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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 1er décembre 1998

• 0901

[Traduction]

Le président (M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia)): Collègues, la séance est ouverte. Nous poursuivons aujourd'hui nos audiences sur les négociations de l'OMC. Nous avons le plaisir d'accueillir les représentants de trois organisations: les Producteurs laitiers du Canada, les Fabricants de produits alimentaires et de consommation (Toronto) et la Western Canadian Wheat Growers Association.

Je demanderais à M. George Fleischmann, des Fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada, de commencer. Bonjour, M. Fleischmann. Nous allons d'abord écouter votre exposé et ensuite, celui des porte-parole des deux autres organismes. Enfin, nous passerons à la période de questions. Veuillez commencer, je vous prie.

M. George Fleischmann (président, Fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada): Merci beaucoup, M. le président. Au nom des fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada, je suis ravi d'avoir l'occasion de vous communiquer nos priorités et nos recommandations à la veille des négociations agricoles multilatérales de l'Organisation du commerce mondial.

Tout d'abord je voudrais détruise un mythe. Notre organisation ne réclame pas la suppression de la gestion de l'offre. Il faut réformer le système de la gestion de l'offre pour accroître la concurrence à l'échelle nationale et multiplier nos marchés d'exportation.

L'industrie des aliments et des boissons du Canada achète 45 p. 100 de la totalité des denrées agricoles vendues par les exploitations agricoles. Nous voulons collaborer avec les producteurs pour supprimer les coûts superflus du système et faire en sorte que tous les membres de la chaîne d'approvisionnement obtiennent un rendement intéressant.

Pour assurer leur survie au Canada, les agriculteurs doivent absolument entretenir de bonnes relations avec leur clientèle. Le secteur de la transformation des aliments est leur principal client. La situation mondiale évolue rapidement. Pour maintenir notre niveau d'exportation par habitant et demeurer concurrentiels, nous devons appuyer le principe de l'élimination des barrières tarifaires et supprimer les barrières commerciales non tarifaires. Il est indéniable que la transformation de premier et de second cycles revêt une importance cruciale pour la croissance des exportations agricoles.

En juillet de cette année, les ministres fédéral et provinciaux de l'agriculture ont convenu que le Canada adopterait la vision du Conseil canadien de commercialisation des produits agroalimentaires, le CCCPA, qui vise à doubler nos exportations et à les porter à 40 milliards de dollars d'ici l'an 2005. Non content de s'être fixé cet objectif ambitieux, le CCCPA reconnaît que le succès dépend de notre capacité de renverser, aux fins de l'exportation, le pourcentage actuel des produits transformés par rapport aux denrées de base. Autrement dit, le Canada exporte en ce moment environ 60 p. 100 de sa production agricole sous forme de matières premières et 40 p. 100 sous forme de produits à valeur ajoutée. Il faudra renverser ce rapport pour exporter 60 p. 100 de produits à valeur ajoutée et 40 p. 100 de matières premières si nous voulons atteindre cet objectif de totaliser des exportations agricoles d'une valeur de 40 milliards de dollars d'ici 2005.

Depuis deux ans, nous avons sondé nos membres, particuliers et entreprises, à trois reprises. Nous avons publié trois rapports. Le premier s'intitule Regard sur la décennie, qui récapitule la période allant de 1985 à 1995. Le deuxième, intitulé Nouveau regard sur la décennie, couvre les années 1995 à 1998. Le troisième, La prochaine décennie, renferme des projections allant jusqu'à l'an 2008. Ces enquêtes nous ont donné une idée très claire du cheminement de nos entreprises membres jusqu'ici et de leur orientation future.

• 0905

Notre association nationale représente plus de 170 entreprises canadiennes qui fabriquent et commercialisent des produits qui sont vendus dans les commerces de détail, les épiceries, les pharmacies, les dépanneurs, les magasins à grande surface et les canaux de distribution de services alimentaires. Nos membres vendent plus de 75 p. 100 des produits alimentaires transformés au Canada.

L'industrie canadienne des aliments et des boissons est une composante très importante de notre économie nationale. L'année dernière, on pouvait lui attribuer près de un cinquième du produit national brut du Canada. Les entreprises du secteur ont acheté 45 p. 100 de la totalité des denrées agricoles canadiennes et produit des exportations d'une valeur d'un peu moins de 12 milliards de dollars. Le secteur emploie 211 000 Canadiens directement dans toutes les régions du Canada. En outre, il a créé trois fois plus d'emplois indirects.

Nous estimons qu'il existe un vaste potentiel inexploité dans notre secteur. Selon l'étude La prochaine décennie, dans 10 ans, la croissance annuelle de notre secteur s'établira entre 2,5 et 4 p. 100; nos ventes augmenteront pour s'établir entre 73 et 84 milliards de dollars d'ici l'an 2008; nous créerons entre 35 000 et 72 000 nouveaux emplois au Canada et nous réussirons presque à doubler le niveau actuel des exportations. En outre, l'utilisation que nous faisons de denrées agricoles augmentera de 38 p. 100. Autrement dit, la valeur des achats que nous faisons directement auprès des agriculteurs passeront d'une valeur de 13 milliards à l'heure actuelle à 18 milliards d'ici l'an 2008.

Certaines choses peuvent limiter cette croissance, et il y a trois domaines importants que je tiens à porter à votre attention. Si nous n'apportons aucun changement dans ces domaines, notre croissance sera limitée. Le premier est l'environnement réglementaire actuel, qui réduit la compétitivité et la croissance de notre industrie. Nous ne réclamerons pas l'élimination de la réglementation; nous souhaitons simplement actualiser et moderniser le cadre réglementaire canadien.

Deuxièmement, la gestion de l'offre entrave la concurrence sur le plan des coûts et le potentiel de croissance des entreprises d'aliments et de boissons qui utilisent des intrants provenant des secteurs laitiers et de la volaille. Tant le prix que la disponibilité sont sources de préoccupation. Il faut réformer le système actuel si l'on veut que le secteur de la transformation de second cycle continue de croître.

Enfin, il faut réduire les barrières commerciales non tarifaires. Le recours à cette mesure protectionniste nuit à notre capacité de tirer pleinement parti de la réputation qu'a le Canada d'être un producteur d'aliments et d'intrants agricoles de haute qualité. Par exemple, au Canada, il nous est interdit de vanter les vertus médicinales des aliments. Nous ne pouvons pas non plus enrichir nos produits avec autant de latitude que les Américains, nos principaux partenaires commerciaux.

Où s'inscrit le libre-échange dans tout cela? Nos entreprises estiment que l'ALENA a ouvert des débouchés commerciaux précieux à l'échelle de l'Amérique du Nord. À l'heure actuelle, 85 p. 100 de la totalité de nos échanges commerciaux se font avec les États- Unis. La croissance des exportations est très importante pour nos membres et c'est une priorité pour les entreprises qui sont la propriété d'intérêts canadiens. D'ailleurs, mon collègue, M. Pigott, aura peut-être l'occasion de vous en dire davantage à ce sujet au cours de la période des questions.

Le gouvernement du Canada n'a pas activement tiré parti des possibilités créées par le libre-échange. Autrement dit, le Canada n'a pas agi suffisamment rapidement pour établir des normes communes ou favoriser une reconnaissance mutuelle de nos réglementations respectives pour ce qui touche notre principal partenaire commercial, les États-Unis. Une réforme fondamentale du cadre commercial est non seulement souhaitable, mais inévitable. Le gouvernement s'est engagé sur la voie de la libéralisation des échanges, ce qui met en relief la vigueur de la production agricole canadienne. La faiblesse récente du cours mondial des denrées fait ressortir la nécessité d'accroître la fabrication de produits à valeur ajoutée au Canada afin de générer un rendement plus favorable pour nos propres producteurs et tirer pleinement parti des avantages économiques considérables découlant d'une production à valeur ajoutée.

Cependant, pour faciliter l'accès de nos propres produits à valeur ajoutée aux marchés étrangers, nous devons, en contrepartie, être disposés à réduire les tarifs relatifs à l'importation. Ce compromis est nécessaire pour accroître notre accès au marché. Cela signifie qu'il faut changer et adapter non seulement nos propres tarifs, mais aussi notre système de gestion de l'offre. Le statu quo n'est tout simplement pas une option.

• 0910

Selon notre rapport La prochaine décennie, si le statu quo est maintenu, voici certainement ce qui arrivera dans notre secteur. Premièrement, moins de produits novateurs seront produits au Canada. Deuxièmement, la production en exclusivité dans les entreprises implantées au Canada fléchira. Troisièmement, nous prévoyons un déclin global d'au moins 1 p. 100 par an dans le secteur des aliments et des boissons. Enfin, il va sans dire que nous aurons moins besoin d'intrants agricoles, y compris de denrées assujetties au régime de la gestion de l'offre.

Par conséquent, si le Canada, ce grand exportateur de produits agricoles, veut récupérer le terrain perdu, il faut que nous devenions plus compétitifs, et cela doit se faire chez nous en premier lieu. Nous recommandons l'adoption d'une politique agricole axée sur la totalité de la chaîne d'approvisionnement. À l'heure actuelle, nous continuons de nous concentrer presque exclusivement sur le producteur primaire.

Deuxièmement, nous devons activement réclamer la réduction et la suppression des tarifs agricoles par l'intermédiaire de l'OMC, non seulement à l'égard des denrées de base mais aussi des aliments transformés.

Troisièmement, il faut reconnaître que le principal marché d'exportation des aliments du Canada est le marché américain. Dans le cadre de l'ALENA, nous devons chercher des moyens d'abaisser les barrières qui font obstacle au commerce en Amérique du Nord afin de présenter un exemple convaincant pour l'OMC.

Quatrièmement, nous devons planifier la transition vers l'élimination des tarifs dès maintenant. Nous devons nous assurer que les producteurs canadiens assujettis à la gestion de l'offre peuvent adapter leurs pratiques pour qu'elles puissent faire concurrence à celles de nos partenaires commerciaux.

Si nous prenions ces mesures, nous pourrions presque doubler les exportations d'aliments et de boissons et les faire passer d'une valeur de 11,8 milliards à 20 milliards de dollars. Tout cela, grâce à une compétitivité accrue. Le total des ventes des produits agricoles atteindrait les 5 milliards de dollars, soit une augmentation de 38 p. 100, et il aurait de 35 000 à 72 000 emplois de plus dans le secteur de la transformation alimentaire au Canada.

Les membres de notre organisation pensent que le secteur de la fabrication des aliments et des boissons peut croître considérablement s'il embrasse le changement et si les transformateurs collaborent avec les producteurs pour établir un milieu agroalimentaire hautement compétitif. Si nous pouvons relever ce défi, c'est toute l'économie qui s'en portera mieux.

Merci beaucoup.

Le président: Nous accueillons maintenant, au nom de la Western Wheat Growers Association, M. Larry Maguire.

M. Larry Maguire (président, Western Canadian Wheat Growers Association): Merci beaucoup, M. le président. Je suis heureux d'être ici ce matin au nom de la Western Wheat Growers Association pour vous expliquer la position que le Canada devrait adopter à la prochaine ronde de négociations commerciales internationales.

Nous suivrons avec beaucoup d'intérêt les efforts que vous déploierez d'ici le mois d'avril pour essayer de finaliser un ensemble de recommandations. Je ne lirai pas la totalité de notre document. Je me bornerai à en résumer les points saillants. Ensuite, nous répondrons volontiers à vos questions.

Pour le secteur céréalier de l'ouest du Canada, les grands enjeux sont sans conteste les subventions à l'exportation, l'accès au marché et les mesures de soutien national, l'Accord de libre- échange avec les États-Unis et le Mexique, la nécessité d'instaurer un système fondé sur les règles pour la prochaine ronde, ainsi que la compétitivité du secteur céréalier à l'échelle nationale et internationale. Nous avons également inclus les recommandations du Sommet des céréaliculteurs qui a eu lieu à Banff en septembre.

Le secteur des céréales de l'Ouest est axé vers les exportations. Cela vaut à la fois pour les produits céréaliers et pour les céréales primaires et transformées. Il continuera d'être basé sur les exportations et d'en dépendre dans un avenir prévisible. Nous espérons exporter davantage de produits transformés plutôt que de produits de base, mais nous pensons que ce secteur continuera d'être axé sur les exportations. Par conséquent, nous espérons que les négociations agricoles déboucheront sur l'égalité des chances pour tous, surtout parce que 80 p. 100 de la production de blé est exportée à l'étranger.

Notre priorité est l'élimination complète des subventions aux exportations. Les mesures de soutien aux exportations appliquées par l'Union européenne dans le cadre de la politique agricole commune et le programme de promotion des exportations des États- Unis sont les deux programmes qui causent le plus de tort à l'industrie céréalière de l'Ouest. Ils ont une incidence certaine sur nos revenus et sur la valeur de toutes nos denrées. Il est urgent de réduire le niveau des subventions et de les éliminer en priorité. Nous souhaiterions également qu'on s'attache à supprimer toutes les restrictions aux exportations et à assurer une plus grande rigueur en ce qui a trait aux crédits à l'exportation.

• 0915

À notre avis, l'accès au marché et les mesures de soutien nationales doivent faire partie intégrante de notre position. Nous reconnaissons que la tarification a rendu la réduction des tarifs plus directe et transparente, mais ces tarifs n'en demeurent pas moins des obstacles considérables au commerce. Un grand nombre de pays imposent des équivalents tarifaires élevés sur les produits qu'ils souhaitent le plus protéger et, comme le soutien national a été mesuré sur une base globale, ils réussissent à maintenir un niveau de protection et de subvention élevé pour leurs produits. Un soutien d'une telle ampleur continue d'encourager une production supérieure au niveau nécessaire pour équilibrer le marché et continue de faire entrave au commerce. Par conséquent, on devrait envisager, à la prochaine ronde de négociations, de négocier les engagements futurs concernant les réductions du soutien national par produit plutôt que globalement.

À cette occasion, il faudrait également essayer d'obtenir une réduction plus poussée et accélérée des tarifs. Autrement dit, nous devons faire en sorte de verser le plus de produits possible dans la catégorie de la boîte verte et passer de la boîte verte à une absence totale de subventions aux exportations, comme nous l'avons dit tout à l'heure.

Le meilleur exemple pour nous reste celui de l'industrie pétrolière, compte tenu des tarifs imposés par le Japon sur le pétrole qui nuisent particulièrement au secteur céréalier de l'Ouest. De tels tarifs favorisent la forte dépendance de l'ouest du Canada vis-à-vis des céréales non transformées au détriment des produits transformés de plus haute valeur. Évidemment, l'élimination des subventions au transport dans l'ouest du Canada favorise la transformation à forte valeur ajoutée en mettant au jour le véritable coût de l'expédition de denrées à faible valeur ajoutée, et nous devons avoir accès aux marchés mondiaux pour nos produits fortement valorisés. Par conséquent, la progressivité tarifaire représente un obstacle à la transformation ultérieure et à la création de la richesse dans les Prairies, dans notre secteur en particulier.

Nous estimons également qu'il convient de réduire et d'éliminer les obstacles non tarifaires. D'ailleurs, ces derniers seront sans doute utilisés plus fréquemment. Bien sûr, on aura vu un indice de cette tendance récemment avec nos voisins du sud, notamment pour ce qui est du produit qui nous touche de plus près. Plus précisément, il ne faut pas permettre que le commerce des organismes transgénétiques soit entravé par des règles excessives et des exigences d'étiquetage fondées sur des données scientifiques non fondées. Nous sommes convaincus que ces produits devraient avoir le feu vert, sur la base de données scientifiques solides. Par conséquent, nous appuyons l'acceptation de ces produits fondée sur une définition large ou plus générale plutôt que sur la définition étroite que d'aucuns voudraient privilégier.

Les mesures de soutien nationales qui favorisent la production et causent des distorsions commerciales excessives doivent être rendues conformes aux critères de la boîte verte dont j'ai déjà parlé. Il convient d'imposer des sanctions disciplinaires aux membres de l'OMC dont les politiques nationales faussent le jeu des marchés mondiaux et entravent l'accès au marché des autres pays.

Cependant, pour être en mesure d'exiger cela de nos partenaires commerciaux, il faut que nos propres politiques aillent dans le même sens. Au cours de la ronde de l'Uruguay, le Canada a essayé de protéger ses secteurs assujettis à la gestion de l'offre tout en réclamant des concessions sur les subventions aux exportations et l'accès au marché. À notre avis, cela est contradictoire et reflète une approche fondée sur chaque produit, plutôt qu'une approche globale.

Le secteur céréalier de l'Ouest a reconnu qu'il n'était ni possible ni souhaitable de se soustraire à la concurrence étrangère. Les céréaliculteurs se sont adaptés à un environnement commercial mondial, et c'est pourquoi nous devons exiger que les obstacles à un commerce équitable sur les produits que nous vendons sur les marchés internationaux soient réduits au minimum et supprimés. S'il veut obtenir des concessions de ses partenaires commerciaux, le Canada doit être disposé à faire certaines concessions lui-même, dans le souci d'en arriver à une entente équilibrée.

Les secteurs assujettis à un régime de gestion et de protection devront accepter de nombreux changements et permettre l'accès au marché national pour leurs produits vulnérables et tirer parti des possibilités d'exportation qui, à notre avis, se présentent aujourd'hui.

Dans la foulée du sommet de l'automne, il nous est apparu évident qu'un certain nombre d'enjeux importants liés au libre-échange pouvaient faire l'objet d'une entente avec nos voisins américains. Les États-Unis demeurent notre principal partenaire commercial. En effet, plus de 50 p. 100 de nos échanges agroalimentaires se font avec les États-Unis. Nous devons mettre un terme à la menace perpétuelle de droits compensateurs sur les céréales et d'autres produits d'exportation vers les États-Unis, car nous sommes beaucoup plus dépendants des exportations que ne le sont les Américains. Les blocs commerciaux devenant de plus en plus monnaie courante dans le monde du commerce international, nous devrions être en quête d'un accord de libre-échange plus exhaustif avec les États-Unis et encourager les Américains à élargir la zone libre-échangiste des Amériques également.

• 0920

Pour ce qui est du secteur des céréales, si nous mettions en pratique toutes les recommandations de la Commission mixte canado-américaine sur les céréales, nous ferions des progrès sur la voie de l'harmonisation dans certains de ces dossiers. Brièvement, nous n'avons rien contre l'inclusion de nouveaux intrants dans l'accord sur le commerce mondial. Cependant, il faut convenir d'un accord fondé sur les règles et les nouveaux membres doivent adhérer aux règles commerciales de l'Organisation du commerce mondial.

La compétitivité internationale du secteur céréalier de l'ouest du Canada est étroitement liée aux politiques nationales concernant les céréales et le transport. Les agriculteurs de l'ouest du Canada doivent pouvoir contrôler leurs coûts d'entreprise. Par conséquent, nous estimons qu'il existe d'importantes mesures à prendre sur le plan du transport et de la commercialisation des céréales pour assurer le développement continu du secteur des produits à valeur ajoutée et sa viabilité à long terme. Permettez-moi d'aborder brièvement la question des réformes dans le domaine du transport, dans le contexte de l'examen du rapport Estey. Nous encourageons le gouvernement à adopter ces réformes. Aucun effort ne doit être épargné dans le cas des céréales pour créer un système commercial de logistique peu coûteux qui remplacera un système réglementé, coûteux et archaïque pour lequel les agriculteurs paient à l'heure actuelle un prix élevé.

Pour progresser, nous estimons qu'il faut régler le problème des entités commerciales d'État sur une base internationale, qu'elles oeuvrent dans le champ des importations ou des exportations. Nous sommes d'avis qu'elles doivent se plier aux risques du marché et que l'adhésion à de telles entités doit être facultative. Nous reconnaissons que des changements se profilent à l'horizon à la Commission canadienne du blé—il y aura un nouveau conseil d'administration élu le 1er janvier—, mais il faut faire en sorte que la Commission se conforme aux règles du commerce international et cela voudra peut-être dire qu'elle devra devenir une entreprise plus commerciale, un peu comme son pendant en Australie.

Je ne vais pas aborder l'ensemble des points de discussion concernant le sommet des céréaliculteurs. Vous pouvez parcourir ce document ou encore, nous pourrions vous en laisser des exemplaires.

En conclusion, nous pensons que les signataires de l'accord sur le commerce mondial devraient viser la contrepartie zéro à l'égard du commerce des céréales et de leurs produits. Cela est sans doute un objectif ambitieux, mais nous sommes convaincus qu'on pourrait y arriver d'ici l'an 2005 si le Canada et les autres membres de l'OMC prenaient des engagements en ce sens. Nous invitons instamment le gouvernement fédéral à adopter la contrepartie zéro dans sa position de négociation pour la prochaine ronde. Nous savons que les besoins contradictoires qui existent entre les différents secteurs de l'industrie agricole, et entre les différentes régions du Canada, compliqueront l'élaboration de cette position de négociation. Cependant, il est impératif de trouver des solutions qui sont dans le meilleur intérêt du pays tout entier.

Le Canada doit forger une alliance plus étroite avec les États-Unis et adopter un rôle de premier plan au sein du groupe de Cairns pour renforcer sa position au cours des négociations. Nous ne devons faire aucune concession qui ne soit accueillie par des concessions analogues d'autres pays, ni protéger un secteur de notre industrie aux dépens d'un autre. Nous sommes prêts à relever le défi de la mondialisation des marchés, mais il nous faut pouvoir compter sur des règles commerciales claires et applicables dans la foulée de la prochaine ronde.

Sur ce, monsieur le président, nous répondrons volontiers à vos questions une fois que les représentants des producteurs laitiers auront fait leur exposé.

Le président: Merci, monsieur Maguire.

Je vais maintenant donner la parole à M. Leo Bertoia, qui représente les Producteurs laitiers du Canada. Bienvenue, monsieur Bertoia.

M. Leo Bertoia (deuxième vice-président (Saskatchewan), Les producteurs laitiers du Canada): Merci, monsieur le président et bonjour. Je souhaite aussi une bonne journée à tous les membres du comité.

Nous sommes ici aujourd'hui pour vous présenter le point de vue des 24 000 producteurs laitiers canadiens en ce qui concerne la position que devrait adopter le Canada lors de la prochaine série de négociations de l'OMC. Notre mémoire vous a été remis, de sorte que je ne vais pas le lire, mais je vais le passer en revue et en extraire les points saillants.

Depuis plus de 25 ans, les producteurs laitiers canadiens exploitent leurs fermes dans le cadre d'un système de gestion des approvisionnements qui leur a permis de composer avec les fluctuations qui ont marqué les marchés internationaux. L'industrie laitière canadienne est le deuxième plus important secteur agricole au Canada, générant des recettes monétaires agricoles de 3,9 milliards de dollars par année. La contribution de cette industrie à l'économie canadienne est très importante, ses ventes approchant les 8 milliards de dollars. Enfin, quelque 50 000 personnes y gagnent leur vie, que ce soit dans les fermes laitières ou dans le secteur de la transformation.

L'industrie laitière canadienne, en dépit des mythes, procure un apport net à la balance commerciale du Canada et elle a toujours été présente sur les marchés internationaux. En 1997, les exportations de produits laitiers se sont élevées à 376 millions de dollars; par contraste, les importations ont totalisé 278 millions de dollars. La résultante: un excédent commercial de 98 millions de dollars.

À l'aube d'une nouvelle ronde de négociations multilatérales, nous souhaitons partager avec vous la vision des Producteurs laitiers du Canada, laquelle a été élaborée il y a deux ans: une industrie laitière composée d'entreprises agricoles indépendantes et rentables, qui oeuvrent dans un régime de gestion des approvisionnements souples mais solides. C'est en inspirant de cette vision que les producteurs laitiers du Canada ont entrepris, plus tôt cette année, d'élaborer leur position en prévision de la prochaine série de négociations multilatérales.

• 0925

La position initiale des PLC peut se résumer ainsi. Les accords commerciaux dans le domaine de l'agriculture doivent déboucher sur une amélioration des mécanismes des marchés internationaux des produits laitiers et contribuer à l'augmentation des recettes agricoles des producteurs canadiens. Il ne doit pas y avoir de concession mutuelle touchant les secteurs agricoles. Le système canadien de gestion des approvisionnements doit continuer à bénéficier d'un statut spécial et de mesures législatives particulières confirmant le rôle unique qu'il joue quant au maintien d'un équilibre lors des négociations entre les producteurs et les autres intervenants de la chaîne de commercialisation. En ce qui concerne le secteur laitier international, le Canada doit avoir pour objectif de parvenir à un équilibre pragmatique au plan de l'équité et de la réciprocité. Les engagements relatifs au secteur laitier ne devraient être négociés que sous l'égide de l'OMC.

Les producteurs laitiers du Canada ont également adopté une politique qui stipule qu'au cours des prochaines négociations de l'OMC, les PLC s'assureront que les mesures de soutien internes, les programmes de subventions à l'exportation et les autres programmes en vigueur dans d'autres pays font l'objet d'une analyse avant que le Canada ne consente à modifier ses engagements actuels eu égard aux produits laitiers. Ce dernier énoncé est d'une importance capitale car il faut composer avec les iniquités qui ont résulté du cycle d'Uruguay. Permettez-moi de faire quelques observations sur un certain nombre de problèmes liés au soutien interne, aux subventions à l'exportation et à l'accès aux marchés et sur la façon dont le cycle d'Uruguay a causé des iniquités.

Une analyse des avis des pays membres de l'OMC à l'OMC concernant les mesures de soutien interne révèle que les États-Unis, la CE, et le Canada ont respecté leurs engagements. Cependant, tant la CE que les États-Unis ont continué à consacrer des sommes très importantes au soutien de leur secteur agricole. En fait, à la figure 3, on constate qu'en 1995, la seule année pour laquelle on dispose de données comparatives, la mesure globale du soutien interne correspond à 11 p. 100 de la valeur totale de la production agricole au Canada, comparativement à 31 p. 100 aux États-Unis et à 42 p. 100 à la CE. Il importe également de souligner que le gouvernement américain a récemment annoncé un nouveau programme d'aide d'une valeur de 6 milliards de dollars U.S. au profit des agriculteurs américains. De cette somme, 200 millions de dollars U.S. ont été affectés aux producteurs laitiers qui, à l'heure actuelle, bénéficient du prix du lait d'un niveau presque record dans l'histoire des États-Unis. La question de niveaux d'aides gouvernementales disproportionnés est de la plus haute importance à la veille de la prochaine série de négociations de l'OMC, question qu'il faudra aborder soit dans la perspective des marchés intérieurs, soit dans celle des marchés internationaux.

On a signalé à plusieurs reprises aux producteurs canadiens qu'ils devraient accroître leur compétitivité. Faut-il en conclure qu'ils doivent soutenir la concurrence du Trésor public d'autres pays? Si ce n'est pas le cas, alors il faut se pencher sur la compétitivité de notre propre gouvernement. Si le gouvernement canadien souhaite que son secteur agricole puisse se tailler une place sur les marchés internationaux, alors il doit accepter de relever le défi et de fournir à l'industrie agricole canadienne un niveau de soutien équivalent à celui de ses principaux partenaires commerciaux.

Il est intéressant de noter alors que le Canada ne subventionne pas ses exportations, l'industrie laitière canadienne doit soutenir la concurrence de pays qui subventionnent, et largement, leurs exportations de produits laitiers. Il convient de signaler que tant les États-Unis que la communauté européenne entendent utiliser pleinement le montant auquel ils ont droit pour les années à venir. À l'échelle internationale, le secteur laitier demeure le secteur agricole où le taux d'utilisation de subventions à l'exportation est le plus élevé.

Enfin, il est impossible d'aborder les subventions à l'exportation sans dire quelques mots sur le Groupe spécial de l'OMC. Les PLC souhaitent féliciter l'équipe d'avocats du Canada pour son brio lors des audiences du Groupe spécial où les États-Unis et la Nouvelle-Zélande ont présenté des plaintes concernant le système de mise en commun du lait de classe spéciale du Canada. L'examen de la différence entre les prix se poursuivra dans le cadre de la prochaine série de négociations. Par conséquent, les PLC tiennent à rappeler au gouvernement canadien qu'il doit se faire le défenseur de la légitimité du système de la mise en commun des prix du lait de classe spéciale, tant devant l'OMC que lors de la négociation des autres accords commerciaux auxquels ils pourraient souscrire.

Alors qu'on a réussi, aux termes du cycle d'Uruguay, à assujettir l'agriculture aux règles du commerce international pour la première fois dans l'histoire du GATT, on n'a cependant pas prévu de dispositions concernant l'égalité d'accès aux marchés. Les pays membres de l'OMC ont réussi à s'entendre sur la mise en oeuvre d'un système régi par des règles, mais ils n'ont toutefois pas pu convenir des règles devant régir les engagements des pays au regard de l'accès aux marchés. Ils ont plutôt établi des lignes directrices, ces dernières ayant fait l'objet de nombreuses interprétations différentes.

Des engagements d'accès minimal devaient être établis à un niveau correspondant à 3 p. 100 de la consommation intérieure (en se fondant sur la période de 1986 à 1988) et ce pourcentage devait être porté à 5 p. 100 de la consommation intérieure d'ici la fin de la période de mise oeuvre. Au cours de cette période, l'accès au marché américain s'est établi à 2 p. 100, comparativement à presque 5 p. 100 pour le Canada.

• 0930

Il y a de nombreux exemples qui montrent qu'il n'y a pas d'accès équivalent sur les marchés internationaux. Un examen de l'administration des contingents tarifaires montre que certains pays administrent ou attribuent leurs quotas de façon à restreindre encore davantage les importations sur leur territoire. Le meilleur exemple, on le trouve aux États-Unis: ils ont attribué une partie de leur CT en crème glacée à la Jamaïque. Nous ignorons tous la dernière fois où la Jamaïque a exporté de la crème glacée aux États-Unis. Un autre exemple est celui du cheddar canadien exporté aux États-Unis. D'ailleurs, vous trouverez dans vos documents de plus amples renseignements sur le sujet.

Nous aimerions également attirer votre attention sur les taux d'exécution des CT. Ces taux d'exécution ressemblent à des importations réelles exprimées en pourcentage des engagements relatifs à l'accès aux marchés. Les PLC tiennent à souligner que les taux d'exécution les plus élevés sont obtenus lorsque les importations sont administrées par des entreprises d'État. Les PLC s'étonnent toujours d'entendre les États-Unis qualifier les entreprises d'État comme constituant une pratique se traduisant par des effets de distorsion sur les échanges commerciaux, alors qu'ils se sont donnés un ensemble de mesures commerciales aux effets de distorsion très marqués.

Les PLC comprennent que le Canada doit se donner une position solide, unique et crédible. Nous partageons cette vision. Or, cette position doit être le reflet de la diversité des intérêts de tous les intervenants du secteur de l'agriculture au Canada.

Nous aimerions conclure en mentionnant un certain nombre de questions et de principes qui seront débattus davantage à notre conférence annuelle sur la politique laitière en janvier et qui pourraient ultimement faire partie intégrante de notre position.

D'abord, les accords commerciaux devraient améliorer le fonctionnement des marchés internationaux et contribuer à l'accroissement des revenus des producteurs.

Deuxièmement, les accords commerciaux devraient protéger le droit des producteurs d'opter pour un système donné de commercialisation de leurs produits. Dans ce contexte, il ne doit pas y avoir de compromis entre les secteurs ou denrées agricoles.

Troisièmement, le Canada devrait poursuivre ses efforts pour abolir toutes les subventions gouvernementales concernant l'exportation de produits.

Quatrièmement, les offres d'accès aux marchés devraient être révisées et assujetties à des règles auxquelles souscrivent les parties afin de garantir l'équité et l'équivalence entre les divers pays.

Cinquièmement, les tarifs applicables aux produits en excédent des engagements tarifaires devraient être maintenus à leur niveau actuel.

Sixièmement, la véritable concurrence découle de l'établissement de règles du jeu uniformes. Les gouvernements demeurent des intervenants importants dans la commercialisation des produits agricoles.

En conclusion, nous espérons que nos points de vue contribueront à l'avancement des travaux du comité. Les PLC continueront de tenir les députés au courant de leur point de vue et de leur position tout au long de la prochaine série de négociations bilatérales. Si vous avez des questions, Richard et moi-même serons heureux d'y répondre.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Bertoia, et merci à vous tous.

Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Hilstrom, vous avez sept minutes.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je pense que les exposés des trois groupes de témoins étaient extrêmement précis. Je ne sais même pas s'il reste des points à éclaircir, car vous avez été très clairs.

J'ai quelques questions sur toute cette idée d'augmenter le commerce et les exportations. À l'heure actuelle, le secteur laitier est en situation de bénéfice net et a un excédent de 98 millions de dollars. Comme pourcentage du total des exportations, cependant, le secteur laitier ne représente pas un pourcentage élevé du total des exportations agricoles, n'est-ce pas? Ce secteur ne représente que 350 millions comparé à notre commerce agricole qui atteint 29 milliards de dollars. C'est peu. N'est-ce pas une bonne idée de l'augmenter? Votre objectif est d'augmenter les exportations laitières, n'est-ce pas? Leo, pourriez-vous dire quelques mots à ce sujet?

M. Leo Bertoia: Comme vous le savez, actuellement, nous avons en place ce que nous appelons un programme d'exportation facultatif. Je pense que c'est probablement le mécanisme que nous voulons utiliser pour augmenter la production au Canada.

M. Howard Hilstrom: Est-il réaliste de penser que nous pouvons augmenter nos exportations de produits laitiers sans ouvrir l'accès à notre marché? Donnons-nous déjà un accès aux produits provenant des pays où nous prévoyons exporter?

M. Richard Doyle (directeur exécutif, Producteurs laitiers du Canada): Si vous le permettez, dans notre mémoire, nous disons simplement que si les autres pays producteurs laitiers, offraient le même niveau d'accès que nous, et si des conditions égales s'appliquaient, nous pourrions nous attendre à ce que nos exportations augmentent considérablement.

• 0935

M. Howard Hilstrom: Très bien, donc l'accès est équivalent.

Mettons de côté les subventions. Nous en avons tous traité, et c'est vraiment un peu une question distincte. C'est l'accès aux marchés qui m'intéresse. Pensez-vous qu'à l'heure actuelle, le Canada accorde un accès équivalent à son marché?

M. Richard Doyle: Plus d'accès.

M. Howard Hilstrom: Plus d'accès? Dans ce cas, pouvez-vous m'expliquer un peu les plaintes de la Nouvelle-Zélande et des États-Unis à l'OMC? Je pense qu'elles portaient surtout sur nos produits laitiers.

M. Richard Doyle: Oui, c'était uniquement sur les produits laitiers. La Nouvelle-Zélande et les États-Unis prétendent que le maintien d'un régime à deux prix, essentiellement, et la façon particulière dont nous gérons notre système d'exportation constitue, de facto, un régime de subvention à l'exportation. Évidemment, nous prétendons tout le contraire, puisque le prix n'est pas fixé pour les produits à l'exportation. L'offre est en fait faite au producteur qui doit décider s'il souhaite ou non exporter. La décision lui revient. Il n'y a aucune contrainte maintenant. Le quota ne limite plus le producteur qui souhaite exporter et c'est pourquoi nous voyons des augmentations. C'est un choix individuel. Le prix est négocié entre l'exportateur, le transformateur et la Commission canadienne du lait pour le compte des producteurs. Voilà essentiellement le point central du débat.

M. Howard Hilstrom: Vous avez déclaré que vous rejetiez, absolument, tout compromis entre un secteur agricole et un autre. Est-ce que c'est ce qui s'est produit au cours de la dernière ronde?

M. Richard Doyle: Non, et justement. Cela ne s'est pas produit...

M. Howard Hilstrom: Excusez-moi, cela ne s'est pas produit?

M. Richard Doyle: Non.

On parle beaucoup de compromis. Au cours des 10 à 12 dernières années, depuis 1986, je n'ai vu personne vraiment démontrer qu'il y avait eu compromis entre un produit et un autre à la dernière ronde. Il faut remonter à 1993, lorsque nous étions à Genève pour la dernière partie de la ronde Uruguay. Le Canada, pour les seuls produits laitiers, a dû donner un accès de 3 à 5 p. 100, ligne par ligne, pour chaque produit. Nous avons dû, avant la fin de décembre 1993, retirer notre offre. Nous avons dû le faire tout simplement parce que ce qu'offraient les États-Unis et l'Europe dans le cas des produits laitiers était de nature si protectionniste, si minime, les tarifs étaient si élevés que nous avons dû réviser notre offre globale. Voilà ce qui s'est passé. Nous ne l'avons pas fait dans le cas des céréales. Nous avons perdu l'article 11 et nous avons fini par fonder notre offre sur le fait que, en dernière analyse, les États-Unis et la communauté européenne, après sept ans, avaient décidé qu'ils en avaient assez. Ils ont accepté de s'entendre et la ronde s'est terminée. Voilà ce qui s'est passé.

M. Howard Hilstrom: Que recherche exactement l'industrie laitière dans le cadre de ces pourparlers? Voulez-vous quelque chose?

M. Richard Doyle: Certainement. Nous convenons qu'il ne doit pas y avoir de subvention à l'exportation. En fait, nous pensons qu'il y a de nombreux faux-fuyants dans ces négociations. On prétend vouloir mettre en question la politique en matière de concurrence et tout le reste. Le fait est que ce qu'il faut régler d'abord, c'est l'élimination des subventions à l'exportation financées par ces gouvernements. Oublions le reste, concentrons- nous là-dessus. Éliminons cela, et le marché mondial s'en portera mieux.

Deuxièmement, on continue à dire que c'est une entente fondée sur des règles. C'est vrai, c'est une entente fondée sur des règles et nous sommes en faveur de cela. Toutefois, la seule chose qui n'était pas fondée sur des règles au cours de la dernière ronde, c'étaient les offres. Elles étaient fondées sur des directives. Les 3 à 5 p. 100, ce n'est pas une règle, c'est une directive. Les offres, les engagements, les subventions à l'exportation, l'accès, l'évaluation des tarifs, tout ce qui est sur la table actuellement est fondé sur une série de distorsions.

Si vous avez recours à la distorsion pour augmenter l'accès à des produits vulnérables, il devient alors impossible de progresser. Nous voulons que l'on nettoie la base. Une fois cela réglé, augmenter. On n'a pas un accès de 3 à 5 p. 100. Et les tarifs sur cet accès... J'ai accès au marché européen pour mon fromage. Je vais payer neuf fois le niveau des tarifs des NPF—ce que l'on appelle les nations les plus favorisées—dans cet accès. Ensuite, je les fais payer pour le fromage qu'ils envoient ici. Les 3 à 7 p. 100 ne sont pas nets. C'est même si sale qu'on ne peut pas s'y fonder pour augmenter l'accès, ce que tous veulent. Tirons ça au clair. Si la base est claire, la croissance est alors possible.

M. Howard Hilstrom: Merci.

Le président: Madame Alarie, vous avez sept minutes.

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): J'ai une question à poser, si vous le me permettez. Je lis dans le texte que les FPACC croient que «le système actuel de gestion des approvisionnements doit être réformé afin de favoriser une plus grande compétitivité intérieure». Quand aux Producteurs laitiers du Canada, ils parlent d'«une industrie laitière composée d'entreprises agricoles indépendantes et rentables, qui oeuvre dans un régime de gestion des approvisionnements souple mais solide».

• 0940

J'aimerais que vous expliquiez les propos «souple mais solide» et «réformé»; qu'est-ce que vous entendez vraiment par cela? Est-ce que vous êtes prêts à toucher à la gestion de l'offre?

M. Richard Doyle: Je ne parlerai pas pour M. Fleischmann, qui a fait le commentaire inverse.

Mme Hélène Alarie: C'est pour ça que je veux entendre les deux parties.

M. Richard Doyle: Je pense qu'il manque une certaine compréhension de la réforme que l'industrie laitière et les systèmes de gestion ont connue depuis les changements majeurs de 1992, avant même 1994, à la fin de l'Uruguay Round.

Il y a eu des réformes absolument majeures. Le système de contingentement a été modifié. Les retenues et le mécanisme ont été complètement changés. On a travaillé à un code d'harmonisation des standards dans les neuf provinces et au niveau fédéral. On a créé des pools, donc des mises en commun, de façon à donner beaucoup plus de contrôle aux producteurs et aux agences provinciales pour qu'on puisse travailler ensemble dans un système de mise en commun.

On entend toujours parler de réformes. Ça fait 15 ans que j'en entends parler. On est constamment dans une réforme de l'industrie laitière et on ne semble jamais comprendre que cette réforme est déjà en marche, bien que non complétée.

Mme Hélène Alarie: Dans ce contexte, monsieur Fleischmann, est-ce que vous pouvez me parler de la gestion des approvisionnements, qui doit être réformée? On va prendre l'exemple du lait.

M. George Fleischmann: On veut faire quelque chose pour ça. Premièrement, il est très important que tous les participants du secteur soient impliqués dans les décisions. Jusqu'à maintenant, les décisions ont presque toujours été prises par les producteurs primaires. La participation des secteurs qui ajoutent de la valeur est très faible.

Deuxièmement, nous sommes en train d'entrer dans un système très mondial. Quand certains érigent de grandes barrières qui inhibent la participation de tous les pays au commerce, c'est très mauvais pour le Canada. Par exemple, les autres pays peuvent exercer des représailles dans d'autres secteurs. Si on ne permet pas l'introduction de produits qui contiennent du lait, les autres pays pourront faire des choses contre nous, par exemple dans le secteur du blé, dans le secteur forestier, dans les pêcheries, partout. Selon notre association, il faut avoir, au Canada, un système qui inclue tous les secteurs agroalimentaires, et pas seulement le secteur primaire des produits laitiers. Pour le moment, on n'a pas cela au Canada.

Mme Hélène Alarie: J'ai une autre question. Dans un autre ordre d'idées, vous avez parlé d'harmonisation des règlements. On a aussi mentionné les subventions publiques à l'exportation, qui créent des distorsions. Enfin, il y a toutes sortes de choses à régler ou à examiner avant de commencer des négociations. On est tellement loin du règlement de ces différends. L'harmonisation des règlements est un exemple de questions à régler en ce qui concerne les barrières non tarifaires.

J'ai écouté un représentant de la Communauté européenne qui est venu nous faire une conférence, il y a trois semaines, à Montréal. Peut-être que vous étiez là. Il disait que les subventions à l'exportation, ils ne les enlèveraient pas parce qu'ils ouvraient leur marché aux pays de l'Est et que c'était impossible. Je pense qu'on était rendu à l'an 2010. C'était pire que les Jeux olympiques.

• 0945

Je trouve qu'on pourrait faire de beaux discours sur la vision qu'on a de l'avenir du Canada à l'OMC, mais il faut tout d'abord s'attaquer à ces problématiques qui me semblent presque insurmontables. J'aimerais vous entendre parler à ce sujet.

M. George Fleischmann: Il y a une chose que j'aimerais vous dire, et c'est que 85 p. 100 de nos exportations vont aux États-Unis et que nous sommes le partenaire des États-Unis dans l'ALENA. Il faut absolument qu'on arrive à une certaine harmonisation de toutes nos règles pour qu'on puisse continuer à faire les bonnes exportations.

Si on a des règles tarifaires et non tarifaires différentes, on ne pourra pas faire de progrès, comme je l'ai dit dans mes commentaires. C'est le problème.

[Traduction]

Le président: Je pense que votre temps est écoulé.

Nous allons maintenant passer à M. Calder pour sept minutes.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Fleischmann, quel taux de rendement touchez-vous sur votre investissement en capital?

M. George Fleischmann: Je ne touche rien, monsieur Calder, car je n'ai pas d'entreprise en exploitation.

M. Murray Calder: Très bien, dans ce cas dites-moi, quel taux de rendement les fabricants de produits alimentaires touchent-ils sur leur investissement en capital?

M. George Fleischmann: Voulez-vous dire les Fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada?

M. Murray Calder: Oui, justement.

M. George Fleischmann: Il y a environ 170 entreprises. Chacune a son propre taux de rendement sur l'investissement que je ne connais pas.

M. Murray Calder: En moyenne.

M. George Fleischmann: Je ne pense pas qu'il y ait un taux moyen de rendement sur l'investissement. Il y a des taux de rendement pour chaque entreprise individuelle.

M. Murray Calder: La dernière fois que j'ai parlé à Kathleen Sullivan, elle m'a dit que votre taux de rendement était d'environ 4 à 5 p. 100.

M. George Fleischmann: Monsieur Calder, Kathleen Sullivan ne représente pas notre industrie. Je pense qu'elle travaille pour l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires. Ce n'est pas notre industrie.

M. Murray Calder: Je vois. Eh bien dans ce cas, j'imagine qu'il y a un chiffre quant à votre rendement sur le capital investi, car évidemment, vous ne fabriquez pas vos produits pour rien, n'est-ce pas?

M. George Fleischmann: J'espère bien que non.

M. Murray Calder: Très bien, n'est-ce pas.

À l'heure actuelle, nous constatons de grands bouleversements au sein du milieu agricole, sauf dans un secteur, celui des cinq produits soumis à la gestion des approvisionnements. On a dit à l'industrie du porc de se chercher des marchés internationaux. Ce secteur a porté sa production de 16 à 19 millions de dollars. Au cours de la dernière année et demie, cette industrie a vu son taux de rendement chuter de 60 p. 100. Est-ce que votre prix de gros a diminué de 60 p. 100?

M. George Fleischmann: Je n'en ai pas la moindre idée. Je n'ai pas de prix de gros, monsieur Calder.

M. Murray Calder: Je suis un peu perdu, car vous représentez bien les fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada.

M. George Fleischmann: Nous sommes l'association qui représente les fabricants, nous ne sommes pas des fabricants de produits alimentaires... Il y a des entreprises qui font ça, monsieur Calder.

M. Murray Calder: Vous avez toutefois accès à l'information, n'est-ce pas?

M. George Fleischmann: Je ne demande pas cette information. Elle appartient aux entreprises. S'il s'agit de sociétés publiques, l'information est publiée, mais ce n'est pas quelque chose que fait l'association.

M. Murray Calder: Eh bien je vais présenter la chose de cette façon-ci: mon épouse fait l'épicerie. Je lui ai donc demandé si le prix des côtelettes de porc avait diminué de 60 p. 100, et elle m'a répondu que non.

M. George Fleischmann: Monsieur Calder, nous ne représentons pas non plus les supermarchés.

M. Murray Calder: Qui représentez-vous alors?

M. George Fleischmann: Nous représentons les fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada. Le Conseil canadien de la distribution alimentaire représente les supermarchés.

M. Murray Calder: Très bien.

M. George Fleischmann: Je pensais que nous avions dit très clairement qui nous représentons.

M. Murray Calder: Je pensais que vous auriez certains renseignements sur les questions que je pose si vous êtes là pour représenter les vendeurs d'aliments—le prix au gros, le prix au détail.

M. George Fleischmann: Ce sont des renseignements privatifs qui appartiennent aux entreprises individuelles. Si le représentant était ici, je suis persuadé qu'il vous donnerait peut-être l'information que vous cherchez. Mais cela ne regarde pas l'association.

M. Murray Calder: Très bien.

Une de vos déclarations ici m'intrigue. Vous dites que votre organisme souhaite que le Canada: «délaisse une politique agricole strictement axée sur les prix à la production au profit de l'ensemble des membres de la chaîne des approvisionnements agricoles». Pouvez-vous nous en dire un peu plus long à ce sujet?

• 0950

M. George Fleischmann: Oui.

Le CCCPA et les ministres provinciaux et fédéral de l'Agriculture ont affirmé vouloir doubler les exportations mais ont aussi reconnu que la seule façon d'y arriver, c'est d'avoir des produits d'exportation à valeur ajoutée, à raison de 60 p. 100 plutôt que 40 p. 100. Pour ce faire, le gouvernement, ou plutôt tous les gouvernements devront considérer l'agriculture comme un ensemble, comme une chaîne composée de maillons.

Actuellement, et vous pouvez le constater rien qu'en regardant dans cette pièce, on se concentre surtout sur les producteurs primaires. On s'occupe peu des transformateurs, des transformateurs de second cycle, des détaillants et du consommateur. Je tiens à vous rappeler, ainsi qu'au comité, qu'il s'agit d'un système complet et si nous ne commençons pas à examiner chacun des maillons de la chaîne, nous n'arriverons jamais à nos fins. La rentabilité ultime de chacun des maillons dépend de l'attention qu'on porte à l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement. Actuellement, on se concentre exclusivement sur les producteurs primaires.

M. Murray Calder: Je n'en suis pas certain; il y a beaucoup d'éleveurs de porc qui ne partagent sans doute pas votre avis. Ils vendent leurs produits parce qu'on leur a dit d'augmenter leur production, ce qu'ils ont fait et, maintenant, chaque animal vendu représente une perte de 60 $. Honnêtement, je n'ai pas vu de baisse de 60 p. 100 du prix du gros chez les transformateurs primaires. Je n'ai pas non plus vu de baisse de 60 p. 100 du prix au détail, dans les magasins. Alors tout cela, ce ne sont que des balivernes.

M. John Pigott (président et directeur général, Fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada): Monsieur Calder, peut-on exporter 100 000 livres de fromage à la crème de l'Ontario en Iowa?

M. Murray Calder: Bon, qu'est-ce que cela a à voir avec...?

M. John Pigott: Non, on ne peut faire traverser la frontière à ce produit, à moins de l'intégrer à un produit de seconde transformation.

L'an dernier, j'ai pu envoyer 1 million de livres de hors-d'oeuvre aux États-Unis, en y intégrant 100 000 livres de fromage à la crème de l'Ontario. Voilà qui encourage la croissance des transformateurs primaires et c'est ce que nous voulons faire. C'est ce que demande M. Fleischmann en demandant de l'aide. Comment enlever les obstacles pour qu'on puisse le faire davantage?

Voilà de quoi il retourne, messieurs. Je ne suis qu'un pâtissier qui veut vendre davantage de produits agroalimentaires canadiens. Tout ce que nous demandons, c'est qu'on nous facilite la tâche, parce que nous y gagnons tous. Tel produit est fait de blé canadien, de fromage à la crème canadien, d'oignons canadiens et de carottes canadiennes. C'est ce que nous voulons faire.

Le président: Monsieur Hoeppner, vous avez cinq minutes.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Cela devient très intéressant. J'aimerais vous fournir quelques statistiques que j'ai présentées hier, dans mon discours.

Lorsque je suis allé déjeuner hier, j'ai commandé du bacon et des oeufs et je m'attendais à avoir toute une assiette de bacon. Lorsque j'ai vu les tranches qu'on me donnait, je me suis dit que le porc n'avait pas dû gouiner bien fort quand on lui a pris cela, puisqu'il n'y en avait si peu.

Je regarde les prix à la ferme qui sont versés pour des produits transformés, par exemple, des oeufs farcis. Vous pouvez avoir un oeuf farci qui coûte 1,60 $; le producteur en aura 10 cents. Un verre de lait coûte 1,50 $, le producteur reçoit 16 cents. Il s'agit là de produits faisant l'objet d'une gestion de l'offre.

Est-ce un rendement juste pour l'agriculteur, un dixième du prix de détail? C'est ma première question.

M. Richard Doyle: Si vous parlez de gestion de l'offre, je pense que nous pouvons dire que les agriculteurs sont contents de ce système, qui veille à ce qu'ils reçoivent leur juste part de l'argent des consommateurs. Nous ne pouvons contrôler les détaillants, comme disait George.

Son effet habituel, toutefois, comme pour d'autres marchandises, c'est que pour toute une chaîne alimentaire, le risque du marché est toujours reporté jusqu'au dernier maillon, soit le producteur agricole. Avec la gestion de l'offre, on s'assure que ce producteur reçoit un rendement raisonnable.

Il y a une chose intéressante qu'on a constatée aux États- Unis. Nous allons parler ici de produits laitiers, avant de revenir à ce dont parlait Murray. C'est au General Accounting Office, au GAO, qu'on a fait récemment un sondage d'après lequel il n'y a absolument aucune corrélation entre les changements des prix payés aux producteurs et les prix au détail—aucune corrélation. C'est pourquoi nous avons pu voir des changements dans les prix pour les agriculteurs américains et dans le secteur laitier—soit des baisses de 28 p. 100 ou de 29 p. 100, tout de même moins grave que ce que nous avons vu du côté du porc et d'autres produits—sans qu'il y ait de changement dans les prix au détail.

M. Jake Hoeppner: Il reste que l'un des problèmes, lorsqu'on a des produits à valeur ajoutée, c'est que pour un verre de lait qui coûte déjà 1,50 $ dont le fermier ne reçoit que 10 cents... comment peut-on ajouter de la valeur à un produit qui est déjà si cher? Ce n'est pas l'agriculteur qui crée des écarts. L'écart se produit quelque part entre la ferme et le produit fini. Je pense que c'est à cette question qu'il faut répondre, si l'on veut d'une industrie à valeur ajoutée.

• 0955

Comme je le disais hier soir, je crois que les deux rôties qu'on m'a données contenaient pour environ un quart de cent de blé. Voulez-vous qu'on en fasse pousser pour moins cher encore, afin d'y ajouter de la valeur? Voilà le problème.

Il y a une autre chose dont je veux parler. Je me suis lancé dans l'agriculture en 1957 et chaque fois que j'allumais la radio, à l'époque des récoltes, j'entendais «vous savez, les prix sont bas maintenant, mais l'an prochain...» ou «le plus dur est passé, les choses vont s'améliorer». Les groupes d'intérêt nous ont toujours parlé d'un futur utopique, parce que nous connaissions notre passé. Depuis 1957, à chaque ralentissement ou à chaque récession, les choses se sont aggravées plutôt que de s'améliorer. Comment cela se fait-il, alors que nous avons des tas de gens compétents, des groupes d'intérêt, qui suivent l'ensemble du système et qui disent ce qui ne va pas?

M. Richard Doyle: C'est une bonne question. Je ne suis pas convaincu de pouvoir y répondre.

M. Jake Hoeppner: Eh bien, j'aimerais bien qu'on y réponde, parce que je dois dire aux gens de ma circonscription, aux producteurs de porc: «Vous n'obtiendrez pas la moitié de ce que vous a coûté l'élevage de ce porc». Je dois dire aux producteurs céréaliers: «Vous aurez 3 $ le boisseau, même si votre moissonneuse-batteuse vous coûte 250 000 $» Ça ne peut plus continuer. Vous devez nous fournir des réponses, parce que c'est toujours à nous, les politiciens, d'essuyer les reproches—et probablement avec raison, dans bien des cas.

M. Richard Doyle: Si vous me permettez un bref commentaire: La réalité, c'est que nous avons un système de libre marché, qui est cyclique. Dans ce cycle, il y a des hauts et des bas et les paiements de stabilisation servent à réduire les écarts entre les hauts et les bas. Si vous voulez suivre le cycle, il n'y aura pas de surprises: il y aura des hauts et des bas. Il n'y aura pas de stabilité. La gestion de l'offre essaie de modifier le système en le stabilisant. C'est ce que nous efforçons de faire: éviter les hauts et les bas.

Bien entendu, il y a des avantages et des inconvénients. Il y a six mois, le prix américain pour les producteurs de lait était supérieur à celui du Canada. Mais il baisse rapidement. Dans moins d'un mois, le prix américain sera inférieur au nôtre. C'est un produit de consommation qui, au détail, a pourtant le même prix aux États-Unis et au Canada, compte tenu du taux de change.

M. Jake Hoeppner: J'ai été bien étonné. Vous savez que les Américains nous menacent de faire un autre blocus. J'ai vu une lettre de Keystone Agricultural Producers, adressée au ministre responsable de la Commission canadienne du blé et qui demandait si on permettait aux Américains d'effectuer des vérifications à la Commission. Bon sang, si quelque chose ne va pas, je veux qu'il y ait une vérification, et si quelque chose ne tourne pas rond, qu'est-ce que vous avez à cacher?

M. Larry McCormick: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je veux simplement poser une question pour qu'elle figure au compte rendu. Je crois savoir que la Commission canadienne du blé fait l'objet d'une vérification annuelle par une entreprise de très bonne réputation et j'aimerais que vous répondiez à cela.

M. Jake Hoeppner: Monsieur le président, je veux qu'il soit consigné au compte rendu que si l'on ne permet pas au vérificateur général de vérifier nos propres comptes...

M. Larry McCormick: Monsieur le président, pourrait-on répondre d'abord à ma question?

M. Jake Hoeppner: ...il y a quelque chose qui sent, et qui sent mauvais.

M. Larry McCormick: Qu'on nous dise si la Commission canadienne du blé fait ou non l'objet d'une vérification annuelle?

Le président: Je ne sais pas si je peux vous fournir la réponse. Oui, il y a une vérification. En outre, il y a eu des enquêtes distinctes d'après lesquelles tout se fait en bonne et due forme.

De toute façon, passons à un autre intervenant. C'est au tour de Mme Ur.

Non désolé, Larry, c'est à vous.

M. Larry McCormick: Merci. Merci, Rose-Marie.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Mais je vous en prie.

M. Larry McCormick: J'ai eu une idée. Vous savez, George, nous sommes ici pour parler de l'OMC et il est bon de le faire aussi tôt dans le processus. Nous voulons tous gagner, et je félicite M. Pigott pour ses produits. Il faut davantage d'innovations comme celle-là, et pourtant, nous nous limitons à cause du faible prix des produits. Ce n'est que dans les meilleures circonstances, lorsque l'économie va vraiment bien que vos entreprises se débrouillent le mieux.

Ce que nous voulons, bien entendu, c'est faire croître nos entreprises et nos exportations. Mais je ne voudrais pas que cela se fasse aux dépens de l'intervenant le plus fragile, soit la ferme familiale. Quand vous dites que le système de gestion de l'offre doit être remanié... M. Calder disait que la plupart de vos entreprises sont bien plus saines, et nous voulons bien sûr des entreprises saines, comme nous voulons des banques saines. Mais nos fermes familiales sont menacées, de bien des façons, par toutes sortes de choses qui se produisent actuellement au Canada. Voilà ce qui nous préoccupe.

• 1000

Vous pourriez peut-être nous dire comment vous souhaitez modifier le système de gestion de l'offre de manière à garder une industrie canadienne saine et viable.

Le président: Monsieur Pigott.

M. John Pigott: Monsieur McCormick, mon entreprise s'est présentée devant votre comité en 1987 pour demander une protection dans le cadre de l'accord commercial Canada—États-Unis, parce que nous étions confrontés à des barrières tarifaires, mais nous avons servi de monnaie d'échange. Nous n'avons obtenu aucune protection et on nous a jetés dans la dure arène de la concurrence. C'est la meilleure chose qui ait pu nous arriver, puisque 10 ans plus tard, nous exportons trois fois plus qu'auparavant et nous achetons trois fois plus de produits agricoles à transformer. Il fallait trouver une façon d'être compétitifs.

Il n'y a pas de compétition pour notre secteur. Nous devons survivre sur le marché et seuls les meilleurs survivent, mais il faut vouloir pour pouvoir. Une partie du problème vient du fait que lorsqu'on est protégé, on n'est pas forcé de se débrouiller sur le marché.

Nous ne leur demandons pas nécessairement de réduire leurs prix, mais s'il n'y a pas de discipline du marché, comment calculer les coûts? C'est une toute autre chose. Quelle attention donnons- nous au coût de transport, Richard? Comment faire pour être de plus en plus concurrentiels? Nous sommes trop occupés à nous chamailler pour des questions de prix alors que nous devrions travailler ensemble.

Une voix: Il a raison!

M. John Pigott: Nous demandons plus de représentation pour qu'il y ait au moins une discipline de marché. J'ai passé des années à un groupe de travail sur la volaille. Tout ce que nous demandions, c'est une représentation égale, pour la gestion de l'offre, afin d'intégrer un peu de la discipline de marché. Rien ne vaut le travail auprès du client. Le client a raison. S'il n'y a pas de discipline imposée par le client dans un système, il n'y a pas de raison pour procéder au dégraissage et je peux vous dire qu'il y a encore bien du gras à couper.

M. Larry McCormick: Merci, monsieur le président. J'ai une courte question pour M. Maguire, de la Western Canadian Wheat Growers Association. C'est une question sérieuse.

Vous avez dit que la commission devrait être plus commerciale, comme son homologue australienne. Je me demande si ce sera possible, avec la restructuration de la Commission canadienne du blé et la composition du conseil d'administration, en espérant que nous faisons la bonne chose. Cela fonctionnera-t-il? Peuvent-ils choisir cette option s'ils le veulent? Qu'en pensez-vous?

M. Larry Maguire: Avec la structure actuelle, ils ne peuvent pas avoir le même genre d'entité. La commission australienne a une structure composée d'actionnaires. C'est une entité commerciale, qui vend des actions qui est bien plus loin du contrôle gouvernemental que le sera notre commission, même avec le nouveau conseil d'administration élu. Bien entendu, ils n'ont de monopole que sur le blé à l'étranger. Il n'y a pas du tout de monopole de cette nature en Australie même.

M. Larry McCormick: Même avec 10 administrateurs sur 15? La Commission canadienne du blé pourra décider de son avenir. Je pense qu'avec toute l'opposition à ce sujet, les gens vont finir par applaudir à cela. Je suis persuadé qu'on ne peut pas contenter tous les Canadiens, avec un système parfait, mais c'est un peu comme l'élection d'hier soir au Québec. Il y a une différence autour de cette table. Je crois que nous avons gagné, alors que d'aucuns vous diront que d'autres ont gagné.

M. Larry Maguire: Indubitablement, la Commission canadienne du blé sera bien différente le 1er janvier de ce qu'elle est aujourd'hui. Nous espérons qu'à l'avenir, il y aura d'autres possibilités qui nous seront offertes. Nous en parlerons plus tard, lorsque nous traiterons des revenus.

Pour ce qui est des changements dans notre secteur au Canada, nous connaissons très bien les changements vécus par nos amis de la gestion de l'offre, partout au Canada, maintenant et lors de la réduction de l'article 11, à la dernière ronde de négociations commerciales. Nous avons réussi aussi, je crois, du côté de l'article 22 pour ce qui est du mouvement américain, soit le grain allant vers les États-Unis.

Mais je pense qu'il faut reconnaître que le changement se poursuit, et plus vite qu'ailleurs dans le secteur du grain, particulièrement dans l'ouest du Canada. Lorsqu'on parle de concession, et de concession individuelle, c'est essentiellement parce qu'on a supprimé la subvention du Nid-du-Corbeau, qui représentait environ 15 p. 100 de ce qui a été sur la table à un moment donné. Il n'y a pas d'autres secteurs au Canada qui prennent 15 p. 100 de la valeur de leurs appuis en une année.

Sans aucun doute, nous assistons à de grands changements dans l'ouest du Canada. Tout le processus en cours bouleverse bien des choses. Mais je crois pouvoir dire que si nous continuons d'avoir des entités commerciales d'État et des programmes du genre de la gestion de l'offre, il nous faudra soit décider, en tant que pays, que nous voulons un trésor aussi bien garni que celui de l'Union européenne et des États-Unis, ou que nous allons appuyer nos partenaires et amis, soit, par exemple, l'Argentine, la Nouvelle-Zélande et l'Australie et prévoir les sommes... Il nous faudra décider si nous avons suffisamment d'argent pour nous associer à eux ou si nous voulons plutôt nous associer aux plus petits pays.

• 1005

Le président: Merci.

Juste avant de donner la parole aux réformistes, j'aimerais vous poser une question, monsieur Maguire. Je ne sais pas si cela se rapporte vraiment à l'OMC. Si vous voulez que la Commission canadienne du blé se rapproche du modèle australien, proposez-vous aussi que la commission fasse l'achat d'installations d'entreposage?

M. Larry Maguire: Ce n'est pas certainement pas nécessaire, étant donné notre géographie bien différente, monsieur Harvard.

Le président: Mais c'est la situation de la Commission australienne.

M. Larry Maguire: En effet. Elle en possède elle-même, mais toutes les installations portuaires sont maintenant de propriété privée, même si les propriétaires sont une nouvelle génération de coopératives agricoles. Nous avons des choses du genre, déjà ici, dans l'ouest du pays, mais il faut aller chercher le grain dans un territoire beaucoup plus vaste et, en outre, nos volumes d'exportation sont bien supérieurs.

Le président: M. Hilstrom ou M. Breitkreuz.

M. Howard Hilstrom: Je ne veux pas trop me pencher sur la Commission canadienne du blé, parce que je crois qu'elle disparaîtra d'ici 10 ans, de toute façon. Nous ne devons donc pas trop nous en préoccuper.

George, représentez-vous les minoteries du Canada?

M. George Fleischmann: Non.

M. Howard Hilstrom: Représentez-vous les fabricants de biscuits?

M. George Fleischmann: Oui.

M. Howard Hilstrom: Les producteurs de biscuits?

M. George Fleischmann: Oui.

M. Howard Hilstrom: Bien. Ça me chiffonne vraiment quand vous dites que les producteurs primaires font partie de l'ensemble de l'agroalimentaire. Pour moi, l'agriculture représente les producteurs primaires et l'agroalimentaire, l'aspect transformation ou valeur ajoutée. Est-ce une bonne définition...

M. George Fleischmann: Oui, ce sont des maillons de la chaîne agroalimentaire.

M. Howard Hilstrom: ...qu'on devrait modifier pour tenir compte de ce genre de production? Pouvez-vous m'expliquer comment le producteur primaire... Je vais reformuler. Il faut être très précis.

Chaque secteur veut l'attention du gouvernement afin que sa position soit écoutée et présentée lors des prochaines négociations commerciales. Je ne crois pas que les producteurs primaires aient vraiment voix au chapitre.

Prenons l'exemple précis du Ontario Wheat Producer's Marketing Board. Dans ce cas, 90 p. 100 des agriculteurs ont voté en faveur d'options de commercialisation pour leur blé. J'ai les lettres pour le prouver, et vous les connaissez. Les producteurs de biscuits et les minoteries sont allés à la Commission de commercialisation des produits agricoles de l'Ontario pour dire: «Ne permettez pas aux agriculteurs de commercialiser du blé autrement que par l'intermédiaire de la Ontario Wheat Producers' Marketing Board». Autrement dit, ils ne voulaient pas de changements. Ce que je vois, c'est que les producteurs primaires n'ont aucun pouvoir par rapport aux transformateurs.

Pouvez-vous nous décrire ce qui s'est produit et nous dire quel est le pouvoir du producteur dans toute cette histoire?

M. George Fleischmann: Je ne connais pas du tout cette situation et je ne peux donc pas vous décrire ce qui s'est produit.

Je suis un scientifique spécialisé en agriculture. J'ai passé 10 ans à Winnipeg à faire de la recherche. J'ai ensuite travaillé 10 autres années pour le gouvernement fédéral, dont une bonne partie au ministère de l'Agriculture, où j'étais sous-ministre adjoint principal. Je peux vous dire que si le pays ne s'organise pas en tenant compte de tous les maillons de la chaîne agroalimentaire, tous les maillons risquent d'en souffrir. Il faut reconnaître la réalité des marchés étrangers et du marché mondial, ainsi que celle des blocs commerciaux. Plus nous attendrons, en nous isolant pour maintenir les barrières tarifaires et non tarifaires, plus il nous sera difficile de nous positionner, de manière avantageuse pour tous les maillons de la chaîne.

J'aimerais dire encore une chose. Tous les fabricants ne s'en tirent pas nécessairement bien. Certains font faillite. Il faut laisser le marché jouer librement; lorsqu'on impose des restrictions ou qu'on élimine certaines choses du libre marché, on nuit ultimement à l'efficacité du secteur.

• 1010

Dès qu'on nuit à cette efficacité, on affaiblit le Canada sur la scène mondiale, et il faut bien se rendre compte qu'en bout de ligne, nous y serons tous, qu'on le veuille ou non.

M. Howard Hilstrom: Je suis un éleveur de bétail et je peux vous dire que nous surpassons l'industrie laitière pour chaque secteur de gestion de l'offre, et de loin, lorsqu'il s'agit de la valeur des exportations; nous parlons de sommes gigantesques, de milliards de dollars.

Larry, voulez-vous présenter la position des producteurs primaires et expliquer comment ils retiendront l'attention du gouvernement au sujet de l'exemple que j'ai donné, où il semble que les producteurs primaires passent après les autres, aux yeux de la Ontario Wheat Producers' Marketing Board. Je ne peux pas croire que personne ici n'est au courant. On en a beaucoup parlé, ici, en Ontario, et je trouve étrange que M. Fleischmann ne soit pas au courant. Pouvez-vous nous en dire davantage?

Le président: Vous avez une minute, monsieur Maguire.

M. Larry Maguire: Je veux simplement dire que nous savons tout à fait de quoi il s'agit; nous sommes au courant. L'agriculteur ontarien avait le choix quant à la façon de vendre son grain sur le marché international, et pouvait choisir de ne pas traiter avec le Ontario Wheat Producers' Marketing Board. Nous avons cherché à obtenir les mêmes choix pour l'ouest du pays, des choix que nous n'avons jamais eus. On en a beaucoup parlé publiquement, et toute l'affaire a été renversée par la Commission de commercialisation des produits agricoles de l'Ontario et il n'y a pas eu de vote. Malgré tout, les agriculteurs continuent de vouloir commercialiser leurs propres produits.

M. Howard Hilstrom: Chaque agriculteur devrait avoir ce choix, plutôt que de se faire dire par un organisme qui aura le choix ou pas.

M. Larry Maguire: Nous le croyons certainement. Nous y croyons aussi pour l'ouest du pays. Cela conviendrait à l'ensemble du pays et nous pensons que nous pourrions augmenter le produit national brut et aussi les exportations.

M. Jake Hoeppner: J'invoque le Règlement, monsieur le président. C'est un sujet très intéressant et j'aimerais que M. McCormick nous explique ce qui s'est produit, puisque c'est dans sa province et qu'il a peut-être...

Le président: Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un rappel au Règlement, monsieur Hoeppner.

M. Larry McCormick: Je l'expliquerai volontiers, mais j'aimerais aussi...

Le président: La parole est à Mme Ur.

Mme Rose-Marie Ur: Merci, monsieur le président.

Depuis quand votre association existe-t-elle?

Mme Laurie Curry (vice-présidente, Affaires publiques et scientifiques, Fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada): Notre ancien nom était les Fabricants canadiens de produits alimentaires. Le changement s'est fait il y a environ trois ans. L'organisme a été créé dans les années 60, je ne sais pas exactement quelle année, mais cela remonte à au moins trois décennies.

Mme Rose-Marie Ur: Avez-vous participé activement aux audiences, la dernière fois?

M. John Pigott: Oui.

Mme Rose-Marie Ur: À quel titre?

M. John Pigott: Un peu le même qu'aujourd'hui; nous représentions alors les Fabricants canadiens de produits alimentaires.

Mme Rose-Marie Ur: Dommage que George ne soit pas là, mais je sais qu'on pourra le mettre au courant. Laurie, vous savez que je suis en faveur de la gestion de l'offre et que cela m'intéresse vivement. Ne pensez-vous pas que vous fonctionnez essentiellement en fonction d'une gestion de l'offre aussi? Je sais que vous représentez environ 170 groupes différents, mais tout bien considéré, que ce soit l'industrie de l'automobile, des produits alimentaires ou autre chose, il s'agit toujours de gestion de l'offre. Nous avons besoin de l'offre. Si les gens n'achètent pas, vous ne produisez pas et vous n'y revenez pas. En fait, on trouve la gestion de l'offre dans de nombreux secteurs. On ne continuera pas de construire des voitures si personne n'en achète. Vous comprenez ce que je veux dire? Vous n'allez pas produire ce que personne n'achètera.

M. John Pigott: Non, mais nous ne pouvons pas fixer les prix des magasins Loblaws. Nous ne pouvons pas leur dire quel volume nous allons produire ni quel seront leurs prix. Nous n'avons aucun contrôle sur la demande, à la sortie de l'usine. Nous essayons de l'influencer en choisissant nos prix, en faisant des promotions, du marketing et en innovant, mais nous n'avons aucun contrôle sur ce que veulent faire nos clients, sauf en sachant ce que veulent les consommateurs à qui nous essayons d'offrir nos produits.

Mme Rose-Marie Ur: Mais c'est ce que je suis en train de dire.

M. John Pigott: Ce n'est pas de la gestion de l'offre.

Mme Rose-Marie Ur: Vous n'allez pas produire si nous refusons d'acheter.

M. John Pigott: Bien sûr que non.

Mme Rose-Marie Ur: C'est exact.

M. John Pigott: C'est dicté par le marché. La gestion de l'offre n'est pas dictée par le marché.

Mme Rose-Marie Ur: Vous n'aimez tout simplement pas le terme «gestion de l'offre». On pourrait en discuter jusqu'à ce que mort s'en suive...

M. John Pigott: La production planifiée c'est très bien.

M. Murray Calder: C'est la même chose que la gestion de l'offre.

M. John Pigott: Mais est-ce sensible aux forces du marché? C'est tout ce que nous demandons.

Mme Rose-Marie Ur: Bon, disons que nous ne sommes pas d'accord.

Je passe maintenant à M. Doyle. Je crois que vous étiez là en 1993 pour représenter les producteurs laitiers. Dites-moi ce que vous feriez différemment la prochaine fois afin que nous n'ayons pas une crise d'huile de beurre ou de sucre pour laquelle le gouvernement sera blâmé en 1998?

Une voix: Avez-vous assez dormi hier soir?

Mme Rose-Marie Ur: Oui, trois heures.

M. Richard Doyle: C'est une bonne question. Comme vous le savez, c'est un système très compliqué.

Mme Rose-Marie Ur: Simplifiez-le.

• 1015

M. Richard Doyle: Je peux vous dire ce que nous entendons faire dans un cas particulier. Nous avons créé un nouveau service et nous avons embauché plus de personnel. Évidemment, il s'agit d'une négociation beaucoup plus complexe qu'elle ne l'était en 1986 et en 1993-1994. Nous devons suivre six ou sept comités distincts qui participent aux négociations. Nous devons également nous préoccuper de l'ALENA, des discussions avec la FDA, l'APEC, ainsi que le travail de l'OCDE. Nous ne sommes pas les seuls. Le ministère du Commerce international et la section du ministère de l'Agriculture qui s'occupe de commerce international ont multiplié leur effectif depuis 1993. Il nous faut être très attentifs.

On peut discuter de philosophie tant qu'on voudra. La situation réelle c'est que ces négociations traitent de questions techniques très concrètes. C'est là que Mike Gifford, le négociateur, a toujours dit que les détails sont un cauchemar. Il faut vraiment avoir un groupe de techniciens qui comprennent la différence et comprennent comment les tarifs sont calculés, comment fonctionne la distorsion de l'accès, en ce qui concerne l'offre, etc., et c'est à ce niveau-là que ces négociations vont aboutir à un résultat favorable ou défavorable pour le Canada.

Mme Rose-Marie Ur: Qu'allez-vous faire différemment cette fois-ci, donc?

M. Richard Doyle: Nous allons nous assurer que nous avons toutes les ressources possibles pour obtenir tous les renseignements dont nous avons besoin. Lors de la crise de l'huile de beurre et du sucre, il s'agissait essentiellement d'un manque de transfert d'information d'un ministère à un autre. Tout le monde croyait que cette information était sur la table et ce n'était pas le cas. Elle est disparue dans les méandres et cela a créé une échappatoire. Le résultat, c'est que nous sommes aux prises avec un problème, un problème très sérieux.

Mme Rose-Marie Ur: Mais il n'y a pas de droit de douane sur le sucre.

M. Richard Doyle: Non. Je ne veux pas me lancer dans un débat sur l'huile de beurre devant le TCCE dans un milieu très...

Mme Rose-Marie Ur: Non, moi non plus.

Plusieurs d'entre nous ont été élus pour la première fois en 1993, et nous avons été confrontés à cette situation très rapidement. Maintenant, nous sommes là depuis quelques années, et c'est pourquoi nous tenons ces audiences, afin que nous puissions tous être un peu mieux informés avant de signer au bas de la page.

Je m'adresse maintenant aux représentants des grains de l'Ouest. Vous avez dit que l'accès au marché était plus important que jamais. Que pouvons-nous faire cette fois-ci pour améliorer votre accès? Que pouvez-vous faire pour nous aider?

M. Larry Maguire: Pour l'accès au marché, dans l'ouest canadien, on nous a dit qu'il n'y a plus de subvention du Nid-du-Corbeau et, évidemment, nos agriculteurs le savent. Donc, au fur et à mesure que nous progressons et que nous voyons le genre de changement auquel nous sommes confrontés, nous ne pouvons plus continuer la production agricole avec des frontières fermées. Nous devons très bien comprendre les appuis qui existent dans le système canadien—et nous allons peut-être l'expliquer détails en plus lors de la séance sur le revenu. Comme je l'ai dit plus tôt, nous exportons 80 p. 100 de notre produit, alors c'est très important. Cela a un impact certain pour nous, mais nous ne pouvons pas influencer les décisions de nos homologues. Je parle de l'Union européenne et des États-Unis.

Mme Rose-Marie Ur: Exactement.

M. Larry Maguire: On peut toujours se plaindre des subventions qu'ils accordent à leurs agriculteurs, et on le fait. Je me suis rendu à Washington et je me suis plains là-bas également. Mais en fin de compte, nous devons nous assurer que quoi que nous fassions comme développement commercial et comme programme de soutien soit classé dans la boîte verte, et qu'il soit clair qu'un secteur ne reçoit pas d'avantages au détriment d'un autre et que cela donne à nos agriculteurs le plus de chances possible pour leur permettre de s'intégrer dans des domaines de production et d'avoir la capacité d'exporter leurs produits à l'étranger ou dans ce cas-ci, chez nos voisins américains, comme je l'ai mentionné plus tôt.

Donc, nous avons besoin d'une frontière—et je ne veux pas simplement dire la frontière américaine ou la frontière que constitue la Commission canadienne du blé—mais une frontière à la clôture de la ferme, au seuil de notre porte. Nous devons pouvoir mieux gérer notre affaire et cela signifie des réformes à la Commission canadienne du blé pour ce qui est des réactions de marketing dans ces domaines-là. Cela signifie un système beaucoup plus concurrentiel que celui où nous avons aujourd'hui dans le secteur du transport ferroviaire pour déplacer nos denrées vers les marchés étrangers également.

Mais cela signifie également un meilleur accès au secteur de gestion de l'offre que nous avons déjà, avec tout le respect que je lui dois. Nous avons les grains les moins chers, et nous devons pouvoir les commercialiser.

Le président: Merci.

Monsieur Breitkreuz.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Merci, monsieur le président.

J'espère que ces discussions seront fructueuses. Je suis ici à écouter, et il me semble que chacun a ses idées bien arrêtées. Les producteurs laitiers ont fait la remarque qu'il n'y avait pas eu de concession parmi les divers secteurs agricoles lors de la dernière ronde de négociations. Etes-vous tous d'accord avec cette affirmation?

• 1020

M. Larry Maguire: Je peux répondre le premier, monsieur Breitkreuz. J'y ai fait allusion plus tôt.

Dans le secteur du grain, nous avons perdu 550 millions de dollars à cause de la perte de la subvention du Nid-du-Corbeau. Malgré ce que j'ai dit plus tôt, nos amis de la gestion de l'offre ont perdu l'article 11. Ils sont confrontés à une tarification et des réductions de tarification. Nous croyons que les réductions devraient continuer, non seulement dans leur secteur mais partout au monde dans les domaines qu'ils ont indiqués là où si nous ne pouvons pas pénétrer ces marchés, nous devons avoir cette capacité.

Certaines des directives dont Richard a parlé plus tôt doivent devenir des règles. Elles deviendront des règles lors de la prochaine ronde afin que nous puissions augmenter notre accès au marché de 3 p. 100. Cela a certainement permis au Canada de progresser énormément dans le domaine de l'exportation des produits agricoles depuis 1995. Cela va certainement continuer de nous permettre de progresser vers ces cibles d'exportation comme ce fut le cas pour une grande partie de l'industrie. Pour les produits transformés, ces exportations sont passées de 20 milliards de dollars à 40 milliards de dollars. Nous espérons pouvoir faire la même chose.

Évidemment, dans notre secteur, nous estimons que nous avons payé le prix fort. Pour ce qui est du transport, nous avons été aussi orientés vers le marché que nous le pouvions. Je suppose que nous estimons qu'il pourrait y avoir plus de concurrence dans ce domaine. Mais puisqu'une subvention très importante est disparue, nous comprenons qu'elle satisfaisait les besoins de toutes nos autres mesures globales de soutien étant donné où nous en sommes dans cette ronde. Les producteurs de blé des Prairies croient qu'ils ont payé ce prix.

M. John Pigott: Nous avons été perdants dans l'industrie de la seconde transformation. Nous avons perdu notre protection tarifaire dans l'ACCEU à compter de 1988. Le résultat final de tout cela c'est que nous sommes une industrie plus importante que nous l'étions à l'époque. Nous avons grandi. Nous avons été forcés d'apprendre à trouver des marchés aux États-Unis. Cela nous a été très profitable. Nous faisions partie des concessions et comme je l'ai dit plus tôt, c'est la meilleure chose qui ait pu nous arriver.

Cela a nui au secteur du blé. Il n'avait pas l'attitude nécessaire pour faire concurrence. Une compagnie s'est fait dire que nous allions disparaître en moins de deux ans; et pourtant nous sommes là aujourd'hui avec trois usines de plus qu'à cette époque-là. Nous employons beaucoup plus de Canadiens et nous achetons beaucoup plus de produits agricoles dans ce pays. Nous avons appris à nous faufiler dans les méandres propres aux États- Unis. Quand il faut procéder ainsi, il faut faire attention car la marge de manoeuvre est très faible là-bas. Quand on veut valser avec les géants, il faut danser vite, mais il y a quand même de la place sur la piste.

M. Larry Maguire: Si je puis ajouter un mot, j'espère que vous songez aux producteurs de blé de l'Ontario quand vous parlez de cela.

M. John Pigott: Je me sers beaucoup de leur blé dur.

M. Garry Breitkreuz: À mon avis, le gouvernement doit voir la situation dans son ensemble et ne pas se contenter de servir les intérêts de quelques groupes particuliers. Vous pouvez constater qu'il y a toutes sortes de tensions autour de la table.

M. John Pigott: Certainement.

M. Garry Breitkreuz: Lorsqu'on siège à un comité comme celui-ci, on se rend compte tout de suite qu'il y a des problèmes. Nous nous disputons entre nous.

M. John Pigott: Vous savez cependant que la meilleure chose à faire serait que nous cessions de nous disputer.

M. Garry Breitkreuz: En effet.

M. John Pigott: Les producteurs canadiens doivent être plus tenaces que les autres. Ceux qui sont au deuxième rang doivent toujours essayer plus fort que les autres. La taille des autres ne veut pas dire qu'ils sont meilleurs que nous et je songe à cet égard aux Européens et aux Américains. Nous avons une attitude positive et nous sommes convaincus de pouvoir travailler, communiquer et vendre ensemble. Nous réussissons lorsque nous sommes prêts à collaborer. Cependant, quand nous nous disputons à cause des structures que nous avons adoptées, je me sens frustré.

Tout ce que je veux faire, c'est vendre plus. Je suis boulanger. Je veux pouvoir vendre plus de tartes. C'est tout.

M. Garry Breitkreuz: En effet. Est-ce que ce n'est pas le rôle du gouvernement de faire ce qu'il y a de mieux pour le pays?

M. John Pigott: C'est vrai, mais ceux qui évoluent sur la scène politique doivent cesser de faire des choses contradictoires.

M. Garry Breitkreuz: Oui.

M. John Pigott: Vous devez prendre des décisions difficiles parce qu'il n'existe pas de solutions faciles à certains de ces problèmes. Plus vite vous commencerez le traitement, plus ce sera facile. Nous remettons constamment à plus tard et les choses deviennent de plus en plus compliquées.

M. Garry Breitkreuz: Oui. Cela fait seulement cinq ans que je fais de la politique et je n'avais pas d'expérience dans ce domaine auparavant, mais nous avons accueilli devant le comité des groupes qui avaient peur de dire la vérité. Ils ne nous disent pas exactement ce qu'ils pensent. Ils sont bien gentils et bien polis, mais ils ne nous disent pas de cesser de faire souffler le chaud et le froid. Il est temps qu'on le fasse. Cela me frustre énormément.

M. John Pigott: Je pourrais dire autre chose, mais je ne le ferai pas.

M. Garry Breitkreuz: Pourquoi pas? Je ne fais que critiquer certains des groupes qui viennent témoigner devant le comité. Ils ne nous disent pas ce qu'il en est.

M. John Pigott: Que pensez-vous de notre négociateur à Genève? Nous ne voulons pas céder sur telle chose et sur telle autre chose. Ce n'est pas étonnant que nous ayons l'air de boy scouts.

M. Garry Breitkreuz: Oui.

Le président: Merci. Monsieur McGuire.

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Merci, monsieur le président.

Selon moi, les négociateurs commerciaux d'autres pays soufflent le chaud et le froid beaucoup mieux que nous parce qu'ils ont toutes sortes de denrées qu'ils considèrent comme étant spéciales et qu'ils veulent protéger. Si nous voulons encore une fois jouer le rôle de boy scouts et renoncer à notre positon équilibrée pour autre chose, vous demanderez plus tard pourquoi nous l'avons fait. Tout ce qu'il nous reste à céder, c'est la tarification basée sur la gestion de l'offre. C'est tout.

• 1025

Pour les producteurs de céréales, il ne reste pas grand chose à céder. Nos subventions représentent quoi, 15 p. 100 de la production par rapport à 52 p. 100 ou à 136 p. 100 pour les Européens? Si les pays qui nous font concurrence, si les importateurs de nos céréales veulent cesser d'importer, ils trouveront toujours un moyen de le faire.

Ce dont on n'a pas parlé d'après moi dans la plupart des discussions sur l'industrie des céréales et des graines oléagineuses c'est la façon dont nous pourrions faire disparaître les obstacles phytosanitaires et non tarifaires à notre commerce lors de la prochaine série de négociations, ces choses que nous avons négociées de bonne foi avec les États-Unis et les pays d'Europe.

On ne peut pas exporter de canola en Europe. Les pays européens refusent d'importer le canola parce qu'ils ne sont pas d'accord avec les changements biotechnologiques que nous y avons apportés. Si je ne m'abuse, personne jusqu'ici n'a dit ce que nous devrions faire aux prochaines négociations relativement aux obstacles non tarifaires, qu'ils soient phytosanitaires, ou bien reliés à la santé, à l'environnement ou autre chose.

Comme nous n'avons pas vraiment beaucoup d'obstacles à l'exportation ou de subventions pour les producteurs de graines oléagineuses, comment pouvons-nous nous attaquer à cet autre problème, c'est-à-dire à ce qui vous empêche d'exporter vos récoltes?

M. Larry Maguire: C'est très simple. C'est pour cela que nous tenons tellement à garder de l'ordre relativement au subventionnement du secteur des grains et à appliquer les règles du GATT. Que nous aimions ou non le système de commercialisation par un office, nous avons réalisé des gains relativement au contrôle que nous exerçons sur le blé dur. Les Américains ont déjà fait des réclamations au sujet de ces contrôles. Ils l'ont fait dans divers domaines. Le Canada a eu gain de cause dans la plupart des cas et nous pensons que nous aurons aussi gain de cause à l'avenir si nous continuons de respecter les règles.

C'est pourquoi je pense qu'il est beaucoup plus important pour le Canada de respecter les mêmes règles commerciales que la Nouvelle-Zélande, l'Australie et certains autres pays que de jouer une guerre de subvention avec l'Europe et les États-Unis. Les Européens voudraient venir au Canada parce qu'ils savent que leurs programmes de subvention ne dureront peut-être pas indéfiniment et qu'ils pourraient transformer leurs opérations en capitaux, venir au Canada et acheter quatre fois plus de terrains dans un climat beaucoup plus ouvert que celui de l'Europe, et c'est ce qu'ils font. C'est un aspect de notre système.

Notre vice-président voudrait dire quelques mots à ce sujet.

M. Kevin Archibald (premier vice-président, Western Canadian Wheat Growers Association): Si je peux dire un mot, monsieur McGuire, au sujet de votre question quant aux obstacles non tarifaires au commerce, je vous dirais que c'est très difficile pour un pays aussi petit que le Canada de faire valoir une telle position aux négociations.

Il nous faut probablement un allié dans ce domaine. Nous collaborons très bien avec les États-Unis, qui ont certaines des mêmes inquiétudes que nous. Ils ont aussi mis au point des organismes modifiés sur le plan génétique qu'ils ont un peu de mal à exporter en Europe. La chose qui serait donc probablement la plus utile pour nous pour négocier la levée de cet obstacle non tarifaire aux organismes génétiquement modifiés serait de former une alliance avec un autre pays.

Vous dites que nous n'avons rien à offrir en échange. Pourtant, nous avons encore une entreprise commerciale d'État qui cause beaucoup de tort relativement à l'accès au marché. Il faudrait probablement voir ce qu'on peut faire relativement à la transparence des prix dans le cas de cette entreprise commerciale d'État. C'est certainement un point de litige pour les producteurs américains, sans parler de l'accès réciproque.

Les Américains n'ont pas l'impression d'avoir accès au marché canadien alors que nous, nous avons accès au marché américain, et nous devrons traiter de cette question lors des prochaines négociations. Nous devons nous assurer que tous jugent que tous les producteurs ont un accès réciproque.

M. Joe McGuire: Merci.

Il y a quelques semaines, un témoin a parlé du fait qu'il voit toutes sortes de fromages étrangers à l'épicerie. Il se demandait pourquoi nous importons tellement de sortes de fromages étrangers au Canada par rapport au fromage canadien. Comment pouvons-nous permettre une telle chose?

M. Richard Doyle: Ce sont les importations traditionnelles. La quantité de fromage importée au Canada est fixée à un peu plus de 20 000 tonnes. Cette limite est fixée depuis 20 ans. La limite est toujours la même; c'est une limite traditionnelle.

Il y a une chose que je voudrais dire à ce sujet. Vous soulevez un point intéressant, mais j'espère que vous ne voulez pas parler à ce sujet de ce que nous serions prêts à céder. Le fait est que les systèmes américain et européen causent beaucoup plus de distorsion commerciale. Ils ont beaucoup plus de contingents reliés aux tarifs et beaucoup plus de subventions que le Canada. C'est à eux de respecter les règles. Pourquoi devrions-nous leur offrir quelque chose en retour?

• 1030

Nous avons négocié avec les Européens; nous en parlons dans notre mémoire. Quand nous avons négocié l'accès au marché avec les Européens, ils nous ont offert un accès relatif à leur engagement de 3 p. 100 selon lequel nous devions payer des frais de 4 000 $ la tonne pour le fromage cheddar. C'est l'accès minimum de 3 p. 100 que les Européens nous ont offert. C'était absolument insensé et nous avons donc négocié. Savez-vous ce que les Européens nous ont offert? Une tonne en retour d'une tonne. Ils nous ont donc donné accès pour 1 400 tonnes, ce qui était le niveau traditionnel de nos exportations vers l'Europe, et nous avons dû leur garantir 1 225 tonnes de plus. Vu la taille de notre marché, nous ne pouvons pas gagner grand-chose si c'est ainsi que les pays plus gros que le Canada veulent négocier.

Je suis donc d'accord pour dire que nous avons besoin d'un accès réciproque. S'ils nous donnent accès à 3 à 5 p. 100 de leur marché, et nous ferons la même chose. Nous devrions mettre de l'ordre dans la situation et régler la question d'accès une gamme de produits à la fois et un produit à la fois.

Le président: Merci.

Juste avant de donner la parole à M. Hilstrom, je voudrais poser une question à M. Pigott et à quiconque d'autre voudra y répondre. Vous savez, monsieur Pigott, on accuse très souvent les gens en politique de souffler le chaud et le froid. C'est peut-être vrai dans le domaine de l'agriculture parce que cette industrie regroupe des secteurs très disparates. Ce que vous considérez comme une bonne chose pour votre parti de l'industrie agricole n'est pas nécessairement accepté par les secteurs qui ont un système de gestion de l'offre. Il peut aussi s'agir d'une divergence de vues pour des raisons philosophiques.

C'est toujours facile de faire des affirmations, mais que feriez-vous à la place des membres du comité qui doivent représenter non seulement votre industrie, mais aussi celles où il existe un système de gestion de l'offre? Voudriez-vous simplement vous débarrasser de la gestion de l'offre? Diriez-vous simplement à M. Doyle et à M. Bertoia qu'ils ont tort et que vous n'allez pas représenter leurs intérêts? Que feriez-vous, monsieur Pigott?

M. John Pigott: Je ferais ce que nous avons fait. Nous avons simplement dit: «Il faut trouver une façon d'être concurrentiels Comment pouvons-nous réduire les coûts de notre système?»

Le président: Je ne pense pas que cela répond à ma question. Je voudrais savoir ce que vous allez dire à M. Doyle, qui n'est pas d'accord avec votre façon de voir les choses. Il veut un système de gestion de l'offre, mais pas vous. Mettez-vous à la place des députés.

M. John Pigott: Je n'ai jamais dit que je ne voulais pas d'un système de gestion de l'offre, monsieur le président. J'ai réclamé une réforme de la gestion de l'offre. Comment pouvons-nous faire en sorte que la gestion de l'offre réagisse plus facilement aux forces du marché? Plus nous aidons les systèmes de gestion de l'offre à réduire leurs effets nocifs pour la concurrence, mieux ils fonctionneront parce que nous voudrions pouvoir acheter notre lait le plus près possible de nos usines. Nous voudrions pouvoir acheter notre poulet le plus près possible de nos usines et acheter des produits canadiens parce que les Canadiens sont aussi mes consommateurs. Je veux leur vendre des pâtés au poulet. C'est à leur avantage de favoriser la prospérité du secteur agricole canadien. Il faut instaurer un peu de discipline dans l'industrie.

Le président: Je comprends, mais je voudrais que vous puissiez aider Mme Ur, M. Hoeppner, ou M. Hilstrom ou moi, par exemple. Dans la circonscription de Mme Ur, il y a beaucoup de producteurs qui ont un système de gestion de l'offre. J'ignore combien de temps elle durerait en politique si elle optait pour votre façon de voir les choses ou bien dans quelle mesure elle aurait le respect de ses électeurs. Vous devriez l'aider.

M. John Pigott: J'en serais ravi. J'offre depuis longtemps d'aller parler à tout conseiller de comté et de lui expliquer que la façon de réduire ses coûts serait soit d'avoir plus de vaches dans son étable ou bien d'avoir plus de poulets dans son poulailler. La seule façon de le faire... La population ne fait qu'augmenter...

Mme Rose-Marie Ur:

[Note de la rédaction: Inaudible]... où ils sont, n'est-ce pas?

M. John Pigott: Non, le marché canadien ne fait qu'augmenter en fonction de la croissance démographique. Nous devons donc exporter. C'est la seule façon pour notre entreprise de prendre de l'expansion. Si nos entreprises peuvent prendre de l'expansion et réduire leurs frais généraux, elles seront plus concurrentielles. Je ne vous demande pas de vendre moins cher. Vous aurez la même marge de bénéfice.

Mme Rose-Marie Ur: Posez la question aux producteurs de porc.

M. John Pigott: Les producteurs de porc ont-ils participé au programme tripartite de stabilisation récemment? Non. Ont-ils contribué à la caisse pendant les périodes de prospérité? Non. Vous ne pouvez pas prendre uniquement le bon grain sans prendre aussi l'ivraie. Si vous voulez jouer sur le marché, vous devez aussi accepter les mauvaises surprises. C'est ce que je fais tous les jours. Si je ne peux pas vendre à Loblaws, j'aurai certainement des problèmes, et le seul endroit où je pourrais me plaindre sera à ma propre salle du conseil.

Le président: M. Doyle voudrait intervenir.

M. Richard Doyle: On a beaucoup parlé de réformes. Je vous ferai remarquer que M. Pigott obtient les produits laitiers à des prix américains concurrentiels et toujours sur demande. Voilà qui constitue une des réformes de la gestion de l'approvisionnement.

M. John Pigott: Richard, jusqu'à quel point vous a-t-il fallu vous battre pour cela pendant ces 12 années? C'était la croix et la bannière.

M. Richard Doyle: Vous, vous l'avez. Vos produits ne sont soumis à aucune restriction commerciale. Vous pouvez vous approvisionner autant que vous voulez à des prix concurrentiels.

M. John Pigott: Non.

M. Richard Doyle: Si. Désolé, mais c'est la vérité, et nous le savons.

M. John Pigott: Les prix sont beaucoup plus proches, mais ils ne sont pas...

• 1035

M. Richard Doyle: Monsieur le président, j'aimerais faire un commentaire auquel vous pourrez réagir.

Vous avez mentionné le transport, et on nous a même posé une question là-dessus. Nous avons démontré avoir été en mesure de réduire les coûts de transport du lait au Canada. Notre système de transport est l'un des plus poussés qui soit. Nous avons réduit les coûts. Mais lorsque nous demandons aux transformateurs de second cycle de mettre tous les chiffres sur la table pour nous prouver qu'ils sont aussi rentables que nous, ils refusent. Ce n'est pas là le genre de partenariat que nous souhaitons avoir à l'avenir.

Le fait est que vous, vous êtes à la table, au comité des ingrédients et dans le système de mise en commun; or, chaque fois que nous tentons de mettre au point des programmes d'exportation et d'avoir une stratégie à l'exportation comme celle que les producteurs ont adoptée en optant pour les programmes d'exportation optionnels, les transformateurs refusent. Cessons de nous leurrer et regardons les choses en face.

Le président: Je crois que M. Archibald veut intervenir. Je n'avais pas l'intention de laisser entrer le loup dans la bergerie, mais la discussion des deux ou trois dernières minutes reflète bien le type de problème que doit résoudre le gouvernement. Vouloir représenter des intérêts aussi disparates équivaut parfois à la quadrature du cercle.

Je suis peut-être trop sensible comme politicien, mais lorsque nous nous sentons obligés de tirer à hue et à dia, pour pouvoir représenter vos intérêts à tous deux, monsieur Pigott et monsieur Doyle, cela peut finir par en rebuter quelques-uns.

Monsieur Archibald.

M. Kevin Archibald: Merci, monsieur le président.

Vous avez fait des commentaires très intéressants, et vous avez raison de demander comment nous pouvons vous aider à remplir votre rôle de politicien. J'aimerais vous proposer de regarder la situation sous un angle plus large.

Ainsi, lorsque vous parlez de supprimer la subvention au transport du grain au titre de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, je suggère de ne pas tenir compte de certaines des économies qui seraient réalisées grâce à la réforme du transport, et de ne pas toucher à la réforme de la Commission canadienne du blé. En effet, si nous déréglementions complètement le système, la compétitivité signifierait pour l'industrie laitière qu'elle se retrouverait concentrée dans le sud du Manitoba plutôt que dans l'est du Manitoba comme c'est le cas actuellement, car c'est dans le sud de la province que les céréales coûtent le moins cher.

Pour bien comprendre ce qui se passerait, les politiciens doivent étudier de près le système et se demander quelles seront les répercussions de ce qu'ils proposent, quitte à offrir des indemnisations au besoin. Or, cette indemnisation ne devrait pas se traduire en sommes versées, mais en programmes ou en mesures législatives qui pourraient devoir être modifiés, comme c'est le cas pour le monopole de la Commission canadienne du blé.

Autrement dit, nous serions beaucoup plus concurrentiels si, à la lumière des réformes que vous avez instaurées dans le secteur du transport et dans la mise en marché des céréales, ce monopole était supprimé.

M. Doyle disait plus tôt que le risque du marché était renvoyé à l'agriculteur, sauf dans les industries soumises à la gestion de l'offre. C'est vrai. Mais pour le céréaliculteur des Prairies, la difficulté vient de ce qu'il ne peut gérer lui-même ce risque. Le système de mise en commun de la Commission canadienne du blé ne gère pas le risque de prix pour les agriculteurs. Les agriculteurs sont autorisés à le faire eux-mêmes, mais ils n'ont pas l'outillage qu'il faut.

Le président: Merci.

Avant de céder la parole à M. Hilstrom, je voudrais signaler la présence de deux visiteurs distingués de la Russie. Il s'agit du professeur Sergei Nickolsky, conseiller au président du Conseil de la Fédération de la Russie, et du professeur Pavel Fomitchev, professeur associé à l'Université d'État de Moscou.

Soyez les bienvenus. Comme vous avez pu le remarquer à la lumière de la discussion des quelques dernières minutes, nous ne parlons pas tous à l'unanimité; toutefois, c'est peut-être cette diversité d'opinions qui fait notre force.

Monsieur Hilstrom.

M. Howard Hilstrom: Merci, monsieur le président.

J'ai l'impression que M. Archibald a mis le doigt sur le problème lorsqu'il a dit qu'au fond, il est possible de créer une économie artificielle, et je crois que ce qu'il dit s'applique à la gestion de l'offre. La gestion de l'offre se fonde sur la part détenue traditionnellement par telle ou telle entreprise sur le marché canadien, n'est-ce pas?

M. Richard Doyle: En effet, on peut parler de la part traditionnelle du marché, mais cette part a évolué énormément au fil des ans. Cette part du marché se retrouve aujourd'hui dans un système de mise en commun et cela sert aujourd'hui à déterminer de la façon dont le marché national est partagé en deux régions.

M. Howard Hilstrom: Bien. Voilà ce qui fait la base de notre discussion. Pendant longtemps, c'était surtout l'Ontario et le Québec qui utilisaient, et utilisent toujours, les programmes de gestion des approvisionnements. Même si les autres provinces arrivent à produire du poulet ou un autre produit soumis à la gestion de l'offre avec un avantage comparatif, elles ne peuvent rien faire puisque les programmes de gestion des approvisionnements sont centralisés entre les mains du gouvernement fédéral, comme le prévoit la loi créant la gestion des approvisionnements. Ai-je bien compris?

M. Richard Doyle: On ne contrôle pas la production. Nous partageons tous un marché national, mais si les agriculteurs veulent produire plus, ils le peuvent.

• 1040

La Saskatchewan ne produit pas à hauteur de son quota, même pour le marché canadien. Or, on n'arrête pas de dire que tout le secteur est concurrentiel. Mais visiblement, la façon dont la production a évolué au fil des ans explique que la céréaliculture soit plus rentable dans l'Ouest et que ce soient d'autres types d'agriculteurs qui sont plus rentables dans l'est ou dans le centre du Canada.

M. Howard Hilstrom: Je m'éloigne un peu de l'industrie laitière. Nous parlons ici d'élargir la gestion des approvisionnements. Vous savez fort bien ce que pense le Manitoba de la gestion de l'offre appliquée aux oeufs et au poulet, entre autres choses. Le Manitoba veut pénétrer ce marché d'exportation. En effet, la demande existe dans la province, mais elle n'est pas comblée. D'après ce que dit notre ministre de l'Agriculture, le Manitoba fait tout pour essayer de combler la demande, quoi qu'il arrive.

Or, l'OCCO—soumis à la gestion de l'offre—refuse. La loi permet à un secteur soumis à la gestion de l'offre de choisir où il ira chercher d'abord ses oeufs, même s'il lui arrive de concéder qu'il existe un nouveau marché dans une autre province; autrement dit, la loi permet à l'OCCO de combler ses besoins d'abord où elle veut, quitte à se tourner plus tard vers un nouveau marché, mais seulement si le besoin existe encore.

Ne pensez-vous pas qu'il s'agit là d'un système inefficace inadmissible dans une économie moderne mondiale?

M. Richard Doyle: Le système permet au producteur qui décide d'exporter de le faire. C'est l'un des éléments clés des réformes instaurées en 1993 et 1994, qui a démarré en 1995. Je sais que l'industrie du poulet et l'industrie ovocole se sont demandé comment fonctionnait notre système et sont en période de réflexion. Je n'ai rien à dire là-dessus.

Cela m'embête d'entendre parler de gestion de l'offre et de compromis. L'OMC n'accepte pas la gestion de l'offre. Or c'est là qu'ont lieu les discussions entourant les négociations commerciales. Nous consacrons beaucoup de temps aux politiques canadiennes. La façon dont nous modifierons nos politiques canadiennes ne nous aidera pas nécessairement lorsque nous aurons à négocier avec les États-Unis et les Européens. Ces derniers ne veulent pas parler des contingents tarifaires. Ce qui les intéresse, ce sont les tarifs, les SPS et les entreprises commerciales d'État. Attendons de voir ce qu'ils sont prêts à négocier. La gestion de l'offre ne relève plus de l'article 11.

M. Howard Hilstrom: Monsieur Doyle, ne convenez-vous pas que de parler de gestion de l'offre fait partie des négociations commerciales pour la simple raison que cette même gestion de l'offre est contestée par d'autres pays?

M. Richard Doyle: Non. Ce que je dis, c'est que l'industrie laitière de 34 pays est protégée. Or, il existe 36 pays qui négocient les questions agricoles, dont 34 protègent leur secteur laitier. C'est un fait, et les céréales n'ont rien à voir avec cela: 34 pays ont à décider ce qu'ils feront de leurs industries. Après tout, il s'agit de la denrée la plus subventionnée du monde. De plus, il n'y a que 5 à 6 p. 100 de la production mondiale de produits laitiers qui fassent l'objet d'échanges commerciaux. Le tableau peut changer complètement sur le marché mondial selon qu'un pays considère son industrie laitière de telle ou telle façon. Dans notre document, vous trouverez les tableaux qui vous donnent tous les chiffres.

On ne peut pas tout simplement dire «faisons ce que nous faisons dans le porc et dans le laitier» ou «faisons ce que nous faisons dans le porc pour le côté laitier» ou «faisons ce que nous faisons pour les poules et la volaille dans le laitier». Il faut voir quels sont les marchés mondiaux, pas à l'interne, mais au niveau international, et ensuite décider comment on va se positionner pour la prochaine ronde de négociations commerciales pour veiller au mieux aux intérêts des Canadiens. C'est de cela qu'il s'agit.

Le président: Madame Alarie.

[Français]

Mme Hélène Alarie: À ce stade-ci, j'ai deux commentaires à faire, qui me sautent aux yeux ce matin. On est un pays qui a des objectifs assez importants en matière d'exportation de produits, avec les règles internationales. On reconnaît tout cela. Cependant, je constate plus que jamais ce matin qu'à l'intérieur d'un secteur très particulier, le secteur de l'agroalimentaire, il n'y a pas de communication verticale. C'est quand même une grappe industrielle. Quand on parle de ventes à l'extérieur, on parle du lait, mais aussi des produits qui subissent une première et même une deuxième transformation.

J'ai l'impression aujourd'hui qu'entre vous, il y en a qui ne se parlent à peu près jamais. C'est l'impression que j'ai. Je m'excuse de prendre toujours un très bel exemple, celui du Québec, mais on a constaté qu'il y a des gens qui ne s'étaient jamais parlé. J'ai aussi constaté que la méconnaissance dans un secteur de l'industrie est plus dommageable que tout le reste. En se parlant davantage, on se rend compte qu'on a plus d'affinités et on se comprend mieux.

Je me demande si, en tant que politiciens, on ne devrait pas forcer cette communication avant de parler de négociations internationales.

• 1045

[Traduction]

Le président: Laurie Curry.

Mme Laurie Curry: Merci, monsieur le président.

Voilà qui est intéressant. Et nous sommes coupables de cela aussi pour ce qui est d'avancer la cause des manufacturiers. De notre point de vue, nous avons passé énormément de temps à nous concentrer sur le détaillant et sur le consommateur pour voir comment on pourrait réduire les coûts du système. Nous avons donc une initiative majeure—une réaction efficiente de la part du consommateur.

Franchement, il faut faire cela en qualité de secteur entier. À vrai dire, il y a quelques mois, Richard Doyle et moi-même nous nous sommes assis pour parler exactement de cela au niveau de la gestion des approvisionnements pour voir s'il y aurait moyen de diminuer les coûts dans le système.

En réponse à votre question et pour revenir aussi à votre commentaire, ce qui nous manque ici c'est la vison pour le secteur agroalimentaire. En fait, la conclusion et tout ce dialogue, c'est que pour la première fois les producteurs nous appellent, à l'association que nous sommes, pour nous dire: «Si nous devions inverser la tendance pour que 60 p. 100 de nos exportations jouissent de valeur ajoutée, il nous faut nous concentrer davantage sur le marché; nous devons nous concentrer davantage au niveau du consommateur. Et, très franchement, en qualité de groupes de production, nous n'avons pas ce genre d'information. En qualité de secteur manufacturier et de secteur du détail, qui sont aussi vos associés, ne pourrait-on pas se rencontrer?»

Il faut se demander comment faire pour nous axer sur le marché; comment attirer l'attention du consommateur; comment faire pour obtenir l'innovation et la croissance dans ce secteur pour tous; comment s'y prendre pour arriver à une vision à la fois pour le marché intérieur et pour le marché d'exportation. Voilà qui pourrait être le point de ralliement et lorsqu'on se tournera vers la vision de l'avenir, on pourra commencer à se demander comment y parvenir plutôt que d'avoir à se battre rétrospectivement avec la situation actuelle.

[Français]

M. Richard Doyle: Je ne suis pas en désaccord avec Mme Alarie, mais malheureusement, je dirais que le dialogue n'est peut-être pas aussi bon qu'il devrait l'être. Des ententes se sont faites entre les producteurs et les transformateurs, dans le passé, ce qui a permis beaucoup plus de stabilité et beaucoup moins de disputes. J'espère qu'on n'aura pas à demander au premier ministre du Canada d'intervenir dans des débats entre producteurs et transformateurs, comme vous l'avez fait au Québec, bien que ce soit merveilleux.

Un des problèmes qui existent, et il faut en être conscient, c'est que les discussions que nous avons eues récemment avec les transformateurs et un peu avec les FPACC, car nous travaillons surtout avec le Conseil national de l'industrie laitière, sont malheureusement des discussions à sens unique.

Au niveau de la transformation, les gens tiennent pour acquis qu'ils ont fait des efforts pour réduire leurs coûts. Lorsqu'on leur démontre que nous avons réduit nos coûts avec des faits, des chiffres et des données très transparentes, nos données sont les seules qui sont sur la table.

Lorsqu'on discute d'approvisionnement de l'offre, on parle du niveau de production du producteur. On ne parle pas de l'effort des transformateurs. Ce n'est pas de l'information prioritaire. On ne parle pas des prix des détaillants. On ne parle pas des prix des grossistes. On parle strictement au niveau du producteur. Il s'agit donc d'une discussion à sens unique.

Les autres secteurs veulent parler strictement de ce que le producteur fait. Jusqu'à présent, ils n'ont jamais offert, dans ces discussions, des données démontrant les efforts qu'ils ont faits.

[Traduction]

Le président: Nous terminerons par une question de M. Hoeppner.

M. Jake Hoeppner: Merci, monsieur le président.

J'ai aimé ce commentaire de M. Doyle à propos des producteurs, qui pourraient se produire à des fins d'exportations. Vous êtes d'accord avec cela, n'est-ce pas?

M. Richard Doyle: Je suis d'accord que si un producteur décide de se lancer dans l'exportation et qu'il est bien informé sur ce que sont les prix à l'exportation ainsi que sur les risques, alors on devrait lui permettre de le faire. C'est en effet ce que dit le système.

M. Jake Hoeppner: Parfait. Pourquoi les producteurs de céréales n'auraient-ils pas la possibilité de faire cela donc alors?

M. Richard Doyle: Ne devraient-ils pas l'avoir? Certainement.

M. Jake Hoeppner: Merci beaucoup.

Je vais vous dire ce qui se passe sur la ferme. Nous avons 25 000 boisseaux de durum dans nos silos. C'était du numéro trois quand nous l'avons coupé. Nous en avons engrangé quelques voyages et il a été déclassé à cinq parce qu'on y a trouvé quelques graines avec de l'ergot. J'ai appelé mes gars et je leur ai dit de le laisser dans le silo.

Nous sommes donc allés du côté de Walhalla—et Larry sait où se trouve Walhalla—et ils nous ont offert 3,05 $ US pour ce durum, ce qui revient à quelque 4,50 $ du boisseau. Nous avons demandé un rachat de la Commission du blé. Savez-vous combien ils voulaient pour ce durum? 5,12 $. Maintenant, on est pris avec cette récolte dans nos silos à 1,57 $. Comment voulez-vous qu'on fasse nos frais? Voilà le problème que nous avons, nous les producteurs de céréales.

• 1050

Quand nous avons posé des questions à M. Hehn à ce propos, il a une semaine, il a répondu qu'ils avaient fait une erreur; ils veulent seulement 3,93 $ pour ce rachat. Ça ne tient toujours pas debout. Quelque chose ne tourne pas rond quand le prix initial revient à 30 p. 100 du prix prévu. Comment les producteurs de céréales sont-ils censés survivre? Répondez-moi.

M. Richard Doyle: Je ne répondrai pas à votre question au sujet des céréales. Je travaille dans le domaine laitier. Je pense que les agriculteurs doivent résoudre les problèmes de leurs propres denrées, pour le fonctionnement de leur système de commercialisation. C'est là l'une des choses que nous avons répétées devant ce comité.

M. Jake Hoeppner: L'Ontario l'a essayé. Ils n'ont pas reçu la permission.

M. Larry Maguire: Si vous me permettez un commentaire, nous sommes certainement influencés par le système de commercialisation des céréales dans l'ouest du Canada, mais pour beaucoup de nos membres, alors que leurs avantages du Nid-du-Corbeau n'existent plus, cette influence n'est pas plus importante que celle de la gestion de l'approvisionnement.

Disons très clairement que les coûts entrant de la gestion de l'approvisionnement ne constituent pas les coûts les plus importants pour un cultivateur de céréales qui cherche à faire une percée dans l'industrie. Les niveaux des quotas interdisent l'accès à ce système au sein du système. Pourtant on nous dit qu'on ne peut pas y participer pour exporter les matières premières du lait ou de la volaille tant nous trouvons des débouchés. Nos membres n'ont pas le droit de le faire, même si actuellement ils sont confrontés aux prix des céréales les plus bas de toute l'Amérique du Nord, ce qui offre, comme Kevin de le dire, un avantage, peut-être plus à la région des Prairies que ce n'était le cas dans les autres régions du Canada.

Ces niveaux de quotas et ces barrières internes ne changent pas à vue d'oeil au même rythme que les coûts. Voici pourquoi nous proposons qu'avant de se présenter avec une position aux négociations internationales, nous devrions à tout le moins mettre de l'ordre chez nous en ce qui concerne l'accès à ces produits dans nos propres programmes.

Malgré ce que je viens de dire au sujet de la disparition de l'article 11 et du fait que la vérification est en train d'être réduite, nous croyons que cela devrait continuer. Nous croyons que le projet de loi FAIR aux États-Unis en 1996 avait été conçu dans cet esprit-là, dans l'idée d'une réduction graduelle, malgré le fait que cet organisme aurait plus d'argent à la fin qu'au moment de son lancement. Pourtant, nos membres ne peuvent toujours pas utiliser ces produits qui existent maintenant et qui sont fortement contrôlés, même si nous trouvons des débouchés.

Le président: Merci.

Je voudrais poser la dernière question avant de lever la séance.

M. Pigott avait dit, et je pense que c'était un bon conseil de sa part, que les organisations devraient arrêter de se chicaner autant que possible et développer en quelque sorte un front commun. Le gouvernement, bien entendu, devra établir une position de base pour lancer les négociations qui devraient exprimer l'intérêt de toutes les organisations, même si les organisations ne sont pas d'accord entre elles.

Il y a une possibilité—je dirais non pas une possibilité, car c'est presque une certitude—qu'à la fin des négociations, quels que soient les résultats, tout le monde ne sera pas nécessairement content. Alors voici ma question, que je pose à quiconque voudra bien y répondre: Pouvons-nous vraiment nous attendre à former un fonds public commun avec le gouvernement au moment de lancer les négociations? Ou est-ce que les chicanes vont éclater même après que le gouvernement aura annoncé sa position dans les négociations? D'après moi, cela ne fera qu'aider nos concurrents et nos adversaires au moment des négociations.

Qu'en pensez-vous, monsieur Pigott?

M. John Pigott: En tant qu'ancien boulanger, je pense que je devrais essayer de régler mes démarches de concert avec mon syndicat. Nous essayons en quelque sorte d'obtenir les petits gains en premier. Si nous réussissons à accumuler d'autres gains pour notre secteur d'exportation en soutenant les initiatives du CCCPA et le reste, nous pouvons améliorer la compétitivité générale de notre secteur agroalimentaire.

Tout ce que nous pouvons faire à court terme pour régler les choses que nous pouvons contrôler à l'intérieur du pays nous sera utile pour parer aux éventualités. Certainement, les Européens et les Américains feront le plus gros volume de commerce, alors pourquoi ne pas travailler sur les choses que nous pouvons gagner au pays, et que nous pouvons réaliser sans la participation des autres pays. Cela nous facilitera certainement la tâche. Si nous pouvons faire transformer davantage de lait en fromage à la crème et produire davantage de hors-d'oeuvre, ce sera utile pour les agriculteurs de Richard. Si nous pouvons faire ces choses ensemble et créer de meilleures relations... Très franchement, sans l'aide de Richard pour les subventions aux exportations nous n'aurions pas un million de livres de hors-d'oeuvre à envoyer là-bas. Ça marche bien quand on travaille ensemble.

Une voix: Une subvention,

M. Richard Doyle: Nous ne subventionnons pas son exportation, monsieur le président.

Je pense qu'en réalité nous pouvons le faire, et j'ai bien confiance que les divers secteurs agricoles s'entendront enfin pour vous aider, les politiciens et le gouvernement, à conclure une entente.

• 1055

Nous avons tendance à nous livrer à des querelles intestines. Voilà ce que je voulais dire tantôt. Avec ou sans la gestion de l'offre, il y a des structures, des règlements.

Je crois qu'au fond ces négociations portent surtout sur les subventions aux exportations. Nous avons respecté 15 p. 100 de notre engagement. Les États-Unis et les Européens sont rendus à 60 p. 100 environ. Nous pouvons couper les subventions à l'exportation jusqu'à concurrence de 50 p. 100, 60 p. 100, 80 p. 100, 100 p. 100, ce qui d'ailleurs est notre position. Nous avons une position en commun: nous voulons faire éliminer toute subvention à l'exportation. Nous avons cela en commun. Nous voulons ouvrir l'accès et être certains que tout soit basé sur des règles. Alors faisons-le, puisque nous sommes tous d'accord.

Nous avons plusieurs autres points en commun au sujet des différentes denrées et des secteurs. Si nous pouvons aller au-delà du débat de la gestion de l'approvisionnement, du libre-échange, de l'exportation ou de la non-exportation, et formuler une positon de négociation, je pense que nous aurons une position en commun avant de nous y présenter.

Le président: Merci.

Merci à vous tous. Vos interventions étaient excellentes.

Nous allons faire une pause de cinq minutes, et ensuite nous reprendrons notre débat sur la situation du revenu agricole.