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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 16 octobre 1997

• 1129

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)): La séance est ouverte.

Je crois qu'il y a eu un petit changement de plans. Soyez la bienvenue à notre comité, Ginny Guiboche, et vous aussi, Miguel. Au lieu du groupe de travail ou de la table ronde auquel nous nous attendions, j'ai pensé que nous vous consacrerions les 45 ou 60 premières minutes.

• 1130

Nous sommes ici pour avoir votre avis sur ce que devrait être le contenu du prochain budget. Voici une copie de la déclaration du ministre; avec les 15 secondes dont vous disposiez, vous n'avez probablement pas eu le temps de lire. En tout cas, il est à votre disposition, et si vous voulez soumettre d'autres éléments d'information au comité après cette réunion, n'hésitez surtout pas à le faire.

Je vous signale, pour votre gouverne, qu'autour de cette table il y a un grand nombre de nouveaux députés qui sont tout aussi nerveux que vous l'êtes—du moins certains d'entre eux. Après votre exposé, ils vous poseront une série de questions. Essayez de vous en tenir à cinq minutes. Si vous les dépassez, pas de problème; si vous parlez moins longtemps, pas de problème non plus.

Le comité a l'intention d'entendre autant de Canadiens que possible afin de recueillir leurs idées sur les domaines dans lesquels des changements s'imposent, sur ceux dans lesquels d'autres investissements sont possibles, et de recueillir aussi leurs commentaires sur les résultats obtenus jusqu'à présent.

Je vous souhaite donc la bienvenue en tant que représentante du Saskatchewan Council for International Co-operation. Vous avez la parole.

Mme Ginny Guiboche (présidente, Saskatchewan Council for International Co-operation): Je tiens tout d'abord à vous remercier de nous offrir aujourd'hui l'occasion de prendre la parole devant vous. J'espère bien que l'absence de tous ces autres groupes ne signifie pas qu'ils pensent que vous n'allez pas utiliser les idées qui vous seront présentées. C'est ce qui s'est produit, je crois, l'an dernier et a frustré certains.

Quoi qu'il en soit, je commencerai par vous présenter certaines de nos idées. Le gouvernement fédéral a réalisé des progrès sur la voie de la réduction du déficit. C'est indiscutable. Pour y parvenir, il a cependant abdiqué sa responsabilité à l'égard de la population et a laissé le soin au secteur privé de fixer les règles et les normes, non seulement pour les activités commerciales et les services sociaux au Canada, mais aussi pour le fonctionnement de l'ensemble de l'économie, nous semble-t-il.

Le Saskatchewan Council for International Co-operation n'est pas partisan de la création d'une nation ou d'un monde dans lequel les riches continuent à s'enrichir et les pauvres, à s'appauvrir. Le gouvernement a, semble-t-il, donné la preuve qu'il n'avait pas la volonté nécessaire pour lutter contre cette tendance et il a laissé le secteur privé libre de contrôler l'ensemble de notre économie.

C'est aujourd'hui la Journée mondiale de l'alimentation; elle marque la fondation de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, la FAO, à Québec, en 1945. Cette année, le thème de cette journée porte essentiellement sur l'élimination de la faim et de la pauvreté au Canada et à l'étranger, grâce à la réciprocité des échanges commerciaux. Cette réciprocité signifie qu'un prix équitable est versé aux producteurs et qu'ils sont traités de manière équitable dans leur milieu de travail.

Aujourd'hui, le commerce mondial est régi par des institutions telles que le GATT et l'Organisation mondiale du commerce, qui sont toutes deux surtout considérées comme des agents du monde développé.

En instituant des politiques commerciales qui favorisent les pays riches à l'insu et sans l'approbation des Canadiens, le gouvernement canadien joue un rôle majeur dans la négociation de l'Accord multilatéral sur l'investissement, l'AMI

Les parties à cet accord sont toutes membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques, mais il est clair que l'accord lui-même aura des effets qui se feront sentir très au-delà de ce groupe de nations et qu'il constitue un document valable pour l'ensemble de l'économie mondiale, alors qu'il a été écrit avec la seule participation des nations les plus prospères du monde, à l'exclusion du monde en développement, qui représente la majorité de la population mondiale.

Des accords de ce genre permettent aux sociétés transnationales—certaines d'entre elles versent des cotisations supérieures au PNB de la Nouvelle-Zélande et aucune n'a de valeur représentative sur le plan national ni de loyauté à l'égard de quiconque—d'être plus libres de déplacer leurs capitaux et de gérer les marchés sans restriction gouvernementale. Ces sociétés assurent leur avantage concurrentiel en s'implantant dans les régions où il existe un vaste bassin de main-d'oeuvre à bon marché et où les lois de protection de l'environnement sont faibles, ce qui leur permet de n'en faire qu'à leur tête.

Au Canada, l'AMI épargnera aux sociétés l'obligation d'acheter sur le plan local ou de respecter leurs obligations à l'égard des travailleurs locaux, des consommateurs ou de l'environnement. Il empêchera le Canada de restreindre l'investissement étranger, et il le privera de son droit de protéger les industries culturelles.

Nous ne voyons vraiment pas en quoi cet accord améliorera le bien-être du Canadien moyen. Les seuls bénéficiaires seront les mégasociétés.

En fait, le SCIC presse le gouvernement du Canada de prendre position en faveur de la population et d'assumer la direction d'un mouvement en faveur de l'institution de la taxe Tobin sur la spéculation sur les devises étrangères.

• 1135

Nous espérons que le ministère des Finances reconnaîtra que la spéculation sur les devises étrangères ne crée aucune valeur ajoutée pour les nations intéressées et contribue surtout à l'instabilité des devises et à l'augmentation des taux d'intérêt. Du moins cela permettait-il d'encourager les grands financiers à investir à long terme plutôt qu'à spéculer, car les seuls à tirer profit de cette spéculation sont les spéculateurs eux-mêmes.

La taxe Tobin, conçue par James Tobin, prix Nobel d'économie, part du principe qu'il suffirait d'une taxe de 0,25 p. 100 par transaction pour décourager une grande partie des spéculateurs et pour recueillir environ 300 milliards de dollars US dans le monde, même en cas de ralentissement des opérations de change.

Il suffirait que la plupart des nations s'entendent pour imposer cette taxe. Celle-ci serait déduite automatiquement par l'institution qui effectuerait la transaction, de la même manière que l'on perçoit aujourd'hui des frais de service. Des campagnes internationales en faveur de la taxe Tobin ont déjà été lancées au Canada et dans le reste du monde.

Cette idée nous paraît intéressante. La part qui reviendrait au Canada serait de l'ordre de 7,5 millions de dollars par an. Ces fonds s'ajoutant aux augmentations de dépenses actuellement prévues par le gouvernement, devraient permettre de satisfaire aux besoins de première nécessité de la population au Canada et d'augmenter la contribution de notre pays à la lutte contre la pauvreté mondiale par le biais du développement international.

La triste vérité est que l'aide officielle canadienne à l'APD n'a jamais été aussi faible en 30 ans; elle est en effet tombée à 0,31 p. 100 du PNB en 1996. Cela signifie que le Canada est passé du cinquième au onzième rang pour le montant consacré à l'APD.

L'aide aux pays les moins développés est tombée de 0,14 p. 100 du PNB en 1992-1993 à 0,08 p. 100 en 1995-1996, pourcentage le plus bas jamais atteint. On a vraiment l'impression que le Canada a renoncé à la poursuite de son objectif, qui est, selon le livre rouge, de ramener l'APD au niveau de 0,7 p. 100 du PNB, objectif fixé par les Nations unies. En fait, les coupures imposées à l'APD étaient disproportionnées par rapport aux coupures auxquelles les autres ministères fédéraux ont été soumis: 40 p. 100 de moins pour l'APD, alors que la moyenne d'ensemble est de 23,5 p. 100 pour les programmes fédéraux.

Selon sa propre publication, «Le Canada dans le monde», le gouvernement canadien a entendu l'appel à une conception plus large de la sécurité, dans laquelle le développement durable est une condition préalable à la sécurité des êtres humains. Il a reconnu le rôle de la coopération dans le domaine du développement international pour assurer cette sécurité. Cette conception plus large est fondée sur la perception des menaces qui pèsent sur les Canadiens à cause de la détérioration de l'environnement, et de l'existence d'un monde de plus en plus hostile dont l'avenir est grevé par les migrations de masse, le crime, la maladie, les problèmes environnementaux, la surpopulation et le sous-développement.

Pour le gouvernement, l'interdépendance signifie que notre bien-être et notre intérêt national sont inextricablement liés au développement mondial. J'espère que cette interdépendance sera reconnue dans le budget actuel, car on n'a vraiment jamais reconnu que cette sécurité commune est effectivement liée à notre budget d'APD.

Ces dernières années, le gouvernement s'est vanté d'avoir pris des décisions peu populaires mais courageuses dans le cadre des efforts de rétablissement fiscal du Canada. Vous entendiez ainsi réduire les programmes sociaux et les transferts aux provinces dans le domaine de la santé et de l'éducation, et augmenter les impôts. Le présent gouvernement a même maintenu d'autres décisions prises par l'impopulaire Brian Mulroney, telles que la TPS et la participation du Canada à l'ALENA.

Aujourd'hui, le SCIC vous demande de prendre des décisions vraiment courageuses: ne faites pas assumer le coût des restrictions financières à ceux d'entre nous qui n'en ont pas les moyens; défendez les petits et luttez contre l'élite que constituent ceux qui détiennent le pouvoir dans le monde; exposez les négociations de l'AMI à un examen national et instituez une libre discussion du coût et des avantages de la participation de notre pays à cette entente; soyez le premier gouvernement du monde à apporter son soutien aux mouvements internationaux en faveur de l'adoption de la taxe Tobin sur la spéculation sur les devises étrangères; et renouvelez l'engagement du Canada en faveur de la lutte contre la faim et la pauvreté dans le monde par le biais du développement international en annulant les coupures prévues pour l'APD en 1998-1999, et en adoptant l'objectif reconnu par les Nations unies qui consiste à dépenser 0,15 p. 100 de notre PNB, dans les 48 pays les plus nécessiteux du monde.

J'apprécie beaucoup cette occasion d'exprimer nos vues. Je suis maintenant prête à répondre à vos questions.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Guiboche.

Nous allons consacrer cinq minutes aux questions; monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Je suis totalement d'accord avec vous pour dire que l'AMI devrait être soumise à un examen attentif. Il est indispensable de savoir à quoi nous nous engageons et ce que seront les répercussions.

• 1140

Ce que je dis est peut-être un peu naïf, car, pour l'instant, nous ne sommes certainement pas bien informés de ces questions au Canada. Je ne sais en effet pas exactement où en sont les négociations ni si on approche d'une décision qui pourrait être critique pour l'avenir du Canada. Il est indispensable que nous sachions quels sont les avantages et les inconvénients de l'AMI.

Vous dites que le Canada devrait reprendre son rôle dans les pays en développement pour y nourrir les pauvres, etc. Je n'ai rien contre l'idée. En revanche, je ne vois pas comment le gouvernement pourrait jouer un rôle important dans ce domaine. Je vois plutôt le secteur privé—je pense à la Canadian Foodgrains Bank, au Mennonite Central Relief Committee et à d'autres organismes du même genre qui apportent une aide directe à la population. Cela me paraît une méthode préférable à l'aide de gouvernement à gouvernement. Lorsque l'on considère l'investissement de gouvernement à gouvernement, on a tendance à penser qu'il porte sur des domaines autres que l'alimentation, la santé et le bien-être de la population du pays en cause. J'aimerais donc que les choses soient présentées d'une manière un peu différente dans votre exposé.

En dehors de cela, il y aura toujours des différences... «Les grandes sociétés sont la racine de tous les maux», ou autres choses du même genre. Certes, vous avez dit beaucoup de choses convaincantes, mais ce que je dis là est plus une remarque qu'une question.

Mme Ginny Guiboche: Le budget du Programme d'APD comprend effectivement de l'argent qui est versé aux ONG privées travaillant dans les pays en développement. Cela inclut le budget de ces organisations qui a considérablement diminué à cause de toutes ces coupures, et bien que ce budget comprenne l'aide de gouvernement à gouvernement, nous constatons également l'effet sur les ONG qui sont de moins en moins capables de faire un travail efficace dans les pays en développement parce que leur budget est amputé presque chaque année.

Beaucoup de gens ont des réserves à l'égard de l'AMI à cause de l'atmosphère de secret qui l'entoure. Il est absolument indispensable que les Canadiens puissent faire un choix et avoir un apport dans ce domaine avant que l'AMI ne devienne une politique établie. C'est un accord qui est lourd de conséquence.

Il n'est pas nécessaire de songer uniquement au Canada. Il faut aussi songer à tous les autres pays. Si les pays en développement n'ont pas leur mot à dire dans cet accord parce qu'ils n'ont pas atteint le stade de développement approprié, ils n'auront plus aucune liberté de choix lorsqu'ils y parviendront. Ils vont simplement devenir des zones de traitement des exportations dont les habitants seront traités avec peu d'égards. Je ne vois pas en quoi cela peut améliorer l'avenir du Canada. Lorsque les gens sont malheureux chez eux, cela finit toujours par des troubles civils. Le nombre des réfugiés augmente et le Canada est censé en accueillir plus, ce qui irrite également beaucoup de gens. Il y a interaction et interdépendance entre les pays. Il n'est pas possible d'en faire abstraction et de ne penser qu'à ce qui se produit à l'intérieur de nos frontières.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Perron.

M. Gilles-A. Perron (Saint-Eustache—Sainte-Thérèse, BQ): Merci, madame, et bonjour.

Si je vous ai bien compris, madame, vous avez dit que vous n'étiez pas d'accord avec le gouvernement parce qu'il réduit les programmes sociaux. Il diminue en effet de plus de 50 p. 100 les transferts aux provinces destinés à ces programmes sociaux. Comme M. Martin l'a annoncé hier, lorsque le gouvernement a l'intention, quand il gagnera de l'argent, de réinvestir à parts égales, c'est-à-dire que 50 p. 100 de l'argent sera utilisé pour rembourser ses dettes et 50 p. 100, pour créer de nouveaux programmes.

Pensez-vous que le gouvernement devrait rendre aux gouvernements provinciaux l'argent récupéré grâce aux coupures afin de leur permettre de gérer leurs propres programmes sociaux?

Mme Ginny Guiboche: Je crois qu'il serait bon que les programmes sociaux soient gérés par les provinces. Celles-ci connaissent bien leurs besoins locaux. Elles seraient mieux placées pour allouer les fonds, en particulier si les membres des collectivités sont consultés. Il serait assez difficile pour le gouvernement fédéral de bien faire ce travail dans chaque collectivité du pays.

M. Gilles-A. Perron: Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je suis le seul député de Regina présent et je vous souhaite la bienvenue dans notre bonne ville de Regina et dans la province de la Saskatchewan. Je m'associe à mon collègue de Battlefords—Lloydminster pour exprimer le voeu que votre séjour sera fructueux et agréable. D'après ce que je comprends, le beau temps sera de la partie aujourd'hui.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Il est certainement meilleur que celui qu'on nous a offert à Vancouver.

• 1145

M. Lorne Nystrom: Je tiens également à vous souhaiter la bienvenue à notre comité, ce matin.

Je tenais à vous dire qu'hier, j'ai signé une motion d'initiative parlementaire pour que le Parlement envisage d'imposer les transactions financières internationales. Il s'agit là d'un projet de loi d'initiative parlementaire parmi beaucoup d'autres. Ces projets ne parviennent pas toujours au stade du débat à la Chambre, mais en tout cas, celui-ci figurera au Feuilleton. Il offrira l'occasion de faire valoir l'intérêt que présente l'examen de la question du point de vue canadien; il se peut donc que ce projet soit débattu.

Comme les projets de loi d'initiative parlementaire sont fort nombreux, nous tenons ce que nous appelons une loterie au cours de laquelle un certain nombre de projets sont choisis de temps à autre et sont présentés à la Chambre. En tout cas il y en aura un de déposé lorsque la prochaine session parlementaire s'ouvrira, la semaine prochaine.

Je voulais vous demander de nous donner plus de détails sur vos idées concernant la taxe Tobin et sur la manière dont nous devrions nous attaquer à la question et la structurer. Il faut, bien entendu, que ce soit une entreprise internationale. Il ne suffit pas que deux ou trois pays adoptent cette taxe, car il y aurait une fuite immédiate des capitaux. Pourriez-vous préciser vos idées sur une taxe Tobin et sur ce que vous voudriez que les députés que nous sommes fassent pour examiner au moins cette proposition? Comme n'importe quelle autre idée, il faudra peut-être attendre longtemps pour qu'elle porte ses fruits.

Le Parti libéral avait promis l'assurance-santé dès 1919, mais elle n'est devenue une réalité dans notre pays que dans les années 1960. Espérons que cela ira beaucoup plus vite dans le cas qui nous intéresse, mais avez-vous des conseils à donner au comité?

Mme Ginny Guiboche: Je crois que la présentation d'un projet de loi d'initiative parlementaire est une très bonne façon de susciter un débat, car il faut que les gens sachent de quoi il s'agit avant d'obtenir un soutien important.

Même si nous sommes le premier pays à le faire, nous ne perdrons vraiment pas d'argent si les gens ne spéculent pas sur notre monnaie. Je ne vois pas en quoi notre développement à long terme en souffrirait. Les seuls à qui la spéculation fait gagner de l'argent sont les spéculateurs eux-mêmes.

Donc, si nous instituons la taxe Tobin et percevons un droit, il nous est loisible de percevoir le double de 0,25 p. 100, ce qui signifie que le pays d'origine de la spéculation qui n'applique pas la taxe Tobin, ne constituera pas un abri fiscal puisqu'on sera obligé d'y payer le double de la taxe au lieu de la taxe qui serait normalement payée à chaque pays où la spéculation a eu lieu.

Comprenez-vous ce que je veux dire?

Donc, même si, au départ, il n'y a pas de coopération entre un groupe important de pays, je crois que cette coopération deviendra inévitable car elle leur permettra de gagner beaucoup d'argent. Le gouvernement pourrait s'en sortir fort bien et je ne pense pas qu'il perde quoi que ce soit à instituer une telle taxe.

M. Lorne Nystrom: Ma seconde question a un caractère plus général; elle a trait à notre aide publique aux pays en développement, etc. Quel pourcentage de notre PNB pensez-vous que nous devrions consacrer à l'APD?

En périodes de dépression ou de récession, les pays ont tendance à se replier sur eux-mêmes. Comme vous l'avez dit, notre budget a été réduit, et la même chose est arrivée dans la plupart des autres pays. Comme M. Martin l'a dit hier, nous en sommes aujourd'hui au stade où notre budget est sur le point d'être équilibré, encore que notre dette nationale demeure énorme. Mais l'Europe de l'Ouest est dans une situation analogue, et les Américains aussi.

Au début du nouveau chapitre que représente notre entrée dans un siècle nouveau, un millénaire nouveau, que devrait-être, selon vous, notre objectif, compte tenu de notre richesse relative? À votre avis, quel devrait être l'objectif du monde développé en ce qui concerne ses obligations à l'égard du monde en développement?

Mme Ginny Guiboche: Je crois que 0,7 p. 100 du PNB est un but louable.

M. Lorne Nystrom: Oui.

Mme Ginny Guiboche: Franchement, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de continuer à faire constamment des coupures budgétaires. Je crois que si les grosses sociétés étaient imposées de manière équitable, cela nous permettrait d'équilibrer nos finances. Il n'est pas nécessaire de chercher constamment de nouveaux moyens d'effectuer des coupures.

Le budget de l'APD contient un certain nombre de choses qui ne devraient pas y figurer. Par exemple, ACDI Inc. n'a pas sa place dans ce budget. Ce n'est pas du développement, c'est du commerce.

On a également inclus dans le budget de l'APD les droits d'établissement pour les réfugiés qui viennent au Canada. Cet argent n'est pas dépensé pour le développement outre-mer; il sert à aider ces personnes à s'établir au Canada, alors que cela relève des programmes des services sociaux, des programmes fédéraux. Nous cachons tout cela pour faire croire que nous donnons plus que ce que nous faisons réellement, car cela n'a vraiment rien à voir avec le développement.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Nystrom, merci.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, madame Guiboche, d'avoir accepté d'être des nôtres ce matin.

Nous sommes un pays relativement petit dans un environnement qui prend des dimensions de plus en plus mondiales. Je crois que le défi qui s'offre à nous est de savoir comment jouer un rôle ou comment maintenir une solide position de puissance moyenne, capable de susciter des changements et d'exercer une influence sur les politiques au plan international.

Un phénomène international s'est produit, celui du déclin du rôle effectif que l'État-nation joue dans l'établissement des politiques et des orientations. Cela est dû à la mondialisation. La technologie a joué un rôle important sur ce plan.

• 1150

Je crois qu'il est très important de tenir compte du fait, qu'il s'agisse de la taxe Tobin ou de négociations telles que celles de l'AMI, que presque tout se passe ou est discuté dans des forums internationaux, qu'il s'agisse de l'OCDE ou d'une organisation commerciale, ou encore, selon le type de politiques, de l'ONU.

En ce qui concerne l'AMI, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il faudrait plus largement consulter les Canadiens lorsqu'il s'agit de quelque chose d'aussi important que cet accord. Pourtant, je ne crois pas nécessairement, comme vous le faites, que cet accord est, par définition, quelque chose de mauvais. Je crois qu'à long terme, il peut être avantageux pour tous les participants. Il comporte une clause d'accession pour les pays en développement. Il est possible de le faire beaucoup plus rapidement par l'intermédiaire de l'OCDE que par celui de l'OMC, qui prend beaucoup plus de temps à cause des écarts et des divergences d'intérêt des pays qui en font partie, ainsi que de leurs situations respectives.

Je crois que tout ce que nous faisons... et même dans la négociation de la taxe Tobin, comme le craint M. Nystrom, il est presque indispensable de le faire ou d'envisager de le faire dans le cadre de la participation à des forums internationaux avec nos partenaires commerciaux. Autrement, nous pénaliserions en fait certains intérêts canadiens.

Vous disiez également que les seuls bénéficiaires sont les commerçants ou les spéculateurs. Dans notre pays, nous avons un secteur financier assez solide qui emploie beaucoup de gens, et je ne pense pas qu'il serait raisonnable de prendre unilatéralement une décision au sujet de la taxe Tobin sans discuter avec les membres de ce secteur des conséquences pour leurs activités et pour leur compétitivité sur le plan international, qui ont pris plus d'importance.

En ce qui concerne l'aide, il nous incombe de collaborer avec les pays en développement qui ont moins de chances que nous n'en avons eu et de les aider. Une des meilleures façons de le faire est d'utiliser les échanges commerciaux et de leur offrir la possibilité de participer à la croissance économique. À l'exception de l'aide alimentaire directe, un des facteurs qui rebutent certains de ces pays est que si cette aide n'est pas fournie de manière appropriée, on risque parfois de provoquer une inflation du taux de change dans ces pays et de rendre leurs produits moins compétitifs sur le plan international, ce qui entrave encore plus leur participation aux activités des marchés internationaux et réduit les possibilités de création de richesse chez eux. Il faut donc que nous structurions cette aide, ou toute autre forme d'aide, avec beaucoup de prudence, afin d'éviter ce phénomène.

Dans le contexte postdéficit actuel au Canada, nous sommes placés dans la situation très enviable de devoir décider de ce que nous allons faire de notre excédent. Certains pensent que nous devrions en faire profiter les consommateurs et les petites entreprises grâce à des dégrèvements d'impôt afin d'essayer de stimuler l'économie, et en particulier, d'essayer d'éliminer le chômage grâce à la réduction des charges sociales. C'est ce que recommande notre parti. Il est favorable à la réduction de ces charges, en particulier des taxes au titre de l'assurance-emploi, qui frappent en fait les emplois eux-mêmes.

En ce qui concerne les dépenses, ce sont les provinces qui ont en partie fait les frais de l'élimination du déficit. En effet, en particulier au Canada Atlantique dont je viens, les dernières années ont été terriblement difficiles. Nous n'avons pas une assiette fiscale locale suffisante pour combler la différence et cela a eu de fortes répercussions sur les soins de santé, l'éducation et les programmes sociaux, ce qui a été très dur pour beaucoup de personnes.

Vouliez-vous dire que ce sont les provinces qui sont encore les mieux à même d'appliquer les décisions en matière sociale au Canada?

Mme Ginny Guiboche: Oui. Certes, l'influence et l'avis des autorités fédérales comptent, mais je crois que les provinces méritent d'assumer la responsabilité des programmes.

M. Scott Brison: En ce qui concerne l'AMI, j'ai une seule question à poser. Quelle formule de consultation voudriez-vous voir adopter au Canada au sujet de cet accord?

• 1155

Mme Ginny Guiboche: Je voudrais qu'on organise des réunions dans nos grandes villes, et je voudrais également que chaque province puisse offrir au moins une occasion à ses habitants de s'exprimer, de manière à ce que personne ne se sente lésé. Il faut s'assurer que personne n'est exclu.

À propos de ce que vous disiez au sujet des banques, celles-ci réalisent des profits records, et si elles perdent un peu d'argent parce qu'il ne leur est pas possible de spéculer sur le marché des devises... je ne vois pas quel effet cela pourrait avoir sur elles.

En voici un exemple. À Regina, la Banque de Montréal a récemment fermé deux de ses succursales. La Banque Royale en a fermé une. Tout ce que font ces banques, c'est de mettre des gens au chômage. Et pour quelle raison? Elles gagnent énormément d'argent. Il n'y avait pas vraiment de raison de fermer ces succursales.

Je constate que les banques vous disent toujours qu'elles vont perdre de l'argent si vous faites telle ou telle chose. Je ne vois pas pourquoi nous devrions laisser le soin au secteur privé de contrôler le destin de notre nation.

Voilà essentiellement ce qui se produit dans le cas de cette AMI. Les grosses sociétés dictent maintenant au gouvernement ce qu'il doit faire.

En ce qui concerne l'APD, vous avez dit que l'aide directe augmentait les taux d'intérêt, etc...

M. Scott Brison: Les taux de change.

Mme Ginny Guiboche: ... pour les autres pays. L'APD, fournie par l'intermédiaire des ONG, ne fait pas cela. Ces organisations peuvent effectuer le travail nécessaire dans un pays par l'intermédiaire des organisations qui sont leurs partenaires. Il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse d'une aide directe au pays. Les budgets des ONG ont été considérablement réduits.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Au nom des personnes assises de ce côté de la table, je vous remercie d'être venue ce matin.

J'ai entendu parler de la taxe Tobin, mais je dois avouer que j'ignore tout de celle-ci. Je précise que lorsque vous parlez des banques, vous évoquez un sujet qui suscite l'hostilité unanime de tous les Canadiens à l'égard de ces établissements.

Ce qui m'intéresse plus c'est ce que vous avez à dire... En Ontario, il y a une dizaine d'années, nous avions une taxe sur la spéculation foncière parce que le marché immobilier était très dynamique. Bien sûr, le grand problème était que... Cette taxe n'existe plus aujourd'hui car il était absolument impossible de l'appliquer. Il est très difficile de faire la différence entre un spéculateur et une personne qui achète légitimement un bien immobilier. Cela m'amène donc à vous poser la question suivante—mon approche est quelque peu anecdotique—dans le cas d'une transaction, comment faire la différence entre une transaction spéculative selon l'interprétation de la taxe Tobin et une transaction légitime à d'autres égards? Ou s'agit-il simplement d'une taxe générale?

Mme Ginny Guiboche: Vous voulez dire, dans le cas de personnes qui font du change parce qu'elles veulent se rendre à l'étranger?

M. Roger Gallaway: Ce serait certainement une raison, mais je pense aussi au cas d'une société qui le ferait pour des raisons commerciales légitimes.

Mme Ginny Guiboche: Au départ, une taxe de 0,25 p. 100 ne dissuaderait pas les gens de faire des affaires. Elle n'aurait eu d'effet que pour les personnes qui veulent spéculer sur des sommes importantes, car la taxe influerait alors sensiblement sur leurs profits. Pour les personnes qui font du change dans le cadre de leurs activités commerciales, une taxe de 0,25 p. 100 n'aurait guère d'effet.

M. Roger Gallaway: Je ne veux pas vous faire dire ce que vous ne dites pas, mais selon vous, il s'agirait tout simplement d'une taxe de 0,25 p. 100 imposée pour tout échange de devises.

Mme Ginny Guiboche: Oui.

M. Roger Gallaway: Appeler cela une «taxe sur la spéculation» ne serait donc pas juste. C'est une taxe toute simple, un point c'est tout.

Mme Ginny Guiboche: En effet. Essentiellement, cela n'aurait pas d'effet dissuasif sur les personnes qui veulent changer de l'argent pour des raisons légitimes. On pourrait fixer un plafond tel que les personnes qui changent de très petites sommes d'argent ne seraient pas touchées, car il n'y aurait aucun avantage à percevoir une taxe de 0,25 p. 100 sur 1 000 $.

M. Roger Gallaway: Étant donné que 60 à 70 p. 100 des Canadiens vivent très près de la frontière, ne pensez-vous pas que cela inciterait les gens à traiter avec des établissements financiers américains?

Mme Ginny Guiboche: Pour quoi faire?

M. Roger Gallaway: Pour leurs opérations bancaires.

Mme Ginny Guiboche: Pour leurs opérations bancaires? Je ne crois pas que les gens soient prêts à accepter l'inconvénient que présente l'obligation de changer constamment de l'argent en dollars américains ou en dollars canadiens pour leurs dépenses au Canada. Les gens seront peut-être simplement obligés de payer plus s'ils changent de l'argent au Canada, car ils ne pourraient pas se rendre constamment aux États-Unis.

M. Roger Gallaway: Je songe au sud de l'Ontario, où je vis. Il y a là huit millions de personnes qui vivent à 60 minutes, au maximum, de la frontière. Cela représente une proportion importante de la population du Canada.

Mme Ginny Guiboche: Je ne pense pas qu'il soit vraiment commode d'être constamment obligé de se rendre aux États-Unis pour ses opérations financières.

• 1200

M. Roger Gallaway: Ce que vous proposez, c'est donc que toutes les personnes qui échangent des devises soient obligées de payer la taxe.

Mme Ginny Guiboche: Nous pourrions fixer un plafond en deçà duquel les gens ne seraient pas obligés de payer cette taxe, car les personnes qui changent de petites sommes d'argent pour voyager ne sont pas des spéculateurs.

M. Roger Gallaway: D'accord, merci. C'est tout ce que j'ai à dire.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Iftody, il nous reste suffisamment de temps pour une brève question.

M. David Iftody (Provencher, Lib.): On m'invite à poser ma question au moment précis où Miguel se réveille.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Cela ne fait rien. Miguel peut participer. Nous n'avons pas d'objection.

M. David Iftody: Je vous remercie vivement d'être venue nous rencontrer aujourd'hui, madame Ginny Guiboche.

Au cours des discussions qui ont précédé votre exposé, nous parlions des organisations non gouvernementales. Les organisations canadiennes m'intéressaient naturellement au premier chef. Je vous ai dit que j'ai travaillé avec des groupes autochtones pendant de nombreuses années, et ceux qui connaissent le centre-ville de Regina et de Winnipeg savent que beaucoup de ces autochtones y ont des problèmes. J'aurais aimé qu'on en parle un peu plus. Peut-être ai-je mal compris les objectifs de votre organisation.

Avant de poser mes questions—j'adopterai une perspective différente—je dois préciser que, l'an dernier, j'ai passé un certain temps en Europe centrale et en Europe de l'Est. J'espère retourner en Roumanie. Mon grand-père a émigré de ce pays. Il est venu ici il y a une centaine d'années et s'est installé dans l'ouest du Manitoba. J'ai passé un certain temps en Roumanie où j'ai participé à des projets d'aide au développement.

J'ai rencontré l'ambassadeur roumain la semaine dernière, et ce qui m'a frappé au cours de mes conversations avec lui ainsi, bien sûr, qu'avec les responsables là-bas—j'espère rencontrer également des gens en Bulgarie pour parler de ces questions—ils s'intéressent beaucoup aux possibilités d'investissement.

La Roumanie, par exemple, fait de très gros efforts pour entrer dans l'Union européenne. L'aide fournie par l'Union européenne prend la forme d'une aide à l'infrastructure et d'investissements. L'aide que les Roumains attendent du Canada est celle qui est accordée par l'intermédiaire de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international et d'autres organismes de ce genre. La nature de l'aide semble avoir changé, ou en tout cas considérablement évolué, au cours des dernières années. J'ai l'impression que ce que ces gens-là recherchent, c'est le genre d'aide que fournit la Société pour l'expansion des exportations. Voilà la première chose que j'avais à dire.

Ma seconde observation est liée à ce qui précède. Je ne voudrais pas trop entrer dans le détail car j'ai une autre question à poser.

Nous avons annoncé l'autre jour que pour la première fois en 27 ans, le Canada n'a pas été obligé d'emprunter sur les marchés internationaux pour payer ses dettes. Selon votre proposition, il y aurait une taxe supplémentaire de sept milliards de dollars par an, ce qui, à mon avis, compliquerait les choses en ce qui concerne le déficit courant. Je sais bien que la taxe de 0,25 p. 100 est minime, mais je voudrais vous demander pourquoi votre question laisse entendre que le libre mouvement des capitaux est une chose mauvaise en soi. Ne pensez-vous pas que le Canada et les Canadiens en feraient les frais, du fait que les grosses sociétés répercuteraient leurs coûts sur les consommateurs? Ces sociétés répercuteraient le coût de la taxe sur les travailleurs et sur les Canadiens moyens. En outre, si on les empêchait de le faire, les capitaux fuiraient notre pays.

Voilà les deux questions que nous nous posons et je souhaiterais que vous y répondiez.

Mme Ginny Guiboche: La première question était...?

M. David Iftody: La première avait trait à l'aide et à la nature stratégique de l'aide à la Roumanie, à la Bulgarie et à d'autres pays de ce type. La seconde avait trait à la taxe Tobin.

Mme Ginny Guiboche: Je sais que beaucoup de pays souhaitent avoir des échanges commerciaux avec le Canada et d'autres nations et qu'ils voient là une source d'argent pour eux. Mais il s'agit de commerce et non d'aide humanitaire. Je crois qu'il est bon que les pays s'engagent dans cette voie, mais il y a encore des gens—pas le gouvernement, mais les gens eux-mêmes—qui ont besoin d'une aide pour satisfaire à leurs besoins de première nécessité. C'est à cela que sert l'argent de l'APD. Ce n'est pas pour le commerce.

• 1205

Je sais que le commerce est un facteur important de rétablissement pour un pays. C'est donc une bonne chose. Je ne pense cependant pas que nous puissions nous permettre d'oublier qu'il faut répondre aux besoins de première nécessité et de ne pas tenir compte du rôle que jouent les ONG dans ce domaine, car ces organisations font beaucoup de bien grâce à l'argent qu'on leur donne. Leurs employés ne sont pas aussi bien payés que ceux de l'ACDI, mais ils travaillent beaucoup plus. Ils ne vivent pas dans le luxe dans ces pays-là, mais ils s'en sortent honnêtement, même s'ils ne sont pas très bien payés. Ils font du bon travail. Quant aux employés de l'ACDI, ils sont fort bien payés lorsqu'ils se rendent dans ces pays, mais ils n'y font pas grand-chose.

Il me paraît indispensable de nous assurer que notre argent est dépensé à bon escient. Si le commerce est important, la satisfaction des besoins de première nécessité l'est tout autant.

La seconde question porte sur la taxe Tobin et sur la fuite des capitaux. Quel effet ont sur le Canada ceux qui spéculent sur l'argent dans notre pays? À quoi cela sert-il? Ma remarque n'est pas purement rhétorique. Je voudrais savoir si cela sert à quelque chose en dehors du fait que cela permet à ces spéculateurs de gagner de l'argent.

M. David Iftody: Je représente une circonscription agricole. Une des choses que j'ai apprises depuis que je suis devenu député—auparavant je ne connaissais rien au commerce et à la spéculation—c'est que dans le domaine de l'agriculture et des ressources naturelles, la spéculation et les opérations de couverture augmentent pour les produits destinés aux marchés internationaux. Toute cette spéculation et ces opérations de couverture jouent aujourd'hui un rôle de plus en plus important dans nos activités commerciales, en particulier en ce qui concerne nos produits du bois, nos produits miniers et l'élevage des porcs qui se développe en Saskatchewan; c'est devenu nécessaire. Il en va de même au Manitoba. J'ai des amis qui sont exportateurs et qui sont obligés de se livrer à ce genre d'activité.

Donc, pour répondre très brièvement à votre question, c'est, malheureusement ou pas, un élément de plus en plus important du commerce agricole.

Mme Ginny Guiboche: S'ils font des affaires dans d'autres pays, c'est du commerce, ce n'est pas de la spéculation. C'est ce que j'essaie de montrer. La taxe dont nous parlons vise uniquement ceux qui spéculent sur les devises pour gagner de l'argent, mais ce n'est pas du commerce.

M. David Iftody: Je ne peux pas répondre à votre question, mais votre remarque est valable.

Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Iftody.

Monsieur Ritz, avez-vous deux ou trois questions à poser?

M. Gerry Ritz: J'ai deux ou trois remarques à faire sur ce qui ressort de la discussion.

Je vous félicite de votre exposé. Il était excellent.

À propos de la taxe Tobin, vous avez dit qu'un quart de cent ne gênerait pas vraiment les transactions commerciales.

Mme Ginny Guiboche: C'est ce que dit James Tobin, le prix Nobel en économie qui a recommandé l'adoption de cette taxe.

M. Gerry Ritz: D'accord, je comprends. Pourtant, toute spéculation n'est-elle pas une transaction commerciale? Pourquoi un quart de point aurait-il un effet dissuasif sur le spéculateur en devises alors qu'il n'en a aucun sur le spéculateur en produits automobiles?

Mme Ginny Guiboche: Parce que lorsque vous spéculez sur des devises, votre gain représente un pourcentage très faible, si bien qu'une différence de 0,25 p. 100 a un effet considérable. Cela découragerait certainement beaucoup de spéculateurs mais produirait malgré tout de l'argent pour le Canada.

M. Gerry Ritz: Cela reste à prouver. Nous parlons ici dans l'abstrait.

Selon vous, une plus lourde imposition des grosses sociétés résoudrait bien des problèmes dans notre pays. Avez-vous un montant quelconque à l'esprit? Savez-vous combien ces grosses sociétés paient actuellement? Que devraient-elles payer en plus? Qu'est-ce qui est équitable? Qu'est-ce qui est juste? La surimposition des grosses sociétés a-t-elle des effets secondaires? M. Iftody a parlé des fuites de capitaux. Ces grosses sociétés ne s'en iraient-elles pas si nous les imposions trop lourdement?

N'oubliez pas que ce sont les sociétés privées, à tous les niveaux, qui créent des emplois. Qu'il s'agisse des employés syndiqués d'une grosse usine de montage d'automobiles ou de l'employé local du parc à bois, l'entreprise se rabat sur le chèque de paie. Si vous surimposiez les grosses sociétés, elles se contenteraient de le répercuter sur leurs coûts. L'exemple qui vient immédiatement à l'esprit est, naturellement, celui des banques. Si vous les imposiez plus, elles augmenteraient en proportion toutes leurs commissions afin de continuer à atteindre les objectifs qu'elles se sont fixés.

Il y a beaucoup de fonds de pension importants établis par des syndicats et des sociétés privées qui sont investis dans les banques. Tous ces gens-là ont-ils droit à un rendement équitable de leur investissement, que nous haïssions tous, ou non, les banques, comme le disait M. Gallaway? Les banques sont une cible facile pour ceux qui veulent les attaquer.

• 1210

Je crois que c'est pratiquement tout ce qui m'est venu à l'esprit pendant que vous parliez aux autres.

Mme Ginny Guiboche: On ne peut pas laisser les banques nous dicter notre politique fiscale. Nous sommes une nation, et nous avons un gouvernement à qui il incombe de s'assurer que nous sommes équitablement imposés. Je refuse simplement de laisser les banques nous dicter nos actions. Ce n'est pas une bonne politique.

Même si elles gagnent beaucoup d'argent, les banques... Comme je l'ai dit tout à l'heure, trois succursales ont récemment fermé à Regina. Pourquoi? Essentiellement, c'était pour permettre à la banque de gagner encore plus d'argent. Les banques veulent toujours en gagner plus. Peu importe que nous les imposions équitablement ou non, elles se plaindront toujours. Et elles continueront à gagner plus d'argent. Je ne crois pas qu'elles fassent beaucoup de mal, mais leur mandat est de gagner de l'argent, comme n'importe quelle autre entreprise.

Ce dont nous avons besoin, c'est donc de déterminer un niveau équitable sur le plan fiscal. S'il existait, nous ne serions pas obligés d'imposer si lourdement les personnes à faible revenu et nous pourrions réduire un peu la pauvreté au Canada.

M. Gerry Ritz: Vous parlez de fermetures de banques. Ces fermetures sont-elles motivées par la cupidité des banques ou par les nouvelles techniques bancaires telles que la bancatique qui vous permet de payer directement vos factures de chez vous? Voilà le genre de programmes que les banques vous offrent.

Je ne dis pas que les banques sont bonnes, mauvaises, ou autre chose. Je vous signale simplement ce point.

Mme Ginny Guiboche: Avant leur fermeture, j'ai vu beaucoup de gens dans ces succursales. Il s'agit simplement de banques qui veulent rationaliser leurs activités, réduire leurs effectifs et gagner plus d'argent.

M. Gerry Ritz: Mais ont-elles vraiment moins d'employés ou ces employés, au lieu de se trouver dans une cage de caissier, se retrouvent-ils maintenant devant un téléphone pour répondre à vos demandes d'opérations bancaires?

Mme Ginny Guiboche: Non. Selon les récentes statistiques publiées par les banques, elles réduisent leurs effectifs. Je n'ai pas vraiment de chiffres qui représenteraient pour moi un niveau d'imposition équitable des sociétés; cela ne faisait pas partie de la préparation de mon mémoire. Je ne peux donc pas faire de commentaire pour le moment.

M. Gerry Ritz: D'accord. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Ritz. Peut-être pourrions-nous poser certaines de ces questions aux banques elles-mêmes. Elles ont probablement des remarques à faire à ce sujet.

Madame Guiboche, je vous remercie vivement de l'exposé que vous avez fait aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants d'être arrivée à l'heure et en bonne forme.

Nous avons d'autres témoins du groupe suivant que nous pourrions entendre dès maintenant afin de donner un peu plus de temps à ce groupe.

Je vous remercie d'être venue de matin et de vous être faites la voix du petit.

Mme Ginny Guiboche: Merci de m'avoir offert cette possibilité.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Mes chers collègues, si vous voulez bien rester à la table, nous allons entendre un représentant de l'Association canadienne de la santé mentale qui va faire un exposé très bref et répondre à une très courte série de questions. Nous passerons ensuite au groupe normal à 10 h 30.

Docteur Hylton, je crois qu'on est actuellement en train de photocopier votre mémoire. Ne craignez rien, nous pouvons vous écouter dès maintenant, mais j'espère que le seul exemplaire de votre déclaration n'est pas à la photocopie.

Dr John Hylton (directeur exécutif, Association canadienne pour la santé mentale): Si, mais nous pourrions peut-être commencer.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Installez-vous tranquillement. À titre d'introduction, je précise que nous sommes le Comité des finances et qu'il s'agit ici de la seconde étape d'une tournée dans tout le pays. Vous êtes le docteur John Hylton, directeur exécutif de l'Association canadienne pour la santé mentale. Vous avez probablement noté que certaines périodes sont réservées aux questions.

Notre greffier va maintenant vous rendre votre document. Je vous invite à faire une déclaration préliminaire, après laquelle nous passerons aux questions.

Dr John Hylton: Parfait. Merci beaucoup. Comme vous venez de le dire, je suis directeur exécutif de l'Association canadienne pour la santé mentale. Je suis aussi membre élu du Regina District Health Board, un des nouveaux conseils de santé régionaux parmi tous ceux qui se constituent actuellement dans le pays afin d'assumer la prestation des services de santé. Dans mon cas, le Conseil de Regina dessert le sud de la Saskatchewan. Je suis également professeur à l'université.

• 1215

Je ne représente cependant ici aucun de ces organismes; je suis en fait venu à titre individuel et j'amène avec moi un certain nombre de préjugés qui tiennent peut-être du fait que j'ai travaillé dans le secteur des soins de santé pendant un grand nombre d'années.

Premièrement, je vous remercie vivement de me permettre de vous rencontrer aujourd'hui. Comme les membres de votre personnel vous l'ont peut-être dit, j'ai été un peu souffrant. L'ennui c'est que dès que j'ai appris que je pourrais vous rencontrer, lundi, j'ai passé la plus grande partie de mon temps chez moi. Ce qu'il y a de bon c'est qu'en sautant d'une chaîne de télévision à l'autre, hier, je n'ai pas trouvé Oprah, mais je suis tombé sur le Comité permanent des finances au moment où les collaborateurs du ministre des Finances faisaient leurs exposés.

J'ai donc l'impression d'avoir des informations toutes fraîches sur les questions soumises à votre comité. C'était tout à fait fortuit. Je n'ai rien trouvé de plus intéressant, ce qui témoigne peut-être de l'importance du travail que votre comité...

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): J'espère que c'est la raison pour laquelle vous êtes en si bonne forme aujourd'hui.

Dr John Hylton: Qui sait? Mais permettez-moi aussi de vous remercier d'être venu à Regina. Nous apprécions vraiment la possibilité d'avoir notre mot à dire au sujet des politiques publiques. Je suppose que la nature des consultations veut que très souvent, Regina ne figure pas sur la liste des endroits visités par les comités. Nous sommes donc particulièrement heureux de pouvoir vous présenter des commentaires.

Je crois comprendre que votre comité a l'intention d'entreprendre un des processus de consultation les plus exhaustifs jamais organisés. Vous méritez d'en être félicité.

Vous avez choisi une très belle journée: Il doit faire 20 degrés à Regina, aujourd'hui. Je ne sais pas si vous le savez, mais vous n'êtes qu'à cinq minutes du plus grand parc urbain d'Amérique du Nord. Si vous avez l'occasion de faire une pause, le parc Wascana et le lac Wascana sont tout près. Je suis certain que d'ici la fin de la journée vous aurez besoin d'un peu d'air frais.

Mes remarques seront très brèves. Je ne dispose, je crois, que de cinq minutes, mais je n'ai que deux ou trois remarques importantes à faire aujourd'hui.

Premièrement, à propos du climat fiscal, on parle beaucoup du dividende fiscal. Je suis sûr que le débat général portera également sur le choix à faire entre les réductions d'impôt, le règlement de la dette et les priorités en matière de dépenses, maintenant que notre pays jouit d'une plus large marge de manoeuvre.

Je pense que le gouvernement actuel a fait savoir qu'il voulait adopter une politique équilibrée en vertu de laquelle il ne s'agit pas de choisir l'une des trois options, mais plutôt d'essayer de les équilibrer. Je tiens à dire qu'à mon avis c'est aussi ce que souhaite la plus grande partie de la population canadienne. Je ne crois pas que dans leur majorité, les Canadiens veulent que le gouvernement s'attaque uniquement à la dette, fasse uniquement des concessions sur le plan fiscal ou se contente uniquement d'augmenter les dépenses. Je pense qu'ils veulent une politique équilibrée.

C'est la première partie de mon message. Je pense que le gouvernement a raison d'agir ainsi à ce stade.

Les discussions vont être très animées. Je suis sûr que vous allez entendre beaucoup de gens à l'extrême gauche ou à l'extrême droite qui vont venir vous demander de privilégier uniquement l'un de ces secteurs mais, à mon avis, ce n'est pas ce que veut le pays, ce que veut la majorité des Canadiens. Les gens veulent que l'on cible bien les dépenses dans certains secteurs qui produiront des résultats importants. À mon avis, ils veulent que l'on s'occupe de la dette et que l'on procède par ailleurs à des réductions d'impôt lorsque notre pays peut se le permettre.

Je veux consacrer mon intervention à l'établissement des priorités en matière de dépenses. Avant tout, je considère que l'on a toujours la possibilité d'augmenter les services du gouvernement et qu'il faut adopter une politique équilibrée. De nombreux projets vont être présentés à votre comité—ainsi qu'à l'ensemble du gouvernement—préconisant que l'on engage des dépenses dans tel ou tel secteur. Les propositions, les idées et les intervenants ne manqueront pas lorsqu'il s'agira de demander une augmentation des dépenses dans nombre de secteurs relevant de la responsabilité du gouvernement. Bien entendu, il ne sera pas possible de mettre en oeuvre tous ces projets.

Je pense que la question fait de plus en plus l'unanimité dans notre pays. Il est certain que l'on s'accorde dans notre région à vouloir faire des programmes sociaux et de la sécurité sociale la grande priorité, et que le gouvernement fédéral a la possibilité de jouer davantage un rôle de chef de file tout en respectant les responsabilités et la compétence des provinces.

• 1220

Pendant la majeure partie de la décennie qui vient de s'écouler, le gouvernement fédéral a en fait abandonné en grande partie un rôle jusque-là beaucoup plus actif dans nombre de secteurs de dépenses relevant de la politique et de la sécurité sociale. Je pense que les Canadiens veulent que le gouvernement fédéral fasse preuve de plus de dynamisme dans ces secteurs. Ils veulent que leur gouvernement prenne directement l'initiative et qu'il s'engage par ailleurs dans des programmes de partage des coûts gérés en commun avec les gouvernements des provinces et des territoires.

Le secteur de la politique sociale est un gros poste de dépenses à l'heure actuelle pour le gouvernement. Il en a toujours été ainsi et je pense que ce sera toujours le cas, et il est donc tentant de dire qu'il nous faudrait dépenser davantage. Je considère toutefois que les Canadiens se méfient éventuellement des solutions qui ont consisté par le passé à dépenser sans compter dès qu'il y avait des problèmes et qu'ils n'offriront leur appui qu'à condition que les projets soient mieux ciblés, que l'on identifie des objectifs plus précis, que l'on rende davantage de comptes, qu'il y ait une meilleure évaluation et que l'on envisage des résultats plus faciles à atteindre. Je pense que c'est aussi ce que le gouvernement cherche certainement à obtenir.

À mon avis, lorsque les ressources sont rares—c'est bien entendu encore le cas à l'heure actuelle, même si nous avons une plus grande marge de manoeuvre—il faut que les ressources soient dirigées vers ceux qui en ont le plus besoin. C'est un principe sur lequel le gouvernement devra se pencher très sérieusement lorsqu'il déterminera ses priorités de dépenses.

La reprise que nous avons enregistrée dans notre pays n'est pas aussi généralisée qu'on pourrait l'espérer. Il y a des segments, des secteurs de notre société, qui sont restés à la traîne.

En regardant hier la discussion qui a eu lieu sur la chaîne câblée, j'ai eu le plaisir d'entendre un certain nombre des membres de ce comité traiter de ces questions. Je sais que M. Loubier, M. Riis et d'autres intervenants ont évoqué des questions comme celles de la pauvreté des enfants, les banques alimentaires, les familles monoparentales, etc., et je pense que ces préoccupations sont justifiées.

Ce ne sont pas les seuls groupes touchés; il y a bien sûr les peuples autochtones et un certain nombre de personnes handicapées. Les statistiques nous révèlent malheureusement qu'ils n'ont pas participé à la reprise que nous enregistrons au Canada. Parmi les personnes handicapées, les taux de chômage sont au plus haut. D'après certaines indications, ils sont même plus élevés que par le passé. Nous avons pris récemment connaissance du rapport du groupe de travail d'Andy Scott, qui s'est penché sur un certain nombre de ces questions.

Il en va de même pour les peuples autochtones. Le fossé semble s'élargir. Il y a eu le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones dans lequel figuraient de nombreuses recommandations demandant une intervention du gouvernement. De toute évidence, la question de la pauvreté des enfants a été soulevée hier par de nombreux membres du comité.

Il y a certains groupes marginalisés et laissés pour compte qui n'ont pas été touchés par la reprise. À mon avis, il est juste que l'on s'occupe de ces secteurs, dans la mesure où nous avons une certaine marge de manoeuvre pour effectuer des dépenses, parce que c'est là que les gens en ont le plus besoin.

On va beaucoup vous parler de la priorité devant être accordée aux soins de santé. Tout semble indiquer que le gouvernement fédéral actuel s'occupe de la question. J'insiste cependant sur le fait que dans des secteurs comme la santé, la justice ou autres, les gouvernements ont trop facilement tendance à s'attaquer aux symptômes plutôt qu'aux problèmes en profondeur.

Dans le domaine des soins de santé, de nombreux intervenants vont réclamer davantage d'hôpitaux et de médecins, ce qui n'est pas une mauvaise chose. En matière de justice, ils seront nombreux à réclamer davantage de dépenses pour la police, les tribunaux et les établissements correctionnels, ce qui n'est pas mauvais non plus, comme dans bien d'autres secteurs de dépenses du gouvernement.

Considérez cependant ce que cela recouvre en fait. La santé en est un bon exemple. Nous savons que quelque 25 p. 100 seulement de la santé relève des services de santé. La santé est déterminée avant tout par les conditions sociales et économiques. Ce sont les inégalités sociales et économiques dans notre pays qui causent des difficultés à nos réseaux de la santé et de la justice, et dans bien d'autres secteurs.

Donc, en quelque sorte, il est si facile pour les gouvernements de réagir face aux symptômes, parce qu'il y a toujours des groupes de pression qui veulent avoir davantage d'argent. Ils nous disent que si on leur donne davantage d'argent et de ressources, ils pourront en faire plus, mais cela ne règle pas nécessairement les inégalités sous-jacentes qui sont à l'origine des besoins.

• 1225

Il m'apparaît que le défi le plus difficile à relever, et le plus important pour le gouvernement, c'est de se pencher sur ces inégalités fondamentales au sein de notre société—et je viens de vous en donner trois exemples: les handicapés, les autochtones et les pauvres, notamment les familles monoparentales, ayant le plus souvent à leur tête une femme—et de profiter en fait de la marge de manoeuvre actuelle, qui résulte de la reprise et de la politique financière, pour essayer de remédier à un certain nombre de ces inégalités.

Pour résumer, j'insisterai sur trois points. Je considère que la plupart des Canadiens sont en faveur d'une politique équilibrée lorsqu'il s'agit de tirer parti de la manne budgétaire. Il ne s'agit pas de choisir exclusivement l'une des trois options, mais de les mettre en oeuvre toutes les trois d'une manière équilibrée: s'attaquer à la dette, régler la question des impôts et engager des dépenses prioritaires dans certains secteurs déterminés.

En second lieu, je considère que la plupart des Canadiens veulent que leur gouvernement joue davantage un rôle de chef de file pour ce qui est des questions d'urgence nationale en matière de santé et de politique sociale.

En troisième lieu, j'aimerais que le gouvernement fasse son devoir plutôt que de se laisser aller à la facilité et se serve de la marge de manoeuvre dont il bénéficie en matière financière pour s'attaquer aux conditions sociales et économiques des groupes marginalisés au Canada.

Je considère que l'on pourrait ainsi faire tout notre possible en procédant par petites améliorations. Il m'apparaît que cela nous aiderait à améliorer la qualité de vie des Canadiens ainsi que la qualité de notre société dans un objectif de justice sociale.

Voilà ce que j'avais à dire.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, docteur Hylton.

Nous allons passer très rapidement aux questions et j'incite donc les membres du comité à ne pas s'attarder. Si vous n'avez pas vraiment de questions à poser, vous pouvez passer votre tour.

Monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz: Je veux simplement souligner que vous nous parler d'une politique équilibrée, et je suis bien évidemment d'accord avec la majeure partie de ce que vous nous avez dit aujourd'hui. Vous nous avez présenté des arguments très réfléchis.

J'aimerais préciser cependant que la question de la réduction de la dette devient un petit peu plus pressante lorsqu'on se rend compte du montant des intérêts que nous payons sur cette dette, soit 42 milliards de dollars par an avec les taux d'intérêt actuels qui, il faut le reconnaître, sont bas.

Plus nous réussirons dans ce domaine, plus nous aurons d'argent pour mettre en oeuvre une politique équilibrée.

Il est si facile... Je sais qu'au niveau du budget de mon ménage, lorsqu'il y a trop de factures à payer, il est tellement facile de les laisser courir et de se contenter de payer chaque fois le minimum.

Si nous laissons les gouvernements agir de cette manière, nous ne pourrons jamais surmonter le problème que nous pose la dette.

Je sais que pendant un certain temps, cela va causer encore quelques difficultés mais, à mon humble avis, plus vite nous réglerons ce problème, plus vite nous dégagerons de l'argent pour faire l'indispensable dans les secteurs de la sécurité sociale, de la santé et de l'éducation.

Dr John Hylton: Je pense que la plupart des Canadiens conscients des réalités seront d'accord pour dire qu'il faut régler la question de la dette et du déficit. Selon les gens, la priorité accordée à cette question ne sera pas la même, bien entendu, mais vous évoquez l'éventualité d'être débarrassé de ces paiements d'intérêt et ce qui se passerait si l'on n'avait pas à les rembourser. Bien évidemment, la situation serait totalement différente et l'on aurait bien plus de possibilités qu'à l'heure actuelle.

De la même manière, même au niveau d'un foyer, il peut y avoir une dette à rembourser, mais cela ne va pas vous amener pour autant à couper l'électricité ou à cesser de faire des courses dans les magasins. Vous allez vous efforcer de maintenir un certain équilibre.

C'est ce que veulent les Canadiens. Ils veulent avoir un certain équilibre, parce que je pense qu'ils considèrent que le gouvernement fédéral a effectivement un rôle à jouer. Ils s'aperçoivent que le filet de sécurité sociale est troué en certains endroits. Cette situation les préoccupe. Ils veulent un chef de file.

Ils ne veulent pas d'un programme de dépenses effréné qui nous ramènerait dans la triste situation qui était la nôtre auparavant. Je pense qu'un programme plus sélectif, plus ciblé, bénéficierait d'un large appui dans le public dans la mesure où il ne remet pas en cause le programme plus général qui consiste à s'attaquer à la dette et qui bénéficie de la grande faveur du public.

M. Gerry Ritz: Oui, dans la mesure où l'on met en oeuvre un système juste et équitable, dans lequel tout le monde paie sa juste part.

M. Gilles-A. Perron: Dans votre exposé, je pense que vous avez oublié une chose. Qu'en est-il des dépenses consacrées à la création d'emplois?

Deuxièmement, pensez-vous que les municipalités soient les mieux à même de se charger de ces programmes sociaux? J'aimerais avoir vos commentaires.

[Français]

Dr John Hylton: Bonjour et bienvenue à Regina.

[Traduction]

Il est certain que la création d'emplois est très importante. Les spécialistes en matière de santé, pour vous donner un exemple, font de plus en plus le lien entre la pauvreté et la santé. Bien évidemment, lorsqu'on n'a pas de travail, lorsqu'on n'est pas compétitif sur le marché, on va dépendre de l'aide publique. Dans notre pays, cela signifie très souvent la pauvreté. Donc, toutes ces choses sont effectivement liées; vous avez tout à fait raison, la création et la promotion des emplois revêtent une très grande importance pour la santé d'une société. Je suis tout à fait d'accord avec cela.

• 1230

Pour ce qui est de l'action des municipalités, le rôle de chef de file que peut jouer le gouvernement fédéral n'implique pas nécessairement que ce soit le gouvernement fédéral qui intervienne. Il peut faciliter l'action menée par d'autres. Le gouvernement fédéral a toujours la possibilité de respecter la compétence des provinces, des territoires et des municipalités et de les aider à atteindre leurs objectifs dans ces secteurs de politique sociale. Je ne dis pas que toutes ces choses doivent être faites par le gouvernement fédéral, mais que ce dernier a un rôle moteur à jouer pour nous aider à aller dans la bonne direction. Je ne considère donc pas qu'il faille que le gouvernement fédéral reprenne la compétence des provinces dans ces secteurs.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Je vous félicite, docteur Hylton, de cet exposé bien construit. J'imagine que cela s'explique en grande partie par le fait que vous avez étudié à l'Université Saint-François Xavier, qui se trouve pas très loin de ma circonscription et qui a formé un certain nombre de grands dirigeants canadiens.

Quoi qu'il en soit, lorsqu'on parle de dépenses sociales ciblées, on considère systématiquement le filet de sécurité sociale comme une dépense sociale. On y voit rarement un investissement pour l'avenir. Nous sommes résolument entrés désormais dans l'ère de l'information et notre monde se caractérise par ailleurs par le libre-échange. Donc, pour l'une des premières fois de notre histoire, nous avons la possibilité de faire progresser l'économie canadienne en investissant dans ce qui va être un avantage comparatif, soit les cerveaux des jeunes Canadiens. Une étude nous a révélé il y a quelques années que lorsqu'on investissait un dollar dans des enfants âgés de trois ans au plus, cet investissement étant ciblé au niveau des cas à haut risque, on en retirait sept dollars au moment où ces enfants atteignaient l'âge de 27 ans. Voilà qui touche directement les groupes marginalisés dont vous avez parlé.

L'éducation est une compétence provinciale, mais il y a de nombreux Canadiens qui aimeraient que le gouvernement fédéral prenne l'initiative dans des secteurs comme le contrôle des connaissances, par exemple, ou lorsqu'il y a réellement un intérêt pour les jeunes Canadiens à bénéficier d'un enseignement au niveau national. Qu'en pensez-vous?

Dr John Hylton: Je considère que la population canadienne estime qu'il faut des normes nationales dans un certain nombre de secteurs. L'éducation est éventuellement l'un d'entre eux. Il y a aussi, bien entendu, la santé, secteur que je connais davantage. Je pense que les Canadiens se félicitent des dispositions de la Loi sur la santé du Canada et souhaiteraient que l'on renforce ces dispositions et que l'on fasse preuve d'un meilleur esprit d'initiative dans l'élaboration des normes. Les Canadiens veulent être sûrs que lorsqu'ils se déplacent au Canada, ils auront partout une possibilité d'accès raisonnable à un ensemble de services de base, auquel ils ont droit par le simple fait qu'ils sont citoyens canadiens. Je pense donc qu'il y a là une chance à saisir, que l'on peut jouer un rôle et que les Canadiens sont prêts à ce que l'on joue un rôle de chef de file dans un certain nombre de ces secteurs.

Pour en revenir à l'argumentation de M. Perron, je ne pense pas qu'il s'ensuive nécessairement qu'il faille que le gouvernement fédéral fasse tout lui-même. On peut faire bien des choses en prêtant son concours. C'est bien évidemment ce qui se passe à l'heure actuelle en matière de santé et dans bien d'autres secteurs relevant de la compétence provinciale. L'éducation fait tout simplement partie de la longue liste des secteurs dans lesquels cette intervention est non seulement possible, mais souhaitable.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, docteur Hylton. Mes collègues du Parti libéral ont convenu de ne pas poser de questions pour l'instant parce que nous avons un groupe de témoins qui sont prêts à nous parler.

Merci de l'exposé que vous nous avez présenté aujourd'hui. Si vous avez d'autre chose à dire, n'hésitez pas à les faire parvenir directement au comité.

Dr John Hylton: Merci de nous avoir permis d'intervenir et merci encore d'être venu à Regina.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): C'est avec plaisir. Merci beaucoup.

Nous allons lever la séance pendant quelques minutes.

• 1234




• 1241

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): La séance est rouverte.

Nous avons plusieurs témoins autour de la table. Si je comprends bien, la plupart d'entre eux ont déposé un mémoire. Je vais tout d'abord vous présenter chacun d'entre eux pour que nous nous connaissions mieux. Mes chers collègues, si vous voulez savoir qui est qui, notre premier témoin est Mme Brown, qui représente le Syndicat étudiant de l'Université de Regina. Nous avons aussi Peter Morin, qui représente la Saskatchewan Child Care Association. Nous avons aussi Mme Olson.

Pour qui travaillez-vous?

Mme Lana Olson (membre du conseil d'administration, Saskatchewan Child Care Association): J'appartiens à la SCA.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Ah, vous aussi. C'est très bien.

M. Wells, qui est ici, représente l'Université de Regina. M. Buck est venu représenter Frank Buck Agencies. Nous avons aussi trois représentants du Syndicat du blé de la Saskatchewan: M. Demyen, M. Shauf et M. Schmeiser. Nous avons Ron Goetz, qui représente la Saskatchewan Motion Picture Association. Pour représenter Canada West Equipment Dealers, nous avons M. John Schmeiser. Nous avons aussi Jean Lara, qui représente ici l'Immigrant Women Society. Enfin, nous sommes très heureux d'accueillir le maire de Regina.

Merci de nous avoir organisé ce temps magnifique, monsieur le maire Archer. Il vous faudra parler avec le maire Owen. Il n'a pas aussi bien réussi que vous à Vancouver.

Je précise à nos invités que nous disposons d'environ une heure pour ce tour de questions. Vous disposerez de quatre ou cinq minutes au maximum. Si vous n'avez pas besoin de tout ce temps, c'est encore mieux. Ne vous croyez pas obligé d'utiliser tout ce temps. Nous essaierons ensuite de vous poser quelques questions. Comme de bien entendu, plus vous irez rapidement, et moins je perdrai du temps, et plus nous disposerons de temps pour les questions.

Madame Brown, vous êtes la première.

Mme M. Brown (présidente, Syndicat des étudiants de l'Université de Regina): Je serai très brève.

Le Syndicat des étudiants de l'Université de Regina, en accord avec ceux d'autres écoles qui sont membres de la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, considère que l'on est allé trop vite en réduisant le déficit. De plus, le message utilisé ne tient pas nécessairement compte des besoins du Canadien moyen. Nous estimons que l'on a déplacé le fardeau du déficit pour le faire désormais reposer sur les épaules des citoyens. Il suffit d'ailleurs de citer l'exemple de l'éducation postsecondaire. Ainsi, l'endettement des étudiants en Saskatchewan a augmenté de 250 p. 100 depuis 1988 alors que nos frais de scolarité ont progressé de 110 p. 100 depuis cette date. Au cours de l'exercice budgétaire actuel, l'endettement moyen par étudiant sera de l'ordre de 28 000 $.

Nous considérons que l'on n'investit pas là dans l'avenir des Canadiens et que ce n'est pas une façon de régler nos difficultés financières éventuelles. Il s'agit plutôt là d'un fardeau imposé aux étudiants ainsi qu'à la société. Nous demandons que l'on change de mentalité lorsqu'il s'agit de faire face à ces réalités financières et nous invitons en fait le gouvernement fédéral à prendre l'initiative de manière à décharger les individus de leur fardeau pour qu'ils puissent jouer un rôle utile au sein de l'économie canadienne.

• 1245

Nous en avons vu quelques signes, par exemple, avec la mise en place du fonds de dotation des bourses du millénaire, mais ce n'est là en fait qu'un nouvel exemple d'imposition du fardeau aux individus. Mentionnons que le problème ne se pose pas seulement dans ce cas pour les étudiants brillants qui ne peuvent pas se payer des études postsecondaires, mais à tous les étudiants qui n'en ont pas les moyens.

Ce que nous demandons en fait, c'est une augmentation des crédits ainsi qu'un système de bourses mises à la disposition des étudiants n'ayant pas de gros moyens financiers afin que tous puissent accéder aux universités et aux collèges.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci. Monsieur Morin puis madame Olson.

M. Peter Morin (président, Saskatchewan Child Care Association): Je tiens à vous remercier de nous avoir permis de nous présenter devant vous. J'ai pu constater avec intérêt, en entrant dans cette pièce, que M. Brison exposait déjà la majeure partie de mes idées. Il nous parlait de l'investissement dans la garde d'enfants en l'opposant à des dépenses. Il semble que votre comité soit déjà bien conscient des avantages qu'il y a à investir dans des ressources telles que la garde d'enfants. Le rendement, les trois pour sept, est un bon rendement.

Il y a aussi d'autres avantages à en tirer. Nous investissons dans de nombreux programmes de notre pays pour, par exemple, maintenir à l'école les parents adolescents. Le ministère de la Santé finance un certain nombre de programmes à cette fin dans la province. Cette action ne serait peut-être pas nécessaire si nous intervenions plus tôt en faisant en sorte que les adolescentes ne tombent pas enceintes parce qu'elles ont confiance en elles et disposent des ressources leur évitant de se retrouver dans cette situation. Il y a beaucoup d'avantages à en retirer. Je ne les exposerai pas en détail.

La Saskatchewan Child Care Association aimerait bien voir s'instaurer un programme national pour la garde d'enfants. C'est avec un grand intérêt que nous avons accueilli le livre bleu des libéraux—et je m'excuse envers les députés non libéraux autour de cette table—parce que nous y avons vu la possibilité d'instaurer un véritable réseau national de garde d'enfants, qui aurait mis les garderies à la portée de tous.

L'un des paradoxes du réseau de garde d'enfants, du moins en Saskatchewan, mais je pense qu'il en va de même dans l'ensemble du pays, c'est que ce sont les riches qui peuvent se payer la garde d'enfants, ou encore les pauvres parce que les gouvernements les subventionnent, mais que la classe moyenne—et cela correspond à une fourchette assez large, du moins ici en Saskatchewan, dès qu'une famille a un revenu de 25 000 $—n'ont pas, bien souvent, les moyens de se payer une garde d'enfants. En fait, ce sont les familles qui se situent dans la tranche en quelque sorte la plus basse de la classe moyenne qui n'ont pas les moyens de se payer la garde d'enfants.

En tant qu'homme d'affaires, je me préoccupe aussi de la disponibilité de la garde d'enfants. J'ai eu récemment une mère de famille monoparentale qui a travaillé pour moi pendant environ un an. La garde d'enfants lui posait un certain nombre de problèmes. Elle n'avait pas les moyens de la payer. Vous allez me dire que si je l'avais payée davantage elle en aurait eu les moyens, mais j'aurais alors des arguments à faire valoir qui n'entrent pas dans le cadre de notre discussion.

Cette femme est retournée tout simplement à l'aide sociale. Elle ne pouvait plus lutter pour occuper un emploi, prendre soin de sa famille et s'occuper des enfants. Elle touche aujourd'hui l'aide sociale, ce qui est regrettable à mon avis.

Pour finir, j'aimerais dire un mot du financement des organisations. La Saskatchewan Child Care Association est financée par le gouvernement fédéral depuis un certain nombre d'années. Lorsque je suis entré à l'association, c'est le Secrétariat d'État qui s'en occupait. Il y a plusieurs années, il nous a fait savoir que nos crédits diminueraient de 10 p. 100 chaque année. Il en a été ainsi pendant deux ou trois ans.

Nous n'y avons vu en fait aucun inconvénient. Nous avions pris antérieurement la décision de ne plus dépendre du financement de base du gouvernement et de devenir autonome. Toutefois, depuis l'année dernière, les crédits sont versés par l'intermédiaire des services de la Condition féminine, ce à quoi je m'oppose en tant qu'homme, parce que la garde d'enfants n'est pas un problème qui concerne exclusivement les femmes.

Surtout, la méthode de financement a changé. Pour bénéficier des crédits cette année, il nous faut mettre en oeuvre un projet. Pour ce faire, nous devons engager une personne, ce qui va nous coûter quelque 9 000 $ ou 10 000 $, ou il nous faut faire appel à nos ressources internes, ce qui signifie que nous ne pouvons plus faire le travail de notre association. C'est un véritable recul. J'ai pu constater que ce changement dans l'affectation des crédits porte préjudice à un certain nombre d'organisations, et non pas simplement à la Saskatchewan Child Care Association.

Je vous incite donc, lorsque vous examinez les programmes, à ne pas pratiquer des coupures brutales et à ne pas modifier les modes de financement d'une façon qui rend insupportable la vie des organisations. Bon nombre d'organisations font un excellent travail au sein de la collectivité, donnent bénévolement beaucoup de leur temps, tout cela en pure perte si ces organisations ne peuvent subsister en raison des modifications apportées aux crédits.

Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Morin.

Madame Olson, je pense que ces observations sont aussi les vôtres.

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Mme Lana Olson: Oui.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Wells.

M. Donald Wells (président et recteur de l'Université de Regina): Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de présenter quelques observations aujourd'hui.

Je commenterai tout d'abord la question de la réduction du déficit budgétaire ainsi qu'un certain nombre de facteurs qui s'y rapportent. Je vais évoquer un certain nombre des décisions prises en 1996 ou annoncé pour 1997 et faire ensuite quelques observations sur les priorités adoptées.

Pour ce qui est de la réduction du déficit budgétaire, je considère que l'on ne peut pas dépenser l'argent que l'on n'a pas. Il est important que les pouvoirs publics conservent au Canada le contrôle des dépenses du gouvernement pour ce qui a trait à ses priorités et aux services sociaux, et que ce ne soit pas les banquiers de New York qui tirent les ficelles.

Je pense donc que c'est une bonne chose qu'on l'ait fait, que les progrès réalisés sont probablement les meilleurs que l'on pouvait espérer, mais j'estime que l'on aurait dû bien moins se décharger sur les provinces. Je reconnais que l'on n'avait pas beaucoup le choix, mais j'estime plus particulièrement qu'il est important que notre gouvernement se préoccupe en priorité des postes de dépenses qui sont des investissements pour l'avenir.

Je considère qu'il est important de continuer à réduire la dette nationale que nous avons accumulée tout en se préoccupant de la recherche et de l'éducation, soit les deux secteurs qui nous rendront compétitifs à l'avenir au sein d'une économie fondée sur la connaissance. La recherche nous donnera les outils pour exercer notre concurrence, et l'éducation la capacité à nous servir de ces outils.

Je tiens à féliciter le gouvernement pour la création du fonds canadien pour l'innovation, mis en place lors du dernier budget, et pour s'être engagé à maintenir le plus large accès possible à l'éducation postsecondaire en remédiant aux graves problèmes que pose l'endettement des étudiants, tel qu'annoncé dans le discours du Trône et la réponse du premier ministre à ce discours.

Les trois projets qui ont été annoncés sont particulièrement les bienvenus—la création du Fonds canadien de dotation des bourses d'études du millénaire, la fourniture d'une aide accrue aux étudiants ayant des personnes à charge et l'apport de nouvelles modifications positives au Fonds canadien de prêts aux étudiants. Toutefois, je nous invite à aller encore bien plus loin. Ce sont là d'excellentes initiatives, et un peu plus qu'un premier pas dans la bonne direction, mais ça ne va certainement pas résoudre l'ensemble du problème.

Pour ce qui est des priorités pour l'avenir, j'ai quatre choses à dire. Il est indispensable que le gouvernement augmente les crédits qu'il accorde aux trois conseils de recherche comme le propose l'AUCC et ses partenaires. Notre pays ne sera compétitif à l'avenir que s'il met ses connaissances à jour, ce qui ne peut se faire que grâce à la recherche fondamentale. Nous ne pouvons pas nous contenter de copier la recherche fondamentale faite par les autres. Il nous faut faire partie comme il se doit de ce club. Nous devons être à la pointe si nous voulons bénéficier de ces connaissances. Nous ne pouvons pas nous contenter de transformer en création d'emploi des connaissances vieillies ou de seconde main. Nous devons être aux avant-postes. Je vous incite donc à augmenter les crédits accordés aux trois conseils de recherche.

Je tiens à mentionner en particulier le Conseil de recherche en sciences humaines. On l'oublie trop souvent. Bien souvent, les responsables du gouvernement nous demandent: qu'a-t-il à voir avec le développement économique ou autre de notre pays? Je vous répondrai qu'il a beaucoup à voir avec le développement de notre pays et avec nos valeurs sociales. Je vous invite à lui accorder un intérêt tout particulier.

Je vous demande aussi instamment d'augmenter l'aide apportée aux étudiants. Il y a de nombreux moyens de le faire. Différents groupes d'étudiants ont fait toutes sortes de propositions. Je pense qu'il est important de ne pas oublier que ce sont nos étudiants qui à l'avenir assureront la compétitivité du Canada. Il faut que l'enseignement qui leur est offert soit de première classe. Il faut à mon avis qu'ils bénéficient des meilleures chances qui sont offertes dans le monde si l'on veut que notre pays soit en pointe. Il est donc important que nos étudiants bénéficient des outils d'enseignement dont ils ont besoin pour tracer la voie.

Je mentionnerai ensuite la nécessité d'augmenter l'appui apporté en matière d'éducation, en particulier pour les Premières nations et les différents peuples autochtones. Dans les années à venir, il sera encore plus important pour notre pays, davantage dans certaines régions que d'autres, mais je pense pour notre pays dans son ensemble, que notre population autochtone puisse prendre part pleinement au développement économique de notre pays. Elle a un rôle majeur à jouer. J'invite le gouvernement à en être conscient.

Le quatrième point ne figure pas dans les notes que je vous ai remises, mais je tiens cependant à le mentionner. Je suis très préoccupé par la fuite des cerveaux. C'est une préoccupation que partagent nombre d'universités dans tout le Canada. Nous perdons des gens très importants en faveur des États-Unis alors que nous en gagnons en provenance du reste du monde, mais lorsqu'on examine cette situation en détail, on constate que nous perdons nos meilleurs universitaires et nos jeunes les plus brillants. Nombre d'entre eux sont appelés à l'avenir à créer les conditions garantissant la création d'emplois.

• 1255

Nous perdons donc une partie de notre investissement, et je pense que cela s'explique pour deux grandes raisons, du moins parmi celles que j'ai décelées. Tout d'abord, nous n'offrons pas des installations compétitives à nos jeunes universitaires et ils vont chercher mieux ailleurs. En second lieu, il y a trop d'inconvénients financiers, en matière de fiscalité et dans d'autres domaines, pour que ces gens estiment devoir rester dans notre pays.

Ce sont là les questions qui doivent être abordées à mon avis, du moins lorsqu'on se préoccupe de la fuite des cerveaux.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Wells.

Nous allons maintenant entendre M. Buck.

M. Frank Buck (F. Buck Agencies): Merci, madame la présidente. J'essaierai de faire très vite. Je n'avais pas compris que nous aurions si peu de temps pour notre exposé. J'ai travaillé toute la nuit et très tôt ce matin pour finir de préparer mon exposé et j'avais tablé sur une intervention de quelque 12 minutes. Quoi qu'il en soit, voici cet exposé. Je vous ai distribué un compte rendu en huit points concernant la réduction du déficit et je vais vous les exposer dans cet ordre.

La démarche a été trop rapide. Il me semble que les gouvernements sont devenus particulièrement insensibles aux graves difficultés causées par les modifications draconiennes apportées au financement. Le secteur des petites entreprises, qui fait travailler principalement des gens à revenu moyen ou faible, est directement touché par les coupures. Les réductions d'effectif ont eu des effets très négatifs sur les revenus des particuliers et, par conséquent, sur les paiements d'impôt sur le revenu. La situation financière actuelle ne s'est pas instauré sur une période de cinq ans et ce ne sont certainement pas les petites entreprises ou les travailleurs qui ont trop dépensé ou pas payé assez d'impôts. Si l'on doit supprimer l'ensemble de notre endettement, il faut que ce soit planifié sur une très longue période en tenant compte de notre santé économique et de notre capacité à rembourser la dette sans créer de grandes souffrances, ce qui est actuellement le cas.

Tout le monde sait que les petites entreprises sont à la source d'un grand nombre d'activités économiques et créent beaucoup de nouveaux emplois. J'ai lu avec intérêt que le premier ministre a parcouru le comté de M. Iftody en fin de semaine et qu'il a déclaré à cette occasion que 80 p. 100 du million d'emplois créés au cours des quatre dernières années l'ont été par les petites entreprises. Pourtant, il semble que ce soit elles qui subissent le plus gros des coupures. Ainsi, s'il fallait que les petites entreprises ramènent leurs dépenses et leur personnel, y compris leur liste de paie, au niveau des coupures pratiquées par les gouvernements et les grosses entreprises, on peut imaginer la catastrophe que ce serait pour notre économie. Comme c'est souvent le cas, nous devons subir les conséquences des erreurs commises par d'autres.

Les compressions de programmes pratiquées au niveau fédéral sont ou deviennent une façon indirecte d'augmenter les impôts payés par d'autres. Les restrictions imposées à l'admissibilité à l'assurance-emploi amènent finalement nombre de gens à se retourner vers le bien-être, pour lequel les crédits provinciaux ont été réduits. Certains enfants doivent s'adresser à nouveau à leur famille pour y trouver une aide financière. Cela a des conséquences sur les petites entreprises.

Les coupures et les réductions d'effectifs peuvent améliorer les seuils de rentabilité, mais bien souvent il en résulte d'autres coûts. Les difficultés du transport des céréales sont-elles la conséquence d'un trop grand nombre de réductions d'effectifs? L'accident récent de VIA Rail à Biggar vient-il du fait que l'on a sacrifié la sécurité au seuil de rentabilité? On peut être certain que si l'on ne surveille pas d'assez près toutes les formes de transport public, il y aura des accidents mortels.

L'opération consistant à se délester des programmes sur le dos des provinces et à réduire les paiements de transferts fédéraux a eu des conséquences directes sur les différentes entreprises locales. Avec une assiette fiscale plus restreinte et le lourd fardeau de la dette léguée par les gouvernements du passé... ces déplacements de responsabilités financières ne sont pas réalistes. On a l'exemple des réductions de crédits imposées aux autochtones qui vivent en dehors des réserves et qui, si je comprends bien, coûtent au Trésor de la province de la Saskatchewan quelque 200 millions de dollars par an.

Il semble que le fonds d'assurance-emploi, qui fait état d'un excédent de 14 milliards de dollars, payés par les travailleurs et les petites entreprises, soit utilisé pour équilibrer le budget. Je trouve que c'est une façon assez étonnante de faire de la cavalerie avec les crédits. Il m'avait semblé qu'à l'origine il s'agissait d'un fonds autonome et que l'on avait peur avant tout de manquer de crédits, ce qui a amené à augmenter les cotisations. Qui paie ces augmentations si ce ne sont les petites entreprises et les travailleurs?

• 1300

C'est la réduction draconienne des prestations et l'augmentation du coût des cotisations, et non pas une meilleure gestion du gouvernement, qui ont amené ce prétendu «excédent». Parallèlement, le gouvernement fédéral annonce une augmentation des cotisations au RPC. Là encore, ce seront évidemment les travailleurs et les petites entreprises qui vont payer. Ce ne sont rien d'autres que des ponctions fiscales imposées à ceux qui sont le moins en mesure de payer.

C'est notre gouvernement fédéral qui est en dernière analyse responsable du bien-être des personnes âgées et il lui incombe de mettre en place un régime de pensions national intégralement financé et pleinement transférable. Le versement de prestations d'invalidité a-t-il mis en péril le régime prévu à l'origine? Je pense que oui et je ne suis pas sûr que nous ne fassions pas le jeu des régimes d'invalidité privés sur certains points.

Nous sommes des entrepreneurs et nous n'avons rien contre les profits, mais les gouvernements ne comprennent pas à quel point les travailleurs et les petites entreprises sont le dos au mur alors que nos grands pontes de Bay Street sont en train de concocter une diminution rapide du déficit. J'étais à Ottawa il y a deux semaines et j'ai lu avec intérêt l'article faisant état des dépenses somptueuses engagées par les courtiers, qui se paient des dîners à 5 000 $, avec vins et cigares, etc. Je dois vous dire que chez nous, ces choses nous laissent un goût amer. On demande de payer bien trop à ceux qui sont les moins à même de se rebeller.

Pour ce qui est des priorités, je considère que le gouvernement fédéral a la responsabilité de procéder à un partage plus équitable de la richesse nationale. Nous devons rétablir une grande partie des crédits accordés aux provinces pour qu'elles poursuivent leur mission essentielle en matière d'éducation, de santé et de programmes sociaux. Nous devons mettre en oeuvre un véritable programme national devant contribuer à la reconstruction de notre réseau de grandes routes à l'échelle du Canada sans attendre que les provinces en défrayent tous les coûts.

Il faut qu'une planification à long terme se substitue au calendrier politique de quatre ans qui a cours à l'heure actuelle. Le grand public se méfie de plus en plus des gouvernements et des politiciens. En raison du manque d'équité dans l'affectation de l'argent provenant de nos impôts, les particuliers et les petites entreprises se sentent laisser de côté.

La grande priorité devrait être la mise en place d'une fiscalité plus équitable à l'échelle du pays. À titre provisoire, une partie des excédents budgétaires éventuels devrait être utilisée pour aider les provinces ayant un fort endettement et des taux d'imposition plus élevés que la normale.

Pour conclure, je tiens à vous dire que ce document a été élaboré sans l'aide d'un consultant ou d'un intermédiaire payé à prix d'or, qu'il s'agisse d'un avocat, d'un comptable ou d'un consultant en gestion. Ce sont là mes propres observations, que j'ai dégagées avec l'aide d'un certain nombre d'universitaires et de dirigeants d'entreprises.

Pour finir, j'ajouterai qu'il est difficile d'aider à la préparation d'un budget sans savoir quel est l'excédent prévu. Là encore, il semble que le ministre fédéral des Finances n'en sache rien lui non plus.

Merci de m'avoir donné la parole. Qui sait si une plus grande égalité des chances dans notre pays ne pourrait pas par ailleurs résoudre certaines de nos difficultés sur le plan de l'unité.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Buck.

Je dois dire que tous les intervenants ont vraiment bien respecté jusqu'à présent le temps imparti. Je vous remercie. Vous avez établi un rythme très soutenu à l'intention des cinq intervenants qui vont suivre.

Monsieur Shauf.

M. Marvin Shauf (président du conseil d'administration du Syndicat du blé de la Saskatchewan): Bonjour. Le Syndicat du blé de la Saskatchewan se félicite d'avoir été invité à participer à ces travaux. Nous accueillons avec plaisir la possibilité de contribuer à la définition des dépenses et à la création des programmes actuels et futurs du gouvernement fédéral qui vont exercer une influence sur l'agriculture de l'Ouest canadien.

Il faut féliciter le gouvernement fédéral pour les progrès qu'il a réalisés afin de contrôler le déficit. L'excédent budgétaire auquel parviendra vraisemblablement le gouvernement fédéral au cours du prochain exercice lui conférera une plus grande marge de manoeuvre lorsqu'il s'agira de répondre aux besoins et aux aspirations des Canadiens. L'amélioration de la situation financière s'est déjà traduite par une baisse de l'inflation et des taux d'intérêt. L'agriculture, qui est un secteur qui consomme beaucoup de capitaux, a déjà bénéficié des taux d'intérêt actuels. En outre, en tant que secteur axé sur l'exportation, l'agriculture a aussi retiré des avantages du fait que les faibles taux d'intérêt ont rendu concurrentiels notre devise et nos produits par rapport à ceux des autres grands exportateurs agricoles tels que les États-Unis. Il est important pour notre secteur de continuer à profiter des avantages des faibles taux d'intérêt et d'une devise concurrentielle. Nous sommes en faveur d'une politique financière appuyant à l'avenir ces objectifs.

L'opération de réduction du déficit a entraîné des compressions importantes des dépenses de programme du gouvernement. L'agriculture, et tout particulièrement le secteur des céréales et des oléagineux de l'Ouest du Canada, a fait plus que sa part pour contribuer à la réalisation de cet objectif. Ainsi, la suppression du tarif du Nid-de-Corbeau pour le transport des céréales de l'Ouest a amené le gouvernement à économiser 560 millions de dollars par an. Depuis 1994-1995, les crédits fournis au titre du filet de sécurité ont été réduits de 30 p. 100, passant de 850 millions de dollars à 600 millions de dollars à l'heure actuelle. Le budget consacré à l'agriculture a été réduit de 19 p. 100, et quelque 30 millions de dollars de crédits de recherche annuels ont été supprimés.

• 1305

Ce sont là deux exemples de postes, celui du filet de sécurité et celui de la recherche agricole, dans lesquels il serait bon que le gouvernement envisage d'augmenter quelque peu les dépenses. Dans les deux cas, il s'agit d'investissements pour l'avenir.

En outre, les frais demandés par le gouvernement aux utilisateurs ont augmenté de manière significative depuis cette date. C'est le cas, par exemple, de l'enregistrement des produits antiparasitaires par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire et des services d'inspection dispensés dans le cadre du Système canadien de l'inspection des aliments. L'industrie paie aussi désormais des frais au titre de l'utilisation des services maritimes dans le cadre de l'expédition des céréales.

Ces frais supplémentaires sont dommageables sur deux points. Tout d'abord, ils réduisent la compétitivité de nos exportations par rapport à celle d'autres pays. Cela revient à remettre en cause la capacité de notre industrie à atteindre l'objectif fixé par le gouvernement pour nos exportations, soit 3,5 p. 100 du commerce agricole mondial. En second lieu, les crédits affectés par le gouvernement à ces activités restent totalement compatibles avec les obligations du Canada vis-à-vis de l'Organisation mondiale du commerce. Aucune coupure n'a été exigée et aucune ne s'impose aujourd'hui.

Compte tenu de l'état des finances fédérales, nous considérons qu'il convient d'adopter un moratoire, sinon des mesures rétroactives, en ce qui a trait à ces frais et à ces droits imposés dans le cadre de la politique de recouvrement des coûts. Une politique de recouvrement des coûts ne pourra se justifier que lorsque les services correspondants peuvent être commercialisés et lorsqu'une concurrence s'exerce entre les fournisseurs de ce service.

Un projet de loi a été récemment déposé devant la Chambre des communes pour modifier la Loi sur la Commission canadienne du blé. Cette législation prévoit la création d'un fonds d'intervention d'urgence financé par les producteurs pour renforcer la capacité d'intervention de la Commission canadienne du blé en matière de rajustement des prix payés aux agriculteurs. Nous considérons ce fonds d'intervention d'urgence éventuel comme l'imposition de nouveaux frais aux producteurs. Nous considérons par ailleurs qu'il sera inutile. Si le gouvernement veut vraiment s'engager dans l'établissement d'un tel fonds, nous recommandons qu'il le finance au départ. Si une demande de remboursement est présentée dans le cadre de ce fonds, le montant correspondant pourra alors être remboursé grâce aux cotisations des producteurs.

La Saskatchewan a enregistré une récolte de qualité et dont la quantité est proche de la moyenne, mais ce fut une déception sur le plan financier pour nombre de producteurs. Plusieurs secteurs ont souffert de la sécheresse, les prix sont inférieurs à ceux de l'année dernière et les coûts de production plus élevés ont réduit les marges correspondant aux revenus des agriculteurs. Il faudra tenir compte de cette situation lorsque l'on envisagera à l'avenir la question des crédits de programmes agricoles et des frais payés par les utilisateurs.

En résumé, nous incitons le gouvernement fédéral à poursuivre dans la voie de la réduction du déficit et de cesser d'introduire de nouveaux impôts dans le secteur agricole sous la forme de frais de recouvrement des coûts et autres droits.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Shauf.

Monsieur Goetz.

M. Ron Goetz (ancien président de la Saskatchewan Motion Picture Association): Je représente la Saskatchewan Motion Picture Association. J'ai siégé pendant sept ans au sein du conseil d'administration de cette organisation. C'est en ma qualité d'ancien président que je m'adresse aujourd'hui à vous.

J'avais tout d'abord l'intention de vous parler des succès de notre industrie, mais lors de mes dernières comparutions, je n'ai pas manqué de constater qu'il est toujours difficile d'annoncer de bonnes nouvelles lorsqu'on revient se présenter devant le gouvernement pour demander davantage d'investissements. Je tiens quand même à vous faire savoir que notre industrie se porte très bien en Saskatchewan, comme c'est le cas dans le reste du Canada. Il y a cependant un point que je veux évoquer avant de commenter plus directement la question qui nous occupe.

Je suis aussi un petit producteur de la Saskatchewan. J'emploie huit personnes, dont six ont moins de 30 ans. Il y a donc une industrie qui se développe.

Dans notre secteur, le gouvernement joue un rôle significatif grâce aux crédits d'investissement qu'il apporte. Ces derniers représentent entre 25 et 30 p. 100 du budget de notre entreprise, qui s'en sert pour appuyer ses activités. Ce n'est pas négligeable compte tenu de la juridiction dans laquelle nous opérons. Dans le monde, nous voyons un grand nombre d'entreprises privées en mesure d'investir dans les films et les productions vidéos et culturelles. Malheureusement, nous n'avons pas la chance au Canada de pouvoir compter sur un certain nombre d'investisseurs privés en mesure de participer à un tour de table et d'investir dans ce genre de productions. Nous n'avons pas non plus des auditoires suffisamment étendus pour financer des productions payées à la demande, au coup par coup ou sur les lieux de la diffusion. Par conséquent, c'est la population du Canada et des provinces qui investit avant tout dans les productions.

• 1310

En gardant cela à l'esprit, je veux appuyer aujourd'hui l'action du gouvernement fédéral, qui encourage l'industrie et contribue à la production de films, d'émissions télévisées et de projets multimédias canadiens. Cela se fait par l'intermédiaire de Téléfilm Canada, du Fonds de production de la télévision et du câble et de la Société Radio-Canada. Chaque intervenant apporte une large contribution à la croissance de notre industrie.

Les films, les vidéos et les projets multimédias exercent une influence dans de nombreux secteurs importants pour la population de notre pays: la croissance économique, la création d'emplois, le commerce international et, surtout, notre culture canadienne. Les industries du film, de la vidéo ainsi que les nouveaux médias emploient du personnel dans des postes techniques et administratifs très qualifiés et créateurs. Ce sont des emplois qui offrent d'excellentes perspectives d'avenir, qui sont intéressants et qui sont source d'espoir et d'inspiration pour notre jeune génération.

Nos émissions filmées et télévisées jouent un rôle important pour la diversité culturelle de notre pays. Elles sont le reflet de notre façon de vivre pour nous-mêmes, pour le reste du Canada et pour les audiences du monde entier. Il est important, lorsque nos enfants se cultivent par l'intermédiaire de la télévision ou du grand écran, qu'ils absorbent ce faisant la culture canadienne. Les films et les vidéos sont des moyens puissants qui influent sur la façon dont nous nous voyons et dont le monde nous voit.

Le Fonds canadien de production de la télévision et du câble, institué en 1996, est un excellent exemple de collaboration des secteurs public et privé dans un but commun et je félicite le gouvernement d'avoir pris cette initiative. Ce fonds a appuyé la création de plus de 375 émissions télévisées, a employé environ 19 600 Canadiens et a permis de lever 625 millions de dollars supplémentaires correspondant à des fonds privés.

Pour finir, je tiens à insister sur l'importance des affectations régionales de crédits. Dans les régions, nous continuons à souffrir des difficultés qu'entraîne l'éloignement par rapport au centre, notamment pour ce qui est de l'accès aux radiodiffuseurs et aux investisseurs, qui sont principalement installés dans l'Est, surtout à Toronto. Les programmes d'incitation régionaux contribuent à garantir que toutes les régions de notre pays aient une chance égale de participer à notre croissance économique et culturelle. Ils ont permis à l'industrie du film de la Saskatchewan de se développer et de contribuer au développement économique et à la diversité de la culture du Canada. Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Goetz. J'ai le plaisir de vous apprendre que nous sommes nombreux à avoir assisté aux cérémonies du 30e anniversaire de Téléfilm. On a passé le film d'Atom Egoyan à Ottawa.

Le suivant est M. Schmeiser.

M. John Schmeiser (Canada West Equipment Dealers Association): Merci de m'avoir donné la possibilité de m'exprimer au sujet du prochain budget fédéral.

Nous considérons que si le gouvernement fédéral prend les mesures appropriées, notre industrie et nos collectivités peuvent prospérer. Nous estimons qu'il faut que le gouvernement fédéral fasse de l'allégement fiscal la priorité lors du prochain budget, ce qui à notre avis aurait des effets positifs sur la création d'emplois dans nos collectivités.

La disposition fiscale la plus importante pour nos membres est la déduction pour les petites entreprises. Nous avons peur que la déduction de 200 000 $ pour les petites entreprises ainsi que le crédit d'impôt de 16 p. 100 qui s'y rapporte, selon les dispositions prévues par les paragraphes 125(1) et 125(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu n'ait pas progressé au rythme du développement économique au Canada. Plus précisément, nos membres considèrent qu'il convient de revoir la déduction de 200 000 $ pour les petites entreprises ainsi que notre mécanisme de crédit d'impôt de façon à relever en quelque sorte le seuil fixé ou à réduire les taux d'imposition.

La disposition prévoyant une déduction pour les petites entreprises a pour but de procurer aux sociétés qui peuvent s'en prévaloir davantage de bénéfices après impôt qu'elles peuvent réinvestir pour assurer leur expansion. Nos membres considèrent que les avantages accordés n'ont pas été remis à jour et que des mesures de révision s'imposent dans l'immédiat.

Cet exposé a été préparé avec l'aide de l'Ontario Retail and Farm Equipment Dealers' Association. Nous avons aussi obtenu l'appui de l'Association des concessionnaires de machines agricoles du Québec ainsi que de l'Association canadienne des concessionnaires d'automobiles.

La plupart de nos sociétés membres sont de type familial et cherchent à appuyer le milieu agricole dans lequel elles résident. La majorité de nos concessionnaires sont installés dans de petites villes. En conséquence, nos membres sont généralement des employeurs importants dans la région qui les entoure. Les avantages économiques que procurent nos membres par le biais de l'emploi et du réinvestissement de leurs capitaux au sein des entreprises locales entraînent des retombées substantielles qui permettent de maintenir en vie nombre des collectivités concernées.

Le secteur et les entreprises de nos concessionnaires font largement appel aux capitaux. Le coût de l'acquisition et du financement des stocks a considérablement augmenté ces dernières années. Il en résulte un resserrement des marges et moins de fonds disponibles pour le réinvestissement et le remboursement des dettes.

• 1315

De plus, la conjoncture économique dans l'agriculture et la législation gouvernementale ne permettent pas que l'on répercute les augmentations de coût sur les clients. Il est très clair que les concessionnaires ont subi le contrecoup de la baisse du pouvoir d'achat des dollars qu'ils peuvent réinvestir dans leurs entreprises.

Le montant net après impôt correspondant à la déduction de 200 000 $ pour les petites entreprises est d'environ 157 000 $. Cette déduction n'a pas changé depuis une douzaine d'années. Avec un taux d'inflation de 2,5 p. 100, ce même montant en dollars de 1985 ne laisse qu'environ 116 000 $ à réinvestir dans l'entreprise.

L'une des sources traditionnelles de financement des petites entreprises, le propriétaire-gérant qui opère au sein de notre industrie, en est affecté. Pour que ces personnes puissent continuer à investir dans de petites entreprises, il faut que leurs capitaux leur procurent un rendement suffisant. L'effet moindre de la déduction accordée aux petites entreprises rend moins intéressantes les entreprises qui consomment beaucoup de capitaux, comme c'est le cas des concessionnaires d'équipement agricole. Ainsi, des dispositions telles que la déduction pour les petites entreprises sont très déterminants pour leur succès à l'avenir.

Les membres de la Canada West Equipment Dealers Association demandent que l'on revoit les seuils actuels de la déduction accordée aux petites entreprises, soit pour porter le seuil à un niveau supérieur aux 200 000 $ fixés pour les entreprises, soit en procédant par l'intermédiaire d'une réduction des taux d'imposition. Le fait que le seuil fixé pour les entreprises n'ait pas suivi le rythme de l'inflation et des coûts d'exploitation des entreprises est particulièrement préoccupant. Des mesures doivent être prises pour s'assurer que ces seuils fixés pour les entreprises seront indexés à l'avenir en prévoyant des dispositions de rattrapage.

Ce point de vue est appuyé par le groupe d'étude du caucus libéral national sur les emplois dans la petite entreprise, qui a passé en revue cette question dans son rapport: «Frayer la voie à l'emploi et aux petites entreprises», ainsi que nous le signale le député Tony Valeri. Ce rapport confirme une recommandation prise antérieurement en 1994 par un comité de travail sur la petite entreprise, qui avait recommandé que l'on relève progressivement le seuil à 400 000 $.

On y a vu un besoin à long terme. Nous ne sommes pas d'accord. Nous demandons que la question soit examinée et que l'on prenne immédiatement des mesures. Un tel changement aurait des répercussions considérables sur la vie économique des collectivités dans lesquelles opèrent toutes les petites entreprises. Des capitaux supplémentaires pourraient être employés par les entreprises, ce qui aurait des effets considérables sur les collectivités environnantes du point de vue de la création d'emploi, de la croissance des entreprises et des retombées des dépenses.

Je vous remercie de votre attention.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Schmeiser.

Madame Lara.

Mme Jean Lara (Immigrant Women Society): Je tiens à vous remercier de m'avoir invité. J'espère que vous n'avez pas fait une erreur en nous invitant, du fait de mon passé. Nous parlions trop dans mon pays et nous avons donc été jetés dehors. Nous disions la vérité. Mon mari était journaliste dans mon pays, et je faisais moi aussi de la télévision. Nous avons dit la vérité et on nous a expulsés. Je sais cependant que le Canada est un grand pays et que ça ne se produira jamais ici.

Je représente les femmes immigrantes de la Saskatchewan. Je n'ai pas rédigé de document officiel parce que j'étais hier soir très occupée à aider une autre organisation, l'Association indo-Canada, dans sa campagne de levée de fonds. J'ai donc en fait manqué de temps, mais j'ai pris des notes sur les questions que je voulais évoquer. Je vous parlerai du fond de mon coeur parce que j'ai fait l'expérience directement de la condition d'immigrante.

Quelles sont tout d'abord nos préoccupations en matière d'éducation? Il est très important que l'on reconnaisse nos diplômes. Certes, il est vrai qu'il y a à Edmonton un mécanisme d'équivalence qui permet de les évaluer, mais les immigrants qui arrivent n'ont même pas les moyens de verser 150 $ pour faire expertiser leur diplôme, sans compter qu'il est parfois même bien difficile d'obtenir les justificatifs dans notre pays. Tout cela coûte de l'argent. C'est donc un élément important que je tenais à mentionner.

En second lieu, la formation professionnelle est très importante parce que, lorsqu'on arrive d'un autre pays, il faut apprendre le nouveau système, celui de la société canadienne. Il nous faut donc un programme de formation professionnelle.

Il faut que l'on tienne compte des besoins culturels. Pourquoi suis-je en train de parler des besoins culturels? Prenons, par exemple, le cas d'un programme qui fonctionne du lundi au vendredi. Les immigrants travaillent du lundi au dimanche et il faut donc adapter spécialement ce programme pour tenir compte du temps dont ils disposent.

• 1320

Il y a donc des choses que même lorsqu'on cherche à améliorer... Généralement, les immigrants ne veulent pas être des prestataires de l'aide sociale. Ils ont leur dignité. Ce sont des gens fiers, et ils ne sont pas habitués à cela.

Pour ce qui est tout d'abord de la formation professionnelle, appuyer le mandat libéral visant à tenir compte des spécificités culturelles dans la formation professionnelle. Que se passe-t-il ensuite? On nous forme pour occuper n'importe quel emploi. Et ensuite, plus rien? Qu'allons-nous faire? Je ne dis pas que c'est une mauvaise chose, mais il faudrait que ce soit des projets de perfectionnement.

Du point de vue d'un immigrant, il y a un certain nombre de sujets que je voudrais aborder en raison de mes différentes implications dans la communauté. Ainsi, pour ce qui est des soins à domicile, il faudrait peut-être essayer de leur donner des moyens, de mettre en place un système leur conférant les moyens d'avoir leurs propres soins à domicile. Regardez autour de vous, vous verrez qu'il n'y a pas de soins à domicile pour les immigrants âgés. C'est là un autre secteur bien précis. Vous savez, nous avons notre propre alimentation mais nous n'aimons pas la vôtre. Que se passe-t-il? Comprenez-vous que lorsque nous avons notre propre alimentation...?

Ainsi, je me souviens quand j'étais à Berlin dans les années 1960, lors d'une visite en Allemagne. Nous étions cinq femmes d'origine asiatique. Il fallait voir comme nous aimions le riz. À Berlin, nous demandions toujours où se trouvait le restaurant chinois. C'était la première chose que nous demandions à Berlin. Vous savez, ces choses-là sont importantes parce que nous nous sentons mieux si nous pouvons manger ce qui nous plaît. Il faudrait peut-être y penser.

Voilà donc les secteurs: soins de santé, garde d'enfants. Il y a aussi l'importation de vêtements à l'étranger, combien de femmes savent coudre? Nous pourrions avoir une coopérative. Comment les faire démarrer? Il y a ici une famille d'environ huit personnes en mesure d'exploiter une entreprise à domicile. C'est une chose qu'elle sait faire.

Voilà les secteurs où l'on peut prendre l'initiative. Les membres d'une famille peuvent être formés à la couture. Ils pourraient peut-être coudre des gants, par exemple, ou des écharpes. C'est aussi simple que cela. Je pense donc qu'on pourrait les aider. Ils n'ont pas l'argent pour démarrer. Vous devriez vous en faire l'avocat. Comment, c'est à vous d'y penser.

En matière de justice, nous voulons que l'on s'occupe davantage de prévenir la criminalité, notamment en ce qui concerne les jeunes. Nous ne reconnaissons plus nos jeunes, parfois. Les immigrants s'intègrent et, je vous l'avoue, on se sent parfois étouffé tellement la loi est difficile. En prévenant la criminalité on leur ferait prendre conscience, notamment en ce qui concerne la toxicomanie, l'alcoolisme et la prostitution. C'est très important. Il faut s'occuper de la prostitution parce qu'il est si facile, vous savez, de vendre la beauté asiatique. C'est une aubaine pour les souteneurs.

Il y a aussi les préoccupations liées aux victimes de la violence. J'ai déclaré que les femmes et les hommes de notre communauté ont besoin d'éducation parce que leur réaction, en raison de leur culture et de leurs traditions, sont différentes de celles de la majorité. C'est bien difficile. Voilà six ans que j'essaie d'intervenir dans ce domaine, mais on ne m'écoute jamais. Tout ce que nous demandons, c'est un fonds alimentant un programme d'éducation permanente qui leur ferait comprendre comment se comporte la police ici, quelles sont les lois, etc.

Ainsi, nous demandons instamment que l'homme soit expulsé du domicile en cas de violence au foyer. Que se passe-t-il? Aucun d'entre nous n'a été nommé juge de paix.

• 1325

Il y a aussi l'agriculture en Saskatchewan. La Saskatchewan est une région agricole, et pourtant on ne cherche pas à former des gens à l'agriculture. Occupons-nous d'abord de la formation. Ensuite, il faut dès le départ des millions de dollars pour se lancer dans l'exploitation d'une ferme. La plupart des enfants d'agriculteurs abandonnent leur ferme; c'est ce que j'ai entendu, je ne sais pas si c'est vrai. Vous devriez nous dispenser une formation. Il y a peut-être des immigrants qui aimeraient exploiter une ferme, mais il n'y en a pas jusqu'à présent. Y en a-t-il?

Pour ce qui est de l'aide sociale—je l'ai déjà mentionné—la question des personnes âgées me préoccupe. Le gouvernement fédéral pourrait peut-être venir aider celui de la Saskatchewan en la matière.

Dans le domaine artistique, les immigrants ont de nombreux talents. Monsieur le maire Archer, vous avez peut-être entendu chanter Stella Salido. Elle jouait le deuxième rôle dans Miss Saigon et elle n'est pas très âgée. C'est peut-être une future étoile si nous lui accordons un appui suffisant.

Je ne sais pas. Nous avons donc de nombreux artistes. Je connais un artiste vietnamien qui est un compositeur, un lyriste et un pianiste. Toutefois, notre organisation est minuscule; je suis la seule à être engagée ici, et il se peut que le mois prochain je ne sois plus là parce que nous n'avons plus de crédits. Personne ne s'en est occupé. Que va-t-il se passer si nous avons une vedette sortie de la Saskatchewan qui s'engage dans cette voie, dans le secteur artistique? En plus, il y a tant d'artistes... Je vais simplement vous donner l'exemple de mon mari. Il est mort d'une attaque cardiaque par frustration. C'était le meilleur écrivain de mon pays. Il avait travaillé pour les Nations unies. Lorsqu'il est arrivé ici... C'est frustrant et ça fait très, très mal.

Pour finir, l'immigration. Les services fédéraux de l'immigration ne se sont jamais occupés des femmes immigrantes de la Saskatchewan. Bien sûr, ils l'ont fait pendant un certain temps, mais c'est fini. Nous n'obtenons aucun crédit en ce qui les concerne, et je suis découragée. Je ne sais pas ce qu'il va advenir de cet exposé, mais j'espère que quelque chose va se passer. On ne reconnaît même pas notre organisation comme organisme de règlement.

Je m'arrête ici mais je vous demande de vous pencher sur la question. C'est très important.

Deuxièmement, j'aimerais signaler que la Saskatchewan est le meilleur endroit au monde pour recommencer sa vie. Je viens d'un autre pays et je me souviens très bien que lorsque nous avons été exilés et que mon mari m'a dit «Nous allons aller en Saskatchewan» j'ai dit «Quoi, la Saskatchewan?». J'ai ensuite regardé le [Note de l'éditeur: Inaudible] international—je suis une fille de la ville; j'avais déjà fait le tour du monde—et je n'ai pas trouvé cet endroit. «Où veux-tu m'emmener? En Saskatchewan?» «Oui, c'est une région agricole.» Je pensais qu'il n'y avait que des montagnes et qu'il fallait les traverser pour avoir de l'eau. Je ne savais pas que c'était un pays plat. Je me trouvais dans l'avion et je me suis dit «Oh, c'est une plaine».

Il m'avait dit avant que nous arrivions au Canada qu'il avait visité tout le Canada et étudié toutes les provinces. Dans mon pays, il a écrit une série d'articles sur le Canada parce qu'il avait été invité par l'ambassade à s'y rendre. Il m'a demandé si je savais que la Saskatchewan était la conscience du Canada. C'est du vent mais c'est ce qu'il m'a dit.

En fait, à partir du moment où nous avons atterri... oui, cela a été le meilleur endroit pour nous. Les services fédéraux d'immigration devraient y envoyer tous les immigrants. Il est facile de s'y établir.

Merci.

• 1330

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Lara.

Une voix: Madame la présidente, j'aimerais intervenir une deuxième fois, si vous me le permettez, pour m'excuser. Je suis désolé d'être obligé de partir. J'en suis désolé, ce n'est pas parce que la discussion n'est pas intéressante. Je serai de retour dans une demi-heure environ.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci.

Merci, madame Lara. C'est une bonne chose que nous ayons tous été là parce que je crois que vous avez, avec votre exposé, donné des choses à faire à plusieurs personnes.

Monsieur Archer.

M. Doug Archer (maire, ville de Regina): Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de présenter, pour le compte de la ville de Regina, un exposé à votre comité permanent.

La question de la réduction du déficit et de la dette est, d'après moi, une question importante, non seulement pour les députés mais pour tous les Canadiens.

Voici dans quel contexte je vous dis ceci: j'estime qu'il y a des limites à ce que notre génération peut demander aux générations futures d'assumer en terme de coût de la fonction publique. Je ne vous dirai pas que j'ai une solution magique et que je peux vous dire à quelle vitesse cela devrait se faire et comment il faut régler cette question mais je sais toutefois que nous ne pouvons continuer à reporter indéfiniment nos dépenses actuelles sans causer de graves difficultés aux futures générations de Canadiens. Ce genre de chose me paraît inacceptable et je crois que cela est inacceptable pour tous les Canadiens.

Le défi consiste à trouver un moyen terme.

J'aimerais signaler le fait que le succès est peut-être une chose qui plaît au gouvernement. Je crois qu'il devrait également être satisfait d'avoir pratiquement réussi à éliminer le déficit.

Ce succès n'a toutefois pas bénéficié à tous les Canadiens. Notre taux de chômage est encore très élevé et cela est tout à fait inacceptable. Comme vous l'avez peut-être vu hier à la télévision, quelqu'un faisait remarquer que le standard de vie de la plupart des gens n'avait pas changé depuis des années. Si nous avons connu un certain succès sur la voie de la reprise économique, il reste encore beaucoup à faire pour que tout le monde puisse en profiter.

Je proposerais que si l'on envisage d'aider certaines personnes, on devrait aider celles qui ont payé le prix le plus élevé. Cela ne veut pas nécessairement dire le plus d'impôt. Lorsque je parle d'impôt, je pense à leur capacité de bénéficier du même standard de vie que nous souhaiterions avoir, ainsi que tous nos amis et voisins, auquel toutes ces personnes n'ont pas eu accès.

À Regina, nous faisons face à certains défis particuliers. Les restrictions budgétaires ont gravement touché le gouvernement provincial et peut-être encore davantage que les autres collectivités de la Saskatchewan, et même peut-être des différentes régions du pays, nous avons souffert de ces coupures, tant dans la fonction publique fédérale que provinciale.

Un grand nombre d'emplois sont en train d'être transférés de Regina à Winnipeg. Cela nous paraît difficile à comprendre. Je vous invite à lire la dernière page de mon exposé qui contient des chiffres concernant la main-d'oeuvre active dans les cinq grandes villes des Prairies. Il suffit de regarder les changements qui sont survenus au cours des quatre dernières années, 1991 à 1995, et que l'on trouve dans la dernière colonne, exprimés en pourcentage. Calgary, Edmonton, Saskatoon et Winnipeg ont connu une croissance économique considérable mais il n'y a pratiquement pas eu de création d'emplois dans notre collectivité.

Cela nous préoccupe beaucoup. Je crois que le gouvernement fédéral nous a complètement perdus de vue sur son écran radar, c'est ce que l'on peut penser lorsque l'on constate ce genre de situation. On transfère encore des emplois à Winnipeg alors qu'il serait tout aussi facile de les transférer ici, si l'on voulait le faire. Ce n'est pas vraiment la solution que je propose; je dis simplement que notre collectivité, tout comme certaines autres, a besoin d'aide.

• 1335

Je vais parler brièvement de certains secteurs auxquels le gouvernement fédéral devrait fournir une aide économique, en respectant votre projet global, économique et financier, de lutte contre le déficit et contre la dette.

En Saskatchewan, la production de pétrole est en augmentation. On me dit qu'elle représente plus de 20 p. 100 à l'heure actuelle. On me dit également que le gouvernement fédéral ne fait pratiquement aucune recherche dans cette province. Je crois qu'à un moment donné il va falloir reconnaître que notre province contribue de façon importante à l'économie du Canada. Il faudrait que le gouvernement fédéral s'efforce de respecter un certain équilibre dans les activités de recherche qu'il subventionne, que ce soit en totalité ou en partie. C'est à nous de nous occuper de la province et du secteur privé, et nous allons le faire mais puisque vous êtes des représentants fédéraux, nous voulons insister sur le rôle que vous pouvez jouer dans ce domaine. J'estime que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer. Nous espérons que le gouvernement fédéral va investir dans la recherche qui s'effectue à Regina et dans le centre de développement de l'Université de Regina.

Il existe un autre secteur qui pourrait profiter d'un investissement stratégique, c'est celui du tourisme et de la formation; je pense au centre de formation de la Gendarmerie royale du Canada qui se trouve ici à Regina. Évidemment, on s'occupe de l'aspect formation mais je pense que l'on pourrait également penser aux possibilités qu'offre la GRC du point de vue du tourisme.

J'ai du mal à comprendre que l'on dépense tant d'argent pour envoyer tous ces gens à Banff alors qu'il faudrait en fait répartir les fonds destinés au tourisme dans toutes les régions du pays au lieu de les concentrer de plus en plus, ce qui ne peut que nuire au parc national lui-même, à l'environnement, et finalement, à la qualité de l'expérience qu'on peut y vivre. Il existe d'autres possibilités et nous allons vous présenter un projet important dans ce domaine. Je tiens simplement à signaler cet aspect parce que cette question va se reposer à l'avenir.

On a parlé du dédoublement de la route Transcanadienne. J'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi nous n'avons pas mis sur pied un programme national de voies routières. En particulier, je peux vous dire que, si le gouvernement fédéral pense à accorder un appui à une liaison par train à grande vitesse entre Windsor et Québec, en se servant des impôts provenant des provinces des Prairies qui ne bénéficient elles d'aucun appui pour leurs aéroports et leurs routes, cette région va réagir très vivement. Il est tout à fait inacceptable pour nous de penser que l'on puisse prendre une telle décision.

D'après ce que je sais, le gouvernement fédéral ne s'est pas encore engagé dans cette voie. Je ne dis pas qu'il a pris un engagement à ce sujet. Je signale simplement la chose pour que, si vous abordez ce thème, vous sachiez que dans le domaine du transport il y a des questions qui se posent à l'extérieur de l'Ontario et du Québec.

Je sais que cela est une question environnementale importante pour le Canada, un pays qui essaie d'agir contre le réchauffement global et l'effet de serre, mais nous avons aussi nos problèmes ici. Nous aurions du mal à accepter que l'on subventionne le Canada central, l'Ontario et le Québec, avec nos impôts fédéraux, si cela était envisagé, sans que l'on accorde un appui comparable aux besoins de la région des Prairies en matière de transport.

Je tiens à parler du programme national d'infrastructures. Je pense que ce programme a été une grande réussite. Je dis cela parce qu'il touche toutes les collectivités canadiennes. Le gouvernement fédéral ne fait pas sentir sa présence dans toutes les collectivités. En fait, la plupart des collectivités constatent que le gouvernement fédéral n'y est pas présent. Il y a beaucoup de gens qui disent que le gouvernement fédéral fait peut-être beaucoup de choses et qu'il est important mais ils ne voient pas souvent ce qu'il fait pour eux dans leur vie quotidienne.

• 1340

Je vous signale que ce programme national d'infrastructures vient renforcer l'unité de notre pays et qu'il fait sentir la présence du gouvernement fédéral littéralement sur le terrain. Je ne suis pas en train de faire un jeu de mots mais les gens peuvent sentir cette présence et constater combien est réelle et tangible l'action du gouvernement fédéral. Il me paraît important que les contribuables qui sont sans cesse sollicités puissent voir quelque chose de réel et de tangible, pas nécessairement à Calgary, Regina et Winnipeg, mais dans toutes les collectivités du Canada. Cela ne se produit pas très souvent et ne s'est pas produit très souvent.

Le dernier point que je veux aborder—là encore, je vous renvoie à la dernière page de mon exposé—c'est le fait que nous avons déployé beaucoup d'efforts depuis plus de deux ans pour conclure une entente de développement pour Regina. Nous n'avons pas fait beaucoup de progrès, je regrette de le dire, mais nous savons que le gouvernement fédéral a appuyé des ententes de développement depuis 15 ans au moins pour la ville de Winnipeg, parce que cette collectivité avait besoin d'aide. Il y a une entente de développement à Edmonton. Mais si l'on regarde la situation qui existe dans notre collectivité, alors qu'Edmonton a vu croître de six pour cent le nombre des emplois et qu'à Winnipeg, ce chiffre est de six pour cent et qu'à Regina, il est de 0,4 p. 100, et pourtant nous avons du mal à en arriver à une entente de développement.

C'est ce que je voulais dire quand j'ai affirmé que notre collectivité avait disparu de l'écran de radar du gouvernement fédéral. Il faut s'occuper de notre ville, non pas pour nuire aux autres mais pour reconnaître que nous sommes également une collectivité. Nous avons des besoins. Nous demandons simplement que l'on fasse quelque chose pour résoudre les problèmes que nous connaissons dans notre collectivité.

Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur le maire Archer.

Nous allons maintenant passer aux questions. Chers collègues, je vous demanderais d'adresser vos questions à une personne en particulier. Si certaines personnes souhaitent ajouter un commentaire qui se rapporte directement à cette question ou à quelque chose qui a été dit autour de la table, je vous invite à le faire rapidement et brièvement.

Je vous demande également de poser des questions courtes. Il est presque moins le quart et nous devrions essayer de terminer à deux heures et quart. Nous allons voir si cela est possible.

Monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz: Je vais adresser mes questions au maire Archer.

Vous avez abordé de nombreuses questions qui touchent la plupart des localités de la Saskatchewan. Je ne parle pas précisément de Saskatoon mais des petites collectivités de la province.

Dans mon comté, nous assistons à une incroyable bouffée de croissance à cause du secteur du pétrole et du gaz. Il y a quelques années, l'usine de traitement et les autres aides vous ont donné un petit coup de fouet, mais cela a diminué depuis.

Vous avez parlé du programme d'infrastructures. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que l'avantage essentiel de ce programme est qu'il s'adresse au financement, chose que ne fait pas un programme d'aéroport; même si vous n'aviez pas besoin d'un aéroport, il fallait l'accepter. C'est peut-être, d'après moi, le meilleur aspect de ce programme. L'inconvénient est que, bien entendu, les trois paliers de gouvernement devaient dépenser des fonds et qu'il n'y a toujours qu'un seul contribuable qui doit sortir l'argent. Il faut espérer que le fait de pouvoir choisir vous a aidé.

Êtes-vous favorable à la fusion des gouvernements au palier municipal? Au risque de me faire l'avocat du diable, je vous demanderais si la ville de Regina pourrait administrer la ville de Moose Jaw et faire des économies. C'est peut-être un très mauvais exemple.

M. Doug Archer: C'est vrai. Il faudrait alors administrer également Ottawa.

M. Gerry Ritz: D'accord. Il y a des jours où je vous en ferais cadeau.

Êtes-vous favorable aux fusions qui s'opèrent dans d'autres provinces—on parle de fusionner les services de MR?

M. Doug Archer: Ce n'est pas un problème sur lequel s'est penchée la ville de Regina. Nous nous considérons comme étant une municipalité suffisamment importante pour que la question de la fusion ne pose pas.

M. Gerry Ritz: Mais c'est ce qui se passe à Toronto et c'est également un centre important.

M. Doug Archer: Cela dépend, je crois, des économies réalisées. D'après ce que je sais de la situation à Toronto, je ne suis pas convaincu que ce soit nécessairement une bonne idée. Mais je connais assez mal la situation, et je ne suis vraiment pas en mesure de vous en parler.

M. Gerry Ritz: Très bien. Dans votre diagramme, vous montrez que la main-d'oeuvre quitte la région de Regina. Calgary, Edmonton et Saskatoon connaissent une croissance économique. Celle de Regina est, bien sûr, négative. Y a-t-il un lien entre cette situation et vos taxes foncières et commerciales? Est-ce pour cette raison que les gens partent ou êtes-vous au même niveau que les autres?

• 1345

M. Doug Archer: Nous avons examiné notre fiscalité et l'avons comparé à celle des autres villes de la Saskatchewan et nous avons constaté que nous nous situions dans la moyenne. Six villes ont des impôts plus lourds et six ont des impôts plus faibles. Nous nous situons exactement dans la moyenne.

Cela dit, nous avons pris des mesures pour supprimer progressivement notre taxe commerciale, mesures qui vont entrer en application l'année prochaine. Nous aurons complètement supprimé la taxe commerciale en l'an 2000. Nous nous efforçons donc d'agir à notre niveau pour répondre aux préoccupations du monde des affaires et encourager les investissements et la création d'emplois.

M. Gerry Ritz: C'est effectivement votre palier de gouvernement qui a subi les coupures les plus dures. C'est vous qui êtes le plus près des gens et qui avez perdu des subventions. Je sympathise avec vous.

Je vais laisser les autres poursuivre.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Ritz. Monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom: Merci beaucoup, madame la présidente.

En tant que député local, je ne sais pas très bien à qui poser des questions—à moins que vous ne me donniez une heure. Je crois que je vais commencer par un sujet qui est particulièrement d'actualité, le Régime de pensions du Canada et les prestations d'assurance-chômage, qui sont devenues aujourd'hui les prestations d'assurance-emploi.

Je vais commencer par vous, monsieur Buck. Vous avez dit qu'en tant que responsable d'une petite entreprise qui emploie un certain nombre de personnes dans le secteur de l'assurance, les cotisations à l'assurance-emploi, alors que ce régime est excédentaire de plusieurs milliards de dollars, impose un lourd fardeau aux petites entreprises. Comme vous le savez, au cours des six prochaines années, si le projet de loi sur le RPC est adopté, les cotisations vont augmenter de 73 p. 100, tant pour les travailleurs que pour les employeurs.

Je me demande si vous pourriez expliquer aux membres du Comité des finances les répercussions que cela peut avoir sur les petites entreprises, en vous basant sur votre propre entreprise pour montrer quel sera l'effet concret de ces mesures sur vos projets en tant que propriétaire d'une entreprise et qu'elle en sera l'effet sur les personnes que vous employez.

M. Frank Buck: Je n'ai pas mes états financiers devant les yeux mais nous employons six personnes. Je crois que le plafond, que tout le monde n'atteint pas, est probablement de l'ordre de 3 000 $. Nous n'avons pas fait de projections, parce que nous n'étions pas sûrs de ce qui allait se passer et je crois que c'est ce que les dirigeants des petites entreprises et les gens d'affaires, tout comme les particuliers, veulent savoir. Quelles seront les répercussions? Va-t-on adopter ces mesures et si oui, pourquoi va-t-on le faire? Est-il raisonnable d'imposer le fardeau de ces augmentations aux travailleurs et aux gens d'affaires ou ne serait-il pas préférable de puiser dans les recettes générales?

Je suis sûr qu'on utilise les recettes générales pour subventionner d'autres secteurs du gouvernement. Peu importe qu'il s'agisse de financer l'éducation, etc., mais l'effet de ces mesures, si elles entraînent une augmentation de 73 p. 100, comme vous l'avez mentionné, va probablement se traduire par une augmentation de 5 000 $ à 6 000 $ par année. Avec la situation difficile que nous connaissons, cela va être dur à avaler.

Il nous est très difficile d'amener les compagnies d'assurances à accepter d'augmenter nos marges. Nous ne pouvons leur demander d'augmenter nos taux. En fait, la tendance est plutôt l'inverse. Si les banques ou les coopératives de crédit obtiennent ce qu'elles souhaitent, notre situation va encore s'aggraver. Il me semble que l'on se préoccupe vraiment très peu...

M. Lorne Nystrom: S'aggraver de quelle façon?

M. Frank Buck: Pour ce qui est de notre part de marché. Il faut donc tenir compte de cet aspect et de ce qui se produit dans notre secteur. Le maire Archer, qui est un de mes concurrents ici dans cette ville, sait fort bien qu'il y a beaucoup de gens qui parlent de fusion, d'expansion, pour lutter contre la concurrence que nous font les banques, les entreprises de vente directe, etc., qui, pour la plupart, exercent leurs activités dans les grands centres. Il y a donc également le fait que les entreprises locales doivent essayer de soutenir la concurrence sur le marché international, ainsi que d'autres facteurs.

Par exemple, les gouvernements s'assurent habituellement auprès des courtiers de New York. Ils n'ont même pas recours aux courtiers canadiens. La Société du crédit agricole s'installe à Regina avec ses employés et auprès de qui s'assurent-ils? Un courtier de New York. Ce sont là les différents facteurs qui nous touchent en tant qu'entreprise.

Pour être plus précis, j'aimerais savoir à l'avance, et je crois qu'il est du devoir du gouvernement d'informer les entreprises de ces choses, quelles seront les mesures prises. On devrait consulter davantage les petites entreprises et les faire participer à l'étape de la planification. Je ne parle pas de la Chambre de commerce ou de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, qui ne me représentent pas en tant qu'exploitant d'une petite entreprise. Je refuse d'en faire partie parce qu'ils ne représentent pas mon point de vue.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Wells, voulez-vous intervenir?

• 1350

M. Donald Wells: C'est un commentaire très bref. Je ne connais pas suffisamment la question pour parler des taux et dire s'ils sont appropriés ou non mais je veux m'assurer que les membres du comité savent que les frais et les taxes que l'on va imposer vont également s'appliquer à des organismes comme les universités. C'est un aspect que l'on oublie souvent. C'est comme lorsqu'on a réduit nos subventions et j'espère que vous n'oublierez pas cela.

M. Lorne Nystrom: L'autre commentaire que M. Buck formule dans son étude est que la réduction du déficit a été trop rapide. Cela ne semble pas cadrer avec ce que disent en général les entrepreneurs. Ils étaient très favorables à ce que l'on s'attaque très rapidement au déficit et à la dette. Je me demande pour quelle raison vous n'êtes pas d'accord avec les autres entrepreneurs sur ce point. Quel en est l'effet sur les petites entreprises? Vous ne semblez pas être d'accord avec Thomas d'Aquino ni avec Conrad Black. Je ne sais pas si c'est un de vos amis mais...

M. Frank Buck: La personne qui a dû quitter la salle—est-ce M. Perron?—m'a félicité pour mon exposé mais il a ajouté «Il y a une chose que vous n'avez pas mentionné et c'est le gaspillage des fonds publics». Nous, les exploitants de petites entreprises, voyons le gouvernement gaspiller de l'argent tous les jours. Je pourrais vous faire un long exposé sur ce que je pense du gouvernement, puisque j'y ai déjà travaillé.

Pour ce qui est de ne pas être d'accord avec les autres chefs d'entreprise, je vous demanderais de quel secteur vous voulez parler? J'ai entendu ce matin Paul Martin sur le réseau CBC et j'ai également entendu les réactions de certains courtiers en placements. Je ne pense pas que tout le monde se félicite de ce qu'a fait le gouvernement fédéral ou soit très impressionné par son action. Je tiens à dire que ce n'est pas le gouvernement fédéral qui a assumé ces coupures ou qui a créé l'excédent que l'on semble prévoir, mais ce sont nous, les particuliers. Il ne faut jamais oublier d'où vient finalement tout cet argent.

Pour ce qui est de ne pas être d'accord, je ne pense pas que les petites entreprises se fassent vraiment entendre. Nous n'avons pas les organismes qu'il faudrait. Nous n'avons pas les moyens de retenir les services de lobbyistes. Nous n'avons pas les moyens de payer des avocats ou des comptables ou des gestionnaires pour qu'ils fassent connaître nos demandes au gouvernement.

C'est pourquoi des audiences comme celles-ci sont très importantes. J'aurais aimé avoir plus de temps parce que je crois que nous aurions pu engager ensemble un débat intéressant.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Je vous encourage à continuer, monsieur Buck. Il y a beaucoup de députés qui vont tenir des réunions dans toutes les municipalités du pays et d'habitude, ils prévoient beaucoup plus de temps pour les discussions. J'espère donc que votre député va organiser des discussions et que vous pourrez y participer.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Monsieur Buck, j'ai moi-même exploité une petite entreprise et c'est pourquoi j'ai bien aimé vos commentaires. S'il y a un aspect que nous allons retenir lorsque nous allons retourner à Ottawa, en nous basant sur vos commentaires ou sur ceux d'autres personnes, notamment ceux de M. Wells, c'est que le montant des charges sociales entraîne une suppression d'emplois et ralentit l'embauche. Je crois qu'il est important que nous transmettions ce message à Ottawa. Cela pourrait améliorer la situation des diplômés de M. Wells et des collègues de Mme Brown lorsqu'ils obtiendront leur diplôme et qu'ils se retrouveront sans emploi.

Pour ce qui est des commentaires de Jean Lara, il y en a un qui m'a particulièrement intéressé. Lorsque vous avez parlé de l'accès des femmes, en particulier, vous parliez de l'accès des immigrantes au crédit et du rôle que jouait le secteur bancaire canadien dans ce domaine. Vous disiez que le rôle que ce secteur joue dans ce domaine n'était pas spécialement positif. Cela cadre tout à fait avec ce que j'ai entendu au cours d'une réunion que j'ai eue cette semaine avec des membres de l'Association des banquiers canadiens. J'ai soulevé la même question. La situation des petits entrepreneurs, en particulier des jeunes entrepreneurs, est très difficile. Le secteur banquier canadien a dans une certaine mesure abdiqué ses responsabilités pour ce qui est du crédit aux petites entreprises.

Les mini-prêts constituent une méthode qui a eu beaucoup de succès dans divers pays pour donner accès—en particulier aux femmes—au crédit, qu'il s'agisse de la Grameen Bank au Bangladesh ou des diverses modalités de cette méthode utilisée dans les collectivités des centre-villes, et même en Nouvelle-Écosse dans la collectivité de Lockeport.

Connaissez-vous les mini-prêts ou la Grameen Bank?

Mme Jean Lara: Non. C'est bien là le problème. Nous ne savons pas ce qui existe. Lorsque nous arrivons dans une nouvelle ville, nous ne savons rien. Nous ne connaissons même pas le nom des rues. Ce dont nous avons besoin immédiatement, c'est de gagner de pour survivre. Il y a des immigrantes qui ont l'intelligence et la ténacité nécessaires pour faire des choses mais elles n'en ont pas les moyens. Par exemple, lorsque nous allons voir un directeur de banque, nous ne pouvons emprunter de l'argent que si nous avons déjà une marge de crédit.

• 1355

M. Scott Brison: Cela revient à dire qu'on vous accorde un prêt que lorsque vous n'en avez pas besoin.

Mme Jean Lara: C'est exact, même si nous en avons besoin.

Deuxièmement, j'aimerais vous donner un exemple précis: les bonnes d'enfants. Nous avons aidé les bonnes d'enfants à se regrouper, en Saskatchewan. Je suis contente que vous ayez parlé de cela. Lorsqu'un membre de leur famille décède, elles ne savent pas où emprunter de l'argent; nous avons donc créé une coopérative qui leur permet d'emprunter 2 000 $: 1 500 $ pour le billet d'avion et 500 $ pour les frais funéraires.

M. Scott Brison: Voilà qui est intéressant, madame Lara. Vous faites fonctionner ce qui est, dans un certain sens, un organisme qui accorde des mini-prêts. Cela est très positif. Vous connaissez déjà les avantages que...

Mme Jean Lara: Oui, je les connais. J'ai démarré des coopératives en Israël. Cela est bon pour les petites gens mais qui veut nous aider?

M. Scott Brison: Voilà qui est du leadership.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Brison, je pense que M. Buck souhaite également intervenir.

M. Frank Buck: Comme vous l'avez sans doute déjà remarqué, j'ai beaucoup d'opinions sur tout un tas de sujets, dont l'un concerne les banques. J'ai personnellement travaillé dans un établissement financier pendant sept ans avant de travailler pour le gouvernement, et ensuite, dans le secteur privé, pendant près de 20 ans. J'ai placé dans une certaine banque, que je ne nommerai pas, une somme représentant six fois le montant du prêt que je voulais obtenir pour ma société, sous forme d'une marge de crédit. Ce prêt était garanti à 100 p. 100 et comportait très peu de risque. Il m'a été refusé.

C'est loin d'être un cas isolé. C'est pourquoi lorsqu'on envisage une expansion... Je crois que vous avez dit que l'on vous prête de l'argent seulement lorsque vous n'en avez pas besoin. C'est donc ce qui va se produire. Dès que j'aurai suffisamment d'argent pour rembourser toutes mes dettes et que je voudrai une marge de crédit dont je n'aurai pas vraiment besoin, ils me l'accorderont.

Prenez aussi le cas des frais de service. Il n'est pas surprenant que les banques fassent des bénéfices aussi énormes. Ils ne proviennent pas tant de la marge que leur procurent les taux d'intérêt mais plutôt de tous les frais supplémentaires qu'ils vous facturent.

Nous faisions affaire à un moment donné avec une banque qui nous demandait 50 $ par mois pour avoir accès à une marge de crédit que nous n'utilisions pas. À l'époque, nous étions une petite entreprise mais cela se produit constamment.

Pensez aux forclusions et à ce qu'elles coûtent aux particuliers et aux entreprises, pensez aux possibilités d'affaires qu'elles font disparaître et à la façon intraitable dont elles s'effectuent. C'était mon dernier commentaire.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci. Madame Brown, vous vouliez faire un commentaire?

Mme M. Brown: Je voulais simplement intervenir à propos des commentaires qui ont été faits au sujet de l'assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada. En tant que jeune adulte qui fait face à un taux de chômage qui s'élève à 17 p. 100 dans ma catégorie d'âge, je dirais qu'il est dans notre intérêt d'avoir un régime d'assurance-emploi généreux. Il faut tenir compte du fait que de nos jours il y a beaucoup d'emplois qui sont à très court terme et que les entreprises continuent à congédier du personnel, malgré la reprise économique. Nous ne voulons pas que l'on durcisse davantage ce régime. Nous savons qu'auparavant ce régime s'autofinançait. Nous avons assisté à son démantèlement.

Je crains beaucoup que le Régime de pensions du Canada n'ait le même sort. Je vais bientôt obtenir mon diplôme et j'aurai près de 30 000 $ de dette. Je ne vois pas comment je pourrais contribuer moi-même à un fonds de pension privé. Si le gouvernement fédéral décide de se retirer de ce domaine, cela va préoccuper gravement les jeunes qui étudient à l'heure actuelle.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Si vous me permettez d'intervenir, je mentionnerai qu'il y a des députés qui travaillent à modifier le RPC pour que votre génération et la mienne en bénéficient, le moment voulu. Merci.

M. Roger Gallaway: Madame Brown, le président Wells et son honneur le maire Archer ont soulevé un certain nombre de sujets qui concernaient la recherche. Je ne sais combien de fois je vais oublier la réponse mais je veux vous poser une question: que devrait faire, d'après vous, le gouvernement fédéral pour encourager la recherche? Pensez-vous à des subventions directes ou à des incitatifs fiscaux ou pensez-vous que le gouvernement fédéral devrait s'occuper lui-même de la recherche?

• 1400

M. Donald Wells: Il y a plusieurs réponses à cette question.

Tout d'abord, il est important de tenir compte du fait qu'il existe une grande différence entre ce que j'appellerais la recherche fondamentale et la recherche appliquée et le développement, même si, lorsque l'on examine ce que font les gens, on constate qu'il n'y a pas de solution de continuité et qu'il est impossible de distinguer ces deux domaines avec précision. Mais pour ce qui est de la motivation, il existe une grande différence et des mesures comme les crédits d'impôt et les mesures du même genre sont très efficaces lorsqu'il s'agit de la recherche appliquée et du développement; ces mesures n'encouragent que très rarement la recherche fondamentale.

Ces dernières années, le gouvernement fédéral a eu tendance à axer sur la recherche appliquée et le développement tous les programmes de recherche qu'il finançait. Cela s'est produit parce que le gouvernement a voulu obtenir un effet de levier avec les fonds qu'il versait et amener le secteur privé à participer à ces efforts.

Cela est fort louable mais je crois qu'il faut reconnaître que cela a eu une conséquence, à savoir la diminution des sommes dépensées pour la recherche fondamentale. Je tiens à mentionner que je suis membre du Comité de la recherche de l'AUCC et que je fais également partie de son conseil d'administration. Un fonctionnaire a déclaré au cours d'une de nos réunions que le Canada avait toujours été un des pionniers dans le domaine de la recherche fondamentale et qu'il fallait donc utiliser maintenant différemment les fonds disponibles.

Je crois que c'est un des commentaires les plus stupides que j'aie jamais entendus. Il revient à proposer que l'on abandonne le léger avantage que nous possédons dans le domaine de la recherche fondamentale et de l'acquisition de connaissances de pointe et que l'on ne commence à utiliser ces connaissances une fois qu'elles sont dépassées.

J'ai invité le gouvernement à renforcer l'aide qu'il accorde aux trois conseils qui attribuent des subventions. L'AUCC estime, tout comme nos partenaires, qu'il faudrait augmenter le financement accordé au Conseil de recherche médicale du Canada de 50 p. 100 sur une période assez courte et au Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie et de 60 p. 100 celui du Conseil de recherche en sciences humaines. Personnellement, je pense qu'il faudrait augmenter encore davantage la subvention accordée au CRSH parce que premièrement, c'est une subvention qui est peu élevée par rapport à l'activité financée et qu'en outre elle a été réduite de façon importante ces dernières années.

Je crois que la meilleure solution consisterait à subventionner les conseils de recherche qui sont bien établis et qui utilisent ces fonds en fonction de normes très strictes, ce qui devrait intéresser le gouvernement. Je ne pense pas qu'il serait souhaitable que le gouvernement s'occupe lui-même de la recherche. Il y a déjà les universités. Pourquoi ne pas utiliser une ressource qui existe déjà? Je préférerais que l'on oriente la recherche dans l'autre sens.

Mme M. Brown: J'aimerais faire quelques commentaires sur ce sujet. Je suis d'accord avec vous sur la question de la recherche appliquée et de la recherche fondamentale, dans ce sens qu'il faut continuer à faire de la recherche fondamentale et y ajouter un autre élément, à savoir préserver l'autonomie de la recherche qui s'effectue dans les universités. Il ne faudrait pas que les choix des sujets de recherche s'effectuent en fonction des besoins technologiques des grandes sociétés. Cela ne tient aucun compte du rôle que jouent le hasard et l'imprévu dans les découvertes. J'estime que les progrès que nous pourrions réaliser au cours des prochaines années, dans le domaine de la médecine et dans d'autres domaines, viendront des universités qui possèdent de bons programmes de recherche indépendants.

Je pense qu'il faut préserver et augmenter les subventions accordées dans ce domaine. Le gouvernement devrait augmenter ses subventions. Les entreprises privées devraient également jouer un rôle dans ce domaine par le biais d'une taxe sur l'éducation que l'on pourrait utiliser pour le financement des universités et de la recherche, et tout le monde profitera en fin de compte des découvertes faites grâce aux universités.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): M. Buck a peut-être quelque chose à dire à ce sujet. Monsieur Archer.

M. Doug Archer: Je suis tout à fait d'accord à ce qui vient d'être dit au sujet de la recherche fondamentale. Il existe un secteur de la recherche qui n'aura jamais accès au financement privé et qui aura toujours besoin de fonds publics mais j'estime que cette situation ne devrait aucunement empêcher le secteur privé et les universités de créer des partenariats qui permettent de combiner les priorités du gouvernement, les spécialités des universitaires, avec les besoins de l'industrie et du secteur manufacturier.

• 1405

Il est évident que notre économie a besoin de cette recherche et si les chercheurs peuvent nous aider à créer des emplois et à faire des découvertes utiles pour tout le monde, non seulement dans nos propres collectivités mais à l'échelle internationale, je crois qu'il faudrait alors essayer d'obtenir un effet de levier avec les fonds fédéraux qui sont affectés à ce genre de recherche appliquée.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Une brève question, monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway: Le maire Archer a parlé de l'absence de croissance du secteur manufacturier à Regina et Mme Brown a parlé du fait que tout le monde avait accès aux universités et aux collèges. Il faut croire qu'il y a des gens qui, pour une raison ou pour une autre, ne peuvent fréquenter l'université ou un collège.

Je me demande quelles sont les mesures qu'a prises la province de la Saskatchewan pour renforcer la formation dans ce qu'on appelle généralement les métiers spécialisés. Si l'on veut renforcer le secteur manufacturier, il faut avoir des ouvriers spécialisés qui n'ont pas de diplôme universitaire ou collégial mais qui ont une formation professionnelle comme celle d'ajusteur, pour qu'il puisse y avoir un secteur manufacturier dans une collectivité ou dans une province. Est-ce que l'on fait quelque chose dans ce domaine ici?

M. Donald Wells: Je vais essayer de répondre à cette question et ajouter quelques observations.

Il existe effectivement un programme de formation professionnelle dans la province et le ministère provincial dont relèvent les universités s'occupe également de ce volet. Il y travaille de différentes façons, dont l'une est notre excellent institut technique de la Saskatchewan.

Je tiens également à signaler que, les emplois que l'on crée actuellement, tant à l'échelon international qu'au Canada, exigent pour la plupart au moins 17 ans d'études. Pour la majorité d'entre nous, cela veut dire posséder au moins un baccalauréat.

J'ai rencontré récemment le vice-président d'une entreprise qui exerce ses activités dans le secteur de la construction automobile. Les vice-présidents s'occupent beaucoup d'obtenir des fonds. Cette personne m'a fait remarquer que son entreprise n'arrivait pas à combler des postes à 100 000 $ par an et qu'ils doivent aller à l'étranger pour le faire—et il s'agit là pour l'essentiel de travailleurs à la chaîne. Je lui ai posé d'autres questions et il m'a fait remarquer que la plupart de ces travailleurs devaient en fait posséder l'équivalent d'un diplôme universitaire ou collégial parce que de nos jours, les chaînes de montage font de plus en plus appel à des systèmes robotiques et informatiques.

Il y a également une aciérie ici à Regina qui vient d'ouvrir une nouvelle usine aux États-Unis, malheureusement, et le président de cette entreprise m'a déclaré que la plupart des travailleurs qu'il embauche pour la nouvelle usine, une usine moderne, possèdent des diplômes d'ingénieur.

Il ne faut donc pas oublier lorsque l'on pense à l'avenir, qu'il faudra non seulement davantage de gens qui possèdent la formation professionnelle dont vous avez parlé et qui ont été formés dans les collèges techniques ou grâce à d'autres programmes de ce genre mais que, de plus en plus, nous allons avoir besoin de gens qui ont fait des études supérieures.

Aujourd'hui même, dans le secteur du pétrole en Saskatchewan, on n'arrive pas à trouver des personnes qualifiées alors que nous avons beaucoup de gens qui cherchent du travail. Il va falloir changer certaines choses. C'est un problème très grave. C'est un problème qui préoccupe beaucoup les présidents d'universités avec qui je parle—tout comme, je crois, les autres personnes qui travaillent dans les universités. Comment adapter la formation aux besoins de l'industrie, tout en laissant aux étudiants la liberté de choix qu'il faut préserver dans une partie aussi importante de notre système?

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Iftody.

M. David Iftody: Merci, madame la présidente. Je sais qu'il ne reste pas beaucoup de temps. L'heure du repas est arrivée et depuis l'exposé de Jean, je ressens une grande envie d'aller dans un restaurant chinois. Mais nous allons bientôt nous occuper de cela.

Je tiens à dire que je suis très heureux d'être ici et que j'ai entendu des exposés de grande qualité ce matin et qui traitaient de sujets variés. J'aimerais sans doute poser une centaine de questions pour poursuivre une discussion fort intéressante mais j'ai pensé m'en tenir au sujet des petites entreprises parce que M. Schmeiser n'est pas encore intervenu. Vous pourriez peut-être faire certains commentaires à ce sujet. Je veux relier cela aux préoccupations exprimées par M. Buck ainsi qu'à celles de mes amis du Saskatchewan Wheat Pool.

• 1410

Madame la présidente, j'aimerais parler, pour le compte rendu, d'un aspect qu'a mentionné un des premiers conférenciers de ce matin, à savoir la spéculation sur les devises. Je veux aborder cet aspect parce qu'il vient de me venir à l'esprit. La Commission canadienne du blé effectue des opérations en dollars canadiens avec des fonds qui viennent du gouvernement du Canada. Je crois savoir qu'elle a ainsi réalisé, ces dernières années, des bénéfices de plusieurs dizaines de millions de dollars qui ont été remis aux agriculteurs.

Voici donc un cas, Lorne, où cet organisme est fort utile et vous ne voudriez certainement pas que l'on fasse payer davantage les agriculteurs de la Saskatchewan, monsieur Nystrom. Je le sais bien.

Cela dit, c'est la question des petites entreprises et de l'allégement du fardeau fiscal qui m'intéresse particulièrement. Je voulais faire un commentaire. Je vais vous demander quelle est la mesure que vous préféreriez voir adopter—l'augmentation du plafond de 200 000 $ qui permet à une petite entreprise d'être imposée à l'heure actuelle à 23 p. 100 ou l'abaissement du taux de l'impôt, à disons 18 p. 100, sur ce montant de 200 000 $? Quelle serait, d'après vous, la mesure la plus utile?

J'allais proposer à notre bureau de recherche d'examiner cette question parce qu'elle me paraît fort intéressante. Je pense qu'en particulier pour les femmes qui exploitent des mini-entreprises, les revenus sont généralement inférieurs à 200 000 $. La plupart des emplois créés—et M. Buck a parlé de la femme d'affaires qui vit dans ma circonscription électorale—sont le fait de cette catégorie d'entreprises qui créent deux, trois ou quatre emplois. Il y a eu une croissance explosive dans ce secteur et il serait peut-être bon d'examiner cet aspect.

Je vous invite également à intervenir sur le commentaire que j'allais faire. Le gouvernement a adopté comme politique de lutter contre l'inflation et de faire baisser les taux d'intérêt. En 1991, par exemple, vous auriez payé peut-être 1 200 $ par mois pour rembourser un prêt de 100 000 $ utilisé pour acheter une machine agricole. Aujourd'hui à sept pour cent, cela représente une réduction de près de 4 800 $ par année pour ce qui est des remboursements. Je pense qu'en se fondant sur le revenu moyen des Canadiens qui s'établit à 47 000 $, cela pourrait représenter une hypothèque. Avec cette réduction, cela revient à redonner à la famille moyenne une somme après impôts de près de 5 000 $ par an. Cela représenterait une augmentation de salaire de 20 à 25 p. 100. Cela est tout à fait impossible, comme M. Buck va vous le dire. Si cinq de vos employés venaient vous demander une augmentation de 25 p. 100, vous ne pourriez pas leur accorder.

Pour ce qui est de préserver les faibles taux d'intérêt pour que les agriculteurs puissent acheter ou louer davantage de machinerie agricole, par exemple, pensez-vous que l'on devrait conserver les politiques en vigueur actuellement ou envisager plutôt d'accorder un allégement fiscal général? S'il fallait choisir entre ces deux solutions, quelle serait votre préférence?

Je vais commencer par Canada West, après quoi les représentants du pool pourront intervenir s'ils le souhaitent.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Commençons par M. J. Schmeiser.

M. John Schmeiser: Idéalement, nous préférerions combiner une augmentation du plafond de 200 000 $ et une diminution du taux de l'impôt. Pour ce qui est de la situation actuelle, nous considérons que le plafond de 200 000 $ impose de lourdes restrictions à l'entreprise qui veut augmenter son capital. Les propriétaires de petites entreprises sortent de l'argent de leur entreprise et paient de l'impôt personnel sur ces sorties d'argent ou s'accordent des prêts à titre d'actionnaire. Si l'on augmentait le plafond de 200 000 $, nous estimons que les agriculteurs seraient moins portés à le faire et qu'il leur serait alors plus facile d'augmenter leur capital, ce qui, d'après nous, aurait pour effet de créer des emplois.

On a imposé une surtaxe de 2,2 p. 100 et ce taux n'a pratiquement pas changé depuis 12 ans. Il a été de 15 p. 100 à un moment donné. Il a été ramené à 12 p. 100 mais ce taux est remonté à près de 13 p. 100 avec la majoration d'impôt. Si nous étions sûrs que ce taux ne bougerait pas, nous serions certainement favorables à une augmentation du plafond de 200 000 $.

• 1415

Une dernière remarque sur le financement de l'équipement. Pour ce qui est du taux d'intérêt, il existe une différence importante dans les taux d'intérêt que les concessionnaires doivent payer à l'heure actuelle pour financer l'équipement qu'ils achètent en vue de le vendre. Il ne faut pas oublier que le prix des machines agricoles a monté en flèche depuis 1990. À titre d'exemple, en 1990, une moissonneuse-batteuse haut de gamme valait moins de 150 000 $. Aujourd'hui, il faudrait payer plus de 225 000 $. De notre point de vue, il est bon que les taux d'intérêt aient baissé mais ces taux s'appliquent à des montants plus élevés. Étant donné que la déduction pour les petites entreprises n'a pas été modifiée pendant toutes ces années, cela exerce des pressions sur les concessionnaires de machinerie agricole.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci.

Je sais qu'il y a sans doute d'autres personnes qui souhaitent intervenir. J'ai déjà mentionné que nous allions essayer de terminer à 12 h 15, parce que je sais qu'il y a des gens qui ont des engagements à respecter. Nous avons déjà perdu deux de nos intervenants, c'est pourquoi je me demande si nous pourrions demander à chacun d'entre vous de se limiter à une déclaration, à un commentaire ou à une intervention d'une minute. Nous allons commencer par donner la parole à Mme Brown pour un dernier commentaire d'une minute. Ceux qui veulent répondre à la question de M. Iftody pourront lui parler par la suite ou vous pouvez utiliser votre temps de parole pour le faire.

Madame Brown.

Mme M. Brown: Je veux revenir sur ma conclusion au sujet de l'effet qu'a eu, d'après nous, cette politique de réduction du déficit. Le déficit a été transféré aux particuliers, qu'il s'agisse des propriétaires de petite entreprise ou des étudiants qui se sont lourdement endettés pour obtenir leur diplôme. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de nous réjouir du fait que nous avons réussi à régler le problème du déficit parce que j'estime que nous n'y sommes pas encore parvenus. Par exemple, les étudiants n'ont pas les moyens de participer à l'économie, de la stimuler, et d'avoir accès à ces prêts à faible intérêt qui devaient, nous a-t-on dit, profiter à tous.

Nous demandons au gouvernement de prendre des mesures pour instaurer un climat qui permette à tous les Canadiens de participer activement à notre économie. Dans le cas de l'éducation postsecondaire, nous souhaitons que les fonds qui ont été coupés à cause du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux soient rétablis et nous voulons un système de bourses qui ait pour effet d'alléger la dette qu'assument actuellement les étudiants.

M. Peter Morin: Je vais saisir l'occasion d'aborder un aspect que j'ai oublié de mentionner. Avec le plan national sur la garde des enfants, on visait à augmenter le nombre des places de garderie. Je ne connais pas la situation qui existe dans les autres provinces, mais je dirais qu'en Saskatchewan, ce plan aurait eu pour effet de porter un coup mortel au système de garderies existant parce que celui-ci n'aurait pas été en mesure de soutenir la concurrence des places de garderie nouvellement créées.

Lorsque le gouvernement prend des décisions, je crois qu'il ne doit pas oublier que c'est un peu comme le cube de Rubik. Chaque fois que l'on change quelque chose, il y a quelque chose d'autre qui change, et ce n'est pas toujours un changement positif. Lorsque vous envisagez d'apporter des changements de ce genre, je vous invite à tenir compte de l'effet que ces changements peuvent avoir sur les programmes et les services existants.

M. Frank Buck: J'aimerais répondre aux commentaires qu'a faits, je crois, Mme Brown. Je suis tout à fait d'accord avec ces commentaires et je crois qu'à l'avenir, il faudrait que les jeunes participent davantage à ce genre d'audience pour qu'ils nous décrivent la situation qu'ils vivent actuellement et qu'ils nous parlent de leurs problèmes. Nos deux enfants viennent de terminer l'université mais nous avions la chance d'avoir notre entreprise pour pouvoir les aider. Il y a beaucoup de gens qui n'ont pas cette possibilité.

En résumé, je dirais que ma principale préoccupation est que les gouvernements devraient tenir davantage de consultations de ce genre et qu'il devrait s'agir de véritables consultations et non d'une simple mise en scène. Je crois que le gouvernement ne sait pas à l'avance quel sera l'effet sur les petites entreprises et les travailleurs des mesures qu'il prend. Même nos députés à qui nous parlons régulièrement n'ont pas toujours la possibilité de faire passer notre message à la Chambre des communes. C'est à cause de l'ordre dans lequel on donne la parole à la Chambre des communes et de la façon assez stupide dont les choses s'y passent parfois.

En résumé, j'aimerais que l'on poursuive ce processus de façon sérieuse—avant que les gouvernements n'agissent, ils devraient procéder à de véritables consultations.

M. Marvin Shauf: Je dirais que l'essentiel du message que nous voulons vous transmettre, c'est que l'agriculture a subi le dur contrecoup des restrictions financières imposées depuis quelques années. Le secteur de l'agriculture a dû assumer de nouveaux coûts et a vu le gouvernement fédéral réduire ses subventions.

• 1420

On a dit aux agriculteurs qu'ils devaient vendre leurs produits sur le marché international et soutenir la concurrence des autres producteurs, tout en se passant de l'aide des contribuables canadiens. Il est très difficile d'y parvenir lorsque les autres pays continuent à subventionner leurs producteurs. Les producteurs canadiens ont du mal à soutenir la concurrence qui règne sur le marché international. Les règles du jeu ne sont pas équitables et il est très difficile de pénétrer ce marché lorsque l'on continue à augmenter les coûts que les producteurs doivent assumer au moment même où le marché s'internationalise.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci. Monsieur Goetz.

M. Ron Goetz: D'une façon générale, je dirais que notre industrie a surtout besoin d'investisseurs. Là encore, je reviens à l'idée que cela va être soit les gouvernements, soit des investisseurs privés. Il faut donc créer une atmosphère favorable aux investissements.

Des lobbyistes vont bientôt vous demander, si ce n'est pas déjà fait—et je suis sûr que vous en avez déjà entendu parler—d'attribuer des fonds supplémentaires à ce que nous appelons dans notre secteur le «fonds Sheila Copps». Cela nous paraît être une chose souhaitable. Cela va non seulement augmenter l'importance accordée à la culture mais cela va également créer des emplois pour les jeunes.

Le dernier aspect à ne pas perdre de vue est que notre industrie se compose en fait de petites entreprises. Le gros de nos entreprises de production emploient moins de 10 personnes. Il faut nous traiter comme des petites entreprises, avec le genre de soutien et de protection que cela implique. On ne peut pas nous traiter comme des grandes entreprises. Nous n'en avons pas les moyens.

Je serais très heureux que vous n'oubliiez pas ces deux choses. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Schmeiser.

M. John Schmeiser: Le gouvernement fédéral a déjà reconnu dans le passé l'importance des petites entreprises et de la contribution qu'elles apportaient à notre économie. Nous lui demandons de ne pas l'oublier. À l'aube d'un nouveau millénaire, le gouvernement fédéral a réussi à remettre de l'ordre dans ses finances. Nous estimons qu'il est maintenant temps de mettre en place des allégements fiscaux pour permettre à notre économie de se développer davantage.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Schmeiser. Madame Lara.

Mme Jean Lara: J'aimerais que l'on accorde davantage d'importance à l'établissement des immigrants. Le gouvernement fédéral devrait prendre en compte notre organisme et je vous demande de faire connaître notre point de vue pour nous aider à offrir nos programmes.

En outre, je suis d'accord avec Mme Brown au sujet des jeunes. J'aimerais qu'on accorde davantage d'importance à leurs problèmes à l'avenir. J'ai six enfants et ils sont tous endettés. L'éducation mérite qu'on lui prête une attention particulière. Ces jeunes vieillissent aussi. Il faut renforcer les programmes destinés aux jeunes, parce que ce seront nos chefs de demain.

J'aimerais également revenir sur la question des bonnes d'enfants. Nous connaissons une bonne d'enfants qui souffre du cancer. Elle a une grosseur au sein et refuse de se faire opérer. J'ai beaucoup de mal à la convaincre de le faire parce qu'elle a peur d'être expulsée. Je tiens à signaler ce cas pour que vous nous aidiez.

Enfin, le développement économique passe, d'après nous, par l'entrepreneuriat.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Lara, et merci à tous nos invités d'être venus aujourd'hui.

Des voix: Bravo!

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): J'ai beaucoup apprécié entendre vos points de vue, ce qui vous a donné également l'occasion d'entendre d'autres points de vue, parce qu'ils diffèrent parfois des opinions que nous avions entendues avant de venir ici aujourd'hui. Si vous avez d'autres idées ou d'autres suggestions à faire au sujet du RPC ou des autres questions que le Comité des finances ou d'autres comités étudient, je vous invite à les faire parvenir à votre député ou à d'autres députés—n'oubliez pas que vous n'avez pas à payer le timbre.

• 1425

Notre comité va probablement commencer à rédiger son rapport vers le 6 novembre 1997 et il serait bon que vous nous envoyiez les commentaires que vous aimeriez ajouter avant cette date. Nous allons également procéder à ce moment-là à des consultations sur le RPC. Je vous invite à nous transmettre vos idées et vos suggestions sur ce sujet.

La réunion va reprendre vers 13 h 30, avec une demi-heure de retard sur l'horaire.

Je vous remercie beaucoup et je vous souhaite une bonne journée. La séance est levée.