcer des discussions avec les fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans afin de proposer des modifications à la Loi sur les océans visant spécifiquement à prévoir la création d'aires marines de conservation, là où c'est justifié, dans le cadre de la stratégie canadienne des océans.

Si toutefois les conseils que nous formulons ci-dessus sont rejetés et que le projet de loi est adopté, nous appuyons certains thèmes de la mesure proposée, nommément que le ministre des Pêches et des Océans soit tenu de donner son aval aux initiatives qui ont des répercussions sur les pêches; le besoin d'un comité consultatif de gestion formé de représentants des secteurs public et privé et chargé de mettre en oeuvre une aire marine de conservation dont on a proposé la création; et le fait de charger les comités de la Chambre de procéder à une étude rapide et bien structurée de toute proposition relative aux AMC.

• 1120

J'ai une dernière observation à faire. Au sujet du renvoi aux comités parlementaires proposé dans le projet de loi, nous trouvons que la mesure établit un juste équilibre. Nous serions contre tout rôle plus poussé des comités, au-delà de ce qui est envisagé dans le projet de loi. Nous faisons une mise en garde contre toute initiative qui pourrait être imposée par les ministres et les fonctionnaires, mais nous ne voulons pas non plus que des dossiers d'affaires publiques qui ont fait l'objet de travaux considérables en termes de consultations, de discussions et d'aménagements soient tenus en otage par des comités qui n'ont pas bénéficié du dialogue d'intérêts opposés, ce qui pourrait inciter les membres des comités à porter des jugements non éclairés.

Je vous remercie encore, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, d'avoir invité le Conseil canadien des pêches à faire une présentation.

Le président: Merci, monsieur McGuinness. Votre exposé était à la fois très concis et très clair.

Je donne maintenant la parole à M. Kielly.

M. Marc Kielly (directeur exécutif pour Terre-Neuve, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture): Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, de permettre aujourd'hui à l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture de comparaître devant vous au sujet du projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.

Le président: Monsieur Kielley, si je comprends bien, votre mémoire a été envoyé en anglais seulement.

M. Marc Kielley: Oui.

Le président: Il n'a pas été traduit.

[Français]

On vient de recevoir le texte et il n'est pas traduit.

Une voix: Il est en anglais.

Le président: Oui, vous l'avez en anglais, monsieur.

[Traduction]

Allez-y, monsieur Kielley.

M. Marc Kielley: L'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture est une association nationale qui représente les intérêts des associations régionales et sectorielles de l'aquaculture et leurs membres qui font l'élevage des poissons et des fruits de mer. Je vais maintenant donner brièvement une vue d'ensemble de notre position sur cette question.

Pour évaluer les mérites de la mesure proposée, il ne faut pas s'en tenir exclusivement au projet de loi C-48, mais plutôt étudier la question en tenant compte de toutes les autres lois et politiques pertinentes. Pour établir notre opinion, nous avons examiné les principes directeurs de Parcs Canada relativement aux aires marines de conservation, puisque c'est la politique sur laquelle se fonde ce projet de loi. Nous avons aussi examiné la Loi sur les parcs nationaux et la Loi sur les océans.

Ce projet de loi intéresse particulièrement le secteur de l'aquaculture et en particulier à Terre-Neuve, où l'on propose de créer une aire marine de conservation dans une région où il y a beaucoup d'activités de pêche et d'aquaculture. Le projet de loi a été évalué sur le plan de ses répercussions sur les utilisations traditionnelles et existantes des ressources marines et au regard des objectifs de conservation énoncés dans la mesure proposée. Dans l'ensemble, bien que nous reconnaissions le besoin de mesures de conservation, nous sommes contre le projet de loi pour un certain nombre de raisons fondamentales.

La problématique: L'entrée en vigueur d'une loi visant à créer des aires marines de conservation nationales résultera en un dédoublement inutile et coûteux de la législation existante, spécifiquement la Loi sur les océans de 1996 et la Loi sur les parcs nationaux modifiée en 1988. Le projet de loi C-48 fera aussi double emploi avec certains règlements déjà en vigueur aux termes d'autres lois, par exemple la Loi sur les pêches. Il alourdira la bureaucratie et pourrait déboucher sur une pléthore de conflits entre diverses organisations. Le mandat de Parcs Canada entrera ainsi en conflit avec les activités traditionnelles et existantes des utilisateurs commerciaux des ressources marines et le climat d'incertitude qui en résultera sera de nature à décourager l'investissement privé et public dans l'aquaculture.

La position de l'industrie: L'industrie de l'aquaculture est d'avis que le projet de loi C-48 doit être retiré. Nous croyons que les mesures envisagées devraient plutôt être prises aux termes de la Loi sur les océans, qui relève du ministre des Pêches et des Océans.

Au Canada, il y a au moins 36 lois fédérales et 20 lois provinciales et territoriales, de même que de nombreuses conventions internationales et accords, qui traitent de la protection et de l'utilisation du milieu marin et des ressources marines. Des modifications à la Loi sur les parcs nationaux ont été apportées en 1988 pour permettre la création, sur une base temporaire, de zones de protection marine. Avec l'adoption de la Loi sur les océans en 1996 et aux termes du paragraphe 35.(2) de la partie II de cette loi, le ministre des Pêches et des Océans a le mandat de «diriger et coordonner l'élaboration et la mise en oeuvre d'un système national de zones de protection marine au nom du gouvernement du Canada».

• 1125

Le paragraphe 35.(3) de la Loi sur les océans va encore plus loin puisqu'il donne au gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre des Pêches, le mandat de prendre des règlements pour désigner des zones de protection marine et prendre toute mesure compatible avec l'objet de la désignation, notamment: la délimitation de zones de protection marine et l'interdiction de catégories d'activités dans ces zones.

Compte tenu des dispositions de la Loi sur les océans visant à protéger et à assurer la conservation et du mandat donné au ministre des Pêches de collaborer avec d'autres ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, le ministre:

    dirige et favorise l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale de gestion des écosystèmes estuariens, côtiers et marins des eaux faisant partie du Canada ou sur lesquelles le droit international reconnaît à celui-ci des droits souverains.

Cette stratégie nationale doit reposer sur les principes suivants: a) le développement durable, c'est-à-dire le développement qui permet de répondre aux besoins actuels sans compromettre la possibilité pour les générations futures de satisfaire les leurs; b) la gestion intégrée des activités qui s'exercent dans les estuaires et les eaux côtières et marines faisant partie du Canada; c) la prévention, c'est-à-dire pécher par excès de prudence.

Aux termes de la même loi, le ministre des Pêches dirige et favorise l'élaboration et la mise en oeuvre de plans pour la gestion intégrée de toutes les activités ou mesures qui s'exercent ou qui ont un effet dans les estuaires et les eaux côtières et marines faisant partie du Canada ou sur lesquelles le droit international reconnaît à celui-ci des droits souverains.

Donc, en ce qui a trait à la mise en oeuvre des plans de gestion intégrés, le ministre des Pêches et des Océans doit élaborer et mettre en oeuvre des politiques et programmes relativement aux questions dont le ministre doit s'occuper aux termes de la loi, et il doit coordonner avec d'autres ministres et organismes fédéraux la mise en oeuvre des politiques et programmes du gouvernement relativement à toutes les activités ou mesures qui touchent les eaux côtières ou marines.

En plus de la Loi sur les océans, le ministre des Pêches et des Océans, aux termes des articles 35 à 43 de la Loi sur les pêches, a clairement le pouvoir et le mandat de protéger l'habitat du poisson et dispose des outils voulus pour veiller à l'application de ces dispositions et pour poursuivre les contrevenants.

D'après ce qui précède, il apparaît tout à fait clair que le projet de loi C-48 est une mesure législative redondante qui, si elle était adoptée, ne ferait qu'embrouiller et compliquer le dossier de la protection et de la conservation des ressources marines et des écosystèmes marins.

L'industrie de l'aquaculture reconnaît que les écosystèmes marins sont extrêmement complexes, tout en étant en même temps très résistants et susceptibles de faire l'objet d'une utilisation durable des ressources. Compte tenu de l'équilibre complexe entre la protection de l'habitat et la gestion et l'utilisation des ressources, il n'est pas évident aux yeux de l'industrie de l'aquaculture que Parcs Canada possède l'expertise en gestion, les ressources et les connaissances scientifiques voulues pour assumer un rôle de chef de file dans le dossier de la conservation du milieu marin. On ne peut même pas faire d'analogie entre l'exploitation d'un parc national terrestre et ce qui revient à un parc national dans un milieu marin.

La proposition d'établir un réseau d'aires marines de conservation nationales crée la perception de deux ministères gouvernementaux se livrant à ce qui ressemble bien à une querelle de clochers, dont le but n'apparaît pas encore clairement. Trop souvent, la perception devient la réalité et l'on ne peut s'empêcher de poser la question: que veut-on protéger exactement par les aires marines de conservation nationales qui ne soit déjà protégé par un plan de gestion ou une loi quelconque?

Confier l'initiative des AMC au ministre du Patrimoine canadien, c'est ébranler sévèrement le pouvoir et le mandat du ministre des Pêches et des Océans tels qu'énoncés dans la Loi sur les océans. Il ne faut pas permettre une telle chose.

• 1130

Quelle est la différence entre une zone de protection marine et une aire marine de conservation? Comment ces deux éléments à première vue semblables cadrent-ils avec l'ensemble complexe de mesures de gestion de la zone côtière? Et qu'en est-il des réserves fauniques en milieu marin?

L'industrie de l'aquaculture espérait que l'entrée en vigueur de la Loi sur les océans inaugurerait une ère de coordination et de contrôle par un seul ministère du gouvernement sur tous les dossiers et activités qui ont trait au milieu marin. Il semble que cet espoir n'était pas fondé.

Je voudrais attirer votre attention sur quelques autres éléments du projet de loi C-48 qui suscitent des inquiétudes aux aquiculteurs.

Le premier point est le zonage. La possibilité de confusion entre les compétences est encore plus prononcée dans le cas de l'aquaculture. Si l'on examine l'arrangement de zonage proposé par Parcs Canada dans son document de politiques, on voit qu'il réclame la création de trois zones de gestion. Dans la zone I, qualifiée de zone de préservation, la récolte des ressources renouvelables serait essentiellement interdite. La zone II serait un environnement naturel entourant la zone I et servant de tampon. La chasse et la pêche récréatives et l'aquaculture y seraient interdites. La zone III serait la zone de conservation et l'aquaculture relèverait de cette catégorie. La récolte des ressources renouvelables serait autorisée sous réserve de diverses conditions. Toutefois, de façon générale, l'aquaculture n'est pas vraiment considérée comme une activité légitime. Je reviendrai là- dessus tout à l'heure.

Quels seront les critères et qui établira la ligne de démarcation des diverses zones prévues? Il est clair que des personnes seront déplacées à cause de ce régime, parce que l'aquaculture n'est pas permise dans les zones I et II, tandis que dans la zone III, l'aquaculture est au bas de la liste des priorités. Pour être faisable, l'aquaculture exige un milieu ayant des caractéristiques spécifiques et il faut avoir un accès raisonnable aux secteurs de croissance ayant les caractéristiques biophysiques souhaitables pour favoriser des activités d'aquaculture durables.

Citons Terre-Neuve comme exemple d'un effort actuellement en cours en vue de constituer une AMC. Parcs Canada propose d'établir une aire marine de conservation allant de Cape Bonavista dans l'est jusqu'à North Head, dans la baie Notre Dame. Dans ce secteur, il y a actuellement 35 établissements d'aquaculture. La grande majorité sont des fermes d'élevage des fruits de mer, surtout les moules. On y trouve aussi certaines des meilleures fermes d'élevage de la morue sur l'île. Si l'on tient compte des zones de préservation ou tampons qu'on propose de créer, ce sera toute l'industrie de l'élevage des fruits de mer et l'industrie naissante de l'élevage de la moule dans le nord-est et le nord-ouest de l'île qui seront touchées. Ce secteur représente entre 85 et 90 p. 100 de l'élevage des moules à Terre-Neuve. Le zonage placerait beaucoup de sites d'élevage dans des zones interdites aux populations côtières qui cherchent désespérément à s'en sortir financièrement. De plus, on ne fait nullement mention d'un dédommagement à verser aux particuliers ou entreprises qui pourraient être déplacés en application du régime de zonage envisagé.

Pour ce qui est de la partie 3.3 des principes directeurs et politiques opérationnelles de Parcs Canada, ce qui nous préoccupe vivement, c'est le parti pris contre l'aquaculture qui transparaît dans cette partie. La pêche y est considérée comme une activité appropriée pour les zones de catégorie III, sous réserve de la protection des écosystèmes des aires marines de conservation, du maintien des stocks viables et du respect des buts et objectifs de l'AMC. L'aquaculture, par contre, peut être autorisée dans la zone III si elle ne nuit pas à la structure et au fonctionnement des écosystèmes de l'AMC et n'entre pas en conflit avec d'autres activités de pêche, de navigation ou de loisirs en milieu marin, ni avec les activités d'éducation publique.

Il est évident que ce parti pris et cet ordre de préséance sont contraires à la stratégie fédérale de développement de l'aquaculture ainsi qu'à la politique provinciale de développement côtier. De plus, on ne reconnaît pas le droit des aquaculteurs d'avoir également accès aux ressources marines, pas plus qu'on ne reconnaît la présence historique des activités commerciales qui sont déjà exercées dans le secteur.

Le concept de zonage est totalement inacceptable et causera énormément de tort aux populations côtières qui luttent pour survivre à l'effondrement de la pêche et à la fin du programme LSPA, le résultat net étant de faire disparaître l'espoir le plus prometteur pour rétablir leur gagne-pain et recouvrer leur dignité.

Je voudrais maintenant aborder certains points au sujet du principe de la prudence.

À première vue, le principe de la prudence semble un moyen raisonnable d'évaluer les risques ou les menaces qui pèsent sur l'environnement. En appliquant ce principe, tel qu'énoncé non seulement dans ce projet de loi mais aussi dans d'autres textes de loi, le gouvernement se donne les outils voulus pour élaborer, modifier et appliquer des plans de gestion en l'absence de certitude scientifique et sans avoir besoin de rendre des comptes à cet égard. Cela peut aboutir à une situation où les opinions, croyances et affiliations personnelles pourraient devenir les facteurs déterminants dans les prises de décision. Étant donné le manque de clarté de la définition et du sens de ce principe de la prudence, nous ne sommes pas convaincus que Parcs Canada sera en mesure d'interpréter comme il faut la portée et l'application de ce concept dans le milieu marin, où Parcs Canada n'a que peu d'expérience ou de compétences scientifiques.

• 1135

Dans tout texte de loi, on doit énoncer clairement dans le corps du texte, et non pas seulement dans le préambule, lequel n'a pas force de loi, ce que l'on veut dire exactement par le principe de la prudence ou de la prévention, et on doit en préciser la portée et quels sont les critères ou les paramètres qui seront appliqués pour évaluer tous les facteurs à prendre en compte.

Pour ce qui est des évaluations de ressource, nous croyons comprendre que Parcs Canada a manifesté de vives inquiétudes au sujet du déplacement de certains secteurs industriels consécutivement à l'établissement d'une AMC. Plus précisément, nous faisons allusion au Comité des évaluations des ressources minérales et des hydrocarbures. À notre connaissance, on n'a pas envisagé de procéder à une telle évaluation des ressources dans le secteur de l'aquaculture, industrie qui offre les perspectives les plus immédiates et les plus avantageuses pour les populations côtières et rurales.

En conclusion, monsieur le président, nous croyons avoir démontré de façon concluante que le projet de loi C-48 est un texte de loi redondant et qu'il suffirait d'apporter de légères modifications à la partie II de la Loi sur les océans, zones de protection marine, pour y ajouter toutes les exigences précises qui seraient nécessaires pour la création d'un parc marin. Le projet de loi concernant les aires marines de conservation, s'il était adopté, créerait un obstacle majeur au développement futur de l'aquaculture en créant de l'incertitude et en érodant les droits de propriété des aquaculteurs, ce qui découragerait les éventuels efforts d'agrandissement et l'investissement.

Nous n'arrivons pas à comprendre pourquoi le gouvernement du Canada envisagerait même d'établir une aire marine de conservation dans le secteur le plus prisé pour l'aquaculture et la pêche, alors qu'il y a des milliers de kilomètres de côte tout à fait représentative de la plate-forme terre-neuvienne. C'est encore plus difficile à comprendre quand on songe aux conséquences éventuelles que cela pourrait avoir sur les exploitations établies d'aquaculture et de pêche dans les secteurs de Bonavista et de la baie Notre Dame à Terre-Neuve. Nous croyons que les braves Terre- Neuviens ont déjà suffisamment souffert de l'effondrement de la pêche sans qu'on les menace maintenant de perdre également leur gagne-pain à cause d'un concept incompatible.

Je vous remercie beaucoup de nous avoir donné l'occasion de présenter notre point de vue ici aujourd'hui.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Kielley.

Nous allons maintenant passer aux questions et je donne la parole à M. Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je voudrais remercier les délégués d'être présents ce matin. Vos observations ont certainement été révélatrices pour moi. C'est très instructif.

Comme vous le savez, cette mesure législative recoupe de nombreux ministères. Je me suis toujours demandé quelles en étaient les conséquences sur les autres ministères; je me demande en fait si cette mesure est vraiment nécessaire. Comme vous le savez, ce projet de loi touche l'environnement, les ressources naturelles, les affaires indiennes, les pêches et les transports.

Je vais poser la question suivante à M. McGuinness. Vous avez dit dans votre exposé qu'à votre avis, il faudrait retirer le projet de loi, mais cela ne vous empêche pas de proposer d'y apporter diverses modifications. Croyez-vous que les amendements en question devraient être inscrits dans ce projet de loi ou bien dans un autre texte de loi?

M. Patrick McGuinness: Eh bien, notre position est claire. Cette initiative relative aux AMC doit relever de la Loi sur les océans; il faut donc modifier la Loi sur les océans. Toutefois, étant donné que nous ne pouvons prédire l'avenir, si, en fin de compte, ce projet de loi est adopté et qu'il relève du ministre du Patrimoine canadien et est administré par les fonctionnaires de Patrimoine Canada, nous avons proposé des amendements qui imposeraient certaines contraintes au ministre des Pêches et des Océans et aux fonctionnaires des Pêches et permettraient à notre conseil de faire des instances. Nous avons donc prévu toutes les éventualités, si l'on veut, mais en fin de compte, nous recommandons le retrait du projet de loi.

M. Inky Mark: Ma dernière question est celle-ci: comment vos organisations ont-elles été consultées dans tout ce processus, quelles activités ont eu lieu et quand?

• 1140

M. Patrick McGuinness: En fait, il y a eu une assez bonne consultation en ce sens que Patrimoine Canada savait quelle était notre position. Je pense que dans une certaine mesure, le libellé du projet de loi tient compte de certaines observations que nous avons faites au ministère et aux rédacteurs de la loi avant le dépôt du projet de loi à la Chambre; en effet, le fait que cette initiative relève de Patrimoine Canada nous inquiète vivement et nous cherchons assurément à inscrire dans le projet de loi un certain équilibre des pouvoirs.

Comme nous le signalons dans notre document, nous croyons que tout projet d'AMC ne sera pas, si l'on peut dire, une décision discrétionnaire du ministre du Patrimoine canadien, mais plutôt du gouverneur en conseil. Nous recommandons que le gouverneur en conseil soit tenu d'être convaincu que le ministre des Pêches et des Océans est... Mais il reste que la consultation a été bonne et qu'il y a eu un dialogue. Malheureusement, Patrimoine Canada n'est pas allé jusqu'au bout et n'a pas simplement recommandé au ministre de ne pas présenter le projet de loi.

M. Inky Mark: Monsieur Kielley, voudriez-vous répondre à cette question?

M. Marc Kielley: Bien sûr. Au sujet de la dernière observation de Patrick, je pense qu'essentiellement, Patrimoine Canada ne comprend pas le message, à savoir que les gens sont très très inquiets à ce sujet, surtout à Terre-Neuve.

J'ai pas mal d'expérience dans ce domaine, parce que je siège au Comité consultatif sur l'aire marine nationale de conservation à Terre-Neuve, auquel on a demandé de se pencher sur la faisabilité de l'établissement de cette aire de conservation. Je suppose que nous nous lancés à contrecoeur dans cette aventure parce que Parcs Canada avait pris l'initiative, premièrement, de délimiter un secteur où l'on souhaitait établir un parc. Nous n'avons pas du tout été mis à contribution dans le processus du choix du secteur ou des critères que l'on devait appliquer pour délimiter un secteur, et maintenant nous sommes engagés jusqu'au cou dans un processus qui a été mis en branle parce qu'ils veulent créer un parc à cet endroit.

Les gens y voient une grave menace pour eux. J'ai déjà soulevé aux diverses réunions du comité certaines des questions que j'ai abordées aujourd'hui, et il y en aurait beaucoup d'autres à soulever car, comme c'est le cas ici, ce sont les détails qui comptent. Quand on analyse les principes directeurs et les politiques opérationnelles de Parcs Canada, on y trouve de nombreux problèmes. La formulation est assez froide, particulièrement envers l'aquaculture. Dans certains cas, cela pourrait mettre en péril les droits d'exploitation des terres et de l'eau des agriculteurs. Il n'existe aucun mécanisme d'indemnisation. Et dans l'ensemble, nous avons constaté que leur philosophie est incompatible avec toute activité commerciale.

Cela dit, chaque fois que nous soulevons cette question avec Parcs Canada, cela semble tomber dans l'oreille de sourds. Leur idée semble arrêtée. Ils ne nous écoutent pas.

Ce dossier devient très controversé à Terre-Neuve. Je peux vous dire que lors d'une récente réunion communautaire à Musgrave Harbour, 500 personnes se sont déplacées. Il y avait là beaucoup de gens très contrariés parce qu'ils ont l'impression que leurs droits de pêcher et de pratiquer l'aquaculture sont sérieusement menacés. C'est une véritable poudrière.

Je ne sais pas comment nous pourrions réussir à nous faire comprendre. Voilà pourquoi je suis là aujourd'hui, pour présenter notre point de vue dans l'espoir que vous puissiez expliquer à Patrimoine Canada que nous ne sommes pas contents.

M. Inky Mark: Merci.

[Français]

Le président: Madame Tremblay.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Bonjour, messieurs.

J'étais à la fois contente et un peu triste à l'audition de vos présentations. Le Bloc québécois a à peu près les mêmes vues que vous sur le projet de loi. Nous nous y opposons depuis le début, indépendamment du fait que le Québec a un peu l'impression que le gouvernement fédéral vient à nouveau de s'immiscer dans des compétences jusqu'à un certain point provinciales.

Nous nous y opposons entre autres parce qu'il contient la proposition de mettre en place une nouvelle structure qui viendrait dédoubler les zones de protection marine de Pêches et Océans et les zones marines protégées d'Environnement Canada. De plus, il y a eu une consultation, dont Pêches et Océans a déjà fait connaître le résultat, et nous nous inquiétons puisqu'on lisait dans ce rapport:

    Il existe encore beaucoup de confusion chez les intervenants en ce qui a trait aux différents programmes fédéraux sur les aires marines protégées.

    Les ministères concernés devraient s'harmoniser et collaborer pour la mise en place des aires marines protégées.

C'est ce qu'ils devraient faire plutôt que de se concurrencer les uns les autres.

• 1145

Je suis ici depuis cinq ans et je constate que chaque fois que le ministère du Patrimoine canadien et un autre ministère sont mêlés à la même action, rien ne marche. On en a vu suffisamment d'exemples pour connaître tous les problèmes que cela peut poser. On en a eu au CRTC, auquel sont mêlés Patrimoine canadien et Industrie, et à propos des droits d'auteurs qui concernent Patrimoine canadien et Industrie. Il y a toujours quelqu'un quelque part qui mène une lutte de pouvoir entre ministères.

Vous avez dit être un peu rassurés par le fait que le pouvoir décisionnel ne revenait pas à la ministre mais au gouverneur en conseil. Le gouverneur en conseil, ce n'est guère plus que l'ensemble des ministres. Quand un ministre souhaite quelque chose, si ses collègues l'acceptent, cela est présenté comme la décision du ministre. Il est rare qu'une chose bien orchestrée au Conseil des ministres...

J'aurais d'abord deux questions à vous poser. La première s'adresse au premier groupe, le Conseil canadien des pêches. J'aimerais que vous m'expliquiez exactement qui vous représentez, qui vous regroupez, qui vous conseillez. Êtes-vous totalement autonomes?

Comme l'a dit jusqu'à un certain point M. Inky Mark, si vous êtes contre le projet de loi, pourquoi nous apportez-vous des recommandations afin de l'améliorer? Est-ce à dire que cela pourrait constituer un compromis que vous êtes prêts à accepter dans l'éventualité où le gouvernement libéral, qui a la majorité et peut faire adopter n'importe quelle loi, resterait sourd à vos desiderata? Est-ce que vous cherchez à limiter les dégâts en proposant des amendements?

M. Patrick McGuinness: Merci beaucoup, madame. Nous sommes d'accord avec vous.

[Traduction]

Notre organisation, le Conseil des pêches du Canada, est tout à fait indépendant du gouvernement du Canada et des gouvernements provinciaux. Nous sommes là aujourd'hui comme lobbyistes venus à Ottawa pour représenter les associations provinciales dont l'Association québécoise de l'industrie de la pêche et des entreprises qui s'occupent surtout de transformation ainsi que des entreprises intégrées qui possèdent leurs propres usines de transformation et leurs propres bateaux de pêche. Nous représentons aussi le Canada atlantique et l'association ontarienne, lesquelles font surtout l'achat et la vente de poisson et de produits de la mer.

Nous sommes une association professionnelle et non pas une association représentant des pêcheurs. Cependant, bon nombre des entreprises membres de notre association possèdent aussi un nombre considérable de bateaux de pêche.

Vous avez raison, nous sommes dans une situation semblable à la vôtre où nous nous opposons au projet de loi parce qu'à notre avis il aura pour conséquence le double emploi et des inefficacités. C'est l'idée d'un mauvais gouvernement. C'est l'idée d'une mauvaise administration publique.

Cependant, nous sommes présents dans cette ville depuis de nombreuses années et nous avons travaillé avec divers ministères et avec divers gouvernements au fil des ans. Pour notre part, nous cherchons des façons de limiter les dégâts. Nous proposons des amendements qui auraient à tout le moins le mérite d'améliorer les contrepoids qui font défaut dans la version actuelle du projet de loi. Nous voulons ces contrepoids pour obtenir que le ministre des Pêches et des Océans et les fonctionnaires de son ministère travaillent avec notre industrie afin que nous puissions infléchir la politique et obtenir des solutions aux problèmes que ce projet de loi causera.

[Français]

Merci de votre question. Nous sommes d'accord avec vous, mais la vie est faite de compromis.

Mme Suzanne Tremblay: Puis-je continuer?

Comme il n'y a pas de questions indiscrètes mais seulement des réponses, puis-je vous demander si, en tant que groupe de pression, vous avez rencontré le ministre de Pêches et des Océans pour lui faire part de vos objections à ce projet de loi en espérant qu'il intervienne auprès du Cabinet pour stopper le projet de loi?

• 1150

[Traduction]

M. Patrick McGuinness: Nous n'en avons pas parlé avec le ministre des Pêches et des Océans, mais nous en avons discuté avec les hauts fonctionnaires du ministère. Eux aussi craignent les risques de confusion, non seulement au sein du gouvernement mais aussi, comme nous l'avons constaté ici dans le secteur de l'aquaculture, au sein du secteur des pêches où il semble y avoir confusion entourant toute cette initiative du millénaire, toute cette initiative relative aux océans; qui seront les participants, qui sera responsable du projet?

J'ose dire que nos inquiétudes sont partagées par quiconque travaille dans le secteur des pêches, dans le secteur de l'aquaculture ou dans les industries maritimes, y compris le transport maritime, etc.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: D'accord. Mardi, alors que nous recevions ici, à ce comité, les fonctionnaires de l'agence, c'est-à-dire son directeur général et quelques-uns de ses acolytes, ils nous ont remis des plans indiquant que Cape Bonavista et Notre Dame Bay étaient parmi leurs priorités.

Avez-vous été consultés? Dans le projet de loi, on dit en effet qu'on va consulter toutes les personnes concernées et qu'on ne fera rien sans l'accord des gens. Or, l'agence a indiqué par des points jaunes les secteurs qu'elle considère prioritaires. Il y en a trois, dont le vôtre, Cape Bonavista et Notre Dame Bay. Avez-vous été mêlés à des consultations en rapport avec cela? Avez-vous l'intention de faire du tapage de diverses façons pour vous faire entendre?

[Traduction]

M. Marc Kielley: D'abord, nous n'avons pas eu notre mot à dire dans la désignation de cette partie-là du littoral comme aire marine de conservation. Nous ne savons pas comment ils en sont arrivés à cette décision. Mais dès qu'ils ont décidé qu'ils souhaitaient créer là une aire marine de conservation, le ministère du Patrimoine a signé un protocole d'entente avec le ministère du Tourisme, de la Culture et des Loisirs de Terre-Neuve pour faire réaliser une étude de faisabilité.

Dans le cadre de cette étude de faisabilité, il a été convenu de créer un comité consultatif sur les aires marines de conservation. C'est ce comité que j'ai déjà mentionné et dont je suis membre. Sur les 21 ou 22 membres, il n'y a qu'un représentant du secteur de l'aquaculture. L'avenir de 35 entreprises aquicoles et la création éventuelle de nombreuses autres entreprises aquicoles sont en jeu, mais nous n'avons qu'un représentant à la table. Les pêcheurs sont beaucoup mieux servis; ils ont réussi à obtenir 51 p. 100 des places.

Jusqu'à maintenant, nous avons eu une série de réunions et d'ateliers. Nous avons eu des ateliers sur les retombées de l'aquaculture. Pendant que je suis ici aujourd'hui, à Terre-Neuve se déroule une réunion pour évaluer l'impact de l'aquaculture sur la pêche commerciale. Il y a eu un atelier sur la méfiance à l'endroit du gouvernement, croyez-le ou non, parce que les gens craignent que Parcs Canada ne soit pas franc tout en nous demandant de leur faire confiance. Nous disons: «Pourquoi ferions-nous confiance au gouvernement? Vous ne nous avez pas donné de raisons de vous faire confiance dans le passé, pourquoi le ferions-nous maintenant?»

Tout ce processus est entaché de méfiance. Malgré tout, nous avons décidé de participer au processus, mais nous avons constaté jusqu'à maintenant qu'il n'est pas équitable et pendant que nous délibérons et que nous tentons de faire une évaluation de tout cela, nous apprenons que les fonctionnaires de Parcs Canada cherchent des façons d'accélérer la procédure...

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Accélérer quoi?

M. Marc Kielley: La création de l'aire marine de conservation. Une série de réunions et d'ateliers nous ont permis de faire ressortir de nombreux problèmes et lacunes dans les principes directeurs, les politiques et la loi. Ils tentent de faire abstraction de tout cela, d'écarter les problèmes. Nous ne permettrons pas qu'il en soit ainsi, première chose.

Ensuite, il est prévu qu'en dernière étape nous produisions un rapport. Les fonctionnaires de Parcs Canada nous disent qu'ils veulent que nous recommandions un modèle. Nous leur répondons que nous ne sommes pas en mesure de le faire. Il existe trop de problèmes; comment pouvons-nous recommander un modèle? Cela ne fait pas partie de notre mandat. Nous mettons plutôt en relief les enjeux et les problèmes. Nous en avons repéré un si grand nombre qu'il devrait être parfaitement clair que ce concept est incompatible avec la réalité de cette région.

• 1155

Si vous me permettez de revenir à votre question originale, vous m'avez demandé si nous proposons un compromis en suggérant que cela soit ajouté à la Loi sur les océans. Non, nous ne suggérons pas nécessairement un compromis. Nous nous contentons d'énoncer notre position sur la conservation, idée que nous appuyons de façon générale. Pour nous c'est une idée qui s'impose d'elle-même. Mais si nous devons aller de l'avant avec ceci, il faut que cela soit du ressort de l'autorité compétente, à savoir le ministère des Pêches et des Océans.

Avant que vous n'alliez de l'avant avec la création de ces parcs, avant que vous n'entamiez la prochaine étape à laquelle je participe déjà, je vous prie de voir quels groupes d'utilisateurs sont représentés ici et de vous demander quelles conséquences cela aura pour eux avant de décider si ce choix d'emplacement d'une aire marine de conservation est le bon. Si une analyse préliminaire révèle qu'il y a une trop forte concentration de pêcheurs et d'entreprises aquicoles dans la région, alors le risque de conflits est trop grand. Il faudrait essayer de trouver un emplacement où il y a moins d'utilisateurs et qui serait plus indiqué pour y aménager une aire marine de conservation. Voilà le conseil que je vous donne.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: J'ai une toute petite question. Quand prévoyez-vous terminer votre rapport?

[Traduction]

M. Marc Kielley: Je prévois que le rapport sera prêt d'ici avril ou mai, mais je ne suis pas aux réunions qui se déroulent aujourd'hui. Ce sont de très importantes réunions qui se déroulent aujourd'hui pour décider de la suite des événements dans ce dossier.

Oui, nous avons parlé fort à Terre-Neuve. J'aimerais ajouter quelque chose, monsieur le président, en ma qualité de représentant du Comité consultatif sur l'aire marine nationale de conservation. Le Secrétaire d'État (Parcs), Andy Mitchell, nous avait indiqué que des représentants du Comité consultatif seraient invités à comparaître devant le comité permanent. Nous avions cru comprendre que des employés de Parcs Canada devaient demander à comparaître. Je me demande si vous avez reçu cette requête, parce que c'est une question importante.

[Français]

M. Mauril Bélanger: [Note de la rédaction: Inaudible ] ...la parole. Je veux parler de cela.

[Traduction]

Est-ce mon tour, monsieur le président?

Le président: Oui, monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger: Il y a une question à laquelle j'aimerais revenir.

[Français]

Premièrement, je tiens à m'excuser auprès de mes collègues pour mon absence d'hier; j'ai été retenu en Chambre par les débats sur le rapport d'étape concernant le projet de loi C-55.

Mme Suzanne Tremblay: Les porte-parole de l'opposition aussi.

M. Mauril Bélanger: Exactement, madame. Cela me fait dire qu'il faudra peut-être, à l'avenir, être conscients de la difficulté que pose la tenue d'une réunion du comité en même temps que se tient en Chambre un débat sur un projet de loi dont on a traité ou dont on doit traiter ici. Cela cause des problèmes assez importants; je pense qu'il en a été de même pour M. Mark, Mme Tremblay, Mme Lill et M. Muise.

Ensuite, je voudrais reprendre la question de Mme Tremblay. On commence et cela risque d'être long. Je sens en quelque sorte le retour de ce que nous avons vécu dans nos discussions sur le projet de loi C-32 sur le droit d'auteur dans la précédente législature.

Je ne suis pas tout à fait d'accord avec Mme Tremblay quand elle dit qu'il n'y a rien qui marche; en grande partie grâce au travail du comité, ce dossier a pu avancer et la question du droit d'auteur a progressé énormément. Nous avons même maintenant un régime...

Mme Suzanne Tremblay: La Commission du droit d'auteur.

M. Mauril Bélanger: Non, vous avez parlé du droit d'auteur...

Mme Suzanne Tremblay: La Commission du droit d'auteur.

M. Mauril Bélanger: La Commission du droit d'auteur aussi. On peut dire que le comité a quand même joué un rôle parce qu'un régime de droits voisins a été mis en place, de même qu'autre chose.

Or, je commence à percevoir le début d'une situation semblable à celle où s'affrontaient les intérêts des producteurs et des utilisateurs de biens artistiques ou culturels. Actuellement, on peut voir poindre des divergences entre les intérêts des gens qui utilisent les aires marines pour en vivre, les intérêts environnementaux et peut-être même les intérêts patrimoniaux. Il faut être conscients que des intérêts s'affrontent et qu'il reviendra au comité de faire la part des choses.

• 1200

Cela m'amène à la question que monsieur soulevait. Je n'ai pas la liste des témoins devant moi, mais j'espère qu'on recevra effectivement une délégation ou un groupe de cet endroit, à Terre-Neuve. Je pense qu'il serait important qu'on les entende, eux ou encore les membres du comité consultatif qui a été mis sur pied, ou encore des gens qui l'auront demandé. Je ne sais pas s'ils sont sur notre liste actuellement, mais j'exprime le voeu qu'on les rencontre, si c'est possible.

[Traduction]

Cela dit...

[Français]

Le président: Excusez-moi.

Mme Suzanne Tremblay: Est-ce qu'on peut vérifier tout de suite? Est-ce qu'ils sont sur la liste des invités?

Le président: Oui. Je l'ai demandé au greffier et, malheureusement, il n'a pas la liste ici aujourd'hui. Je lui ai demandé de l'apporter la prochaine fois. Il faudrait à tout prix qu'on ait cette liste ici pour vérifier si l'agence en question y figure.

Mme Suzanne Tremblay: J'appuie la requête de M. Bélanger. S'ils ne sont pas inclus, il faudrait automatiquement qu'ils le soient.

M. Mauril Bélanger: Je laisse ce point en suspens. On pourra y revenir à un autre moment.

M. Pierre Stang (directeur exécutif intérimaire, Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture): Monsieur le président, je pourrais peut-être ajouter quelque chose à ce sujet. Lors de ma dernière conversation avec M. Radford, le greffier, il y a à peine quelques jours, j'ai vérifié ce point. À ce moment-là, le comité n'était pas sur la liste.

M. Mauril Bélanger: On va laisser cela entre les mains du président.

[Traduction]

À votre avis, quel pourcentage des eaux devrait être assujetti à un tel régime au Canada? Ma question s'adresse aux deux groupes.

M. Marc Kielley: J'aimerais réellement comprendre quel est l'objectif global.

M. Mauril Bélanger: Nous parlions des aires de conservation.

M. Marc Kielly: Oui.

M. Mauril Bélanger: La question est très simple. Les gouvernements successifs et les Canadiens ont jugé bon de protéger, de conserver un certain pourcentage des terres du Canada en créant des parcs nationaux et je vous demande, à votre avis, quel pourcentage de nos eaux devrait être désigné aires marines de conservation?

M. Marc Kielly: Je ne suis pas certain de pouvoir vous donner un pourcentage précis. Il s'agirait plutôt de rechercher certaines caractéristiques précises, de faire une évaluation du littoral pour découvrir quels segments du littoral correspondent aux paramètres recherchés. Ensuite, il faut voir quels groupes d'utilisateurs sont présents sur le littoral. Si vous pouvez trouver un segment du littoral où une aire marine de conservation peut être créée sans être obligés d'évincer un groupe d'utilisateurs, alors allez-y.

M. Mauril Bélanger: Vous ne contestez donc pas la validité du concept selon lequel en fonction de certaines caractéristiques, on pourrait créer deux ou 29 aires marines de conservation.

M. Marc Kielly: Non, absolument pas. Je ne conteste pas cet aspect de la question. Ce qui me préoccupe c'est la possibilité de conflit et d'éviction.

M. Mauril Bélanger: C'est bien clair. Je voulais m'assurer de bien vous comprendre parce que vous vous opposez au projet de loi mais non pas à l'idée de préserver certaines régions.

M. Marc Kielly: Non.

M. Mauril Bélanger: Avez-vous une idée des pourcentages, monsieur?

M. Patrick McGuinness: J'aimerais répondre.

Nous accepterions l'idée d'une aire marine de conservation en vertu de la Loi sur les pêches. Mais, au nom du secteur des pêches, nous voulons souligner un point fondamental sur lequel on n'a pas suffisamment insisté, à savoir qu'il est inapproprié de vouloir transposer l'idée d'un parc national terrestre au domaine des océans.

Dans le cas de la Loi sur les parcs, comme vous le dites, on cherche à préserver certaines zones représentatives pour que les Canadiens et le reste du monde puissent en jouir pendant un certain temps ou à perpétuité. Et cela parce que les compagnies forestières pourraient, par exemple, se rendre sur place et détruire totalement les forêts. Or, dans le cas des océans, personne ne viendra enlever l'eau. L'eau est là. Par conséquent, dans le secteur des pêches, nous appuyons pleinement l'idée de la conservation prioritaire, mais nous souhaitons une approche basée sur l'écosystème.

M. Mauril Bélanger: Bref, il n'y a pas un pourcentage que vous... Vous n'êtes pas disposé à m'en donner un.

M. Patrick McGuinness: Non. Je pense que c'est une approche inappropriée.

• 1205

M. Mauril Bélanger: Ça va. C'est bon.

En écoutant votre exposé, j'ai eu l'impression que vous souhaitez qu'un seul ministre ait un pouvoir discrétionnaire. Sinon, ce serait le Cabinet et non pas un seul ministre. Pourquoi?

M. Patrick McGuinness: Nous disons qu'il doit s'agir du ministre des Pêches et des Océans. Toutefois, si tout compte fait cette initiative ne doit pas relever de Pêches et Océans, nous croyons, comme vous le dites, qu'elle doit être du ressort du gouverneur en conseil essentiellement parce que les océans sont relativement très utilisés. Le secteur des pêches au Canada a un chiffre d'affaires de 3 milliards de dollars.

M. Mauril Bélanger: Ainsi, étant donné l'importance du secteur des pêches, vous dites que le ministre des Pêches et des Océans doit être le seul à avoir un pouvoir discrétionnaire mais, faute de cela, aucun autre ministre ne devrait avoir un pouvoir discrétionnaire exclusif. Est-ce bien cela?

M. Patrick McGuinness: C'est cela. Ce que nous disons c'est...

M. Mauril Bélanger: N'êtes-vous pas un peu partial?

M. Patrick McGuinness: Non.

M. Mauril Bélanger: Si un seul ministre doit avoir un pouvoir discrétionnaire, ce doit être le ministre des Pêches et des Océans.

M. Patrick McGuinness: Exactement.

M. Mauril Bélanger: Aucun autre ministre ne doit avoir un pouvoir discrétionnaire exclusif.

M. Patrick McGuinness: C'est cela.

M. Mauril Bélanger: N'est-ce pas un point de vue partial?

M. Patrick McGuinness: Je ne sais pas ce que vous entendez par cela.

M. Mauril Bélanger: Je m'explique mal.

M. Patrick McGuinness: Ce que je dis, c'est que si cette initiative doit se réaliser comme le prévoit ce projet de loi, alors il ne faut pas que ce soit le ministre de Patrimoine Canada.

M. Mauril Bélanger: C'est ma dernière question. Vous vous opposez à l'idée des aires marines de conservation, c'est bien cela?

M. Patrick McGuinness: Nous sommes prêts à accepter l'idée des aires marines de conservation qui relèveraient de la Loi sur les océans. J'ai dit simplement qu'au plan philosophique c'est une idée curieuse de vouloir transposer l'idée d'un parc terrestre aux océans. Le monde des océans doit faire l'objet d'une approche basée sur les écosystèmes. Et quand on adopte une telle approche, on ne cherche pas à gérer l'eau ni à gérer les ressources halieutiques; on cherche plutôt à gérer l'activité humaine dans les océans. C'est soit le secteur des pêches ou le secteur de l'aquaculture. De sorte qu'en disant que vous allez réserver une zone marine, une partie de l'océan pour...

M. Mauril Bélanger: Je vous ai bien compris. Vous dites dans votre mémoire: «Nous nous opposons au projet de loi en principe».

M. Patrick McGuinness: Nous nous opposons à ce que le projet de loi...

M. Mauril Bélanger: Non, au principe. Le principe du projet de loi c'est de créer des aires marines de conservation. Vous vous opposez à la façon dont ce principe serait mis en oeuvre. C'est bien clair.

M. Patrick McGuinness: D'accord.

M. Mauril Bélanger: J'essaie de comprendre au juste ce que vous voulez dire: «Nous nous opposons au projet de loi en principe». Voulez-vous ménager la chèvre et le chou?

M. Patrick McGuinness: Non.

M. Mauril Bélanger: Êtes-vous contre les aires marines de conservation?

M. Patrick McGuinness: Non, mais nous avons du mal à comprendre la logique de tout cela. Si les AMC sont perçues comme étant la voie de l'avenir...

M. Mauril Bélanger: Vous tentez d'éluder la question.

M. Patrick McGuinness: ... nous acceptons cela, mais il faudrait que cette option soit évaluée au regard des autres options qu'aurait le gouvernement pour gérer cette ressource—AMC ou autre chose. Nous nous opposons à la teneur du projet de loi parce que, tout à coup, on verra apparaître des AMC sans qu'on ne comprenne très bien quelle est leur place dans la stratégie sur les océans.

M. Mauril Bélanger: Je comprends cela.

M. Patrick McGuinness: Le gouvernement et les provinces sont à mettre en oeuvre une stratégie sur les océans.

M. Mauril Bélanger: Vos commentaires sur le siège de cette responsabilité sont très clairs, monsieur.

M. Patrick McGuinness: Tout à fait.

M. Mauril Bélanger: Très clairs. Je ne suis pas certain d'avoir obtenu une réponse très nette à ma question, mais je vous comprends peut-être mal. Vous ne vous opposez pas à l'idée de créer des aires marines de conservation; ce n'est qu'une question d'ordre technique quant au siège de cette responsabilité.

M. Patrick McGuinness: C'est exact.

M. Mauril Bélanger: Ainsi, vous ne vous opposez pas aux aires marines de conservation.

M. Patrick McGuinness: Non.

M. Mauril Bélanger: Merci.

M. Patrick McGuinness: Nous avons des réserves.

Le président: Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): J'aimerais demander aux témoins—je connais la réponse dans un cas. Le Comité permanent des pêches a étudié la Loi sur les océans pendant six mois, je crois, et a aussi voyagé. Je sais que le Conseil des pêches a comparu. Je ne sais pas si votre groupe a comparu.

Le Conseil des pêches a dû avoir la possibilité de commenter par ailleurs les normes de conservation qui figurent dans la troisième Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Avez-vous abordé des questions de ce genre dans le cadre de ces consultations-là?

• 1210

M. Patrick McGuinness: Dans le cas de la Loi sur les océans, ce que l'on proposait c'était l'élaboration d'une stratégie sur les océans, et nous appuyons cette idée-là. En outre, la Loi sur les océans créait un nouvel outil, à savoir les zones de protection marine. À cette époque-là, nous pensions que ces zones de protection marine étaient comparables à une aire marine de conservation.

Si les données scientifiques révèlent qu'une zone donnée doit faire l'objet d'une protection spéciale pour diverses raisons, y compris la biodiversité et la productivité de la biodiversité, selon les groupes d'utilisateurs et les groupes écologistes, nous pouvons ensemble nous entendre sur la création de zones de protection marine. Je me permets d'ailleurs de vous signaler que la création de cinq zones de protection marine a été annoncée par le ministre...

M. Ted McWhinney: Votre réponse c'est donc que vous avez témoigné sur ce point en particulier?

M. Patrick McGuinness: Pas sur les AMC, non, parce qu'il n'en était pas réellement question à cette époque.

M. Ted McWhinney: Le Canada a signé la Convention sur le droit de la mer mais a tardé pendant longtemps à la ratifier en raison surtout du différend qui nous opposait à l'Espagne et au Portugal. Nous avons obtenu gain de cause là-dessus, alors il y aura peut- être ratification. Toutefois, étant donné la gamme des sujets touchés, il apparaît clairement que plus d'un ministère fédéral participera à sa mise en oeuvre.

Ensuite, il ne s'agira sans doute pas de plus d'un ministère fédéral seulement mais aussi de plus d'un ministère provincial. Il y aura, pour employer un terme technique, polycentricité des problèmes, et une pluralité de responsabilités. Autrement dit, c'est un fait incontournable au gouvernement fédéral qu'il est impossible de compartimenter les problèmes, de les confier à tel ou tel ministère et pas aux autres.

Autrement dit, pour la quasi-totalité des politiques fédérales, deux, trois, voire quatre ministères interviennent pour régler un problème, et nous faisons appel au mécanisme que vous voyez à l'oeuvre aujourd'hui. Il y a des comités parlementaires, dont chacun examine attentivement les domaines du ressort des autres et très souvent ces comités tiennent des audiences en commun. Nous comptons toujours sur le fait que les ministres font connaître leur point de vue au sein du Cabinet et il y a un consensus ou encore l'un des points de vue l'emporte sur les autres.

Je suis un peu perplexe devant ce que vous dites ici, et j'aimerais savoir ce que vous vouliez dire au juste. À la page 2 de votre mémoire, paragraphe 5(1), monsieur McGuinness, vous dites:

    Un amendement [...] concernant la création [...] peut être apporté seulement si le gouverneur en conseil est convaincu que le ministre des Pêches et des Océans est d'accord avec l'amendement.

Je me demande quelle idée vous vous faites de la fonction contemporaine de gouverneur général. Croyez-vous que le gouverneur général pourrait exercer un pouvoir discrétionnaire indépendant? Si vous croyez en fait au droit conventionnel quant au rôle du gouverneur en conseil, cela signifie essentiellement qu'aucune décision ne serait prise sans l'assentiment du ministre des Pêches et des Océans. C'est en fait ce que prévoit la loi. C'est en réalité la loi et la pratique. Nous pourrions nous demander si ce n'est pas ce qui se passe effectivement au sein du Cabinet. S'il y a différend entre les ministres, ils en débattent au sein du Cabinet et le premier ministre, j'imagine, tranche en cas de désaccord. Autrement dit, préconisez-vous une structure constitutionnelle spécialisée qui reposerait sur des prérogatives autres?

M. Patrick McGuinness: Ce que nous cherchons à dire c'est que, si une décision du gouverneur en conseil nécessite la signature de cinq ministres, l'un d'eux doit être le ministre des Pêches et des Océans.

M. Ted McWhinney: Vous dites alors qu'il faudrait le préciser dans le règlement. Il faudrait la signature de deux ministres. Mais si ma mémoire est fidèle, tous les décrets en conseil sont en fait signés par au moins deux ministres, mais c'est assez formel. J'oserais vous dire que la même chose se produirait dans le cas de votre proposition.

Vous tentez de préciser une procédure qui se déroule tous les jours au Cabinet et qui est, de quelque façon, exercée par des mémoires aux divers comités. Rien n'empêcherait que le Comité de la justice et celui des affaires étrangères se saisissent du même problème, même si chacun d'eux s'en tiendrait aux questions de son ressort. Dans ce cas en particulier, si vous formulez des recommandations au Comité du patrimoine, elles sont transmises par le ministre du Patrimoine au ministre des Pêches.

• 1215

Toutefois, un tel conflit est réglé au sein du Cabinet et je ne sais pas ce que cela vous apporterait, si ce n'est ce qui se fait maintenant. C'est-à-dire que vous formulez ici des recommandations très appuyées qui influenceront certainement le comité et le rapport qu'il fera au ministre. La pratique des responsabilités étanches au sein du Cabinet qui avait cours au XIXe siècle est maintenant périmée. Presque tous les problèmes sont réglés par un effort concerté de deux, trois ou quatre ministères ou comités du Cabinet.

Vos arguments m'ont impressionné. Nous souhaitons certainement éviter tout double emploi au sein du gouvernement. Vous semblez suggérer que l'on revoie les mécanismes de coordination et souhaitez que nous précisions quel serait le rôle d'un conseil interministériel. Je note la présence du secrétaire parlementaire qui prend sans doute des notes.

Quand nous ratifierons la Convention sur le droit de la mer, qui renferme d'immenses dispositions sur la conservation qui nécessiteront l'intervention d'un certain nombre de ministères, j'espère que les deux groupes reviendront nous faire part de leurs recommandations. Cela nous sera utile. Un de nos collègues, M. Caccia et moi-même tentons d'obtenir que soit ratifiée la Convention sur le droit de la mer. J'imagine que cela viendra assez rapidement.

Cela dit, j'ai bien apprécié vos suggestions et j'en ai pris bonne note. Je siégeais au Comité des pêches en ma qualité de secrétaire parlementaire quand un certain nombre de mémoires nous sont parvenus mais je ne me souvenais plus de la réponse du Conseil des pêches, et je suis heureux que vous me l'ayez confirmée.

[Français]

Le président: Monsieur Dumas.

M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau, BQ): Bonjour, messieurs.

Dans la partie de votre mémoire intitulée «Aperçu», je me réjouis des remarques que vous avez faites au sujet des deux ministères qui pourraient être appelés à gérer ces AMC. Ce sont des remarques que nous avions faites nous aussi mardi. On nous a répondu à ce moment-là que cela ne devrait pas causer de problèmes. Nous étions bien d'accord sur ces deux points-là.

Maintenant, je voudrais vous poser une question. Il y a des gens du Québec qui font partie du Conseil canadien des pêches. Quelle a été la position des pêcheurs ou des dirigeants québécois?

Mme Suzanne Tremblay: Est-ce qu'ils sont concernés?

M. Maurice Dumas: Oui, est-ce qu'ils appuient ce mémoire-là?

Deuxièmement, êtes-vous entrés en contact avec le gouvernement du Québec à ce sujet?

[Traduction]

M. Patrick McGuinness: Nous n'avons pas eu de discussions avec le gouvernement du Québec. L'association provinciale québécoise s'appelle l'Association québécoise de l'industrie de la pêche. Pour l'instant, elle n'est pas membre de notre organisation. Elle a eu des difficultés financières, mais nous ne travaillons pas étroitement avec elle.

Certaines entreprises québécoises sont membres du Conseil des pêches du Canada par l'entremise d'autres organisations dont le Groundfish Enterprise Allocation Council qui est aussi membre, et c'est un secteur de la flotte. Nous comptons parmi nos membres des organisations comme Madelipêche. C'est l'une des organisations qui possèdent des usines de transformation aux Îles-de-la-Madeleine aussi bien que de gros bateaux de pêche.

Les zones de protection marine et les aires marines de conservation sont très préoccupantes. La note que vous avez devant vous a été envoyée à chacun de ces groupes, y compris au Groundfish Enterprise Allocation Council qui compte des membres au Québec et ils ont proposé des changements au libellé.

• 1220

Je peux vous confirmer, monsieur, que ce document reflète fidèlement la position du Conseil des pêches du Canada, y compris des membres qu'il compte au Québec.

[Français]

M. Maurice Dumas: Merci.

Le président: La parole est à M. Mark, et ensuite à Mme Tremblay.

[Traduction]

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Contrairement à l'opinion qu'ont exprimée certains députés, je suis d'accord pour que l'on protège les écosystèmes au Canada. Cela va de soi. Par contre, je m'oppose aux méthodes que l'on utilise pour cela.

Nos délégués nous ont signalé qu'il y avait peut-être un problème de perception, et c'est bien possible car, à l'origine, lorsque cette mesure législative a été présentée, il s'agissait d'une loi sur la protection des parcs marins. Si le secrétaire parlementaire veut bien répondre à la question, il pourra indiquer quand ce changement a été apporté et s'il est possible qu'il ne s'agisse, après tout, que d'une modification du titre.

M. Mauril Bélanger: Je suis désolé, je ne peux répondre à cette question.

M. Inky Mark: Je me demandais quand ce changement avait été apporté et quel était l'esprit initial du projet de loi, puisqu'on envisageait la protection de parcs marins...

M. Mauril Bélanger: Je ne peux répondre à votre question, monsieur, car je n'ai pas les renseignements nécessaires.

Le président: Monsieur Mark, votre question sera inscrite au procès-verbal. Nous la transmettrons aux fonctionnaires et nous leurs demanderons de nous expliquer ces modifications. Vous aurez votre réponse.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

Madame Tremblay.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le président, je voudrais d'abord indiquer que que j'aurais aimé mieux saisir l'intervention de mon ami.

Je crois avoir compris que la situation est la suivante: Pêches et Océans peut créer des zones de protection marine; Patrimoine Canada, par le biais de Parcs Canada, va pouvoir créer des aires marines de conservation; le ministère de l'Environnement, pour sa part, peut créer des réserves marines de faune. Déjà, on a trois ministères différents engagés dans la création des mêmes choses, qui peuvent se trouver physiquement au même endroit, mais qui vont être soumis à trois réglementations différentes à cause de l'engagement de ces trois ministères différents. J'avoue comprendre que la population se pose des questions.

J'ai cru entendre aussi que parce que nous n'étions plus au XIXe siècle et que nous arrivions presque au XXIe siècle, il était normal que plusieurs ministères soient mêlés aux mêmes choses.

Il est peut-être normal que plusieurs ministères aient à s'en occuper. Cependant, on aurait pu s'entendre pour dire qu'au Canada, on va étudier la carte pour déterminer, non pas un pourcentage d'eau à protéger, car cela ne fonctionne pas en termes de pourcentage, mais des écosystèmes différents. S'il y en a 9, on en aura 9; s'il y en a 29, on en aura 29. Et si éventuellement on en trouve 42, on en aura 42. Je pense que c'est ainsi que cela doit fonctionner. Il y aurait un seul ministère qui serait chargé de le faire.

Si j'ai bien compris, on nous dit qu'à Parcs Canada, on n'a pas les experts pour le faire.

M. Mauril Bélanger: Monsieur le président, est-ce que nous en sommes au débat sur le projet de loi?

Mme Suzanne Tremblay: Non, je pose une question et je veux situer le contexte dans lequel je la pose.

M. Mauril Bélanger: D'accord.

Mme Suzanne Tremblay: Ai-je bien compris qu'ils ont une double préoccupation qui s'applique, d'une part, au chevauchement et, d'autre part, au manque de compétence des gens de Parcs Canada pour prendre les décisions quant aux écosystèmes à protéger? Pouvez-vous simplement me confirmer ou m'infirmer cela?

Le président: Monsieur Stang.

M. Pierre Stang: Effectivement, madame Tremblay, vous avez raison. Vous avez exposé notre position très clairement, très brièvement et avec beaucoup de précision.

Je voudrais souligner un seul point. Bien que l'Agence Parcs Canada n'ait pas, selon nous, le personnel scientifique nécessaire, il lui serait évidemment possible de se doter d'un tel personnel. Par contre, il se trouve au sein du ministère des Pêches et des Océans une expertise massive dans le domaine océanique que Parcs Canada aurait de la difficulté à égaler, je crois.

• 1225

Je vous remercie de votre intervention parce que je crois que vous avez vraiment bien cerné le problème. C'est exactement cette situation qui nous tracasse. Merci beaucoup.

[Traduction]

Le président: J'aimerais poser quelques questions sur la version actuelle du projet de loi.

Si je comprends bien, vous préféreriez que ce projet de loi ne soit pas adopté. Vous préféreriez que ses dispositions se trouvent incluses dans la Loi sur les océans. C'est très clair., Pour ma part, je consulte le projet de loi pour trouver des précisions à certains éléments de votre mémoire.

Si j'ai bien compris le projet de loi, il y aura des aires de conservation désignées et de nombreuses mesures seront prises. Il y aura tout d'abord une étude de faisabilité, semblable à celle à laquelle vous participez. Il faudra ensuite conclure des accords fédéraux-provinciaux. Autrement dit, toute province qui refuse de participer au régime, pourra s'en abstenir; il faudra un accord fédéral-provincial. Et il ne suffira pas de désigner une aire de conservation pour que celle-ci soit établie; la proposition devra être présentée à un comité de la Chambre.

Je comprends ce que vous dites, monsieur McGuinness, car on dit au paragraphe 7.(1) que les propositions devront être déposées devant chaque chambre du Parlement, c'est-à-dire la Chambre des communes et le Sénat, «le comité de chaque chambre habituellement chargé des questions concernant les aires marines de conservation ou tout autre comité désigné par celle-ci, pour l'application du présent article». Vous dites qu'il devrait s'agir nécessairement du Comité des pêches, et je comprends cela.

Mais si vous allez plus loin dans le projet de loi, et cela répond à l'objection de Mme Tremblay, il ne peut y avoir trois ministres chargés de la même aire de conservation. Cela est dit très clairement au paragraphe 8.(1), où on peut lire:

    Les aires marines de conservation sont placées sous l'autorité du ministre en ce qui a trait à toutes les matières non attribuées de droit à d'autres ministres fédéraux.

Autrement dit, si le ministre des Pêches a déjà désigné une aire sous le régime de la Loi sur les océans, ce ministre n'aurait plus rien à voir dans l'affaire. Autrement dit, si j'ai bien compris le paragraphe 8.(1), il ne s'agit que de matières non attribuées.

M. Ted McWhinney: Le postulat est déjà énoncé.

Le président: Il faudra ensuite préparer un plan de gestion. On dit, au sujet de ce plan de gestion, au paragraphe 9.(4):

    Les dispositions du plan relatives à la pêche, l'aquaculture, la gestion des pêches et la navigation maritime et sécurité maritimes sont assujetties à l'accord du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

Autrement dit, si le ministre des Pêches et des Océans n'est pas d'accord ou si les fonctionnaires du ministère lui conseillent de ne pas accepter, de ne pas faire en sorte que les pêches ou l'aquaculture soient protégées, le plan ne peut être adopté.

On dit également au paragraphe 10.(1):

    Le ministre favorise la consultation des parties de son choix—notamment les ministres ou les organismes fédéraux ou provinciaux et les communautés côtières ou organisations autochtones touchées [...]

Au paragraphe 9(1), on dit que le ministre:

    établit un plan de gestion [de l'aire marine de conservation] traitant de la protection des écosystèmes, des modalités d'utilisation par les visiteurs et du zonage et le fait déposer devant chaque chambre du Parlement.

L'examen par les comités de chaque Chambre constitue une mesure de protection. Il y a également une garantie de ce que les groupes touchés seront consultés. Le ministre des Pêches et des Océans peut imposer un veto au plan de gestion. Les deux Chambres participent à l'examen des propositions.

Si je dis cela, ce n'est pas nécessairement pour vous convaincre de ce que la loi est le meilleur outil pour atteindre vos fins, puisque votre point de vue semble différent. Je vous fais simplement remarquer que les choses ne sont pas aussi tranchées que vous le dites. Autrement dit, ce ministre doit surmonter de nombreux obstacles pour que soit créée l'aire marine de conservation. Et même une fois cette aire désignée, il faut préparer un plan de gestion et le présenter à la Chambre, où les ministres des Pêches et des Océans peuvent en tout temps imposer leur veto. Ces plans doivent tenir compte de la pêche, de l'aquaculture, de la gestion des pêches, de la navigation en mer et de la sécurité maritime, sujets qui sont tous assujettis à une entente entre le ministre et le ministre des Pêches et des Océans.

• 1230

Je comprends que vous n'êtes pas d'accord avec ce projet de loi et que vous souhaiteriez qu'on en rédige un autre. Mais c'est une autre histoire.

Y a-t-il, dans ce projet de loi, des éléments qui pourraient être renforcés? Vous avez parlé, monsieur McGuinness, des paragraphes 5.(1) et 7.(1). Vos arguments sont valables et nous devrions en tenir compte. Monsieur Kielley, vous dites qu'il n'y a rien de récupérable dans le projet de loi. Vous ne croyez pas qu'il serait possible de le renforcer de façon à ce qu'il puisse être applicable.

M. Marc Kielley: Non, j'estime que ce projet de loi est redondant.

Je mets toutefois en doute ce que vous dites, au sujet du droit de veto du ministre des Pêches et des Océans. D'après ce que je crois savoir, l'opinion du ministre du Patrimoine canadien aurait préséance sur celle de tous les autres ministres en cas de conflit.

Le président: Mais on dit au paragraphe 9.(4):

    (4) Les dispositions du plan relatives à la pêche, l'aquaculture, la gestion des pêches et la navigation et sécurité maritimes seront assujetties à l'accord du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

Si les ministres ne s'entendent pas, rien ne se fait.

M. Ted McWhinney: C'est très clair.

Le président: De toute évidence, les deux ministres doivent donner leur accord.

M. Marc Kielley: Puis-je répondre à cela?

Le président: Bien sûr.

M. Marc Kielley: On dit par contre au paragraphe 16.(5):

    (5) Les règlements visés aux paragraphes (2), (3) et (4) l'emportent sur les règlements incompatibles pris sous le régime de la Loi sur les pêches, la Loi sur la protection des pêches côtières, la Loi sur la marine marchande du Canada, la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques, la Loi sur la protection des eaux navigables ou la Loi sur l'aéronautique.

En fait, cela confère au ministre du Patrimoine canadien des pouvoirs d'une ampleur effrayante.

M. Ted McWhinney: Les règlements découlant des lois ne peuvent outrepasser la portée de cette loi. S'il n'y a pas uniformité, ces règlements ont préséance.

M. Marc Kielley: C'est exact.

Allons un peu plus loin pour voir jusqu'où vont les pouvoirs du ministère. On peut lire, au paragraphe 16.(7), qui est intitulé «Modification par le directeur»:

    (7) Les règlements visés au présent article peuvent autoriser les directeurs à modifier, dans les circonstances et la mesure qu'ils précisent, les exigences qu'ils comportent.

Le président: Monsieur Kielley, lisez le paragraphe 16.(2):

    (2) Les règlements visés au présent article qui ont trait à la gestion ou à la protection des pêches ou qui limitent ou interdisent la pêche, l'aquaculture, la navigation maritime ou toutes autres activités liées à la sécurité maritime sont pris sur la recommandation du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

De toute évidence, ces dispositions donnent au ministre des Pêches et des Océans un droit de regard sur ces règlements, puisque

    les règlements qui ont trait à la gestion et à la protection des pêches ou qui limitent ou interdisent la pêche, l'aquaculture, la navigation maritime ou toutes autres activités liées à la sécurité maritime sont pris sur la recommandation du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

Cette disposition fait le lien avec ce qui est énoncé au paragraphe 9.(4).

M. Marc Kielley: Je n'y comprends plus rien, car si je lis le paragraphe 16.(5), je constate que c'est l'opinion du ministre du Patrimoine canadien qui prévaut. Je ne suis pas un expert en droit, mais c'est du moins ce que j'en comprends.

M. Ted McWhinney: À mon avis, c'est le ministre des Pêches qui prévaut. C'est dans son ministère qu'on trouve le plus important groupe d'experts de ce domaine au gouvernement fédéral, et ils ont bien défendu la Loi sur les océans et la Loi sur les pêches. Comme nous l'a confirmé le président, le ministère des Pêches a préséance dans toutes les questions de fond liées aux pêches.

Le président: Pardonnez-moi, mais je ne vois pas la contradiction. Ce qu'on dit dans cette disposition, c'est qu'une fois adopté un règlement sur l'aire de conservation marine, ce règlement aura préséance. Mais auparavant, sous le régime du paragraphe 16.(2), le ministre ne peut prendre de règlement sans l'accord du ministre des Pêches et des Océans. Vous comprenez?

M. Marc Kielley: Je comprends votre argument.

Le président: Une fois le règlement adopté, vous avez raison, monsieur Kielley. Mais auparavant, il y a cette...

[Français]

Mme Suzanne Tremblay: Mais, monsieur le président, vous savez très bien que si le ministère du Patrimoine canadien et Parcs Canada veulent installer quelque chose et que c'est dans la ligne du Parti libéral et du gouvernement que de le faire, le ministre des Finances n'aura qu'à signer.

• 1235

Vous avez déjà été membre du gouvernement et vous savez comment cela fonctionne.

Le président: Oui, j'ai déjà été membre du gouvernement. C'est pourquoi je sais que lorsqu'on donne un droit de veto à un ministre, ce n'est pas quelque chose qu'il exerce à la légère.

Mme Suzanne Tremblay: Cela dépend du ministre.

Le président: S'il faut tout refaire... On ne parle pas des individus, mais d'une question de principe.

Mme Suzanne Tremblay: Oui, mais les principes sont appliqués par des personnes. Je comprends les gens de se sentir échaudés. On voit que toutes les consultations qui ont été faites partout ont été bidon.

Le président: Madame Tremblay, vous faites des...

Mme Suzanne Tremblay: Non, non. On les a, les résultats. Il y a 60 personnes qui ont répondu selon les résultats qu'on a eus. Il n'y en a pas eu 3t00, comme on nous l'a dit.

M. Mauril Bélanger: On n'en est pas au débat. On a des témoins...

Le président: Ce n'est pas le débat en Chambre là.

M. Mauril Bélanger: La question sur la consultation a été posée aux témoins et ils ont donné leur réponse. Qu'on s'en tienne à cela pour l'instant.

J'aimerais passer une remarquer à l'intention de nos témoins. Je vous avoue que je suis enchanté d'entendre le Conseil canadien des pêches et l'Alliance de l'industrie canadienne de l'aquaculture nous dire ouvertement tous les deux, très fermement, qu'ils ont confiance dans les capacités du ministère des Pêches et des Océans, dans les capacités des fonctionnaires. Je trouve très réconfortant de savoir que le Conseil canadien des pêches vient nous dire ici aujourd'hui qu'il a confiance dans le travail des fonctionnaires du ministère. Je les en remercie.

Le président: Monsieur Stang.

M. Pierre Stang: Un seul point, monsieur le président, sur lequel vous pourriez peut-être m'éclairer. Selon ma lecture, les articles que vous nous avez soulignés contiennent clairement le mot «recommandation» ou «recommend». Je n'ai pas la même confiance que vous qu'une recommandation veuille effectivement dire un veto. Si le mot «veto» se trouvait dans le texte, peut-être qu'il y aurait...

On ne perd rien à essayer.

[Traduction]

Le président: Un instant.

[Français]

On a un expert juridique ici.

M. Luc Gagné (attaché de recherche auprès du comité): D'après moi, quand le Conseil des ministres est saisi d'un mémoire, ce qui est indiqué au bas du mémoire est toujours une recommandation du ministre. Il faudrait que je vérifie ce point mais, selon moi, il ne peut y avoir quelque chose de plus fort que la recommandation d'un ministre.

Le président: Toutes les recommandations sont faites par des ministres. Dans ce cas, il faudrait que deux ministres la fassent. Si c'était seulement le ministre du Patrimoine canadien, ce ne serait pas suffisant. Il faudrait qu'il y ait le ministre du Patrimoine canadien et le ministre des Pêches et des Océans. Que ce soit la recommandation ou la demande d'un seul, cela revient au même. Il faut les deux.

Mme Suzanne Tremblay: Monsieur le président, je voudrais faire un appel au Règlement. Je vous ai dit que les consultations étaient bidon. J'ai ici les chiffres. On a consulté 3t00 intervenants dans l'ensemble du pays. On a demandé le dépôt es résultats de la consultation. On nous a remis 300 feuilles de réponse dont 73 ne contenaient que le coupon-réponse. Sur les autres, il n'y avait rien. Parmi les 62 réponses obtenues par le ministère, une seule était en français.

Donc il y a eu 61 réponses en anglais et une réponse en français. C'est du moins les résultats de la consultation menée par Patrimoine Canada et dont font état les documents qu'on a obtenus en vertu de l'accès à l'information.

Donc, quand on dit que c'est une consultation bidon, on se base sur les chiffres que le ministère nous a transmis. Quant au ministère des Pêches et des Océans Canada, il a aussi admis que sa consultation était plutôt bidon.

Celle qui avait été menée en janvier 1997 avait aussi été bidon. Comme il n'y avait eu que 5 p. 100 de réponses, ce n'est certainement pas une consultation qu'on peut considérer exhaustive. Alors, qu'on cesse de nous faire croire qu'on consulte les gens lorsqu'en fait, on ne les consulte pas.

M. Mauril Bélanger: Monsieur le président, je fais appel au Règlement. Sommes-nous en période de débat?

Mme Suzanne Tremblay: Ce n'est pas une période de débat. J'ai posé une question et on m'a accusée de faire les choses à tort et à travers.

Le président: Madame...

Mme Suzanne Tremblay: C'est faux. Je fais un autre appel au Règlement.

Le président: Excusez-moi, madame Tremblay. S'il vous plaît, madame Tremblay.

• 1240

Je pense qu'on vient ici entendre des témoins. Là, vous faites des déclarations qu'aucun représentant officiel du ministère ne peut contredire parce qu'il ne s'en trouve pas ici. Vous faites des déclarations basées sur des statistiques qui n'ont rien à voir avec ce dont on discute ici. C'est purement une opinion que vous exprimez quand vous dites que les consultations sont bidon.

Du reste, M. McGuinness, lui, vous a répondu. Vous n'avez pas aimé ce qu'il a dit, mais il s'est dit tout à fait satisfait de la consultation menée par le ministère. Si vous avez des preuves à l'appui, vous pourrez produire, au moment des débats en Chambre, tous les chiffres démontrant que le ministère a fait des consultations bidon. Mais je ne pense pas que cela fasse avancer nos discussions d'aujourd'hui de faire un grand débat là-dessus.

Nous ne sommes pas ici pour cela, mais bien pour écouter ces témoins. S'ils pensent qu'il n'y a pas eu de consultation, ils nous le diront. L'autre jour, c'était le temps d'en discuter avec les représentants officiels du ministère. Si vous voulez les faire revenir pour en discuter, pour savoir si, oui ou non, il y a eu des consultations bidon, eh bien, on le fera avec plaisir.

[Traduction]

Monsieur McGuinness.

M. Patrick McGuinness: Oui, j'ai deux observations à faire.

Premièrement, nous sommes d'accord avec votre interprétation de ces dialogues quant aux freins et aux contrepoids que comporte le projet de loi pour l'industrie de la pêche. Quand je dis que nous avons eu de bonnes consultations, j'entends surtout par là que nous avons eu de bonnes consultations avec les fonctionnaires de Patrimoine Canada, ici à Ottawa, lors de la rédaction du projet de loi. Je l'ai dit, nous avons assez bien identifié les mesures qui constituent des sauvegardes pour le ministre des Pêches et des Océans et pour ses fonctionnaires, dans ce projet de loi. Nous croyons toutefois qu'on aurait dû aller plus loin encore et inscrire ces dispositions dans la Loi sur les océans.

Pour ce qui est du paragraphe 16.(2), nous croyons qu'il est bien rédigé. L'idée, c'est qu'une fois établie l'aire marine de conservation, c'est au ministre des Pêches et des Océans, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par le Cabinet, de prendre des règlements en matière de pêche—par exemple sur la taille des engins—tout en respectant les objectifs de l'aire marine de conservation. Enfin, c'est sans doute la seule façon de rédiger cette disposition, car seul le ministre des Pêches et des Océans peut prendre des règlements sur l'exploitation des pêches et des océans. Je puis vous assurer que nous nous opposerions à ce que le ministre du Patrimoine canadien ou un autre ministre se voie conférer les pouvoirs nécessaires pour prendre des règlements sur la façon dont nous travaillons. Cela relève du ministre des Pêches et des Océans, et c'est ce que l'on dit dans la disposition.

Le président: Merci beaucoup d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer. Nous apprécions votre opinion. Vous avez fait valoir vos arguments de façon très claire et convaincante, et nous vous en remercions.

La séance est levée.