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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent du patrimoine canadien


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le vendredi 10 juin 2005




¾ 0835
V         La présidente (Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.))
V         M. Carl Bessai (président , Citizen's Coalition for the Protection of Canadian Films)

¾ 0840

¾ 0845
V         La présidente
V         M. Howard Storey (président, Union of B.C. Performers)
V         La présidente
V         M. Howard Storey

¾ 0850
V         M. Rob Morton (trésorier, ACTRA - Vancouver, Union of B.C. Performers)
V         Mme Mercedes Watson (directrice générale, ACTRA - Vancouver, Union of B.C. Performers)
V         M. Thom Tapley (préposé du bulletin d'information pour les médias numériques, ACTRA - Vancouver, Union of B.C. Performers)

¾ 0855
V         La présidente
V         Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD)
V         Mme Mercedes Watson
V         Mme Libby Davies
V         Mme Mercedes Watson
V         Mme Libby Davies
V         Mme Mercedes Watson
V         Mme Libby Davies
V         Mme Mercedes Watson
V         Mme Libby Davies
V         Mme Mercedes Watson
V         M. Carl Bessai

¿ 0900
V         La présidente
V         M. Rob Morton
V         M. Carl Bessai
V         M. Howard Storey

¿ 0905
V         M. Carl Bessai
V         La présidente
V         M. Carl Bessai
V         La présidente
V         M. Gary Schellenberger (Perth—Wellington, PCC)

¿ 0910
V         M. Howard Storey
V         M. Thom Tapley
V         M. Gary Schellenberger
V         Mme Mercedes Watson
V         M. Gary Schellenberger
V         M. Howard Storey
V         M. Thom Tapley
V         M. Carl Bessai

¿ 0915
V         Mme Mercedes Watson
V         La présidente
V         M. Gary Schellenberger
V         La présidente
V         M. Gary Schellenberger
V         La présidente
V         M. Rob Morton
V         M. Gary Schellenberger
V         M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ)

¿ 0920

¿ 0925
V         M. Carl Bessai
V         M. Marc Lemay
V         M. Carl Bessai
V         Mme Mercedes Watson
V         M. Carl Bessai
V         M. Marc Lemay
V         La présidente
V         L'hon. Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.)

¿ 0930
V         M. Carl Bessai
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Carl Bessai
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Carl Bessai

¿ 0935
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Thom Tapley
V         M. Howard Storey
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Thom Tapley
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Rob Morton
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Thom Tapley

¿ 0940
V         M. Carl Bessai
V         M. Thom Tapley
V         M. Rob Morton
V         M. Carl Bessai
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Carl Bessai

¿ 0945
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Carl Bessai
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         La présidente
V         M. Rob Morton
V         M. Thom Tapley

¿ 0950
V         La présidente
V         Mme Libby Davies
V         M. Carl Bessai

¿ 0955
V         Mme Mercedes Watson
V         M. Rob Morton
V         La présidente
V         La présidente
V         M. Michael Francis (président, conseil d'administration, British Columbia Film)
V         La présidente
V         M. Michael Francis

À 1015

À 1020

À 1025
V         Mme Lodi Butler (directrice, Financement de films, British Columbia Film)
V         La présidente
V         Mme Anita Adams (directrice générale, First Weekend Club)

À 1030

À 1035
V         La présidente
V         Mme Liz Shorten (directrice, Mise en marché et communications, British Columbia Film)
V         Mme Lodi Butler
V         Mme Anita Adams
V         La présidente
V         Mme Sauching Ng (directrice générale, Moving Pictures: Canadian Films on Tour)

À 1040
V         La présidente
V         Mme Libby Davies

À 1045
V         Mme Anita Adams
V         Mme Libby Davies
V         Mme Anita Adams
V         Mme Libby Davies
V         Mme Anita Adams

À 1050
V         Mme Liz Shorten
V         Mme Anita Adams
V         La présidente
V         M. Michael Francis
V         La présidente
V         M. Michael Francis
V         La présidente
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Anita Adams
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Anita Adams
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Anita Adams
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Anita Adams

À 1055
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Anita Adams
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Michael Francis
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Michael Francis
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Michael Francis
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Michael Francis
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Michael Francis
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Lodi Butler

Á 1100
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Lodi Butler

Á 1105
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         Mme Lodi Butler
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         M. Michael Francis
V         L'hon. Sarmite Bulte
V         La présidente
V         M. Gary Schellenberger

Á 1110
V         M. Michael Francis
V         M. Gary Schellenberger
V         M. Michael Francis
V         M. Gary Schellenberger
V         M. Michael Francis
V         La présidente
V         M. Michael Francis

Á 1115
V         La présidente
V         M. Marc Lemay

Á 1120
V         Mme Sauching Ng

Á 1125
V         La présidente
V         M. Michael Francis
V         Mme Anita Adams
V         M. Marc Lemay
V         Mme Anita Adams
V         La présidente
V         Mme Sauching Ng
V         La présidente










CANADA

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 047 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 10 juin 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¾  +(0835)  

[Traduction]

+

    La présidente (Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent du patrimoine canadien. Nous souhaitons le préciser pour fins d'inscription au procès-verbal.

    Je m'excuse auprès de nos témoins de ce très léger retard, mais je suis encore plus navrée que nous ayons dû annuler la rencontre avec vous il y a environ un mois. Qu'à cela ne tienne, nous sommes très ravis que les choses aient marché et que nous puissions reprendre nos audiences, cette fois-ci à Vancouver, et entendre le point de vue de l'Ouest sur l'état de l'industrie cinématographique canadienne.

    Nous demandons à tous les témoins de nous faire un bref exposé, moins de cinq minutes si possible. Sachez que nous avons lu vos mémoires, car la chose la plus productive, à notre avis, c'est la discussion avec les témoins. Nous sommes arrivés au point où nous voulons explorer un peu plus en profondeur certaines questions, notamment d'un point de vue régional particulier. Si vous pouvez donc faire ressortir ce que vous souhaitez que nous fassions, je crois que ce serait on ne peut plus utile.

    Comme la question a été posée par plusieurs témoins, peut-être devrais-je vous expliquer ce que le comité est en train de faire. Compte tenu du retard dans la tenue de certaines de nos audiences, et en raison de la nature des témoignages et de la complexité de certains enjeux, nous espérons être en mesure de rédiger un rapport provisoire. Le but est de présenter les questions dont les témoins nous ont parlé et quelques recommandations qui nous ont été soumises et, ensuite, de distribuer le rapport aux témoins qui ont comparu devant nous pour leur demander leur réponse à certaines questions très spécifiques avant de rédiger un rapport définitif. Il se peut que nous ayons à tenir d'autres audiences à l'automne, selon la nature des commentaires qui nous parviendront. Voilà donc ce que nous escomptons faire.

    Sur ce, je vais donner la parole au représentant de la Citizen's Coalition, M. Carl Bessai.

+-

    M. Carl Bessai (président , Citizen's Coalition for the Protection of Canadian Films): Merci. C'est un grand plaisir pour moi d'être ici, et merci à vous d'être venus.

    Je vois que je n'ai pas beaucoup de temps, et c'est pourquoi je veux aller droit au but en faisant ressortir ce qui, à mon sens, constitue le véritable enjeu. Je suis porte-parole d'un groupe de personnes. Notre coalition regroupe de nombreuses personnes, dont des cinéastes et des amateurs de cinéma. Vous en entendrez davantage sur la question du First Weekend Club, qui est un autre groupe de citoyens. D'ailleurs, je siège au conseil d'administration de ce groupe aussi, et je suis réalisateur.

    Au Canada, nous réalisons des films grâce, à mon avis, à l'appui de la télévision. Je parle de longs métrages, c'est-à-dire des films qui sont financés en partie par des distributeurs qui font des mises de fonds et en partie par les licences de radiodiffusion, lesquelles garantissent le fonds aux fins de distribution.

    Cela signifie qu'à cause de mesures législatives telles les règles régissant le CRTC et qui visent à protéger le contenu canadien diffusé en ondes, les longs métrages canadiens se trouvent un créneau à la télévision, et c'est d'ailleurs la seule raison pour laquelle les distributeurs nous donnent des avances pour financer leurs films. J'en suis à mon cinquième film à titre de réalisateur. En fait, j'ai un tournage à faire aujourd'hui, et nous avons tourné des scènes toute la semaine; c'est pourquoi je suis un petit peu fatigué.

    C'est très frustrant de réaliser des films et de constater qu'il n'y a pas de marché pour les vendre. Imaginez que vous arrivez au marché avec une tarte, vous attendez que quelqu'un veuille bien l'acheter alors que vous vous êtes donné du mal à présenter cette belle tarte, faite à la main... et vous constatez qu'ils ont déménagé le marché, que le marché n'a jamais même existé ou que c'est un Wal-Mart.

    Ce dont je suis venu vous parler en réalité, c'est comment changer cette situation, comment trouver une façon d'utiliser notre législation pour protéger le marché. Je ne parle pas de fiscalité, ni d'enlever quoi que ce soit à qui que ce soit. Je parle de ce qui, à mon sens, constitue un droit souverain, c'est-à-dire le droit du peuple de ce pays de voir et de vivre l'expérience des longs métrages. À mon avis, c'est quelque chose que nos amis du Québec comprennent un peu, car la langue les a aidés à se constituer un marché.

    Au cours de vos déplacements, vous entendrez beaucoup parler de la nécessité de nous doter d'un système de vedettariat, de la nécessité d'augmenter les fonds pour le marketing, de la nécessité d'injecter davantage de fonds dans la distribution. Grâce aux fonds qui nous parviennent de l'État fédéral, nous soutenons la composition de scénarios, la production de films, la conception d'affiches et de bandes-annonces... bref, nous soutenons tous les aspects de la production d'un film, sauf quand il s'agit de son exploitation...

    Je veux préciser clairement la distinction entre la distribution et l'exploitation d'un film. Le distributeur, c'est celui qui prend notre film et qui le remet à l'exploitant. L'exploitant, lui, c'est l'utilisateur final. Autrement dit, c'est la salle de cinéma. Quand on arrive à ce stade-là, ce stade important où l'exploitant peut accéder au marché et où la population peut voir le film, on se rend compte qu'il n'y a pas de place. Aucune place libre sur l'étagère.

    J'ai des enfants, et nous avons tous des enfants, nous avons tous des familles, et partout au pays, il y des gens qui sont en train de grandir. Il fut un temps où la situation était la même dans le domaine de la musique, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas de place libre sur les étagères. Puis nous avons adopté une loi. Et à partir de là, des disc-jockeys récalcitrants ont néanmoins commencé à jouer cette musique sur les ondes, et maintenant nous avons une industrie musicale. La même chose s'est produite dans le domaine de l'édition. Des éditeurs réticents comme McClelland and Stewart ne voulaient pas publier le premier livre de Leonard Cohen. Des écrivains ont alors fait pression en insistant auprès d'eux sur le fait que c'était quelqu'un d'intéressant. Les subventions, d'une part, et la législation, d'autre part, ont aidé les maisons d'édition à prendre de l'expansion et à prospérer. Les écrivains canadiens jouissent désormais d'une réputation internationale. Pourquoi ne pouvons-nous pas faire la même chose pour le cinéma?

    Je pense qu'il serait naïf de prétendre ici... vous avez lu mon mémoire. Nul besoin d'entrer dans les détails pour vous donner un exemple qui illustre le mieux l'utilisation efficace d'un contingent à l'écran. Mais pour récapituler brièvement, un contingent à l'écran est essentiellement un outil législatif visant à créer un espace pour le cinéma.

    La Corée l'a fait massivement. Pour ma part, j'estime que bien que ce soit la mesure la plus efficace à prendre, il est extrêmement difficile d'adopter un texte législatif en la matière. En Corée, on a exigé que les salles de cinéma réservent 140 jours par année à des films coréens. Vous pouvez en imaginer l'impact sur le marché. Du coup, ces films trouvant preneur, par voie législative, les distributeurs coréens se sont vite aperçus du rendement sur leur investissement. Ainsi, des entreprises privées ont commencé à prendre au sérieux ces films, parce qu'elles ont compris que ces films n'aboutiraient pas sous forme de DVD sur une étagère dans un club vidéo quelque part. En fait, le film était assuré de jouer au grand écran pendant un certain temps. Tous ces facteurs, y compris la sensibilisation du public, la publicité que le film suscite, le marketing accompagnant la sortie d'un film de ce genre, c'est de l'argent bien investi à condition d'avoir un marché. Les 140 jours en Corée, c'est quelque chose d'absolument phénoménal, et d'ailleurs le gouvernement américain a été extrêmement contrarié par cette mesure. Celui-ci a fait maintes pressions, mais les Coréens se sont cantonnés dans leur position et ont maintenu ce contingent.

¾  +-(0840)  

    Je crois qu'au Canada, c'est plus difficile. Nous savons tous que nous sommes cousins, frères, voisins, mais soyons honnêtes et francs. Dans ce marché qu'on appelle le Canada, l'industrie du long métrage des États-Unis contrôle dans le Canada anglais, 98 p. 100, parfois 99 p. 100 des écrans. Dans toute autre industrie, c'est tout simplement un monopole—il faut l'appeler par son nom—et dans toute autre industrie, il y aurait des lois pour équilibrer les choses.

    C'est ce dont je veux m'entretenir car notre mémoire porte essentiellement sur la largesse d'un contingent à l'écran. Il faut essayer de trouver des idées pratiques et de présenter cela d'une façon avantageuse. Si l'on considère l'ensemble du pays—en fait une poignée de grandes villes—j'estime que l'industrie cinématographique américaine gagne énormément d'argent dans ces énormes multiplexes. Ils sont essentiellement dans les banlieues ou à l'extérieur des centres. Il y en a un dans chaque centre-ville mais, habituellement, il s'agit des Richmonds, des Etobicokes, des Mississaugas où il y a énormément de banlieusards bon public pour ces spectacles américains.

    Si l'on prend un petit film comme The Delicate Art of Parking, un film d'ici, ou, par exemple, un film Atom Egoyan et que par voie législative, nous demandions à un exploitant de le présenter dans un multiplex dans les banlieues, il est évident que ce serait un échec. Nous savons qu'il serait là comme perdu et que la majorité des gens n'iraient pas le voir et cela découragerait tout le monde.

    Cette idée d'un contingent à l'écran comme outil pourrait permettrait de cibler précisément les centres urbains. J'ai eu des contacts avec un certain nombre de distributeurs. Nous convenons tous que chaque ville a un marché pour ce que je considère être le cinéma canadien, le cinéma de niche, et nous travaillons avec des distributeurs et des exploitants pour cibler les cinq ou six cinémas de centre-ville pour ce genre de programmation de niche—car je ne crois pas que les Canadiens font d'énormes super productions et je ne pense même pas qu'il faille en parler, car nous n'avons pas les moyens—nous pourrions prendre cette idée de contingent à l'écran et l'appliquer à la création d'un bassin d'écrans, travailler avec ces écrans pour créer un contingent. Par exemple, au centre-ville de Vancouver, le cinéma Fifth Avenue est très connu des cinéphiles. Si nous savions qu'une salle de ce cinéma présentait des films canadiens en permanence et que nous travaillions avec l'exploitant pour nous assurer qu'il ne perd pas d'argent, qu'il bénéficie de certains appuis...

    Nous dépensons énormément d'argent à réaliser ces films. Le budget de Téléfilm Canada est énorme. Nous savons tous que tout le monde est frustré. Pourquoi ne va-t-on pas voir ces films? J'ai l'impression que si nous envisageons l'idée d'un contingent et que nous l'appliquons à un réseau précis de cinémas, nous pourrions commencer à créer ce que j'appelle une destination pour le cinéma canadien.

    Certains parleraient de ghettos, mais dire que le cinéma peut faire face à la concurrence des grandes superproductions américaines me semble parfaitement illusoire. Si l'on veut que les choses changent, si l'on veut créer un public, un marché, il faut mettre des produits en vente et, pour le moment, ces produits sont invisibles. Dans le Canada anglais, on ne connaît pas ces films. Ce contingent serait un contingent ciblé. Réellement, honnêtement, est-ce trop demander quand on considère la façon dont est dominé le marché?

    C'est une façon de le présenter et je viens encore ajouter une autre petite idée avant de répondre à vos questions. Il nous semble en effet très intéressant à propos de ce contingent—même si je pense qu'il faudrait un peu plus de temps et un peu plus d'infrastructure pour cela—de créer ce que j'appelle une toile, un genre de chaîne de cinémas. Nous recourrions à la technologie numérique, qui est nouvelle et très enthousiasmante, nous créerions un réseau de cinémas. Je sais que l'Office national du film commence à y réfléchir. Nous créerions une chaîne de cinémas—c'est-à-dire une chaîne de haut niveau, de qualité, pas le genre de multiplex avec popcorn, mais quelque chose qui ressemblerait davantage à ce que Daniel Langlois a fait à Montréal avec Ex-Centris. C'est un genre de cinéma urbain haut de gamme et c'est là que nous présenterions le cinéma canadien.

    Un film canadien comme It's All Gone Pete Tong, coproduction avec le Royaume-Uni, sera très populaire. Ces films n'ont évidemment pas besoin d'aide s'ils démarrent bien et que ça marche. Ils peuvent aller dans les banlieues, tout le monde est content. Mais il y a un certain nombre de films qui ne feront jamais cette transition et je crois qu'il y a tout de même un public pour eux.

¾  +-(0845)  

    La difficulté, c'est ce que dans le métier nous appelons la chasse aux oeufs de Pâques, c'est-à-dire que les films sont lancés et tout le monde ou presque sait qu'ils ont été lancés, mais personne ne sait vraiment où on peut les voir. Ceux qui s'efforcent d'en faire la promotion ne peuvent jamais vraiment faire un bon travail, parce que les exploitants de films sont toujours préoccupés par leurs clients a priori, soit les majors américaines. Ce client a une relation privilégiée avec l'exploitant. Si leurs dates changent, ou s'ils décident de modifier leurs dates, c'est le film canadien qu'on déplace, et le public n'arrive pas à le trouver.

    Cette idée de destination est bonne, parce qu'elle nous soutiendrait et nous épargnerait la concurrence féroce avec le secteur de l'exploitation et de la distribution dominé par les États-Unis et nous donnerait l'occasion de trouver notre public.

    Par exemple, un long métrage canadien type rapporte environ 2 000 $ CAN la première semaine, alors que le gouvernement fédéral a investi jusqu'à 1 million de dollars dans sa réalisation, c'est presque à pleurer. En tant que cinéaste, je me dis parfois que je ferais tout aussi bien de me tenir en haut de l'escalier roulant d'un cinéma avec une pile de billets de 20 $ et de les distribuer aux gens pour les inciter à aller voir le film, et que cela nous reviendrait moins cher à tous. Nous pouvons faire certainement mieux que ce que nous faisons maintenant.

    Voilà pour mes idées : nos idées; je suis navré. Je ne suis qu'un porte-parole.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous allons maintenant entendre la Union of B.C. Performers. Je remarque que l'ACTRA est bien représentée. Je tiens à dire que nous avons entendu des représentants de l'ACTRA à chacune des séances que nous avons tenues. Je le rappelle, la discussion est des plus importantes. Mais il n'est pas très important d'entendre à nouveau ce que nous avons déjà entendu, alors si vous pouviez vous en tenir à ajouter à ce que nous avons déjà entendu quelques idées concernant cette région particulière, je vous en saurais gré.

    Qui fera l'exposé?

+-

    M. Howard Storey (président, Union of B.C. Performers): Je vais commencer. Je crois que nous ferons chacun une brève déclaration. Il est assez difficile d'imaginer un acteur s'en tenir à quelques paroles.

+-

    La présidente: Il en est de même pour les politiciens, alors revenons-en au dialogue et aux échanges spontanés dès que possible.

+-

    M. Howard Storey: C'est vrai; je l'avais remarqué. Je suis un acteur mais aussi un politicien, étant président de la Union of B.C. Performers, et je suis accompagné par trois de mes collègues qui se trouvent à ma droite.

    Permettez-moi simplement de dire ce que Carl Bessai a déjà dit. Je ne l'avais jamais rencontré, mais apparemment nous sommes frères, et je m'en réjouis. Nous sommes en faveur de l'établissement de partenariats avec des partenaires de l'industrie, le gouvernement—avis aux intéressés—pour essayer de collaborer afin d'amorcer le type de changement dont parle Carl et pour être vraiment en mesure de nous raconter mutuellement nos histoires de Canadiens, et de faire connaître ces histoires, naturellement, au reste du monde dans la mesure du possible. C'est une quête qui nous semble incroyablement difficile mais qui nous apporte beaucoup.

    C'est nous-mêmes qui avons lancé le programme indépendant en Colombie-Britannique, qui est une tentative visant à rallier toutes les parties afin qu'il devienne possible d'assurer une production nationale en C.-B. D'entrée de jeu—nous répondrons aux questions un peu plus tard, je l'espère—nous sommes à l'origine du programme Moving Pictures dont vous avez entendu parler hier, je pense. Je siégerai sous peu à son conseil d'administration afin de miser sur ce qui existe déjà et de présenter nos solutions.

    Nous sommes à l'origine du Alibi Unplugged/First Weekend Club dont vous entendrez aussi parler cet après-midi, ainsi que du programme Crazy8s, un programme extraordinaire. Je ne sais pas si vous êtes au courant—il s'agit de courts métrages de huit minutes créés au moyen de 800 $ sur une période de huit jours. La moisson a été extraordinaire. Je pense que Tom vous en touchera un mot. Il s'agit de 24 films, d'une très grande qualité—il va sans dire que les progrès de la technologie y sont pour beaucoup. Nous leur accordons tout notre appui. Nous sommes redevables à l'extraordinaire pépinière de talents qui existent en ce moment en Colombie-Britannique. Avec un peu de coopération et de collaboration de la part de partenaires de l'industrie et de partenaires gouvernementaux, nous pouvons vraiment faire en sorte que le secteur cinématographique tourne rondement comme moyen d'expression des réalisations télévisuelles et cinématographiques canadiennes à l'échelle mondiale.

    Oh, pour l'amour du ciel. Que devrais-je ajouter d'autre?

    Comme Carl l'a mentionné, nous pourrions être un extraordinaire centre de coproduction, parce que nous ne pouvons nous limiter à notre propre expression, mais nous pouvons la présenter ensuite à l'auditoire américain, à l'auditoire anglais au sens large. Je pense que la C.-B. est toute désignée pour le faire.

    Avant de terminer, permettez-moi d'ajouter que nous sommes très fiers d'avoir soutenu une production récente qui rend hommage au cinéma canadien d'un océan à l'autre et qui s'intitule Weird Sex and Snowshoes, qui a été produite par Omni Film Productions, dont des représentants sont ici parmi nous et qui a éprouvé de grandes difficultés dans cette entreprise. Nous avons pris fait et cause pour eux afin d'obtenir les droits d'usage, et nous y sommes parvenus. Ils nous en ont été très reconnaissants, et ce fut pour ainsi dire notre première expérience de partenariat véritable. Voilà qui rend hommage au cinéma canadien et nous donne une idée de ce qui se passe d'un océan à l'autre, sur le plan de l'histoire. Je pense que cela a été une expérience très riche.

    Quoi qu'il en soit, notre premier point a trait à la politique canadienne en matière de long métrage. Nous sommes bien sûr en faveur du maintien de toute forme d'appui qui nous permet de continuer à faire notre travail.

    Je cède maintenant la parole à Rob Morton.

¾  +-(0850)  

+-

    M. Rob Morton (trésorier, ACTRA - Vancouver, Union of B.C. Performers): Je suis le trésorier de mon syndicat, l'Union of B.C. Performers. Il me revient donc de vous parler de questions financières et d'autres sujets associés du même genre.

    Comme vous le savez je n'en doute pas, à Vancouver, le secteur commercial est surtout—à 85 ou 87 p. 100—une industrie des services, la majorité de ceux-ci allant aux États-Unis. À Vancouver, nous voyons l'assemblage des investissements privés ou commerciaux qui sont réunis à Los Angeles, New York ou que sais-je encore, en tout état de cause au sud de la frontière. Ils composent un scénario, et ils viennent chez nous, et ils y font la production et une partie de la préproduction, puis ils rentrent aux États-Unis pour faire la distribution et ils empochent les bénéfices.

    Aussi étrange que cela paraisse, nous pensons que la même chose pourrait en fait se passer ici, au Canada. Nous avons le sentiment que la formule d'aide gouvernementale aux longs métrages ne devrait pas être modifiée, qu'elle doit continuer à exister. L'industrie cinématographique en a besoin pour son développement, à des fins pédagogiques et que sais-je encore, mais nous estimons qu'il faut également créer en parallèle un univers financier faisant appel au secteur privé afin de créer de façon durable une industrie cinématographique au Canada. Les gouvernements vont et viennent. Si nous pouvions stimuler un système privé, que ce soit un concept semblable aux actions accréditives qui existent dans le secteur des ressources ou d'une formule faisant intervenir du capital de risque—des sociétés par exemple—il faut voir comment nous pourrions mettre cela en place afin d'avoir une alternative, soit travailler avec le système public, soit travailler avec le système privé.

    Ce genre d'investissement ne peut toutefois être limité à la seule production. Il doit pouvoir être offert à toutes les étapes, depuis le développement et la production, jusqu'à l'après-production, la distribution et l'exploitation. Malheureusement, à notre grand regret, les films canadiens arrivent en bout de liste parce qu'ils n'ont pas suffisamment d'argent pour la promotion.

    C'est vraiment regrettable. Nous faisons un excellent produit, un produit tout à fait respectable. Mais dans une certaine mesure, ce produit ne passe pas à l'affiche parce que les gens ignorent qu'il existe, de sorte qu'il faut ouvrir cela à toutes les étapes de la production, d'un bout à l'autre.

    Au milieu des années 80, nous bénéficiions évidemment de ce merveilleux régime d'abri fiscal, la DPA. Dans certains cas, il y a eu des abus, c'est sûr, mais vous savez quoi? Ce système a permis à une industrie de se bâtir. Il nous a appris à faire des films. Certains de ces films étaient des navets, certains d'entre eux ne sont jamais passés à l'affiche, mais cela a fait affluer de l'argent chez nous, cela a créé de l'enthousiasme. Mais ensuite, on a pris le bébé, l'eau du bain et la baignoire et on a tout mis à la poubelle parce qu'il y avait eu des abus. Je pense qu'il est grand temps de reprendre le bébé, et peut-être l'eau aussi, et d'y jeter un coup d'oeil, ou alors simplement de reprendre la baignoire. Voyons donc ce qui existe.

    Nous croyons que c'est en stimulant l'investissement privé grâce à la vulgarisation et à un vecteur financier que nous pourrons construire de façon durable cette industrie, voire profiter un peu de cet énorme marché qui existe aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Cette industrie a une vocation mondiale. J'ai la conviction que grâce à l'investissement privé, le cinéma canadien peut se relever, prendre sa place dans le monde et imposer sa marque.

+-

    Mme Mercedes Watson (directrice générale, ACTRA - Vancouver, Union of B.C. Performers): Merci.

    Je m'appelle Mercedes Watson, et je suis directrice générale de la Union of B.C. Peformers au sein de l'ACTRA. Je vais m'en tenir à la demande de la présidente en évitant de m'éterniser sur nos différents arguments.

    Avant d'ouvrir la discussion et de céder la parole à mes collègues, je voudrais dire la chose suivante : il est certain que la distribution et la présentation sont des éléments clés de la réussite de l'industrie du cinéma et de la télévision.

    J'ai travaillé dans cette industrie pendant l'essentiel de ma carrière professionnelle, et je peux dire que ce qu'il nous faut, c'est un engagement—un engagement en temps et en argent—pour faire voir les films, pour constituer un auditoire susceptible d'apporter son soutien à une cinématographie et à un art dont les Canadiens pourront rester fiers et dont ils pourront profiter dans l'ensemble du pays.

    Je serai heureuse de répondre aux questions. J'ai une bonne expérience de l'industrie cinématographique et je ne veux pas accaparer le temps de parole, mais j'aimerais parler en particulier du modèle de distribution, qu'il faudrait peaufiner considérablement pour assurer le succès du cinéma canadien.

+-

    M. Thom Tapley (préposé du bulletin d'information pour les médias numériques, ACTRA - Vancouver, Union of B.C. Performers): Je m'appelle Tom Tapley. Je suis préposé au bulletin d'information pour les médias numériques de l'UBCP. Moi aussi, je serai bref. J'espère qu'il va être question, dans la discussion, de ce que nous faisons en Colombie-Britannique pour traiter certains problèmes.

    J'aimerais parler de l'amélioration de la diffusion commerciale des longs métrages canadiens, grâce notamment à la télédiffusion. En résumé, les films canadiens doivent avoir d'autres occasions de se montrer. Howard a parlé d'une émission intitulée BC Indie. J'ai apporté une trousse de promotion que j'aimerais vous laisser. Il y a aussi des programmes comme Crazy8s. Nous pourrons parler plus précisément de ce que nous avons fait et des résultats obtenus à ce jour à l'occasion des questions et réponses, si cela vous convient.

¾  +-(0855)  

+-

    La présidente: Merci.

    C'est Mme Davies qui va commencer.

+-

    Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Merci beaucoup.

    Je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. Il me semble utile que le comité recueille le point de vue de la Colombie-Britannique, car cette province jouit d'une industrie cinématographique très dynamique, mais comme l'ont dit d'autres témoins, il y a aussi bien des problèmes à régler.

    Je trouve intéressant que ce matin, vous ayez tous parlé de la distribution et de la présentation, qui ont aussi été évoquées par d'autres témoins, ainsi que de l'investissement privé.

    Je vais commencer par la première partie. Nous avons l'impression que l'élément créatif et la production sont en grande forme, et que notre produit est de très haute qualité. Si nous voulons mettre l'accent sur la distribution pour assurer une bonne commercialisation, j'aimerais savoir si vous avez des recommandations précises à nous faire en ce qui concerne spécifiquement la Colombie-Britannique.

    Que faudrait-il faire au niveau national, ou que faudrait-il recommander au niveau provincial—parce que le comité peut également faire une telle recommandation dans le cadre de son étude—pour apporter un véritable changement dans la distribution et la commercialisation, de façon qu'un plus grand nombre de personnes...? On nous a dit à maintes et maintes reprises qu'il y a un problème parce que le contact ne se fait pas et que les Canadiens ne connaissent pas les films canadiens. Une fois qu'ils les découvrent, ils les adorent, mais comment établir ce contact initial? J'aimerais savoir ce que vous avez à recommander à ce sujet, afin qu'on puisse les convaincre.

+-

    Mme Mercedes Watson: Je vais commencer, et je suis certaine que Carl aura des choses à ajouter. J'ai été immédiatement séduite par ses deux propositions très prudentes sur la création d'un créneau pour la présentation des produits canadiens.

    D'après mon expérience de l'industrie, la difficulté a toujours été liée au temps dont on dispose pour faire voir un film canadien. Lorsque le bouche à oreille a convaincu les spectateurs d'aller voir le film, il n'est plus disponible, même dans les salles d'art et d'essai qui présentent ce genre de production.

    Malheureusement, l'histoire de la diffusion de films canadiens au Canada est telle qu'il faut plus longtemps pour convaincre les cinéphiles d'aller voir un film canadien. Le cinéma canadien ne bénéficie pas des fins de semaine de battage publicitaire dans les médias—la presse écrite et la télévision—comme cela se produit pour les superproductions américaines.

+-

    Mme Libby Davies: Pensez-vous qu'il faudrait réglementer dans ce domaine?

+-

    Mme Mercedes Watson: Absolument.

+-

    Mme Libby Davies: L'un des distributeurs que nous avons entendu hier parlait des décisions qu'il prend en fonction de l'auditoire. C'est toujours l'histoire de l'oeuf et de la poule.

+-

    Mme Mercedes Watson: Absolument.

+-

    Mme Libby Davies: On présente un film canadien pendant une semaine ou deux. Personne ne vient le voir, ou presque personne. On le retire de l'affiche, car il y a d'autres films qui sont...

+-

    Mme Mercedes Watson: Parce qu'il arrive un moment où les gens essaient de le trouver.

+-

    Mme Libby Davies: Oui, et l'exploitant prend ses décisions en fonction de la façon dont il perçoit le marché.

    Pensez-vous véritablement qu'il faudrait une intervention directe?

+-

    Mme Mercedes Watson: Absolument. Comme l'a bien expliqué Carl, étant donné le niveau du financement des coûts de production par le gouvernement, il est ridicule que les autorités gouvernementales ne participent pas de façon semblable à la publicité et à la promotion du produit fini dans le but de récupérer l'investissement initial. Il est absolument essentiel qu'elles le fassent jusqu'à ce que les cinéphiles commencent à penser que le cinéma canadien, et non pas les superproductions américaines, correspond véritablement à ce qu'ils souhaitent voir.

    Mais nous n'en sommes pas encore là. Nous n'avons jamais pris le temps ni la peine d'investir dans ce genre d'engagement envers les créateurs de longs métrages canadiens.

+-

    M. Carl Bessai: Puis-je vous interrompre?

    Il me semble important d'établir une distinction. Vous aurez beau consacrer des millions et des millions de dollars à la publicité dans les abribus et à la télévision, vous aurez beau multiplier les bandes-annonces, vous aurez beau faire des pieds et des mains, si vous n'élaborez pas un outil législatif s'appliquant au marché lui-même, ce sera peine perdue.

    C'est comme si vous aviez un outil que vous vouliez vendre et que tout un chacun voudrait l'acheter, parce qu'il y a des images de l'outil partout. Hélas tous les acheteurs potentiels vont à Wal-Mart, où votre outil n'est pas disponible.

    Il est question ici d'un changement complet des mentalités. Comment? La réponse est simple : établir un plan de cinq ou de dix ans, s'entendre pour subventionner la diffusion ou pour établir un contingent à l'écran, un contingent cible...

    Laissez-moi revenir en arrière pour préciser une chose : reprendre possession de nos cinémas pendant 140 jours par an, dans ce pays, à cette époque, est une impossibilité. J'en ai parfaitement conscience. Mais pensez un peu à mon idée : un contingent à l'écran, un contingent cible. Dans ce cas, je peux solliciter des sources privées pour obtenir de l'argent pour la publicité et pour le marketing, chacun sachant qu'il existe une place pour le film, que les gens finiront par le voir. Si l'on se contente de faire de la publicité dans les abribus et de laisser le marché tel quel, cette place n'existe pas.

    La publicité comporte une autre particularité. Mettons que j'annonce la parution d'un film canadien de toute beauté pour le 2 juillet. Tant que nous ne modifierons pas le marché pour lui garder la place dont je parle, que peut faire un petit distributeur canadien à qui Universal annonce : « Désolé, mon vieux, le 2 juillet, c'est Spider-Man qui sort et qui passera dans cette salle. »

    C'est pourquoi il est important de ne pas se laisser obnubiler par l'idée de consacrer plus d'argent aux distributeurs ou au marketing, sans régler le véritable problème. Car le véritable problème est la présentation par les exploitants. Il faut que nous parvenions à exercer un certain contrôle. Je ne parle pas de verser dans le communisme, de s'emparer du système et de brûler des drapeaux, mais simplement d'exercer un certain contrôle là où pour l'instant nous n'en avons aucun. Quelle que soit la ville, quelle que soit la province, ouvrez un quotidien et cherchez ces films. Ils n'y sont pas.

¿  +-(0900)  

+-

    La présidente: Merci.

    M. Morton.

+-

    M. Rob Morton: À ce sujet, j'ai quelque chose à ajouter.

    J'aimerais relater une anecdote, parce qu'elle traduit bien l'état du film canadien. J'ai entendu dire qu'à Tinseltown, juste à côté d'ici, où il existe plusieurs salles de cinéma, on projetait un film canadien avec un taux de remplissage des salles de 60 ou 65 p. 100, ce qui est honnête. Le film canadien est passé pendant deux semaines. Après cela, il s'est fait virer pour un navet américain avec un taux de remplissage de 30 p. 100 seulement. Pourquoi? Parce que l'exploitant devait respecter les termes d'un accord qu'il avait conclu.

    C'est vraiment dommage, mais c'est ainsi : le film canadien qui marchait bien a dû céder la place, à cause d'un accord avec une entreprise de distribution étrangère. Ce sont des choses dont il faut tenir compte.

    Si nous envisageons de réglementer la présentation, il conviendrait peut-être d'envisager des traités de coprésentation avec d'autres pays, qui accorderaient une place à nos productions si nous en accordions une aux leurs. Ainsi, nous nous épaulerions sur la scène internationale. Cela peut se faire avec l'Australie; l'Australie peut nous aider. Nous avons déjà des traités de coproduction. Pourquoi ne pas envisager également une codistribution?

    Je pense que Carl a fait allusion à une idée brillante, quand il a mentionné l'établissement d'un réseau numérique de salles de cinéma d'un bout à l'autre du pays. Cela pourrait être de petites salles, avec 100 ou 150 sièges seulement, où l'on pourrait créer une place pour des films canadiens.

+-

    M. Carl Bessai: Rob, le plus intéressant dans cette idée, c'est qu'étant donné que la technologie numérique nécessite un certain niveau d'investissement, le gouvernement du Danemark s'est saisi de l'idée et il a pu exiger... On ne peut peut-être pas parler d'un contingent à l'écran, mais nous pourrions parfaitement demander un tel contingent : nous avons construit ces salles de projection, nous avons constitué un réseau et nous nous écartons du modèle actuel de projection; veillons à ce que des films canadiens soient projetés. Vous devez alimenter 80 p. 100 de ces salles de projection que nous avons construites avec l'argent du contribuable.

    Pour bien faire comprendre l'analogie, il n'y aurait pas de dramatiques canadiennes aux heures de grande écoute dans ce pays, produites par des Canadiens, comme Da Vinci's Inquest ou Cold Squad—ces émissions n'existeraient pas sans contingent. Il faut bien appeler les choses par leur nom : le CRTC fixe un contingent à l'écran pour la télévision. Il en faut un aussi pour le cinéma, ou nous devrons renoncer à une industrie canadienne du long métrage au Canada anglais.

+-

    M. Howard Storey: Même pour ceux qui s'intéressent moins à la perspective de permettre aux Canadiens de se parler entre eux et de parler au monde entier, cette formule de contingent a une excellente justification commerciale. Il se trouve qu'elle crée un produit, et que ce produit s'exporte. L'industrie du cinéma le fabrique, mais elle le fabrique dans un souci de renouvellement et de durabilité. Pour y parvenir, elle réunit toutes sortes de produits et d'éléments, elle crée cet article d'exportation qui est renouvelable et durable, et que le monde entier réclame à cor et à cri.

    J'irais même jusqu'à dire que nous ne pouvons pas concurrencer les superproductions, et nous ne voulons pas les concurrencer. De façon générale, le modèle américain est fondé sur une volonté d'homogénéiser le monde entier pour lui faire acheter la production américaine quelle qu'elle soit. Notre modèle doit être, à mon sens, un modèle mondial misant sur la diversité du monde et l'expression des différences. Ce modèle devrait se révéler très positif et permettre la conclusion de traités de codistribution, de façon que chacun ait la possibilité de faire voir son produit et que l'éléphant soit entouré de toute une armée de petites souris.

¿  +-(0905)  

+-

    M. Carl Bessai: J'ajouterais que lorsque la Corée a imposé un tel contingent, comme je l'indique dans mon mémoire, elle n'avait pas d'industrie cinématographique. Le pourcentage d'espace à l'écran, quel qu'il soit... Les Coréens ne faisaient presque pas de films; leur production représentait 2 ou 3, peut-être 6 p. 100 des films projetés chaque année—je parle ici de films coréens faits par des Coréens. Aujourd'hui, la proportion est de 40 à 45 p. 100.

    Le plus intéressant, c'est que le cinéma coréen est devenu très important au plan international. Je ne sais pas si vous l'avez remarqué, mais les films coréens sont partout dans les magasins de vidéos. Ils sont présents au Festival de Cannes. Il y a cinq ans, on n'entendait jamais parler du cinéma coréen. Les films coréens étaient inconnus, et aujourd'hui, ils font les manchettes. Pourquoi? Parce que les Coréens ont développé un marché chez eux.

    Lorsque je suis allé en Corée pour présenter mes films dans des festivals, des foules hurlantes de 2 000 jeunes venaient rencontrer un acteur dont personne n'avait entendu parler. Comme la Corée s'est dotée d'un marché intérieur, l'industrie fait son chemin; voilà le plus étonnant. Ces films rapportent beaucoup d'argent à la Corée.

+-

    La présidente: Nous allons passer à la suite. Je vais donner la parole à M. Schellenberger, à M. Lemay puis à Mme Bulte.

    Permettez-moi de vous demander ceci. Vous semblez utiliser indifféremment les mots « distribution » et « présentation », et je pense qu'aux fins de nos délibérations, il importe de savoir quand vous parlez de présentation et quand vous parlez de distribution.

+-

    M. Carl Bessai: Pensez à une chaîne de mots-pages, qui commence par le scénario, se poursuit avec la production puis la distribution. La présentation se trouve à l'extrémité. La distribution fait donc partie de la séquence. Vous voyez le cheval qui décharge sa cargaison, mais il ne peut pas le faire si on élimine la distribution.

    Soyons clairs : actuellement, nous subventionnons la distribution. Il m'a fallu des années de tournage pour me rendre compte de ce qui faisait défaut en cas d'échec. Comme tout le monde, je disais : « Oh, vous savez, les distributeurs n'en font pas assez. Ils ne vendent pas suffisamment de films, ils faut leur donner davantage d'argent. » Ou bien : « Pourquoi ne nous payent-ils pas davantage pour nos films? Pourquoi ne répondent-ils pas à mes appels? » C'est une attitude commune dans notre pays, c'est toujours un problème de distribution. Or, la réalité est différente. Les petits exploitants qui gèrent la salle de cinéma Hollywood, une entreprise familiale—un homme et son fils—ne peuvent pas se permettre de commander un film canadien, parce que c'est un produit inconnu et qu'ils ne veulent pas y laisser leur chemise.

    La présentation dans la salle de l'exploitant, c'est l'endroit ultime; pour moi, c'est le bout du chemin. C'est le magasin; c'est l'étagère. C'est de cela qu'il faut parler.

+-

    La présidente: M. Schellenberger.

+-

    M. Gary Schellenberger (Perth—Wellington, PCC): Merci.

    J'ai été un petit commerçant toute ma vie et je n'ai jamais été favorable aux contingents sur quoi que ce soit, car non seulement le contingent... Il peut assurer la subsistance, mais il empêche la croissance, à mon avis.

    Il y a une chose dont on entend souvent parler et qui m'est venue à l'esprit il y a plusieurs années, alors que je participais à une table ronde agricole où il était question de vin. Je suis de l'Ontario, et nous parlions du vin ontarien. À l'époque, pour qu'un produit soit appelé vin de l'Ontario, il suffisait qu'il contienne 30 p. 100 de raisins de l'Ontario. Les producteurs faisaient d'excellents vins, mais essentiellement avec des raisins ou du jus de raisins du Chili, qui était mélangés avec la production locale.

    J'aimerais donc savoir ce que vous appelez un film canadien et comment vous le définissez. On m'a dit à plusieurs reprises qu'une partie du financement—il faut encore parler de financement—est limitée par la définition du film canadien, ou peut-être qu'un moment donné... J'aimerais avoir une définition précise de ce qu'est un film canadien. Je sais que notre pays est multiculturel, mais encore une fois, qu'est-ce qui définit une oeuvre canadienne?

    Je sais que nous devons miser sur l'investissement privé et qu'il y a sans doute quelque chose à faire. C'est terrible d'avoir un produit qui semble bien marcher mais dont il faut se débarrasser parce qu'il est victime d'une injustice. Lorsqu'une voiture commence à consommer de façon excessive, on ne s'en débarrasse pas à la première décharge. On essaye de trouver le problème et d'y remédier.

    Je reconnais qu'on peut faire quelque chose pour remédier aux injustices des années 80 en voyant ce qui s'est passé à l'époque, en reprenant les bons éléments et en apportant des correctifs aux mauvais.

    On vient encore de parler des actions accréditives. Ce doit être un phénomène occidental, car je n'en avais jamais entendu parler auparavant, mais il en a été question deux ou trois fois hier. Pouvez-vous m'expliquer ce que sont les actions accréditives?

    Voilà mes deux questions. Je vous remercie.

¿  +-(0910)  

+-

    M. Howard Storey: Qui veut se risquer à définir ce qu'est un film canadien? Évidemment, la question se pose pour chacun d'entre nous. Nos membres eux-mêmes nous demandent, à l'occasion, comment il se fait que It's All Gone Pete Tong, par exemple, ce merveilleux film qui a été projeté il y a quelques jours, peut être considéré comme un film canadien alors qu'il s'agit d'une coproduction avec la Grande-Bretagne. Il nous faut définir le film canadien de façon plus ou moins collective. Mais je considère qu'il faut faire preuve d'un peu plus de souplesse, compte tenu de la mosaïque dont le Canada se compose. Nous sommes plus ou moins une expression du monde entier.

    Ainsi, une coproduction canado-britannique a été considérée comme étant un film canadien. C'est toute une question.

    Allez-y, Tom.

+-

    M. Thom Tapley: Je considère qu'un film canadien est un film réalisé principalement par des Canadiens et c'est évidemment plus ou moins ce qui nous est imposé par les traités conclus avec d'autres pays. Il existe des structures pragmatiques qui définissent les proportions respectives de l'apport britannique, canadien, américain ou autre. Mais avant tout, lorsque des Canadiens peuvent créer sans restriction, ils créent des histoires canadiennes. Ce sont des films canadiens.

+-

    M. Gary Schellenberger: Et qu'en est-il si le scénario est canadien mais qu'il n'y a aucun acteur canadien dans le film?

+-

    Mme Mercedes Watson: Dans ce cas, c'est un film d'Hollywood. Cela peut paraître drôle, mais c'est ce qui s'est produit dans un trop grand nombre de nos...

+-

    M. Gary Schellenberger: Et si le film est tourné en Inde?

+-

    M. Howard Storey: Voilà une question intéressante, qui mérite réflexion. Supposons que je participe à une production américaine, à laquelle j'apporte ma sensibilité. Tout d'abord, si j'en apporte trop, je n'obtiendrai pas le rôle. Si j'obtiens le rôle, c'est difficile à dire, mais j'y apporterais une gamme de possibilités plus vaste qu'on ne l'imagine habituellement en Amérique.

    Les Américains s'empressent d'être tous semblables les uns aux autres, ils sont très directs et merveilleusement simples à certains égards. Mais chacun veut toujours passer avant les autres, alors qu'ici, c'est toujours : « Après vous, non non, je n'en ferai rien », etc. Voilà notre forme de sensibilité. Est-ce que j'apporte une sensibilité canadienne à une production américaine en tant qu'acteur? Oui, dans une certaine mesure.

+-

    M. Thom Tapley: À mon avis, votre question m'amène à considérer que nous voulons aussi créer de nouvelles modalités qui permettent aux Canadiens de continuer à raconter des histoires. Par exemple, si un scénario canadien est réalisé par une société américaine aux États-Unis, l'histoire a néanmoins été écrite par un Canadien et présentera vraisemblablement une sensibilité canadienne—du moins, on peut l'espérer. Un auteur talentueux peut écrire dans n'importe quel genre, et c'est pour cela qu'il écrit. Dans le contexte de cette discussion, il faut penser à ce qui peut favoriser la mise en place d'une structure permettant une diffusion plus régulière des films.

    Un cinéaste comme Carl se donne beaucoup de mal pour rassembler les capitaux nécessaires à la création d'un film. S'il a de la chance, il pourra, quatre ans plus tard, obtenir un peu plus... En fait, c'est un cas particulier, car il réussit plus vite que cela, mais bien des réalisateurs mettent des années à réunir ce qu'il faut pour faire le film suivant car il est très difficile d'aller chercher de l'argent, à cause de tous les problèmes qui ont été évoqués ici aujourd'hui. Lorsqu'un cinéaste a de la chance, il a la possibilité de pratiquer son art tous les quatre ans. Voilà le problème.

+-

    M. Carl Bessai: J'aimerais simplement répondre à Gary, en fait je crois que c'est beaucoup plus simple. Prenez par exemple David Cronenberg. Disons qu'il produit un film grâce à l'argent provenant des grands studios. C'est un réalisateur canadien qui tourne un film canadien. Son film reçoit des hommages à Cannes. Mais David n'a pas demandé à Téléfilm Canada de payer pour la production de son film. Ce n'est vraiment pas compliqué.

    Une société de Los Angeles m'a demandé de réaliser l'un de ses films. La société a déjà réuni les fonds nécessaires. Je suis Canadien. On dira qu'il s'agit d'un film canadien car j'en suis le réalisateur. Le scénariste est Américain. Mais je n'ai pas l'intention de demander au gouvernement d'investir dans mon film.

    Selon moi, c'est là le problème dont il est question. Nous discutons des mesures auxquelles nous sommes favorables par rapport aux mesures auxquelles nous nous opposons. Nous voulons éviter que notre définition de certains concepts permette aux Américains, aux Britanniques, aux Français ou à quiconque de demander du financement à notre gouvernement et d'utiliser l'argent des contribuables pour faire leurs films, à moins que ce ne soit prévu dans un traité.

    Je fais souvent partie des jurys de Téléfilm. Nous recevons des scénarios et nous les lisons. Il y a, par exemple, des cinéastes qui veulent raconter l'histoire de Napoléon. Je trouve que c'est une histoire fantastique, mais la France offre beaucoup de financement pour filmer la vie de Napoléon. Pourquoi devrions-nous payer pour une telle production?

    Vous nous avez convoqués ici aujourd'hui pour que nous vous disions comment notre gouvernement pourrait utiliser les fonds publics pour soutenir notre industrie. À titre d'exemple, Paul Haggis, le scénariste de Million Dollar Baby, n'a pas demandé au gouvernement de financer son film intitulé Crash, bien qu'il soit un réalisateur canadien. Il a recueilli les fonds nécessaires à Los Angeles. Il n'a pas besoin de l'aide du Canada.

    Tout revient à la question des besoins que le financement doit combler, un point c'est tout. Nous ne voulons pas que les studios américains puissent bénéficier de nos ressources publiques pour faire des films américains, parce qu'on risque d'ouvrir la voie à une tendance dangereuse. Lorsqu'on parle de contenu canadien, et c'est essentiellement ce à quoi Gary faisait allusion, d'aucuns affirment qu'il s'agit de règles et d'obstacles, mais il faut prévoir des définitions pour éviter d'investir dans un film racontant l'histoire d'un type de l'État de l'Indiana qui s'inquiète de sa mère à la Nouvelle-Orléans. C'est tout à fait insensé.

    Gary, vous avez dit d'emblée que vous êtes un petit entrepreneur et que vous n'êtes pas en faveur de contingents ou de dispositions législatives, vous êtes contre toutes formes d'ingérence. Dans une certaine mesure, je suis d'accord avec vous. Je crois à la libre entreprise et à la concurrence, car elles permettent de produire de grandes choses. En revanche, je ne suis pas d'accord avec les monopoles et les grandes entreprises qui contrôlent tout un secteur et qui empêchent l'arrivée de sociétés rivales. Comme entrepreneur, je crois que vous saisissez tout à fait l'importance que revêt la libre concurrence loyale.

    Si je suis venu vous parler de contingents dans le domaine cinématographique et de dispositions législatives, c'est parce que nous vivons une situation de monopole dans notre industrie, et que les monopoles sont inacceptables. Quand les Américains estiment qu'ils subissent un monopole, comme c'était le cas pour le bois d'oeuvre résineux, ils adoptent des lois en conséquence. Nous devons nous doter de dispositions législatives.

¿  +-(0915)  

+-

    Mme Mercedes Watson: Pour revenir sur un point soulevé par Carl, il existe déjà des contingents dans de nombreux domaines. À l'heure actuelle, au Canada, les contingents sont absolument nécessaires dans le domaine artistique car ils permettent aux Canadiens de continuer de bénéficier d'oeuvres canadiennes. L'industrie musicale s'est bâtie grâce aux contingents au Canada. Il y a eu beaucoup de critiques, mais cette méthode a porté fruit.

    Tout le monde cite Céline Dion et Sarah McLachlan en exemples. Ce sont des artistes canadiennes, et elles n'auraient pas bénéficié de temps d'antenne s'il n'y avait pas eu de système de contingent dans l'industrie de la musique. Ainsi, le public n'aurait pas eu la chance de les entendre et d'acheter leurs disques et elles ne seraient pas devenues populaires. Ainsi, il est regrettable que des contingents aient été mis en place, mais nous n'avions pas le choix, la situation l'exigeait. Il fallait des contingents.

+-

    La présidente: M. Lemay.

+-

    M. Gary Schellenberger: J'ai une dernière question.

+-

    La présidente: Il faudra attendre le prochain tour.

+-

    M. Gary Schellenberger: J'ai posé une dernière question sur les actions accréditives. Je pense que j'étais sur le point de recevoir une réponse.

+-

    La présidente: D'accord.

+-

    M. Rob Morton: Il se peut que ces actions soient un peu une anomalie dans certains endroits où nous tournons. Je ne sais pas si vous avez entendu dire à quel point ce genre d'action est populaire en Colombie-Britannique parce que nous avons une bourse des entreprises à risque et une grande part de l'activité économique est axée sur les ressources. Je pense que ces actions sont également assez populaires au Québec.

    En fait, il faut constituer une société en commandite. Il y a des crédits d'impôt et des déductions fiscales propres au secteur axé sur les ressources. La société en commandite donc investit dans ce secteur. Les crédits d'impôt sont accordés à cette société en commandite et versés à l'investisseur, lequel obtient l'avantage conféré à la société.

    Voilà plus ou moins comment fonctionnent les actions accréditives.

+-

    M. Gary Schellenberger: Merci.

[Français]

+-

    M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ): Je vais compléter en parlant des actions accréditives, car je viens d'une région minière du Québec. Si vous investissez dans l'exploration, vous avez le droit de déduire 166 p. 100 ou 133 p. 100 de votre investissement. Par exemple, si vous investissez 100 millions de dollars, vous avez le droit de déduire 133 millions de dollars. C'est un bref résumé.

    Revenons aux choses sérieuses. Je ne dis pas que les actions accréditives ne sont pas chose sérieuse, mais il faudrait travailler avec le ministère des Finances, et ce n'est pas pour demain. Or, nous avons quelque chose à vous demander pour demain.

    Je m'adresse à monsieur Bessai. On va parler de quotas. J'aimerais que vous alliez à la page 5 de votre document. Il y a là un tableau illustrant la preuve statistique de la réussite en Corée. Je ne sais pas si vous interprétez ce tableau de la même façon que moi, mais en 1993, date d'entrée en vigueur d'une loi protectionniste, ils ont sorti 63 films coréens. Doucement mais sûrement, en 1998, ils n'en ont sorti que 43. Donc, loin d'avoir aidé la production, on a réduit le nombre de films. Je n'ai pas vu les films, évidemment.

    Je pense que les quotas ramèneraient le cinéma à ce qu'il était au Québec il y a vingt ans. Lorsqu'on a aboli ce système de quotas au Québec... Je ne sais pas si vous vous rappelez Mon oncle Antoine, mais les Jutras et autres Perrault ont fait des films qui jouissaient d'une protection, etc. Or, ils se sont vite rendus compte qu'ils plafonnaient, car ils ont sorti des navets — j'espère que l'expression est bien traduite — parce qu'ils savaient qu'il y avait de l'argent. L'expression artistique en a subi un coup.

    Regardez le Québec aujourd'hui. Je ne veux pas en prendre exemple plus que nécessaire, mais le Québec a réussi une intégration des producteurs, des acteurs, des réalisateurs, de toute la famille qui compose le cinéma. Voyez un peu ce que cela donne aujourd'hui. Je me demande s'il n'y a pas lieu de penser à autre chose qu'aux quotas. C'est ma question.

    J'aime bien votre idée de chaîne de cinéma. Comme je viens du Québec, je connais le cinéma excentrique, le cinéma parallèle. On a des films du Québec et même de la Colombie-Britannique que l'on voit peu ou pas ailleurs. J'aimerais que vous m'en parliez un peu plus, que vous me disiez comment vous voyez cela.

    Comme législateur, j'aurai beaucoup de difficulté à vendre l'idée des quotas, parce que j'ai de la difficulté à y croire, compte tenu de l'exemple du Québec. J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous voyez cela.

    J'ai lu avec très grand intérêt le mémoire de First Weekend Club; c'est un truc formidable. Je pense qu'il y a quelque chose à développer à ce niveau.

    Cependant, je me demande s'il y a encore moyen, au Canada, de rassembler tout le monde et d'avoir une vision. En effet, il est clair que votre adversaire est la langue, la langue anglaise. Par contre, nous sommes multiculturels. Il y a donc des choses que nous voyons.

    Je voudrais que vous me parliez un peu des chaînes de cinéma. Comment voyez-vous cela? Je m'adresse à tous les gens autour de la table, bien évidemment.

¿  +-(0920)  

¿  +-(0925)  

[Traduction]

+-

    M. Carl Bessai: Il existe à Montréal un cinéma qui s'appelle le Cinéma Beaubien. Vous le connaissez. Chose intéressante, officieusement, sans qu'on ait fixé de contingent, ce cinéma est devenu l'endroit à Montréal où le public sait qu'il peut voir un bon film québécois. Peu importe le nom que l'on donne—moi je vous parle de la notion d'un contingent à l'écran—mais je pense que nous convenons qu'il est bénéfique qu'il existe sur le marché un endroit où les gens savent qu'ils vont trouver quelque chose de différent.

+-

    M. Marc Lemay: Avez-vous un exemple de cela en Colombie-Britannique?

+-

    M. Carl Bessai: Non. Non, nous n'en avons pas. Nous n'avons pas d'endroit qui se consacre à cela. Nous avons parlé tout à l'heure du Tinseltown, mais en fait, l'exploitant est américain. Nous n'avons rien de semblable.

    Comme vous l'avez dit, il y a plusieurs raisons qui expliquent pourquoi la situation est différente au Québec, et non la moindre est certainement attribuable à ce que nous sommes—c'est-à-dire très semblables aux Américains. Quand les gens cherchent quelque chose de différent, ici on pense qu'il faut aller à l'extérieur du Canada.

    Nous avons des cinémas pour tous les genres de films. Nous en avons pour les films d'Hollywood. Nous en avons pour les films étrangers, comme la chaîne Cinémathèque. Mais nous n'avons pas de cinéma qui se consacre aux films canadiens, y compris les films québécois, et c'est déplorable. Ici à Vancouver, je ne peux pas voir vos superbes films. C'est un gros problème.

    Lorsque je parle de ce genre d'écran—et j'entends ici les cinémas, les chaînes, la notion de contingent—je m'inspire du modèle de la Cinémathèque. Nous savons tous ce que représente la Cinémathèque : une grande ville, un centre urbain, des cinémas haut de gamme. Ces chaînes se consacrent à ce que nous appelons le cinéma mondial. À l'occasion, on présente un film canadien mais on ne le fait pas de façon régulière.

    M. Lemay dit qu'il n'aime pas les mots « contingent à l'écran », mais on pourrait dire que les Cinémathèques ont un contingent pour le cinéma mondial, car le gros de la production cinématographique mondiale est présenté à longueur d'année. Pourquoi ne pas faire la même chose avec des films canadiens? Le Cinéma Beaubien est un exemple à Montréal où les gens peuvent aller sachant qu'un film québécois remarquable est projeté. Il nous faut cela.

    Quand vous entendrez le témoignage de Anita de First Weekend Club, vous en apprendrez davantage mais il y a des salles de cinéma disponibles actuellement et, en formant un groupe, nous pourrions commencer à travailler, à investir et à moderniser.

    La technologie numérique est fort intéressante. Elle permet de réduire au minimum les coûts de distribution, car plutôt que de dépenser pour transporter les bobines, on pourrait se servir des films numériques.

    Je pense qu'une des choses capitales est ce qu'a fait Daniel Langlois, c'est-à-dire faire du film canadien une expérience enrichissante pour qu'il ne soit pas le cousin pauvre dans le ghetto. Il ne faut pas dire : « Voilà cet écran du coin est réservé au film canadien. » Dès lors, voir un film canadien s'apparente à aller au théâtre—à une activité que l'on choisit, et pour laquelle il faut retenir une gardienne, car pour cela il faut sortir.

    Je pense qu'il faut commencer dans les grands centres. Faisons comme on a fait au Québec. Ce qu'on a fait là-bas est remarquable, et s'il y avait un contingent, le Québec pourrait atteindre 80 p. 100 et devrait le faire—du moins 60 p. 100. Vous êtes actuellement à 20 p. 100 et c'est fantastique, mais je sais que s'il y avait des écrans, vous pourriez atteindre des sommets.

+-

    Mme Mercedes Watson: Je voudrais poursuivre dans la même veine que Carl. Je suis entièrement d'accord. Ce serait merveilleux que le reste du pays, régulièrement, puisse voir les films inouïs produits au Québec au fil des ans. Comme vous l'avez dit, avec un système de contingent semblable pendant 20 ans et ce n'est pas ce que... le marché anglophone a besoin de ces 20 ans. Il lui faut le temps nécessaire pour consolider son assise et subir des échecs. En effet, il pourra produire ces films qui n'auront pas un succès fracassant, mais en même temps, il pourra produire de ces films qui seront de francs succès et que les gens vont aller voir.

+-

    M. Carl Bessai: Mon Oncle Antoine est l'un des grands films de tous les temps. Chez les Canadiens anglais, c'est le seul film qu'ils peuvent évoquer. Mon Oncle Antoine—vous l'avez dit, il a été produit sous un régime de contingent—est un des films gravés dans la mémoire de ceux qui l'ont vu lorsqu'ils grandissaient, étudiaient la cinématographie ou s'intéressaient au cinéma. C'est un film québécois. Nous connaissons tous ces films.

[Français]

+-

    M. Marc Lemay: Mais La Vraie Nature de Bernadette n'a pas été...

[Traduction]

+-

    La présidente: Mme Bulte.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Tout d'abord, merci d'être venus et merci de vos exposés.

    Je suis entièrement d'accord avec vous : il nous faut trouver plus de débouchés pour montrer les films canadiens et fidéliser le public, même les jeunes publics, afin que tous sachent où aller voir ces films.

    L'idée d'un contingent me laisse perplexe. Il y a d'abord la compétence provinciale, car cela pourrait très bien aboutir à une querelle de compétences. J'essaie de revenir aux exemples... il est indéniable que notre industrie musicale a été créée grâce aux règlements du CRTC parce qu'il y a là des contrôles possibles. Nous contrôlons les ondes radiophoniques car c'est du domaine public. Si le gouvernement fédéral intervenait pour réglementer... je suis très reconnaissante au CRTC car sans lui, notre industrie musicale ne serait pas ce qu'elle est, car il a forcé les radiodiffuseurs privés à faire entendre cette musique aux heures de grande écoute. Je me souviens que les radiodiffuseurs refusaient de le faire, parce que cela les empêcherait de faire entendre Céline Dion, ce qui n'était absolument pas vrai. On leur demandait tout simplement d'aller un peu plus loin que Céline Dion.

    Ensuite, vous avez évoqué l'exemple de l'édition. On a créé un programme, le programme d'aide au développement de l'industrie de l'édition, et cela aide à publier des livres. Cela n'a toutefois pas réglé le problème de l'espace sur les rayonnages, car il faut se tailler une place dans les Chapterset les Indigos du monde entier. Nous ne pouvons pas faire le même genre de publicité que les éditeurs américains font. Donc, oui, le PADIE a été très bénéfique mais il y a encore là-dedans des choses qui ne sont pas réglées.

    Hier, Dave Thomas a parlé d'un éventuel crédit d'impôt accordé aux exploitants. Mais, par contre, comment garantir que le film sera présenté pour plus d'une semaine, pour deux semaines ou trois semaines? Je ne pense pas que votre système de contingent serait très utile à cet égard car si vous êtes un exploitant de salle désireux de montrer différents films canadiens, et que vous avez un chiffre en tête, vous allez devoir être interrompu au moment où...

    En fait, j'essaie de voir où est la carotte et où est le bâton dans tout cela. J'ai lu votre mémoire et vous abordez la question d'une taxe sur les productions étrangères... encore une fois, il ne faut pas oublier les accords commerciaux.

¿  +-(0930)  

+-

    M. Carl Bessai: Ne trouvez-vous pas étonnant que la France impose ce genre de mesure?

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Mais la France n'a pas d'accord avec...

+-

    M. Carl Bessai: Non, je le sais.

    Ce sont des idées radicales mais je voudrais que tout le monde sache ce qui se fait dans d’autres pays. Je comprends tout à fait votre difficulté. C’est vrai que c’est difficile car si l’on considère l’espace dans les cinémas comme un lieu de vente au détail, la question des compétences fédérales-provinciales se pose…

    Ce que j’essaie de faire c’est de transcender ces questions pour déterminer si le cinéma fait partie de notre héritage culturel ou pas. Bien des gens pensent : « Au diable le cinéma commercial », nous devrions plutôt nous soucier des DVD et de la télévision car nous pouvons au moins les contrôler. Mais je pense que c’est vraiment important.

    J’essaie de présenter mes films dans autant de festivals que possible dans le monde et il y a plus de gens à l’extérieur du Canada que de Canadiens qui connaissent mes films. Je suis Canadien et c’est frustrant pour moi de savoir que mes petits garçons vont grandir sans avoir rien vu d’autre que des films américains. Que pouvons-nous faire pour corriger cette situation?

    J’adore votre idée de commencer par les jeunes. Je pense qu’il faut des salles où nous pouvons présenter nos films et nous devons lutter pour informer les gens.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Je suis de Toronto et la ville de Toronto a une politique active et énergique en matière de cinéma. Elle a un conseil du film, dont le maire est membre. Avec Jack Blum et l’ACPFT, nous essayons de présenter des films canadiens dans les écoles, car c’est par là qu’il faut commencer. Je pense, pour ma part, que c’est une excellente raison d’investir dans Téléfilm pour qu’il travaille en partenariat avec les villes, dont les objectifs concordent en grande partie avec ceux du gouvernement, et c’est une façon de contourner les gouvernements provinciaux. Je cherche des solutions uniques de ce genre.

+-

    M. Carl Bessai: Les festivals de films sont fantastiques, n’est-ce pas? Nous les aimons tous, mais ce qui nous échappe, c’est l’idée de présenter nos films dans des salles de cinéma commerciales canadiennes. Je pense que c’est pour cela que je lutte, pour que nous puissions pénétrer notre propre marché. L’ennui avec l’idée d’une chaîne de cinémas destination, qui est une excellente idée, c’est l’investissement élevé dans les immobilisations. Comment pourrait-on créer une telle chaîne dans l’ensemble du pays, combien est-ce que ça coûterait? Je pense qu’il faut plutôt procéder par petits pas, mais je pense que l’idée de travailler en collaboration avec les distributeurs et les salles de cinéma afin de présenter nos films sur les écrans qui existent déjà, grâce à des programmes…

¿  +-(0935)  

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Monsieur Morton, j’aimerais savoir ce que vous en pensez, mais vous venez de me faire penser à autre chose.

    Monsieur Storey, dans votre exposé, vous avez parlé d’un partenariat. Avez-vous songé à créer un partenariat directement avec les salles de cinéma? Tout le monde y gagnerait. On nous a donné un exemple. Pendant le tournage du film Les Invasions barbares, de Denis Arcand, tout le monde a travaillé ensemble pour s’assurer que le film serait distribué à temps pour les mises en nomination aux Oscars. Que pourrait-on faire pour encourager ce genre de partenariat entre vos organismes et les salles de cinéma?

    Encore une fois, j’aime ces idées, mais je lutte. Je ne veux pas simplement lutter. Je veux des recommandations concrètes qui donneront de véritables résultats pour que nous puissions réaliser cette idée du scénario jusqu'à l’écran qui a été lancée en même temps que le fonds de financement de longs métrages canadiens. J’aimerais entendre l’avis de tout le monde, puis nous retournerons à mon autre question. Nous pouvons toujours en parler aussi après la réunion.

+-

    M. Thom Tapley: À cet égard, notre problème, comme Carl l’a déjà mentionné, c’est que le temps d’écran est déjà réservé car la plupart des exploitants de salles de cinéma ont des ententes globales et pour faire un bénéfice, ils doivent présenter surtout des films américains. C’est très difficile pour un organisme comme le nôtre ou pour d’autres membres de l’industrie de créer un partenariat avec eux car leur temps d’écran est déjà réservé.

+-

    M. Howard Storey: Eh bien, même si nous le voulions—et nous sommes certainement prêts à faire tout ce qui est possible—ils ne le peuvent pas parce qu'ils ne sont pas libres.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Mais supposons qu'on exige qu'ils présentent seulement des longs métrages canadiens. Comment allez-vous choisir un film qui restera à l'affiche pendant 11 semaines? Ou allez-vous choisir 10 films qui vont être présentés chacun pendant une semaine. Je pense que ça entraînerait le même problème pour les films canadiens. Comment choisir le film à succès qui devrait rester à l'affiche pendant 11 semaines?

+-

    M. Thom Tapley: Je pense qu'il faut situer cette conversation dans un contexte. Prenons l'exemple du Québec. Le Québec a eu 20 ans pour créer son infrastructure, ce qui leur a donné le temps d'apprendre, et il y a eu des compromis. Puis, tout à coup, il s'est retrouvé avec cette infrastructure qui était comme une machine qui fonctionne très bien. Au Canada, nous n'avons jamais eu d'engagement à long terme qui nous aurait permis de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Si vous nous donniez 20 ans...

    Nous pouvons changer les mots. Ce n'est pas absolument nécessaire d'avoir un contingent; il y a d'autres solutions. Si vous modifiez la situation pour nous permettre de créer un mécanisme pour que les films canadiens soient présentés plus régulièrement, d'une manière continue et à long terme, s'il y a ce genre d'engagement, je pense que ce qui s'est produit au Québec se répéterait probablement ailleurs au pays. Peut-être pas dans la même mesure, car ils ont l'avantage naturel de parler une langue différente, mais ça réussirait. Mais il nous faut cet engagement.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Mon tour achève et j'aimerais savoir ce qu'en pense M. Morton.

+-

    M. Rob Morton: Parlons d'un « incitatif » plutôt que d'un « contingent ». Je pense que c'est une meilleure façon de voir la chose.

    Qu'est-ce qui incite les exploitants de salles de cinéma à présenter un film américain? Le bénéfice qu'ils tirent d'une super production, n'est-ce pas? À l'heure actuelle, les films canadiens ne sont pas perçus comme étant rentables. Si on accordait aux propriétaires de salles de cinéma un incitatif pour qu'ils présentent des films canadiens, je pense qu'ils en présenteraient plus souvent. Pour ce qui est du réseau de distribution numérique, des salles de cinéma, il y a peut-être moyen de les aider à générer d'autres revenus en même temps. Peut-être qu'ils pourraient servir des boissons alcoolisées ou un verre de vin aux spectateurs. Peut-être que le jour ils pourraient offrir des jeux vidéos, ou quelque chose du genre. Je ne songe pas nécessairement à des casinos, mais plutôt qu'on leur offre un encouragement pour qu'ils présentent des films canadiens plutôt que de leur imposer un contingent. C'est tout à fait possible.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Et pour la CBC? Aucun de vous n'a mentionné la CBC.

+-

    M. Thom Tapley: En effet, j'avais l'intention d'en parler. Nous reconnaissons ces efforts. Je pense que l'un des...

    Prenons un petit exemple régional, Crazy8 en Colombie-Britannique. Andrew Williamson ou moi-même veillerons à ce que vous receviez une copie du disque, car il illustre très bien mon propos. Essentiellement, on vous donne huit jours, 800,00 $, et une bande d'une demi-heure, pour créer un film. Les films ont été présentés la semaine dernière. C'était incroyable de voir ces films. D'abord, la salle était remplie et les membres de l'auditoire appartenaient à divers groupes ethniques. Il y avait des jeunes et des moins jeunes qui ont tous ri et apprécié les films.

    Vous vous dites probablement que ces gens pleins d'enthousiasme qui regardaient les films étaient probablement le même groupe de gens enthousiastes qui avaient fait les films. Mais il n'y avait pas que cela. La qualité des films était vraiment spectaculaire. Dans le cadre de ce programme, on met entre les mains de cinéastes une technologie numérique qui leur permet de créer des histoires dans un délai inimaginable il y a seulement trois ans.

    Grâce à une seul petit programme, on a pu faire 32 films qui ont été présentés dans 150 festivals et qui ont remporté de nombreux prix internationaux. Ce programme a permis à des réalisateurs qui font des courts métrages de passer aux longs métrages. Carl en est un excellent exemple. Ce processus a tellement évolué que nous cherchons maintenant les moyens d'élargir la distribution. On a produit un DVD que je vous ferai parvenir.

    Avec ce projet, nous avons tout fait pour lancer le processus. La UBCP a créé un autre programme intitulé BC Indie, suivant la même idée. Nous espérons que ce programme deviendra un incubateur de longs métrages. Nous sommes encore en train de régler les détails.

    Nous créons le contenu, mais c'est après que le problème se pose. Ce que nous contrôlons le plus, c'est la création du contenu, et sur ce plan nous faisons tout ce que nous pouvons, mais comme Carl et tous les autres l'ont dit, ça s'arrête au bout de la chaîne.

¿  +-(0940)  

+-

    M. Carl Bessai: J'aimerais parler de la SRC. Nous investissons énormément d'argent dans la SRC, et la critique que j'ai à formuler à l'égard de la SRC est très simple : elle ne présente pas assez de longs métrages canadiens. C'est un problème. Elle devrait réserver un soir pour le cinéma canadien. Mais je ne veux pas entrer là-dedans. Chaque fois que je parle à des distributeurs et des exploitants de salles de cinéma ils me demandent: « Que fait la SRC? », comme si la SRC était obligée de trouver la solution à nos problèmes de distribution dans les salles de cinéma. L'ironie dans tout cela c'est que les diffuseurs que nous critiquons sans cesse sous prétexte qu'ils n'en font pas assez, sont en fait les seuls à qui je peux m'adresser en tant que cinéaste pour obtenir des fonds. C'est uniquement grâce à la SRC que mon distributeur m'a consenti une avance.

    Vous devez comprendre que pour un film d'un million de dollars mon distributeur m'avance une somme de 150 000 à 200 000 $. Je peux prévendre mon film à la télévision canadienne pour 300 000 à 400 000 $. Je donne tout cet argent au distributeur qui est assuré de réaliser un bénéfice dès le départ. Avant même que j'aie tourné la première scène, le distributeur a gagné 250 000 $. En outre, c'est vous qui subventionnez leurs dépenses de commercialisation et de distribution. Ainsi, tout le monde y gagne. Mais le problème c'est que le film reste sur une tablette parce qu'il n'y a pas de marché.

    Ainsi, tout le monde autour de cette table a investi dans la production du film, y compris le diffuseur. La SRC c'est une autre histoire; je pense, bien sûr qu'elle pourrait en faire davantage. Mais la loi sur le CRTC oblige les diffuseurs à avoir un certain contenu pendant les heures de grande écoute. La télévision payante dans ce pays est fantastique pour nous. Mais vous voyez, nous en revenons toujours à la même chose : tous ces gens font des choses fantastiques, mais quand vient le temps de...

    J'ai tourné un film dans le cadre du programme Crazy8 et ça été formidable, mais au bout du compte, nous nous retrouvons quand même avec nos boîtes à films sous le bras parce qu'il n'y a pas de temps d'écran. Ce sont les dix mêmes films qui jouent dans toutes les salles de cinéma de toutes les villes du Canada—, à l'exception de votre merveilleuse province, mon ami.

    Il faut faire quelque chose.

+-

    M. Thom Tapley: Pour en revenir à la mêmes, nous avons BC Indie. Eh bien, pourquoi pas un SRC Indie, ou un CTV Indie, qui réserverait du temps d'antenne aux heures de grande écoute, lorsque les gens sont assis à la maison devant leur télévision—pour promouvoir les films canadiens?

+-

    M. Rob Morton: Nous devons célébrer le caractère canadien des films, et c'est ce qui fait défaut dans cette formule. Nous sommes une société tellement polie. Et puis, zut alors, il n'y a rien de mal à s'afficher de temps en temps. Il n'y a vraiment aucun mal à cela. Célébrons le fait que nous sommes très bons dans ce que nous faisons. Vantons-nous du fait que nous avons Carl Bessai, que nous avons Cronenberg, et un tas de vedettes.

    La plupart des acteurs dans la série américaine 24 sont des Canadiens. Pourquoi ne pas le dire? On nous accorde quelques mots ici ou là, mais on a raison d'en être fiers. Ce n'est peut-être pas notre série, mais les acteurs sont des Canadiens. Célébrons ce que nous sommes...

+-

    M. Carl Bessai: Vous ne pouvez pas dire aux gens où et quand, car ce serait un gaspillage d'argent. En tant que cinéaste, le meilleur moyen pour moi de rejoindre mon auditoire canadien c'est de le confier aussi rapidement que possible à un distributeur américain qui a les exploitants de salles de cinéma canadiens dans sa poche et mon film sera largement diffusé. C'est absurde.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Vous ne pouvez pas obtenir d'argent de Téléfilm si vous allez...

+-

    M. Carl Bessai: Mais si, au contraire. Mon prochain film s'appelle Fido; il sera tourné cet été. Le gouvernement y a investi des sommes énormes. Le film a été prévendu à un distributeur canadien, TVA. Puis, on l'a préacheté de Lions Gate, un distributeur canadien. Lions Gate international va diffuser le film aux États-Unis. Cette société a beaucoup d'argent et de pouvoir et elle contrôle les salles de cinéma dans son pays. Ainsi, le film sera un succès. Le distributeur américain est un géant qui se moque des frontières et qui est propriétaire de nos salles de cinéma. Nous n'avons pas besoin de le subventionner. Lorsque cette société s'en charge, tout va bien. C'est pourquoi les navets américains font de l'argent.

¿  +-(0945)  

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Je croyais que Lions Gate s'appelait maintenant Maple.

+-

    M. Carl Bessai: Non, Maple est le nom de marque de sa filiale canadienne. Honnêtement, le long métrage canadien anglais est une mauvaise marque. Personne n'en veut. Pourquoi? Parce que nous pensons que les films sont mauvais. Si vous demandez aux gens quels films ils ont vus, ils n'en ont vu aucun. Il y a une rumeur selon laquelle nos films sont mauvais. Ils ne sont pas mauvais. Ils ne sont tout simplement pas disponibles. Alors, nous supposons qu'ils sont mauvais parce que nous avons l'habitude du système de marché. Si vous ne pouvez pas trouver d'outils Black and Decker, c'est sans doute qu'ils ne valent rien. On ne les trouve pas sur les tablettes. Ils ne peuvent pas être très bons. Ils sont probablement mal faits. Avez-vous déjà essayé un outil Black and Decker? Non, mais ils ne doivent pas être très bons.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: C'est une question de commercialisation.

+-

    La présidente: Madame Bulte, vous avez eu 16 minutes et votre tour est maintenant terminé.

    Nous parlons presque exclusivement de la présentation de nos films dans les salles de cinéma. Or, 90 p. 100 des présentations de films se passent ailleurs, du moins si on en juge par la valeur monétaire des différents lieux de présentation. Je n'ai pas encore entendu de bons arguments pour accorder tellement d'importance à la distribution de nos films dans les salles de cinéma. N'y a-t-il pas d'autres moyens de présenter nos films aux Canadiens? Je comprends la question des relations publiques, la valeur publicitaire d'une première. Mais si nous n'avons aucun espoir de pénétrer ce marché des salles de cinéma, je me demande si nous ne devrions pas chercher d'autres solutions.

    Deuxièmement, supposons que nous tous ici présents nous rencontrions des exploitants de salles de cinéma et que nous leur disions : « Trouvez-nous une solution. Comment pouvons-nous présenter davantage de films canadiens dans vos salles de cinéma? » Qu'arriverait-il? À quoi ressemblerait la discussion? Quelles solutions trouverait-on?

+-

    M. Rob Morton: J'aimerais commencer par répondre à la deuxième partie de votre question. Ce serait excellent. Je ne peux pas prédire ce qui en arrivera. Mais c'est un débat légitime qui doit avoir lieu. Il faut en discuter. Cela nous permettrait de mieux définir cette célébration du produit canadien. C'est nécessaire, cela ne fait aucun doute.

    En réponse à la première partie de votre question, à savoir comment créer un auditoire canadien pour le cinéma canadien, peu importe le lieu de visionnement, ce qu'il vous faut, de manière générale, c'est un film commercial qui fera parler les gens et qui les amènera à le voir. Les autres lieux de visionnement ont leurs problèmes à eux aussi. Si l'on parle de télédiffusion, un diffuseur canadien peut acheter pour quelques centaines de milliers de dollars un très bon produit américain pour les heures de grande écoute. Il vend ensuite la publicité et gagne 350 000 ou 400 000 $ en une heure. Ou il peut acheter un produit canadien pour beaucoup plus d'argent—il devra se repayer sur le produit lui-même—et ne pas faire des recettes aussi élevées parce que les gens ne le regarderont pas.

    Cela nous ramène donc à la même situation que nous avons avec la distribution des longs métrages. C'est la même situation, que cela plaise ou non. Nous avons besoin de ces films commerciaux; nous avons besoin de ce bouche-à-oreille qui met en place le marché secondaire. Chose certaine, nous adorerions avoir le marché secondaire. Radio-Canada peut nous le donner. Ou peut-être qu'il faudrait obliger CTV à présenter un film canadien une fois par semaine comme condition de renouvellement de sa licence. Cela constituerait un incitatif et non un quota. C'est comme dire : « Si vous voulez faire ces profits énormes avec les produits américains, nous allons vous demander de faire du canadien quelques heures par semaine. Vous pouvez le faire, et Global aussi. » Et ça pourrait fort bien marcher.

+-

    M. Thom Tapley: Les marchés subsidiaires sont très importants, même pour les films de Hollywood, et chose certaine, dans de nombreux cas, c'est là qu'ils font leurs frais. Il sera donc important d'avoir accès aux marchés subsidiaires également. Mais comme Rob l'a fait remarquer, généralement, c'est cette énorme machine de commercialisation qui se met en marche lorsqu'un film est lancé qui féconde tout le marché subsidiaire.

    Nous n'aurons pas cette énorme machine, mais je crois qu'il y a des façons de faire certaines choses, et il existe aussi des solutions simples. Je crois que le problème tient au fait que nous n'avons jamais fonctionné de manière concertée, coordonnée. Par exemple, prenez l'idée de CBC-India ou CTV-India, ou peu importe comment vous l'appelez. Et obligez les détaillants vidéo à avoir un point d'achat, de telle sorte que lorsqu'on entre chez eux, il y a un kiosque qui est bien identifié et qui met en vedette les films canadiens.

    Je vais vous donner un exemple. J'ai essayé de louer Le Confessionnal, qui a été tourné par l'un de mes metteurs en scène favoris. Je n'ai pas pu le trouver à mon club vidéo. C'est un problème. Il ne s'agit donc pas seulement de l'avoir dans les clubs vidéo, mais de l'avoir aussi sur les premiers rayons, je crois qu'il y a des moyens de coordonner cela sans que ça coûte nécessairement une fortune.

    Je crois qu'il faut qu'il y ait des synergies entre tous ces marchés secondaires si l'on veut qu'ils fonctionnent. Et je crois que c'est à ce niveau que nous n'avons peut-être pas su réussir, la coordination au niveau macro.

¿  +-(0950)  

+-

    La présidente: Madame Davies.

    Je crois que ce sera la dernière question. Nous allons faire une courte pause pour permettre à nos nouveaux témoins de s'avancer.

+-

    Mme Libby Davies: Oui, je tâcherai d'être brève.

    Je veux seulement revenir à la question des quotas. Tout d'abord, je crois qu'il ne faut pas utiliser ce mot. Les mots sont importants, et si j'en crois la discussion que nous venons d'avoir, nous avons dépassé cela il y a longtemps. Je crois qu'il conviendrait beaucoup mieux de parler du principe d'accès. C'est l'accès du point de vue des producteurs et de l'auditoire. C'est là où se trouvent les gens. Si vous vous en tenez à cette idée de quotas—vous avez vu la réaction que vous avez suscitée—on voit ce que vous voulez dire, mais vous avez vu la réaction. Je crois donc que vous devez faire marche arrière et parler plutôt d'accès de manière plus générale.

    J'aimerais savoir pourquoi on peut entrer dans n'importe quelle librairie—et je vais dans les librairies dans les aéroports—et l'on y trouve toujours une section réservée à la littérature canadienne. Je m'attends à la trouver là; c'est une chose très courante. Mais on n'a pas ça dans l'industrie du cinéma.

    Si l'on pouvait reformuler les choses et parler d'accès à partir de diverses perspectives... Qu'en est-il des gens qui vivent dans les localités plus isolées? À quoi ont-ils accès? Il ne leur est pas loisible d'aller aux festivals de films spécialisés. Je crois que si on faisait ça, au lieu de s'en tenir à cette idée très rigide, notre débat avancerait. Je crois que vos arguments sont brillants. Il s'agit d'égaliser le terrain et de contrer les géants et les monopoles, mais je crois que la façon d'approcher les choses, en fait de vendre ce produit, c'est de définir ce principe d'accès.

+-

    M. Carl Bessai: C'est la raison pour laquelle je suis ici, parce que j'espère que lorsque vous aurez tiré tout cela au clair, vous aurez quelque chose que vous pourrez communiquer par notre entremise. C'est vraiment la raison pour laquelle je suis ici, pour m'assurer que nos législateurs créent dans notre pays le milieu que nous voulons créer.

    Je sais bien que le mot « quota » est un mot chargé. Cela attire sûrement l'attention, et cela contribue sûrement à maintenir le débat ouvert, mais ce à quoi je veux vraiment en venir, c'est à la manière dont nous allons légiférer ou nous servir de nos outils législatifs pour lancer ces idées qui nous permettront d'avoir accès à notre marché.

    Je le répète, il faut éviter de trop parler de ce que les diffuseurs et même les clubs DVD font ou ne font pas. En fait, je trouve presque tous mes films et presque tous les films de mes collègues dans la plupart des bons clubs vidéo dans la plupart des villes du pays. C'est en salle que nous échouons tous les jours. Et pourquoi les salles sont-elles importantes? Pour le secteur commercial, les salles sont comme les festivals de films.

    Nous avons décidé d'utiliser, et d'utiliser exclusivement, les festivals de films pour faire connaître notre culture cinématographique au monde entier. Nous tirons très bien notre épingle du jeu dans les festivals de films. Pourquoi ne pourrions-nous pas adapter certaines de ces idées au marché commercial? Je crois que c'est perdre son temps que de rêver à la superproduction du genre Hollywood. C'est se tromper lourdement. Nous devons commencer par nous demander ce que nous faisons de bien dans les festivals de films. Qu'est-ce qui est intéressant ici? Quand on y va, on vit toujours une expérience merveilleuse. On rencontre parfois le cinéaste. On assiste parfois à une bonne discussion sur le film. On y côtoie des mordus du cinéma.

    J'aime l'idée de créer un foyer à valeur ajoutée pour le long métrage canadien dans toutes les villes du pays—et vous avez probablement entendu parler du circuit cinématographique, ou vous en entendrez parler, ce qui est une idée formidable si l'on veut présenter ces films dans les localités plus éloignées—mais il faut que tout cela rapporte au guichet pour qu'on ait au moins le sentiment que ces films sont rentables.

    Ce qui est vraiment gênant ici, c'est qu'on investit un million de dollars et qu'on y gagne 100 000 $, si on a de la chance. Et c'est ça qui est stupide. Nous devons comprendre que lorsque les Américains parlent des recettes intérieures, ils englobent le Canada. Ils ne nous excluent même pas. C'est « le Royaume-Uni a rapporté tant, la France tant, et les recettes intérieures tant .

    Et si vous voulez savoir pourquoi le mot « quota » est un mot si abhorré, nous savons tous qui est Jack Valenti et nous savons tous ce qui s'est passé en 1988 et nous savons tous ce que Flora a essayé de faire de ce côté dans le temps, il y a longtemps de cela, et nous savons tous que les Américains adorent de belles recettes intérieures. Dix pour cent de l'argent qu'ils gagnent sur leurs films provient du Canada. Nous ne constituons même pas 10 p. 100 de la population. Nous sommes donc un élément très rentable de leur marché intérieur, et nous devons comprendre cela.

    C'est ce que je pense.

    Merci, Libby.

¿  +-(0955)  

+-

    Mme Mercedes Watson: Madame la présidente, j'aimerais seulement dire une dernière chose. Nous sommes heureux de vous avoir parlé aujourd'hui, tous autant que vous êtes, et nous sommes heureux de prendre part à cette discussion qui définit des mots comme « quota » et qui donnent naissance à des idées que tout le monde peut comprendre et aimer, sans contrainte; parce que nous ne sommes sûrement pas là pour exercer des contraintes. Nous croyons tous dans cette industrie, et bon nombre d'entre nous y ont passé presque toute leur carrière pour une raison bien simple : nous adorons ce que nous faisons; nous croyons que ce que nous faisons a une valeur; et nous aimerions que cette valeur soit mieux connue partout au pays. Et nous sommes heureux de prendre part à cette discussion qui nous permettra de faire cela.

+-

    M. Rob Morton: Je crois qu'il appartient à votre comité d'aider le gouvernement à comprendre que la promotion et la célébration de cette industrie sont importantes. Je crois que Carl a mis le doigt dessus lorsqu'il a dit que « l'on pense que le produit canadien est mauvais; ce n'est pas vrai. » Il est clair que ce n'est pas le cas. Si c'était un mauvais produit, je peux vous le dire, le marché étranger n'existerait pas à Vancouver. C'est un bon produit que nous faisons; cela ne fait aucun doute. On se joue des tours avec cette histoire de culture canadienne. L'un des meilleurs films canadiens que j'ai vus s'intitulait Whale Rider. Il avait été tourné en Nouvelle-Zélande. Mais s'il avait été tourné sur le site Haïda Gwaii en Colombie-Britannique, on parlerait d'un film canadien.

    Donc, que dit le cinéma canadien? Il ne parle pas seulement des petites villes du Nouveau-Brunswick. Notre culture est diverse. Elle parle de tout. Ce que nous avons à dire parle au monde entier. Cela nous interpelle tous. Il faut donc s'arranger pour que les Canadiens sachent ce que nous faisons de très bien. Il faut que tout notre pays le sache. Et il faut ensuite faire savoir au monde entier ce que nous faisons de très bien pour qu'ils aient envie demain de venir voir le dernier film canadien au lieu d'aller voir Arnold et le Terminator.

    Merci.

+-

    La présidente: Grand merci à tous pour cette discussion intéressante.

¿  +-(0957)  


À  +-(1012)  

+-

    La présidente: Le Comité permanent du patrimoine canadien reprend ses travaux et son étude sur le long métrage au Canada.

    Nous avons quelqu'un dans l'auditoire qui a passé une bonne partie de la journée d'hier avec nous et qui ne figure pas comme témoin. Si vous n'avez pas d'objection, j'aimerais inviter Sauching Ng à se joindre à nous. Elle est de Moving Pictures. Elle a distribué des informations sur la façon dont son entreprise distribue des films canadiens.

    Approchez-vous.

    Étant donné que nous avons parlé au cours de la dernière heure et demie de la manière dont nous devons présenter des films canadiens aux Canadiens, nous serions peut-être bien avisés d'élargir quelque peu notre groupe de témoins.

    Je vais d'abord donner la parole à Liz Shorten et Michael Francis de British Columbia Films.

    Allez-vous parler tous les deux?

+-

    M. Michael Francis (président, conseil d'administration, British Columbia Film): Lodi Butler, notre gestionnaire du financement des films à BC Film, est également avec nous.

+-

    La présidente: D'accord.

    Lequel d'entre vous va commencer?

+-

    M. Michael Francis: Je vais commencer par un court exposé puis je serai à votre disposition pour répondre à vos questions.

    Permettez-moi d'abord de vous expliquer en quoi consistent les documents qui vous ont été remis. L'un donne des chiffres de production pour la Colombie-Britannique. Cela sort tout juste des presses puisque les chiffres pour 2004 ont été annoncés vendredi. Vous constaterez à la lecture de la première page que l'année a été très mauvaise pour la production cinématographique et télévisuelle en Colombie-Britannique.

    Pour la deuxième année, le peu de bonnes nouvelles viennent du fait que les choses sont allées très bien pour l'industrie l'an dernier par rapport au creux dans lequel elle se trouvait. C'est la barre bleue. Vous observerez que les chiffres sont toujours inférieurs à ceux de 2000 mais marquent une progression encourageante par rapport à 2002-2003. Je dirais que 213 millions, c'est à peu près le niveau d'activité durable en Colombie-Britannique; il y aura de bonnes années où le chiffre sera supérieur et d'autres qui seront moins bonnes, mais c'est notre niveau durable.

    L'autre document, assez détaillé, donne la répartition des genres des deux premières; je vous le laisse; parcourez-le à votre convenance.

    L'autre est le rapport d'activités de BC Film, l'organisme que je préside, et dont Liz et Lodi sont gestionnaires. Il décrit avec force détails l'industrie et les réussites que nous avons connues.

    Je vous remercie tous d'être venus à Vancouver pour en apprendre un peu plus sur l'industrie cinématographique en Colombie-Britannique. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous savons que ça n'a pas été facile. Le calendrier a été chamboulé et je vous remercie de votre persévérance.

    Nous avons pris connaissance du communiqué qui annonçait la création du comité et la tenue d'audiences. En ce qui concerne l'un des éléments que vous examinez, l'influence et l'efficacité de la politique cinématographique canadienne du gouvernement fédéral, nous dirions qu'elle est très efficace. Je ne connais aucun autre pays qui, en si peu de temps, s'est doté de politiques fédérales qui ont eu autant d'effet que les nôtres.

    En ce qui concerne la structure et l'efficacité des mécanismes de soutien direct et indirect, mes éloges ne seront pas aussi sentis. Le personnel et les cadres de divers organismes ont énormément de talent et sont bien intentionnés, mais il s'agit d'un assemblage bancal, gargantuesque, suradministré et de plus en plus inefficace. C'est là j'espère que vous porterez votre attention.

    Au fait, BC Film s'enorgueillit de son administration. Tous les fonds obtenus du gouvernement de la Colombie-Britannique, jusqu'au dernier cent, sont allés aux cinéastes. Nous n'avons jamais rien prélevé au passage pour les frais généraux. Ceux-ci sont financés par nos activités commerciales, soit la rémunération de nos services. Chaque dollar reçu est allé aux programmes de production cinématographique et j'estime qu'il serait sage d'appliquer la même formule aux organismes fédéraux. Des dizaines de millions de dollars iraient ainsi aux cinéastes plutôt qu'aux administrateurs.

    Nous exerçons une vigilance constante à British Columbia Film pour nous assurer que nous obtenons bien notre juste part des fonds du gouvernement fédéral. Dans l'année dont j'ai parlé, l'année record de 400 millions de dollars de production en Colombie-Britannique, nous avons eu notre juste part.

    Nous représentons 13,2 p. 100 de la population, mais l'an dernier Téléfilm Canada ne nous a accordé que 7,1 p. 100 de ses crédits. Le Fonds canadien de télévision nous en a donné 12,4 p. 100, et nous ne nous en plaignons pas. L'Office national du film nous en a donné 6 p. 100, et les crédits d'impôt, calculés en fonction de la production, représentaient 11 p. 100. Pour cette année-là, nos plus gros reproches vont à Téléfilm Canada.

    Nous appuyons fermement le lien qui existe entre le ministère du Patrimoine et ses organismes dans la mesure où la justice entre les régions est un élément essentiel de vos liens contractuels.

À  +-(1015)  

    À ce propos, je signale que Téléfilm Canada a un bureau à Vancouver depuis des années. Il a été absolument essentiel à la croissance de notre industrie. J'ignore comment les régions qui n'ont pas d'antenne de l'organisme fédéral peuvent gérer leurs affaires. Celle de Vancouver a du personnel de talent et ces gens ont été de véritables partenaires dans l'essor de l'industrie ici. Nous sommes très reconnaissants de sa participation ininterrompue à la croissance de l'industrie.

    Les régions sont très différentes les unes des autres. Nous sommes inquiets quand les politiques nationales ne tiennent pas compte de ces différences. Le 5 p. 100 d'écrans canadiens conviennent peut-être en Ontario mais ne suffisent pas à la croissance du secteur ici. Nous recommandons donc une coordination beaucoup plus étroite entre les organismes fédéraux et provinciaux capables d'offrir diverses formes d'aide à chaque région en fonction de la maturité de l'industrie dans la région.

    Nous étions ici lorsqu'il a été question des écrans et des quotas. Comme vous le savez, vous l'avez déjà entendu et c'est un très vieux débat, le monde change très rapidement. Sans aller jusqu'à dire que c'est un chiffre qui n'a pas de sens, il n'est pas aussi important qu'il l'était il y a quelques années.

    La Colombie-Britannique est le centre des nouveaux médias. Les jeux informatiques, par opposition aux jeux de hasard, ont vu le jour ici au Canada. Nous avons eu un immense succès. Plusieurs très grosses entreprises ont été créées ici. Beaucoup ont été pressenties par des auteurs étrangers de jeux vidéos. Pour cette raison, nous sommes très sensibles au rôle d'Internet, de la télévision et des autres médias dans la distribution des produits de divertissement numériques. La stratégie de demain devrait s'inspirer de cette nouvelle réalité et non des objectifs des dernières années.

    La Colombie-Britannique tenait à ce que son succès ne se fasse pas projet par projet. C'est une façon inefficace de bâtir un plan d'activités. Comme vous le savez, c'est pourtant la façon dont l'industrie télévisuelle et cinématographique fonctionne au Canada. Nous avons appliqué ce que nous appelons le programme de l'ardoise. Les producteurs viennent nous présenter le bilan de leurs réalisations passées et ce qu'ils comptent accomplir dans l'avenir. Nous leur versons directement des subventions pour grossir leur capital et leur permettre ainsi de profiter de nouvelles possibilités. Certains projets seront couronnés de succès, d'autres échoueront. C'est le marché qui veut ça. Nous voulons seulement nous assurer qu'ils disposent des capitaux nécessaires pour acquérir un produit culturel canadien et en faire un film ou une émission de télévision.

    Nous encourageons nos partenaires du niveau fédéral à penser de même. Il est inconcevable pour moi—surtout si l'on regarde ce qui se passe ailleurs dans le monde—qu'une formule projet par projet puisse être durable dans ce secteur. Il faut mobiliser et soutenir le producteur indépendant pour qu'il puisse créer une ardoise de produits.

À  +-(1020)  

    Nous trouvons qu'il y a trop de restrictions. Trop d'arbitraire dans la définition de ce qui est canadien et ce qui ne l'est pas. Dès lors qu'un Canadien possède le droit d'auteur et dirige les aspects créatifs et financiers d'un projet, le projet est canadien. Un surcroît de contraintes ne fait que réduire la commercialité du projet et rogner son succès. Nous en sommes fermement convaincus.

    Nous sommes divisés sur la question de la distribution. Comme vous le savez, il faut un distributeur canadien pour se prévaloir de l'organisme fédéral. C'est sans doute une bonne chose, mais il y a des projets ici en Colombie-Britannique pour lesquels il conviendrait bien mieux d'avoir un distributeur étranger puisque leurs chances de réussite seraient plus grandes de cette façon. J'espère que vous vous pencherez sur cette idée quand vous examinerez les diverses propositions qui vous ont été faites.

    C'est tout ce que j'ai à dire. J'aimerais demander à mes deux collègues si elles ont quelque chose à ajouter, après quoi je céderai la parole au prochain témoin.

À  +-(1025)  

+-

    Mme Lodi Butler (directrice, Financement de films, British Columbia Film): J'aurais simplement une chose à dire en réaction à vos séances précédentes. Je suis à 100 p. 100 d'accord pour que le gouvernement fédéral continue à insister pour faire en sorte que les films canadiens sortent en salle, mais je ne pense pas qu'il y ait un public pour cela. Il faut un remaniement considérable de la politique pour arriver à créer un public et trouver de l'argent pour assurer le marketing des films canadiens. Il faut créer un public en commençant par les jeunes, et à l'heure actuelle, jamais les possibilités de le faire n'ont été meilleures grâce à Internet.

    Ici, dans l'Ouest, nous ne savons au juste quelles sont les politiques, les avantages administratifs et les compétences technologiques des administrateurs de Téléfilm en matière de commerce électronique. Nous aimerions pouvoir consacrer plus de temps et d'efforts à ce sujet. Peut-être est-ce là un mécanisme qui pourrait être utilisé afin de créer un public pour les longs métrages canadiens.

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Madame Adams, c'est votre tour.

+-

    Mme Anita Adams (directrice générale, First Weekend Club): Je vous remercie.

    Je ne suis pas venue ici pour faire des recommandations, mais plutôt pour vous parler de ce que nous faisons dans notre organisation, le First Weekend Club, afin de vous apprendre de quoi il s'agit.

    Le First Weekend Club est un ciné-club pancanadien. Nous sommes un organisme sans but lucratif qui a pour mandat de créer un public pour les films canadiens et de susciter l'enthousiasme pour les talents canadiens. Nous avons pour objectif de produire de grosses recettes pour les films canadiens pendant la fin de semaine de leur sortie en salle et faire en sorte qu'au bout du compte, les films canadiens tiennent l'affiche plus longtemps.

    Comme notre nom l'indique, la fin de semaine de la sortie en salle d'un film est l'élément clé du succès qu'il aura. Si un film réussit bien la fin de semaine de sa sortie en salle, il tiendra vraisemblablement l'affiche plus longtemps, et, peut-être aussi, sera-t-il projeté dans d'autres marchés au Canada. Par conséquent, nous essayons surtout de faire en sorte que nos membres aillent au cinéma les fins de semaine où les films canadiens font leur sortie en salle.

    À l'heure actuelle, les cinéphiles sont bien en peine de trouver des titres canadiens dans les salles de cinéma. Comme quelqu'un me le disait tout récemment, trouver un film canadien c'est un peu comme chercher des oeufs de Pâques  : on sait qu'ils sont là, mais ils sont vraiment difficiles à trouver. Notre club a été constitué pour aider le public à trouver ces films et à aller les voir au moment où ils sortent dans les salles commerciales. Nous croyons, et c'est également notre mandat, que si ces films font un succès d'affiche la première fin de semaine, ils pourront résister à la pression d'une énorme vague de produits américains, lesquels monopolisent actuellement 98 p. 100 des écrans dans la partie anglophone du Canada.

    La stratégie de marketing que nous avons adoptée pour les films canadiens est très simple. On peut faire la promotion d'un film de toute sorte de façon, à la radio, à la télévision, ou encore en faisant de la publicité dans les journaux mais la publicité la plus efficace, c'est le bouche à oreille. Le First Weekend Club est un organisme populaire animé par ses membres, qui répond aux besoins de ceux-ci et fait d'eux l'élément le plus important du processus de promotion du cinéma canadien.

    Je voudrais dire un mot de nos membres, après quoi j'évoquerai quelques autres initiatives que nous menons pour aider le cinéma canadien. Nous avons actuellement 5 000 membres un peu partout au Canada, et nous nous sommes donné pour objectif d'avoir 100 000 adhérents actifs. Pour y arriver, nous faisons connaître notre organisation et sa mission, mais aussi nous allons chercher de nouveaux membres. Nous avons fait plusieurs choses dans ce but. Nous avons fait passer en ondes un communiqué d'intérêt public, une petite publicité de 60 secondes axée sur le thème « Découvrez le cinéma canadien ». Il a été projeté à plusieurs festivals du film un peu partout au Canada. Nous venons tout juste de recevoir le feu vert pour le diffuser en ondes, et vous le verrez donc sur plusieurs canaux de télévision pendant l'année qui vient. Nous sommes actuellement en pourparlers avec Famous Players Media pour le faire projeter dans leurs salles partout au Canada, et nous espérons bien que cela se fera; je pense que cette projection en salle fera une énorme différence.

    Nous avons également lancé plusieurs campagnes d'adhésion en partenariat avec de gros organismes comme les Prix Génie, le Festival du film de Whistler, le Festival du film de l'Atlantique et, cette année-ci, le Festival international du film de Toronto. Nous affichons notre présence dans les cinémas en commanditant la projection de bandes-annonces promotionnelles, nous essayons de rejoindre les cinéphiles qui fréquentent les festivals en leur envoyant des matériels publicitaires, et nous allons très bientôt lancer deux nouvelles initiatives qui nous enthousiasment beaucoup. La première est une série de discussions en coulisse en compagnie de cinéastes et d'acteurs canadiens qui auront lieu à Toronto, et la seconde, ici à Vancouver, est une série de causeries sur le cinéma que nous organiserons en partenariat avec le Festival international du film de Vancouver, et qui nous permettra une fois par mois de faire projeter un film canadien.

    Pour faire bouger nos membres, ce qui est un élément essentiel de notre travail, nous invitons des cinéastes et des acteurs à assister aux projections qui ont lieu pendant les fins de semaine des sorties en salle. En fait, nous orchestrons une activité qui gravite autour de ces fins de semaine de lancement, ce qui rend encore plus intéressant le prix du billet d'entrée au cinéma. Nous organisons également des réceptions après les projections, de sorte que nos membres puissent s'entretenir avec les cinéastes et les acteurs. Nous nous sommes mis en partenariat avec plusieurs commerces de Vancouver et de Toronto où, si vous vous présentez après avoir vu le film avec la souche de votre billet, vous entrez gratuitement et on vous offre un apéritif et des hors-d'oeuvre. Tout cela fait partie de votre soirée au cinéma. C'est étonnant de voir à quel point l'idée d'un apéritif gratuit fait sortir les gens de chez eux pour aller au cinéma.

    Des voix : Oh, oh.

    Mme Anita Adams : Nous nous sommes merveilleusement associés avec quelques restaurants du coin. À Vancouver, nous nous sommes mis en partenariat avec Wilson, un nouveau restaurant spécialisé dans les grillades, un endroit très à la mode où il y a un grand écran sur lequel nous faisons passer les bandes-annonces des films que nous soutenons ou d'autres films que nous allons favoriser, de manière à lancer le bouche à oreille.

À  +-(1030)  

    Nous offrons aussi à nos membres des occasions d'interaction avec des cinéastes canadiens, dans le cadre de notre forum sur Internet que nous lancerons d'ici quelques semaines.

    Le First Weekend Club a parmi ses rôles importants l'information de ses membres et la dissémination de l'information. Nous le faisons surtout par Internet. Ainsi, nous leur envoyons des bulletins de nouvelles électroniques mensuels sur tous les lancements de films canadiens. Toujours par voie électronique, nous signalons à nos membres les films de fort calibre. Habituellement, ce sont ceux pour lesquels nous organisons des événements, afin d'en faire la promotion.

    Notre site Web est maintenant une source d'information bien connue sur les films canadiens et on y trouve les dates de lancement, les cinémas qui les présentent, leur synopsis, le nom des créateurs principaux et des bandes-annonces, s'il y en a. Nous voulons que notre site Web soit l'équivalent du site apple.com, pour les bandes-annonces. Vous ne connaissez peut-être pas apple.com, mais il reçoit 100 000 consultations par jour. Les gens vont y voir des bandes-annonces. Les bandes-annonces sont un moyen efficace de susciter l'enthousiasme du public pour un film. Nous présentons aussi des articles et des entrevues avec les cinéastes. Nous allons aussi lancer bientôt un forum de discussion.

    Nous sommes très fiers de notre nouveau programme, le programme ambassadeur. Nous avons un grand nombre de ce que nous appelons des ambassadeurs, à Vancouver et à Toronto, qui appuient nos projets. Nous leur donnons des billets pour les avant-premières de films, quelques jours avant la fin de semaine de la première. Ils vont voir le film avec un ami. S'ils aiment le film, nous leur demandons d'en parler à au moins 10 amis, que ce soit en personne ou en envoyant un courriel à cet ami ou ce collègue. Heureusement, nous avons dans ce programme de nombreux leaders qui ont de grands réseaux de relations et qui appuient notre programme. C'est une toute nouvelle initiative et je ne sais pas encore quel en sera le résultat. Mais je suis très optimiste à cause des personnes qui y participent, qui sont engagées et passionnées.

    Nos membres sont la force motrice de notre organisation, notre atout le plus précieux. Nous nous efforçons de répondre à leurs besoins en vue de créer une expérience unique et mémorable de cinéphile. C'est très important dans notre travail.

    En plus d'organiser des événements se rapportant aux films canadiens et en plus d'envoyer nos messages, le First Weekend Club travaille avec les cinéastes, les distributeurs, les exploitants de salles et les publicitaires à la création ou à l'offre de services de gestion de campagnes publicitaires. Les visionnements promotionnels et la gestion des détails d'avant-premières font partie de ce service. Beaucoup des distributeurs sont à Toronto. Nous avons des représentants dans diverses villes du pays. Nous pouvons les aider à Vancouver, à Calgary ou ailleurs. Nous pouvons contribuer aux activités d'avant-premières. Ainsi, pour promouvoir les films canadiens, nous concevons et exécutons des campagnes de courriels et des campagnes médiatiques, nous supervisons ou mettons en oeuvre des initiatives de marketing auprès du public, nous organisons des fêtes de premières et nous offrons des services publicitaires.

    Nous avons eu quelques grands succès, le principal étant un film que nous avons travaillé et intitulé The Delicate Art of Parking. Nous avons recruté une armée de bénévoles qui se sont rendus dans les rues pour donner 10 000 fausses contraventions de stationnement. Si vous avez déjà eu un constat d'infraction à Vancouver, vous auriez dit : « Mais c'est une contravention » si vous aviez vu cela sur votre pare-brise. Mais en l'examinant bien, vous vous seriez rendu compte que c'était une publicité pour un film canadien. On y disait même qu'il n'y avait pas eu d'infraction, mais que c'en serait une de ne pas aller voir le film. Au verso, il y avait l'affiche du film.

    L'un des principaux trucs publicitaires que nous avons employés pour ce film au Canada a nécessité la collaboration des exploitants de salles, du distributeur, du réalisateur et du publicitaire. Les spectateurs qui avaient une contravention de stationnement non payée de quelque municipalité que ce soit pouvaient la présenter au guichet, même pour une matinée ou la fin de semaine du lancement du film, et entrer gratuitement. Cela a eu un effet boeuf à Vancouver. Les gens étaient très enthousiastes. Il fallait qu'ils voient le film. Cela ne nous a coûté que 80 billets de cinéma, mais l'effet a été incroyable.

    Le film est resté à l'affiche pendant 13 semaines. La fin de semaine de la première, il a obtenu le plus grand nombre d'entrées pour un seul écran à Vancouver et la plus haute moyenne par écran pour l'ensemble du Canada.

À  +-(1035)  

    Et j'insiste là-dessus, ce sont les efforts conjugués de toutes ces différentes personnes qui ont donné cet effet explosif.

    La fin de semaine du lancement du film, nous avons fait un mini-sondage sur la façon dont les gens avaient entendu parler du film. Nous l'avons fait pour trois représentations. Voici les résultats : 39 p. 100 des personnes interrogées avaient entendu parler du film grâce au First Weekend Club, 38 p. 100, grâce à un ami, 34 p. 100, dans un reportage, 14 p. 100, en voyant la bande annonce, 12 p. 100 grâce aux publicités imprimées, 11 p. 100 grâce à la radio, et pour 3 p. 100, c'était une autre source. Il va de soi que pour certains des répondants, il y avait plus d'une source. En fait, pour 40 p. 100 des personnes interrogées, il y avait trois sources. Je le répète, c'est important qu'il y ait des sources diverses, pour un même but.

    First Weekend Club a fait la promotion de plus de vingt films jusqu'ici et a des chapitres à Vancouver, Toronto, Calgary, Victoria, Winnipeg et Halifax et en aura de nouveaux, d'ici la fin de l'année, à Ottawa, Edmonton et Montréal. Le besoin est grand pour un organisme comme le nôtre au Canada étant donné que sont grandement désavantagés les films canadiens par rapport aux films américains. Nous croyons que Patrimoine canadien doit savoir que First Weekend Club est un outil qui, s'il se trouvait partout au Canada, pourrait améliorer le rendement des longs métrages canadiens.

    En terminant, j'aimerais rappeler que dans un rapport de Téléfilm Canada, remontant à il y a quelques années et intitulé De plus vastes auditoires pour les produits culturels canadiens, un plan d'entreprise, on disait que l'une des priorités serait de créer des outils plus précis pour rejoindre les auditoires et améliorer le potentiel de l'industrie, particulièrement dans les secteurs du long métrage. On dit plus loin dans le rapport qu'une nouvelle stratégie de promotion des films canadiens doit être mise en place.

    Voilà exactement ce que First Weekend Club offre : une nouvelle stratégie et une approche populaire pour joindre directement le public et bâtir les auditoires.

    Merci.

+-

    La présidente: Merci.

+-

    Mme Liz Shorten (directrice, Mise en marché et communications, British Columbia Film): Puis-je ajouter que je suis aussi membre du conseil d'administration du First Weekend Club? Et je tiens à dire que nous sommes très reconnaissants à Téléfilm Canada qui est devenu l'an dernier un partenaire du First Weekend Club et qui finance nos efforts. Vous aidez donc le First Weekend Club par l'intermédiaire de Téléfilm Canada, lui-même financé par Patrimoine Canadien. Je voulais simplement que vous sachiez que nous avons l'appui de Téléfilm.

+-

    Mme Lodi Butler: J'aimerais aussi ajouter quelque chose. Depuis quatre ans, British Columbia Film a investi dans 32 longs métrages. Les succès les plus récents sont The Delicate Art of Parking, The Corporation, Ill Fated, Emile, et The Snow Walker. Alibi Unplugged a été partenaire dans la promotion de ces films. Leur succès a été pour nous très apparent, et nous en sommes très reconnaissants.

+-

    Mme Anita Adams: Alibi Unplugged est la société mère de First Weekend Club.

+-

    La présidente: Merci.

    Pour la gouverne de Mme Bulte, je précise que nous avons ajouté à notre ordre du jour Mme Ng, qui a assisté à presque toutes nos audiences d'hier et de ce matin et qui, estimons-nous, pourrait faire une contribution intéressante.

    Madame Ng, vous avez la parole.

+-

    Mme Sauching Ng (directrice générale, Moving Pictures: Canadian Films on Tour): Je fais partie du Festival itinérant de films canadiens Moving Pictures: Canadian Films on Tour. Nous ne présentons que des films canadiens. Nous les amenons dans de petites collectivités. Actuellement, nous visitons des collectivités de la Colombie-Britannique, du Yukon et de l'Alberta. Nous sommes allés dans d'autres provinces auparavant et nous espérons pouvoir conserver cette pratique afin de présenter les films canadiens à de petites collectivités.

    Nous sommes uniques et bon nombre des questions dont vous avez parlé hier et aujourd'hui sont les problèmes de notre quotidien. Nous traitons avec les distributeurs qui envoient les pellicules pour qu'on les présente à ces festivals. S'il n'y a pas suffisamment d'auditoires, c'est en partie un problème de marketing. Il y a aussi le problème de l'accès aux copies. Il y a un nombre limité de copies 35 millimètres pour fins de distribution et bon nombre de nos partenaires exploitant de salles dans les plus petites collectivités voudraient y avoir accès dès leur sortie, et non quand ils sont déjà disponibles en DVD ou sur cassette. En effet, il est difficile de séduire les cinéphiles ou de faire de la publicité dans la collectivité quand les gens peuvent louer le film sur vidéo, au club vidéo local.

    Il y a aussi le problème des salles. Dans certaines de ces petites collectivités, ce sont de vieilles salles, qui n'ont pas des sièges confortables. C'était le cas notamment à Vancouver. Nous présentions auparavant notre festival à la Pacific Cinematheque mais cette année, nous avons pris l'initiative d'aller ailleurs, à Tinseltown, dans un cinéma plus en vue, plus fréquenté. Nous essayons de retirer ces films canadiens des petits cinémas pour les mettre en valeur dans des cinémas de première classe.

    Cette année, au gala de fermeture, nous avons accordé un prix au meilleur court métrage de notre festival. Le gagnant était Milo 55160, et nous avons remis un chèque de 4 500 $ au réalisateur, pour l'aider dans sa carrière de cinéaste.

    En partenariat avec Odeon Films, nous avons mis à l'affiche It's All Gone Pete Tong à notre visionnement du gala de fermeture du 1er juin, en plus de contribuer à sa promotion. Nous avons travaillé avec l'exploitant des salles, et c'était une première pour lui. C'était la première fois qu'il confiait un film à Moving Pictures ou à un festival de notre nature, avant la sortie en cinéma. Je pense que nous avons bien fait de travailler ensemble pour donner davantage d'attention à ce film.

    Vous constaterez que dans les hebdomadaires, on parle beaucoup de It's All Gone Pete Tong. Nous avons trois publicitaires dont deux ont travaillé à la promotion du visionnement du gala de fermeture et de Pete Tong. Dans tous les communiqués, on donnait aussi le nom du responsable de la publicité pour Odeon, et nous avons donc pu collaborer à la promotion du film, auprès des stations de radio et de télévision, ainsi que dans les médias écrits, pour faire mousser ces visionnements. Par ailleurs, nous avons essayé d'attirer des artistes bien connus au visionnement, pour en faire un événement, et nous espérons continuer de faire des choses de ce genre.

    Cet été, je vais réévaluer les objectifs de Moving Pictures et moderniser notre plan d'entreprise pour le renforcer et le rendre encore plus solide qu'il ne l'est déjà. Je m'efforcerai aussi d'éviter qu'il y ait dédoublement avec les efforts d'autres organisations, de manière à collaborer ensemble et à s'entraider du mieux que nous pouvons.

À  +-(1040)  

+-

    La présidente: Merci beaucoup.

    Nous commençons par Mme Davies, qui sera suivie de Mme Bulte, ce qui devrait être fort intéressant.

+-

    Mme Libby Davies: Merci d'être venus.

    En fait, il est très intéressant d'entendre ici ce matin que chacune de vos organisations travaille de façon différente. Il y a beaucoup de collaboration.

    Vous étiez ici au début, mais je ne sais pas si les autres étaient déjà là. Nous parlions de la distribution, de l'accès, du marketing, de l'exploitation et du problème que posait la continuité.

    En vous écoutant, ce qui m'a frappée, c'est que faisiez tous des choses étonnantes. Le First Weekend Club est phénoménal. Je n'en avais jamais entendu parler, ce qui me donne vraiment mauvaise conscience. J'ai toujours eu le sentiment d'être bien branchée, mais je n'avais jamais entendu parler de vous.

    Alors j'ai à l'esprit cette image qui vous montre tous faisant tout ce qu'il faut, mais que ce n'est quand même qu'un petit grain de sable dans ce vaste monde qu'on appelle le Canada et où il y a toutes ces autres forces qui n'arrêtent pas de bombarder les gens. Lorsque vous dites que vous voulez passer de 5 000 à 100 000 membres, ce qui semble formidable, comment entendez-vous vous y prendre pour arriver à ce chiffre? Vous ne devez pas me donner l'ensemble de votre plan, mais que pourrions-nous faire pour vous faciliter la tâche?

    Pour revenir à l'idée que ce genre de choses doit venir de la masse, à peu près tout le monde nous a dit que dans l'industrie du cinéma, le bouche à oreille était extrêmement important. Vous avez manifestement exploité ce filon. N'est-ce pas? Comment s'y prendre pour créer ce réseau, qu'il s'agisse de Moving Pictures ou que sais-je encore? Comment partir de ce que vous faites vous pour faire exploser cela à la millième puissance? Comment cela doit-il se passer? Qu'est-ce qui doit changer?

    Ma seconde question s'adressera plutôt à Michael. On a beaucoup parlé du fait qu'il fallait une bien meilleure adéquation avec l'investissement privé. J'ignore comment la British Columbia Film y arrive. Vous nous avez dit que vous donniez des subventions directes, mais est-ce que vous aidez les gens du cinéma à établir ce genre de contacts?

    Je pense avoir entendu dire par à peu près tout le monde que s'il y avait une meilleure façon de faire ces contacts avec l'investissement privé, par exemple, pour la production ou le marketing, tout le monde s'en trouverait beaucoup mieux. On pourrait y arriver en partie en utilisant pour vecteur les incitatifs fiscaux, par exemple, mais pour ce qui est du travail de terrain, qui doit s'en charger? Est-ce cela qu'un bureau du cinéma doit ou devrait faire? Et est-ce que vous le faites?

    Voilà pour mes questions.

À  +-(1045)  

+-

    Mme Anita Adams: Je vais commencer.

    Pour ce qui est de trouver des adhérents et des appuis partout au Canada, je crois que cela va prendre du temps. Mais je crois que l'essentiel, c'est de trouver ces partenaires, ces grandes organisations et ces personnages clés, qui peuvent nous aider à faire des choses.

    Nous sommes après Famous Players. Je crois qu'ils ont un rôle primordial à jouer. Ils ont des milliers d'écrans partout au Canada. Si nous pouvons prendre pied dans leurs salles pour rejoindre notre auditoire cible de mordus du cinéma avec notre message d'intérêt public, qui est un mini-film merveilleux de 60 secondes, très bien fait, tourné par des cinéastes de la Colombie-Britannique qui ont remporté des prix—parmi lesquels Carl Bessai que vous avez rencontré plus tôt—je crois que nous allons avoir un impact. Nous allons pouvoir rejoindre plus de gens et faire passer notre message, et nous allons le faire passer de diverses façons.

    Nous venons tout juste d'obtenir l'appui ou le parrainage de Georgia Straight. Ce magazine nous accorde de la publicité gratuite pour faire la promotion du First Weekend Club. Notre organisation est sans but lucratif. Nous devons faire en sorte que ces organisations ou bien nous parrainent ou alors nous accordent un bon rabais.

    Pour ce qui est de Famous Players, ils m'ont envoyé à l'origine une trousse médiatique qui disait que pour avoir accès à tous leurs écrans partout au Canada pendant quatre semaines, il allait nous en coûter 400 000 $. Je leur ai renvoyé un charmant petit courriel, où je me moquais de cela, et où je leur demandais de nous parrainer. C'est une situation où tout le monde est gagnant. Nous envoyons des gens vers leurs salles qui verront les films qui sont dans leurs salles. Nous mettons de l'argent dans leurs poches s'ils soutiennent notre initiative. Ils nous écoutent maintenant. Il faut simplement continuer de se parler. Je crois que cela va faire une différence énorme.

    Pour ce qui est d'obtenir l'appui de grandes organisations et du gouvernement, il est sûr que Téléfilm Canada nous a grandement aidés à avancer. Nous avons un programme d'ambassadeurs. Nous lançons divers produits pour gagner des adhérents; mais je crois que ceux-ci doivent provenir de sources très différentes.

+-

    Mme Libby Davies: Est-ce que le gens doivent adhérer?

+-

    Mme Anita Adams: Oui.

+-

    Mme Libby Davies: Y a-t-il un droit d'adhésion?

+-

    Mme Anita Adams: C'est gratuit.

    Nous songeons à mettre sur pied ce que nous appelons un programme pour les personnes de marque. Il y aura donc deux niveaux d'adhésion, l'un gratuit et l'autre étant un programme à valeur ajoutée, où nous allons trouver d'autres partenaires dans l'industrie pour offrir des forfaits, ou des parties de forfait, que nous pourrons vendre à nos membres et ainsi créer des revenus pour le First Weekend Club qui nous aideront ensuite à faire connaître ce que nous faisons.

À  +-(1050)  

+-

    Mme Liz Shorten: Je crois que l'essentiel ici, c'est que nous essayons de bâtir des auditoires au niveau des gens eux-mêmes, et je crois qu'on a parlé de ça plus tôt ce matin. C'est l'un de nos défis ici, et Carl en a parlé plus tôt. En fait, on a cette perception à propos des films canadiens, et le First Weekend Club essaie de changer cette perception au niveau des gens. En entreprenant des initiatives de ce genre, qui semblent petites et élémentaires, nous allons élargir notre auditoire partout au Canada. Nous ne pouvons pas nous attaquer aux superproductions d'Hollywood, mais nous pouvons croître graduellement. Nous avons prouvé que nous pouvions bâtir un auditoire loyal et durable grâce à ce genre d'initiative et grâce à Moving Pictures, cette initiative qui implante les festivals dans des régions éloignées qui n'ont normalement pas accès aux films canadiens.

    Nous voulons donc faire connaître les films canadiens.

    British Columbia Film est fier d'appuyer Moving Pictures depuis ses débuts.

+-

    Mme Anita Adams: J'aimerais parler d'une autre initiative que nous allons lancer. Il s'agit d'une émission-causerie à la radio que nous sommes en train de réaliser et que nous voulons vendre à la CBC, pour qu'elle ait un rayonnement national. L'idée consiste essentiellement à fonctionner comme un club de livres, sauf que c'est pour le cinéma, où les gens téléphoneront et parleront d'un film qu'on peut trouver en vidéo, ou lorsqu'un film canadien est lancé au Canada, nous disons aux membres d'aller voir ce film, puis le lundi suivant, ou peu importe quand, nous les inviterons à nous téléphoner pour en parler. Nous aurons des invités spéciaux, des cinéastes, par exemple, qui dialogueront avec l'auditoire.

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Bulte.

+-

    M. Michael Francis: Je n'ai pas répondu à la question, si vous me le permettez.

+-

    La présidente: Excusez-moi.

+-

    M. Michael Francis: Je suis comptable agréé de profession et je suis dans le domaine du capital-risque depuis plusieurs années, donc je sais de quoi je parle. Toutes les suggestions qu'on a faites concernant l'investissement dans l'industrie cinématographique ne sont en fait qu'un débat sur la question de savoir qui doit éponger les pertes. Il n'y a aucune perspective de profit. Cela tient principalement à toutes ces entraves qu'on impose aux cinéastes au niveau du contenu canadien et de ce genre de choses. On est en fait forcé de fabriquer un produit pour lequel il n'existe qu'un marché minuscule. Tant qu'on n'aura pas réglé ce problème, il n'existera pas de perspectives d'investissement qui ne seront pas dictées par des allègements fiscaux d'un genre ou d'un autre.

    Et vous connaissez les piètres résultats que l'industrie a connus dans ce domaine à ses débuts, à l'époque où tous les investissements étaient liés à des avantages fiscaux. La raison pour laquelle il existe aujourd'hui des crédits d'impôt, c'est parce que le système initial était tellement inefficient. Pour chaque dollar qui sortait de la poche de l'investisseur, sept cents étaient versés au cinéaste, et tout le reste passait en honoraires et commissions. Je dirais donc qu'aujourd'hui, au Canada, cette industrie touche des subventions suffisantes. Il appartient aux cinéastes et aux producteurs de réaliser des films commercialement viables qui seront rentables pour les investisseurs.

+-

    La présidente: Merci.

    Madame Bulte.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Toutes mes félicitations au First Weekend Club. Je l'écoute maintenant.

    Depuis quand est-ce que cela existe?

+-

    Mme Anita Adams: Nous avons lancé le First Weekend Club en février 2003.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Vous n'avez donc que deux ans.

+-

    Mme Anita Adams: Oui. La première année, je n'avais en fait aucune idée de ce que ça allait devenir. L'organisation mère est Alibi Unplugged, qui est une série de lecture de scénarios que nous organisons à Vancouver. Grâce à cette série de lecture de scénarios mensuelle, j'ai rencontré un grand nombre de cinéastes et j'ai découvert la misère de l'industrie cinématographique canadienne, et je me suis mise à songer à des solutions. Naïfs comme nous l'étions, nous avons lancé le First Weekend Club, et ses débuts ont été fulgurants. C'est maintenant notre principale activité. Ça fait seulement un an que nous avons vraiment commencé à pousser et à faire des choses.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Quel est votre budget?

+-

    Mme Anita Adams: Eh bien, notre principale source de financement est Téléfilm Canada. Nous avons reçu 100 000 $ pour gérer First Weekend Club cette année, pour en faire une structure nationale. Nous nous arrangeons donc avec ce budget en ce moment, et nous tâcherons de trouver d'autres sources de financement.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Par l'entremise de Téléfilm?

+-

    Mme Anita Adams: Nous cherchons d'autres sources de financement, avec le programme de personnes de marque que nous voulons lancer, et en offrant nos services aux distributeurs pour gérer des campagnes de sensibilisation populaires à la sortie des films.

À  +-(1055)  

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Quel est votre site Web?

+-

    Mme Anita Adams: C'est le www.firstweekendclub.ca

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Monsieur Francis, je veux parler de vos changements définitionnels. Lorsque le Fonds de financement de longs métrages canadiens a été lancé en 2000, il y avait certaines choses qui définissaient ce qui constituait un film canadien, et qui par conséquent serait admissible au financement. Vous avez mentionné cet exemple où vous disiez que tant que le cinéaste possédait le droit d'auteur, c'était lui en un sens qui avait le contrôle financier.

+-

    M. Michael Francis: Il a le contrôle financier et créatif.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Et le contrôle créatif. Qu'en est-il d'une situation où vous avez seulement le droit d'auteur? Ce qu'on essaie de faire en ce moment dans le domaine du droit d'auteur, c'est de couper les cheveux en quatre et dire que le cinéaste conserve le contrôle, mais renonce au droit d'auteur afin d'avoir accès au financement international.

+-

    M. Michael Francis: Le plus important, c'est le contrôle financier et créatif. Si vous avez le contrôle financier et créatif, je ne m'inquiète pas beaucoup de la nature de la propriété du droit d'auteur tant et aussi longtemps que ce droit existe sous une forme ou une autre.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Vous proposez donc que l'on modifie le Fonds du long métrage? Est-ce une des recommandations que vous faites, à savoir supprimer l'exigence pour les acteurs et réalisateurs canadiens...

+-

    M. Michael Francis: Oui. Je dis qu'il faut examiner le système et qu'il faut l'assouplir pour que ces produits trouvent des débouchés. J'épouse un point de vue industriel par opposition à un point de vue culturel.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: D'accord. Donc, je vous le redemande, est-ce qu'on supprime l'exigence relative au contenu canadien? J'imagine que j'essaie...

+-

    M. Michael Francis: Je pense que certaines exigences relatives au contenu canadien sont trop restrictives. Du point de vue des points, je ne placerais pas la barre trop haut de ce côté, ou alors j'accorderais plus de discrétion à celui qui doit évaluer si un projet est bon ou non et s'il doit être tourné ou non.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: D'accord. À votre avis, qu'est-ce qui est trop restrictif? J'essaie...

+-

    M. Michael Francis: Je pense que la formule totale doit correspondre aux chiffres, et il faut gagner ces chiffres. Souvent, quand on atteint ce seuil, on se retrouve souvent avec un projet qui n'a pas le potentiel international.

    Cela étant dit, nombreux sont ceux qui vous diront que cela importe peu; que c'est un récit canadien qui doit être raconté à des Canadiens. Mais je ne crois pas que c'est ça qui va bâtir une industrie.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: J'essaie seulement de trouver un exemple concret. Avez-vous une recommandation précise à nous faire pour modifier cette définition?

+-

    Mme Lodi Butler: L'exemple précis que j'ai à l'esprit concerne particulièrement les acteurs-vedettes. Chose certaine, c'est un aspect de la distribution qui est très difficile à maîtriser si vous êtes un producteur.

    Un bon exemple serait un film de 10 millions de dollars avec la collaboration de Lions Gate, qui dirait : « Eh bien, pour notre avance de 2 millions de dollars sur la distribution pour le territoire américain, vous devez avoir des acteurs-vedettes. Il est très difficile de négocier cela et d'avoir un investissement de 3,5 millions de dollars de Téléfilm Canada et de répondre aux exigences relatives au contenu canadien quand votre distributeur insiste pour avoir certains acteurs-vedettes avant d'investir 2 millions de dollars dans ce film à contenu canadien.

    Donc, le producteur doit se livrer à un véritable exercice de funambule lorsqu'il essaie d'agencer ces divers éléments, et ce sont essentiellement les acteurs en vedette dans le film qui vont faire que le film aura une distribution internationale. C'est frustrant, et c'est également frustrant pour les administrateurs de Téléfilm Canada qui sont obligés d'insister pour que vous ayez 10 sur 10, si vous voulez un investissement maximum de Téléfilm Canada. Si vous avez 8 sur 10, c'est autre chose. Si vous avez 6 sur 10 et que votre film rapporte de bonnes recettes, vous n'avez pas droit à une prime au rendement. Donc tout est lié à ce contenu canadien sur une base internationale. Pour obtenir un contrat international, vous devez avoir des acteurs-vedettes, et cela ne vous est pas permis. Donc la distribution du film—ces deux acteurs-vedettes qui comptent pour quatre des dix points—est essentielle.

Á  +-(1100)  

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Mais il y a des moyens de contourner cela. Par exemple, l'ACTRA nous a dit que les règles étaient trop flexibles, particulièrement dans les coproductions, où vous pouvez avoir pour acteurs-vedettes des personnes issues de pays non signataires. Le meilleur exemple, c'est le dernier film de Robert Lantos. Le metteur en scène, István Szabó, est du Royaume-Uni, mais les vedettes en sont Annette Bening et Jeremy Irons. Ce film est considéré comme canadien. Dans quelle mesure cette exigence est-elle restrictive?

+-

    Mme Lodi Butler: BC Film voit les choses autrement. Si c'est une société canadienne et ce sont ses actionnaires qui ont le contrôle financier et artistique, c'est habituellement moitié-moitié, il s'agit d'un film canadien. D'après les politiques actuelles du Slate Development Fund, il n'y a pas d'exigences au sujet des subventions reçues par l'entreprise. Il n'y a pas d'exigences relatives aux règles en matière de contenu canadien. S'ils gèrent et contrôlent la production, ils sont responsables des fonds. Loin de nous l'idée de déclarer à un partenaire britannique qui a donné six millions de dollars qu'il ne peut pas participer aux décisions relatives à la création et à la gestion financière.

    Je vois deux choses. Si vous voulez instaurer un milieu de cinéastes qui produiront la culture canadienne, il faut les appuyer avec des politiques différentes de celles qui s'offrent aux producteurs qui travaillent depuis des années dans le milieu du cinéma et de la télévision. Il leur faut un plan d'entreprise. Ce sont deux choses bien distinctes.

    Pour obtenir les sommes en jeu dans un plan d'entreprise pour le cinéma ou la télévision, plan comme on en présente pour créer des succès, il faut des partenaires internationaux. Et sans la distribution, sans les éléments commercialisables, que ce soit un réalisateur de Yougoslavie ou quoi que ce soit d'autre, vous n'aurez pas les budgets ni les partenaires. Si une personne peut attirer un auditoire et susciter des contributions de 500 000 $, tant mieux. Il en va ainsi quand on a un plan d'entreprise.

    En revanche, pour un petit cinéaste de la Colombie-Britannique qui en est à son second long métrage, le modèle est différent. Il ne pourra pas séduire un distributeur américain, pour commencer, alors peu importe la distribution et le contenu canadien. Il y aura du contenu canadien en raison du type de financement qu'on peut obtenir au Canada.

    Nous avions un fonds pour les longs métrages, un programme de trois ans qui était à notre avis un grand succès. À la fin du programme, nous nous sommes adressés aux gens du milieu, et avons eu des entretiens avec 50 d'entre eux. Nous avons parlé à des diffuseurs, des distributeurs, des cinéastes, des producteurs, des gens de partout. Nous leur avons demandé ce qu'ils voulaient qu'on fasse de la petite somme dont disposait désormais BC Film. Ils ont tous dit qu'il fallait de l'argent pour le développement et le marketing. Ils ont dit qu'il ne valait pas vraiment la peine que BC Film continue à s'occuper de production. Le programme des crédits d'impôt comblait pour eux ce besoin. Il est juste pour tous. Ils n'avaient rien à dire au sujet du contenu canadien. Il y a un minimum à satisfaire, mais si vous avez six éléments sur dix, vous obtenez encore les points d'impôt. Si vous avez six éléments sur dix de la politique fédérale et que vous avez de bonnes recettes, vous n'avez pas droit à l'enveloppe basée sur le rendement. Ce n'est pas équitable. Est-il juste qu'un film canadien, de propriété et de contrôle canadiens, qui répond aux exigences minimales en matière de contenu canadien n'ait pas droit à l'enveloppe basée sur le rendement s'il connaît du succès en salle? Cela n'a aucun sens. Tous les intéressés ont déclaré que l'argent était nécessaire pour le développement et notre marketing, afin qu'ils puissent sortir leurs films du Canada, les financer et ramener les recettes au pays.

    Nous commençons à en voir les effets. Depuis cinq ans, nous avons le programme Passports to Markets, qui aide toujours les producteurs à commercialiser leurs films à l'étranger. L'argent commence maintenant à revenir au Canada.

    Voilà pourquoi, pour les derniers exercices, les chiffres de production au Canada ont grimpé, au lieu de baisser, malgré la façon dont le gouvernement fédéral offre du financement dans notre province. Nous croyons fermement qu'il y a deux secteurs pour les longs métrages. Il y a le secteur en émergence et le secteur commercial. Il faudrait éliminer les restrictions pour le secteur commercial, afin qu'il puisse faire des affaires.

Á  +-(1105)  

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Qu'en est-il de l'enveloppe basée sur le rendement de Téléfilm Canada? Êtes-vous pour ce programme?

+-

    Mme Lodi Butler: Personne en Colombie-Britannique n'a reçu d'enveloppe de performance.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Bien, cela dit tout.

    Si vous permettez, rapidement, monsieur Francis : vous avez parlé de distributeurs internationaux. On nous a dit qu'il fallait un distributeur canadien pour avoir accès aux fonds de Téléfilm. Pourtant, aujourd'hui, on nous a appris qu'on pouvait contourner cette règle, d'une certaine façon. En faisant une prévente à Lions Gate, tout ayant un distributeur canadien, vous profitez aussi de la distribution internationale qu'offre une entreprise comme Lions Gate.

    Ce qui me donne du soucis, c'est que partout au pays, on nous a dit que les distributeurs canadiens couraient à leur ruine. Il n'y en a de moins en moins. Ce que je crains, c'est qu'en acceptant qu'il y ait un distributeur international, et qu'on ait accès aussi aux fonds de Téléfilm Canada, ce soit la dernière goutte d'eau pour les distributeurs canadiens. Avez-vous des observations?

+-

    M. Michael Francis: C'est ce que nous craignons aussi. Voilà pourquoi il y a cette division. Je ne pense pas que les cinéastes soient bien servis. En revanche, ce serait nuire à beaucoup d'entre nous que de mettre fin au secteur de la distribution au Canada. Il faut donc trouver une solution qui soit bonne pour tous.

+-

    L'hon. Sarmite Bulte: Bien, merci.

+-

    La présidente: Merci.

    Monsieur Schellenberger.

+-

    M. Gary Schellenberger: Je dois dire que ce que nous entendons ici aujourd'hui est très rafraîchissant; vous avez beaucoup de bonnes idées.

    Anita, j'aimerais vous embaucher pour ma prochaine campagne. Vous avez d'excellentes idées, des idées innovatrices. J'ai toujours été de ceux qui estimaient que si un secteur industriel est en péril, c'est à lui et à ceux qui en font partie de se remettre en selle. Trop souvent, on regarde vers le passé plutôt que de trouver une solution créative comme vous l'avez fait.

    J'ai entendu tant de choses. Comment servir davantage de gens? Libby a dit que vous étiez peu nombreux, mais si votre programme peut passer de 5 000 à 100 000 membres, et si on peut le faire ailleurs, si vous connaissez ce succès, vous pourriez vous retrouver très nombreux au sein de votre club. Je vous félicite pour ce projet.

    J'ai déjà parlé de ceci. J'en ai parlé à un témoin précédent, ce matin, mais pas pendant son témoignage. À Montréal, nous avons eu la chance de visiter une entreprise qui vend du cinéma informatique. Dans ses bureaux, il y avait trois cinémas. Je sais la différence par rapport aux pellicules 35 millimètres. Les copies sont en nombre limité et ne durent souvent qu'un mois. Il faut les remplacer alors, et c'est très coûteux.

    Mais revenons au cinéma informatique. La salle de cinéma qui m'a fasciné était celle du milieu. D'en haut, on voyait une salle de cinéma de 100 places. Le sol était incliné et il y avait le grand écran et l'acoustique était extraordinaire. Mais les murs pouvaient se rabattre à la hauteur des lambris pour transformer la salle en une pièce polyvalente. On pouvait s'en servir pour des sports comme le basket-ball, ou pour tenir une réunion, comme nous le faisons ici. J'ai trouvé que c'était vraiment fascinant.

    L'autre jour, nous avons reçu des témoins de l'Université Simon Fraser et de l'Université de l'Alberta. On y enseigne le théâtre autant que le cinéma et j'ai demandé s'il y avait une salle de visionnement dans leur école. On m'a répondu que non, il n'y en avait pas.

    Vous enseignez à des gens. Il est parfois plus difficile d'enseigner à des personnes plus âgées. Si notre jeunesse, que ce soit dans les écoles publiques, ou secondaires, à l'université ou ailleurs apprend à aimer le cinéma canadien et peut en voir, ce sera avantageux pour elle.

    Je pense que certains de ces cinémas informatiques pourraient être installés dans des petites villes canadiennes. Je viens de la campagne et dans bon nombre de nos petites villes, les salles de cinéma sont fermées. Beaucoup de gens ne veulent pas faire 40 ou 50 milles pour aller voir un spectacle. Ils se contentent de ce qu'il y a dans leur petite ville.

    Si certains de ces cinémas informatiques étaient installés dans les écoles... Tous les enfants fréquentent les écoles. Ils y iraient souvent. Il pourrait y avoir des partenariats avec les conseils scolaires, par exemple. On pourrait avoir des projets pilotes et commencer par les universités, par exemple. La plupart des universités sont accessibles au public et pourraient, au moins une fois par semaine, présenter des films, ou faire quelque chose du genre.

Á  +-(1110)  

    Je pense qu'il y a également autre chose à faire et je m'interrogeais à ce sujet.

    Cela m'a beaucoup intéressé. Je sais que Téléfilm Canada a des bureaux régionaux. Mais y en a-t-il seulement quatre actuellement ou y en a-t-il davantage? Je ne suis pas sûr.

+-

    M. Michael Francis: Quatre.

+-

    M. Gary Schellenberger: Pensez-vous que les services...? La Colombie-Britannique est bien desservie parce que c'est sur place, mais l'Alberta et la Saskatchewan...?

+-

    M. Michael Francis: Cela fait partie du territoire desservi par le bureau. Il faut néanmoins dire que nous sommes bien desservis. Il suffit de poser la question à un Albertain.

+-

    M. Gary Schellenberger: Je suis heureux de vous l'entendre dire.

    Est-ce que les paliers fédéral et provincial se parlent, communiquent entre eux actuellement?

+-

    M. Michael Francis: Non. Je vais vous en dire un mot parce que c'est un véritable scandale.

    J'occupe depuis 1991 le poste de président de BC Film. Que je sache, il n'y a eu aucune réunion avec un ministre provincial responsable du cinéma et de la télévision. Jamais. Le ministre n'a jamais assisté à une réunion en Colombie-Britannique. S'il y en a eu une, la Colombie-Britannique n'y était pas représentée.

    Cela a eu pour résultat cette course insensée aux crédits d'impôt. Il n'y a aucune coordination entre les deux ordres de gouvernement en ce qui concerne cette politique. Nous pensons également qu'il faudrait un lien entre les agences fédérales et la participation des provinces sur le plan financier. BC Film travaille en étroite collaboration avec Téléfilm grâce à notre nouvelle politique des crédits d'impôt. Sur le plan provincial, nous assumons une part beaucoup plus importante du coût financier.

    Ainsi, il y a cinq ans, le ratio des interventions financières provinciales et fédérales en Colombie-Britannique pour la production cinématographique et télévisuelle était de l'ordre de sept pour un en faveur du palier fédéral. À l'heure actuelle, nous ne savons pas s'il y a égalité ou pas, c'est assez proche, mais nous n'en savons rien en raison de la grosse augmentation des crédits d'impôt. C'est un véritable miracle que cela ait pu se produire alors qu'il n'y a aucun cadre de politique. On aurait jamais pensé que cela puisse arriver dans ce qui...

    Le ministère du Patrimoine a un style bien à lui depuis plusieurs années. Cela n'invite pas les provinces à participer, du moins c'est ce que j'ai pu constater en ma qualité de représentant d'une agence provinciale.

    Je voudrais maintenant revenir à votre première question sans monopoliser trop de temps.

+-

    La présidente: M. Lemay est...

+-

    M. Michael Francis: Je suis également le président du Festival international du film de Vancouver. Nous sommes en train de construire dans cette ville un centre du cinéma qui va ouvrir d'ici quelques semaines. Nous avons une salle. La technologie dont on rêve est à portée immédiate. Nous allons pouvoir diffuser en vidéo avec la même qualité de son et d'images qu'en 35 millimètres. Nous allons pouvoir faire la même chose avec les DVD. Tout d'un coup, on pourra transformer n'importe quelle salle de classe en cinéma.

    Cela coûte très cher pour l'instant, et nous en sommes actuellement aux essais pilotes. Mais nous ne sommes pas loin du but. C'est maintenant qu'il faut faire cela dans les écoles. Nous avons une salle de 185 places. Pendant la journée, les universités et les écoles viennent chez nous pour découvrir le cinéma et aussi le cinéma étranger—puisque nous sommes multiculturels—elles viennent découvrir les autres pays, mais également le cinéma canadien.

Á  +-(1115)  

+-

    La présidente: Je vous remercie.

    Monsieur Lemay, allez-y, je vous prie.

[Français]

+-

    M. Marc Lemay: Bonjour.

    J'ai lu avec attention vos mémoires et je les trouve extrêmement intéressants.

    Le First Weekend Club ressemble un peu à ce qu'on avait au Québec. Cela s'appelait les ciné-clubs. Je ne sais pas si cela existait ailleurs au Canada. Au First Weekend Club, y a-t-il des discussions sur les films? Va-t-on plus loin que la présentation des films? Y a-t-il des suites à leur présentation?

    Les ciné-clubs ont été essentiels au développement du cinéma québécois. Si le cinéma québécois actuel existe, c'est parce que beaucoup de jeunes auteurs, scénaristes et réalisateurs ont participé à des ciné-clubs.

    Je me demandais donc s'il y avait des discussions, si on continuait après la présentation de ces films et s'il y avait des projets en ce sens. C'est ma question pour les représentants de First Weekend Club.

    Madame Sauching Ng, votre organisme, Canadian Films on Tour, doit-il payer des droits pour les films qu'il présente?

    Je consulte votre répertoire et je le trouve extrêmement intéressant. Je me demandais donc si, bien que vous soyez installés en Colombie-Britannique, des équivalents de votre projet existaient ailleurs au Canada? Si j'ai bien compris, il s'agit d'un festival du film qui se déplace de ville en ville. Présentez-vous tous les films que l'on trouve dans le dépliant? Si oui, combien de temps dure le festival? Je trouve cela magnifique; c'est une excellente initiative.

    Je vois que vous avez des commanditaires. Téléfilm Canada assure une participation essentielle à la présentation de cet événement. Cependant, ma question porte surtout sur les droits d'auteur. Les payez-vous?

    J'ai aussi une question pour British Columbia Film. Êtes-vous, comme la SODEC au Québec, l'organisation qui représente l'industrie du film de la province?

    Je veux également savoir, parce que vous avez dit une phrase intéressante plus tôt, s'il y a un ministre de la Culture en Colombie-Britannique. Si oui, je pense que vous devriez frapper à sa porte dès que possible, parce que les ministres de la Culture du Canada et des provinces, à la suite des recommandations que nous ferons, auront à prendre des décisions importantes

    S'il n'y a pas de ministre de la Culture en Colombie-Britannique, je crois que vous aurez besoin d'une bonne discussion avec votre premier ministre. Toutefois, je crois qu'il doit y en avoir un.

    Voilà. J'ai posé en vrac toutes les questions que j'avais à poser. Je ne sais pas qui veut commencer à répondre.

Á  +-(1120)  

[Traduction]

+-

    Mme Sauching Ng: Je pourrais répondre à vos questions en ce qui concerne le Moving Pictures.

    Chaque année, nous composons une sélection de films. C'est un genre de menu. Les partenaires issus de chaque festival choisissent les films qu'ils veulent projeter, et nous les commandons aux distributeurs pour les présenter aux festivals. C'est un peu de l'acrobatie. Bien souvent, nous ne parvenons pas à en obtenir la copie, de sorte qu'il faut sans cesse faire marche arrière. Je dirais qu'une bonne partie de notre temps consiste précisément à essayer d'obtenir les copies des distributeurs afin de pouvoir projeter ces films lors des festivals.

    L'autre élément concerne les droits. Nous négocions avec le distributeur ou avec le cinéaste le montant des droits à payer. Nous payons des droits pour les longs métrages et pour les courts métrages. Nous le faisons et nous en sommes assez fiers. Nous faisons bien en sorte de payer les droits, qu'il s'agisse d'un droit forfaitaire ou d'un pourcentage des ventes.

    Nous invitons également des cinéastes aux projections afin qu'ils puissent être en contact avec le public. Il y a énormément de séances de questions consacrées à la réalisation du film, par exemple ce qui a poussé le cinéaste à vouloir lancer ce projet. Il y a donc eu d'excellentes discussions.

    D'ailleurs, l'une des meilleures discussions cette année a eu lieu à Kelowna. Nous avions fait venir deux cinéastes, Bill Marchant et Matt Fentiman, qui avaient réalisé le filmEveryone. Une discussion qui était censée durer 45 minutes a fini par durer plus d'une heure et demie. On a dû nous chasser de la salle tant l'intérêt suscité par ce film était grand. Cela a poussé le cinéaste à vouloir organiser un atelier l'année suivante. Il avait été vraiment stimulé par les réactions qu'il avait eues de l'auditoire.

    Dans beaucoup de petites localités, les gens sont vraiment avides de ce genre de contacts avec les cinéastes. Bien souvent, on y trouve de petits clubs de cinéphiles, des ciné-clubs, mais qui sont un peu coupés du monde du cinéma. Les gens voudraient améliorer leurs connaissances d'un cran, mais ils n'ont pas la possibilité de faire venir des personnes qui puissent leur apprendre et les stimuler un peu. Voilà donc un besoin que nous essayons de satisfaire.

    Oui, nous sommes déjà allés dans d'autres provinces. Nous avons été dans 12 villes du Canada. Nous avons organisé un festival à Collingwood. Mais chaque année, c'est nos partenaires qui décident s'ils veulent continuer et revenir.

    Cette année, c'était un peu inhabituel parce que l'été dernier, notre festival a fermé ses portes dans une certaine mesure pour tenter de réévaluer ce que devrait être notre rôle dans le milieu des festivals du film.

    Je ne travaille pour le festival que depuis janvier et j'ai eu pour l'essentiel deux mois pour monter un festival, faire la tournée, réunir tout le matériel de marketing nécessaire pour sa réussite. Cela a vraiment été un acte de foi.

    Nous sommes très peu nombreux, le bureau ne compte en effet qu'une personne et demie. Si nous sommes si peu nombreux, c'est en partie parce que nous ne parvenons pas à décrocher davantage de financement.

    Les groupes sans but lucratif sont très courageux de devoir ainsi jongler tout le temps en multipliant les demandes de financement auprès des organismes existants. Faire ce genre de demande exige énormément de temps. Il faut absolument respecter les échéances. Chaque fonds a également ses conditions, et il faut bien faire en sorte de les respecter. Et il faut faire tout cela en plus de réserver les films, faire la coordination avec le distributeur, faire la coordination avec les compagnies de messagerie, et tout cela en tentant également d'aider les partenaires à vendre ces films.

    Cette année, nous avons engagé trois publicitaires pour nous aider à faire connaître les films. C'est quelque chose que nous voulons continuer à faire parce que le marketing des films est un élément extrêmement important.

Á  -(1125)  

    Si ces petites localités ne parviennent pas à attirer l'attention des médias—parce que c'est juste quelqu'un du coin—parfois l'attention sera plus soutenue si cela vient d'une grande ville. C'est également l'une des raisons pour lesquelles nous avons monté toute sorte de manifestations pour vendre Moving Pictures. Si nous réussissons à faire parler de nous dans les grands journaux ou dans les gros médias de la ville, alors les petites villes commencent à faire attention. Comme les gens y sont tellement coupés de tout, ils font beaucoup de recherche sur l'Internet pour essayer de savoir ce qui se passe. Bien souvent, ils savent donc, peut-être pour avoir entendu la rumeur publique—que La Presse ou un autre média a parlé de tel ou tel film, en a fait la critique ou a signalé que le film a remporté tel ou tel prix. Ils sont donc bien au courant et ils savent ce qui se passe.

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    La présidente: Il nous reste environ trois minutes.

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    M. Michael Francis: Pas de problème, je n'aurai pas besoin de trois minutes.

    Simplement pour répondre à la question sur le ministère de la culture, nous n'en avons jamais eu en Colombie-Britannique, et je ne parle pas ici du cinéma, mais bien de la culture en termes beaucoup plus généraux. Plus souvent qu'autrement, c'est quelque chose qui vient s'ajouter au ministère des Affaires municipales. À l'heure actuelle, comme l'industrie du cinéma donne du travail à beaucoup de gens, cette enveloppe est passée au ministère du Développement économique. Cela fait bien longtemps qu'en Colombie-Britannique, on traite les industries culturelles comme un groupe d'intérêts parmi les autres.

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    Mme Anita Adams: Excusez-moi, mais je n'ai pas compris comment cela marchait et je n'ai pas compris votre question.

[Français]

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    M. Marc Lemay: Je peux rapidement vous la poser à nouveau. Je voulais savoir si First Weekend Club, après la présentation des films, organisait des discussions. Va-t-on plus loin que la présentation des films? En discute-t-on, y a-t-il des débats pour susciter l'engouement, non seulement des téléspectateurs, mais peut-être aussi d'un jeune réalisateur ou d'une jeune réalisatrice en devenir?

[Traduction]

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    Mme Anita Adams: Effectivement, et c'est une partie très importante de ce que nous faisons. Nous essayons d'enrichir la fin de semaine inaugurale en faisant venir des cinéastes. Nous en avons fait venir par avion à Vancouver, nous avons organisé une projection spéciale—avec une période de questions—en leur compagnie et puis nous avons invité les cinéastes et les acteurs à une réception qui suivait la projection afin qu'ils puissent discuter avec les spectateurs.

    Nous sommes en train de négocier une commandite avec la chaîne des hôtels Fairmont afin de pouvoir faire venir des cinéastes canadiens dans plusieurs villes du Canada pendant les fins de semaine inaugurales et leur permettre d'avoir ainsi ce genre de discussions.

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    La présidente: Excellent.

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    Mme Sauching Ng: Je voulais également ajouter que lorsque nous faisons venir des cinéastes à ces festivals, nous prenons en charge leurs frais de voyage et de logement. Nous leur payons également des honoraires lorsqu'ils participent aux ateliers.

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    La présidente: Merci beaucoup.

    Cette expérience, je le sais, a été extrêmement enrichissante pour nous tous ici à Vancouver. Merci beaucoup à tous et toutes pour votre participation, pour votre patience, et également pour nous avoir permis de vous rencontrer une nouvelle fois, même si nous avons dû nous décommander il y a un mois environ. Je suis persuadée que nous nous réjouissons tous à l'idée de pouvoir encore avoir vos commentaires au fur et à mesure que nous avancerons.

    Je ne sais pas si vous m'avez entendue lorsque j'expliquais que nous espérions adopter, la semaine prochaine, un rapport provisoire, un rapport qui ne sera toutefois pas encore assorti de conclusions. Nous avons jugé que ce ne serait pas juste de le faire sans avoir rencontré les gens des deux côtes. Nous allons donc exposer les problématiques qui ont été portées à notre attention ainsi que certaines des propositions qui nous ont été faites en demandant à nos témoins de nous faire part de leur avis sur certaines questions. À partir de là, nous aurons peut-être une seconde série d'audiences, plus courtes cette fois. Vous pouvez donc vous attendre à entendre parler de nous au début de l'été, et nous vous demandons à notre tour de nous faire part de vos commentaires à ce sujet au début de l'automne.

    Merci beaucoup.

    Je remercie aussi énormément les membres du comité pour leur excellent travail. La séance est levée.