NDVA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS
COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 6 mai 1999
Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du CPDNAC, le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants.
Nous recevons deux groupes de témoins et nous avons ensuite à régler deux ou trois importantes questions de procédure dont nous nous occuperons à la fin, lorsque nous aurons le quorum. Mais nous pouvons commencer à entendre...
M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Voulez-vous le faire maintenant?
Le président: Je le ferais volontiers, mais nous ne sommes que cinq à être à l'heure. Nous ne dirons pas quels partis de l'Ouest sont en retard, mais enfin...
Nous accueillons M. Bill Matthews, vice-président de Bristol Aerospace. Bienvenue, monsieur Matthews. Merci de vous joindre à nous. Je suis sûr que vous avez une déclaration liminaire. Ensuite, nous passerons aux questions des députés.
M. Bill Matthews (vice-président, Marché et contrat, Bristol Aerospace Ltd.): Bonjour, monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le comité.
Je représente Bristol Aerospace Ltd. de Winnipeg, une composante clé de la Magellan Aerospace Corporation de Mississauga. Bristol et Orenda Aerospace sont les deux filiales de notre société mère, Magellan, qui sont impliquées dans la grande majorité des acquisitions du gouvernement canadien ainsi que dans des marchés publics conclus à l'étranger.
Je vais commencer par vous donner brièvement une vue d'ensemble des activités de Magellan et ensuite, je me concentrerai sur les trois volets du système d'acquisition du gouvernement canadien qui, à notre avis, requièrent de sérieuses améliorations. Pour explorer ces questions, je me fonderai principalement sur l'expérience que j'ai acquise chez Bristol.
Magellan Aerospace Corporation fournit toute une gamme de produits et de services à des avionneurs et des exploitants d'aéronef à travers le monde, dans le secteur commercial et dans celui de la défense. Magellan fabrique des composants de structure d'aéronef et de moteurs d'avion de première qualité et effectue des réparations et des révisions dans ses installations et services d'exploitation situés au Canada et aux États-Unis.
Parmi les produits que nous fabriquons, on peut citer des structures composites et métalliques, des pièces de moteur qui ont une importance critique, qu'elles appartiennent ou non au système rotatif, des systèmes de roquettes pour l'aérospatiale et la défense, ainsi que des systèmes d'objectifs télépilotés. Magellan applique ses compétences en ingénierie à la conception et au développement de produits ainsi qu'à la prestation de services, notamment des réparations et des révisions complexes de réacteurs et de moteurs industriels, ainsi que de composants de moteurs d'avion et de structures d'aéronef.
On trouve parmi nos clients des sociétés comme Boeing, la NASA, General Electric, Pratt & Whitney, Bombardier, Rolls Royce, Allied Signal et des exploitants comme Southwest Airlines, Airbus, Bell Helicopter, etc.—le gratin de l'industrie de l'aérospatiale—tout comme des organismes du secteur de la défense au Canada, aux États-Unis et à travers le monde. Magellan est une entreprise dont les actions sont cotées à la Bourse de Toronto.
J'aimerais n'aborder ce matin que trois sujets de discussion, et vous les voyez énoncés sur la première diapositive: diversification des modes de prestation de services, politique sur les profits et enfin, acquisition et politique.
La diversification des modes de prestation de services a été lancée en fanfare il y a quelques années. Auparavant, l'industrie avait pris un certain nombre d'initiatives qui allaient dans le même sens.
• 0905
Je pense que, mis à part une ou deux histoires à succès, cette
initiative s'est révélée largement décevante. C'est un exercice que
nous avons trouvé frustrant. Il s'est aussi révélé non rentable, étant
donné que l'industrie a dépensé beaucoup d'argent pour tenter de
répondre aux exigences officielles du gouvernement, pour ensuite
découvrir que ce n'était pas ce que le gouvernement voulait, après
tout, ou qu'il avait été décidé de ne pas donner suite.
Je pense qu'il est juste de dire que nous nous sentons quelque peu utilisés. On nous a utilisés pour générer des idées que le ministère a ensuite appliquées lui-même sans indemniser l'industrie, qui avait littéralement dépensé des millions de dollars pour répondre aux demandes du gouvernement.
Dans une large mesure, cela se résume, à mon avis, à deux choses. Premièrement, il n'est pas tout à fait clair qu'il existait la volonté politique nécessaire pour faire aboutir le projet. Ce qui est peut-être plus important, et certainement plus frustrant, c'est le fait que non seulement les documents d'acquisition décrivaient ce qui était requis, mais qu'au fur et à mesure que les choses avançaient et que vous dépensiez de plus en plus d'argent, on vous disait comment faire à tout instant. Cela se résumait essentiellement à dire: procédez exactement de la même manière que nous et faites-nous payer moins. La chose s'est donc révélée frustrante pour nous.
Je continue de penser que l'initiative est bonne, mais le processus doit définir ce qui doit être fait et laisser l'industrie utiliser son expérience et ses capacités pour décider comment le faire de façon efficiente.
En ce qui concerne le deuxième point, la politique sur les profits, c'est une politique qui est fondée sur le coût. Par conséquent, plus le coût est bas, plus le profit l'est aussi; plus le coût est élevé, plus le profit est grand. Ce n'est pas exactement le genre de contexte qui permet au gouvernement de faire des économies. De fait, tout le monde y perd. Le gouvernement y perd, les contribuables aussi, l'industrie également—tout le monde est perdant avec cette politique sur les profits.
J'ai utilisé un exemple simple pour essayer d'expliquer cela. Si quelque chose coûte 100 $, la politique sur les profits autorise un bénéfice d'environ 8 $, soit 8 p. 100, pour un prix de 108 $.
L'option B correspond à une situation où, d'une manière ou d'une autre, le fournisseur trouve un moyen de réduire le coût de 20 $ et de le faire tomber à 80 $. Il subit alors également une réduction de son bénéfice, et le prix tombe à 87 $. Cette option paraît très intéressante. Toutefois, étant donné qu'il n'est pas possible de récupérer l'argent investi pour réduire le coût, vous vous retrouvez en bout de ligne doublement pénalisé puisque votre bénéfice est également réduit, et l'on peut alors se demander où est l'incitatif et qui va accepter de faire cet investissement?
Une solution plus raisonnable serait l'option C, en vertu de laquelle l'industrie peut trouver des moyens de réduire le coût de 20 $—par exemple, en se rééquipant ou en investissant dans quelque nouvelle technologie—et peut aussi récupérer cet investissement, alors que le gouvernement bénéficie encore d'une réduction de prix équivalant à peu près à 16 p. 100.
Le président: Monsieur Matthews, lorsque vous parlez de cette politique sur les profits, c'est à la politique du gouvernement que vous faites allusion, n'est-ce pas.
M. Bill Matthews: Oui, c'est de la politique sur les profits du gouvernement qu'il s'agit. Si vous signez un contrat avec le gouvernement, vous devez respecter cette politique.
Le président: Merci.
M. Bill Matthews: Si vous examinez la deuxième série de chiffres, vous pouvez voir que les économies réalisées en suivant ce processus sont exactement les mêmes. Dans le cas A, on arrive à zéro; dans le cas B, à 20 $; dans le cas C à 20 $. C'est simplement la distribution des fruits du travail qui est en question.
Troisièmement, j'aimerais signaler au comité que pour me préparer à ma comparution, j'ai lu les 250 pages de témoignages des personnes qui m'ont précédé et j'ai remarqué...
Une voix: Et vous êtes resté éveillé?
M. Bill Matthews: Premièrement, je dois dire qu'il s'agit d'un excellent cours sur le système d'acquisition du gouvernement. C'est le côté positif. J'ai trouvé là de belles remarques sur l'excellence du système d'acquisition qui existe actuellement. Notamment, il a été souligné que la politique n'entrait d'aucune façon en ligne de compte, etc. et qu'en bout de ligne, il est impossible que ce soit les retombées industrielles qui aient le plus d'importance, et ainsi de suite.
• 0910
Eh bien, voici ce qu'il en est. Normalement, les exigences techniques
sont bien définies, voire trop, donc le manque de clarté n'est pas en
question. Les modalités commerciales sont toutes bien précisées. Quant
aux objectifs nationaux qui, je le rappelle, constituent l'un des
critères de sélection, ils sont mal définis, voire secrets. Ce sont
les éléments qui obligent l'industrie à dépenser beaucoup plus
d'argent. Toutes ces dépenses, naturellement, s'ajoutent à la facture.
Ce sont également des éléments qui entraînent la plupart des retards,
car il faut naviguer à vue. Vous savez quelles sont les exigences
techniques, ce que le prix devrait être et comment on va procéder pour
conclure un contrat avec vous, mais vous n'avez aucune idée des
véritables critères qui seront appliqués quand l'affaire ne sera plus
entre les mains de tel ou tel ministère.
Nous ne rejetons pas le principe selon lequel, dans une démocratie, les représentants élus et le gouvernement en place jouent un rôle de premier plan lorsqu'il s'agit de prendre des décisions. Le problème n'est pas là; nous ne remettons pas cela en question. Nous voudrions simplement savoir quels sont les critères sur lesquels s'appuieront ces décisions avant de dépenser 3 à 4 millions de dollars pour faire partie des candidats à un programme.
Alors, si l'un des critères est que 10 p. 100 des travaux doivent être effectués dans l'Ouest, pourquoi ne pas le dire franchement? Si 50 p. 100 doivent être réservés au Québec, qu'on le dise, nous le saurons et nous planifierons en conséquence. Mais être au mis au courant de ces conditions une fois que l'on a perdu le contrat est inacceptable, à notre avis.
Le président: Une précision; lorsque vous parlez des objectifs nationaux est-ce que vous faites allusion aux contrats eux-mêmes ou à la politique générale de défense?
M. Bill Matthews: Les objectifs officiels du gouvernement en matière d'acquisition, par ordre d'importance d'après les témoignages précédents sont: les besoins opérationnels; le meilleur rapport qualité-prix; les retombées industrielles et régionales à long terme; d'autres objectifs nationaux; et le soutien d'entreprises canadiennes. Nous comprenons, je pense, ce que recouvre les besoins opérationnels, mais pour ce qui est des retombées industrielles et régionales ainsi que des autres objectifs nationaux, qui peut savoir ce dont il s'agit? Ce sont des critères qui ne sont pratiquement jamais définis, mais qui peuvent avoir une grande force de persuasion lorsqu'on en arrive à la décision finale.
Le président: Vous aimeriez donc connaître ces critères, dans la mesure où ils s'appliquent à un contrat pour lequel vous faites une offre.
M. Bill Matthews: Exactement.
Le président: Bien. Je veux simplement que les choses soient claires. Merci.
M. Bill Matthews: Alors, pour résumer, si je peux me permettre de faire des recommandations—même si elles ne sont pas très précises, notamment en ce qui a trait à la diversification des modes de prestation de services—il faut franchement définir la situation dans son ensemble de façon plus exhaustive et plus claire. S'il faut que toute la main-d'oeuvre existante soit employée, qu'on le dise, et ainsi de suite. Si nous sommes tenus d'utiliser les installations existantes, il faudrait que cela soit précisé quand, en bout de ligne, c'est un critère de sélection.
En ce qui a trait à la réduction des coûts, il serait très facile d'offrir des incitatifs à cette fin. À l'heure actuelle, ce n'est pas... Selon les règles en vigueur, il s'agit d'une exception à la politique.
Pour conclure, il est difficile de fonctionner dans un environnement concurrentiel lorsque seules quelques-unes des règles qui s'appliquent sont connues.
Le président: Merci beaucoup.
Je m'adresse aux députés. Nous avons une motion dont nous pourrions nous occuper maintenant, avant de passer à l'audition du deuxième groupe de témoins et ensuite, aux questions. Étant donné que cette motion porte sur la procédure qu'entend suivre le comité pour interroger les témoins, je serais d'avis que nous nous en occupions maintenant. Nous avons le quorum. Habituellement, nous ne nous réunissons pas dans cette pièce. Nous essayons d'éviter cela autant que possible mais aujourd'hui, nous n'avons pas pu; cela explique que certains députés aient été un peu en retard.
Je remercie M. Matthews et je demanderais simplement aux représentants de Sikorsky de patienter un peu.
Passons à la motion dont M. Pratt a donné préavis il y a une semaine. Je lui donne la parole.
M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.
L'objet de la motion est de distribuer plus équitablement le temps de parole entre les partis d'opposition et le parti au pouvoir. À l'heure actuelle, pendant la première heure consacrée aux questions lors de chaque réunion, l'opposition dispose de 45 minutes et le gouvernement, de 15 minutes. Cela se traduit par trois minutes de temps de parole pour l'opposition pour chaque minute accordée au gouvernement. Je pense que plusieurs d'entre nous, notamment de ce côté-ci de la table, estiment que c'est extrêmement inéquitable et qu'il faut apporter des ajustements.
La proposition que j'ai faite modifierait en réalité bien peu, au bout du compte, la distribution du temps de parole entre les partis de l'opposition et le gouvernement. Mais je pense qu'elle est plus équitable, dans le sens où cela nous amène à des séries de questions pour lesquelles l'opposition et le gouvernement disposent, de part et d'autre, de cinq minutes.
J'ai remarqué, au cours de réunions d'autres comités—je pense notamment à la façon dont les choses se passent au Comité de l'environnement dont je fais également partie—, où le président organise d'entrée les questions sur la base de cinq minutes de temps de parole, que cela a tendance à accélérer le rythme de la réunion. Il n'y a pas de longs discours ni de préambules. Les questions et les réponses se succèdent à un bon rythme.
Je pense donc que l'objet de ma motion est assez évident. La proposition a des effets relativement bénins, puisqu'il s'agit de réduire de trois minutes le temps de parole au cours de la première série de questions et de le fixer à sept minutes. Au cours d'une réunion de deux heures, le résultat, si vous faites les calculs, est que l'opposition dispose toujours de 75 minutes, alors que le gouvernement a approximativement 45 minutes.
Le président: C'est bien.
M. David Pratt: Merci.
Le président: Merci.
Permettez-moi, à titre de président, de faire une ou deux observations. Nous passerons ensuite aux autres commentaires éventuels avant de voter.
Tout d'abord, je préside le comité depuis octobre et je trouve que c'est un très bon comité. J'ai siégé à quatre ou cinq comités et j'ai également été vice-président précédemment. À quelques exceptions près, qui étaient presque prévisibles, nous nous sommes montrés assez peu partisans. Il y a eu parfois un peu de partisanerie, mais je pense que le comité a su maintenir cela au minimum. C'est une chose qui m'a impressionné et je tiens absolument à tout faire pour faciliter ce genre d'attitude, en tant que président.
Bob a dirigé le comité jusqu'à l'étape de l'examen article par article, avant que je devienne le nouveau président et que je présente le rapport. À mon avis, les travaux du comité sur le rapport relatif à la qualité de la vie reflétaient de façon exceptionnelle l'opinion des partis qui y étaient représentés. C'est ce qu'en ont pensé presque tous les gens qui l'ont lu. Le fait que le gouvernement a décidé d'assurer un suivi financier le démontre. Je pense donc que nous avons fonctionné d'une façon qui est assez peu partisane et j'espère que nous allons pouvoir continuer à le faire.
Cependant, une de mes frustrations, en tant que président, vient du fait que... Et je veux être sûr que ce soit bien clair pour tout le monde. Le président d'un comité ne décide pas de la distribution du temps de parole pendant les séries de questions, et je sais que ce n'est pas ce que vous suggérez. Même certains de mes propres collègues ont pensé que lors de l'avant-dernière réunion ou celle d'avant, je dérogeais au Règlement. Ce n'était pas le cas. Après la première série de questions, d'après les règles du comité, on recommence en donnant à nouveau la parole à l'opposition—le Parti réformiste, l'opposition officielle, et ainsi de suite.
Vous vous en souvenez sans doute, lors d'une de nos dernières réunions, j'ai rappelé l'ordre d'intervention qui avait été déterminé par le comité par un vote à la majorité des voix, à l'unanimité, je pense, il y déjà quelque temps, le 30 octobre 1997. Donc, ce n'est pas au président de décider aujourd'hui qu'il veut des séries de questions de cinq minutes ou de deux minutes, sauf que parfois, le président peut dire qu'il reste seulement quinze minutes et que si l'on vient juste de commencer une série de questions, la façon juste de procéder est de diviser le temps de parole en périodes de trois minutes, par exemple.
Donc, même si le président d'un comité jouit de cette marge de manoeuvre, il doit suivre les règles établies par le comité lui-même. C'est exactement ce que j'ai fait. Vous avez maintenant sous les yeux une proposition qui modifierait ces règles.
Monsieur Pratt, si vous le permettez, il y a une chose que je voudrais dire à tous les membres du comité—et je fais parfois moi-même partie des coupables—: quand les députés arrivent, ils sont parfois en retard et peuvent ne pas réaliser que sept ou huit membres du comité sont censés intervenir avant eux. Ils se sentent donc frustrés lorsque le président ne leur accorde pas la parole; c'est notamment le cas des membres qui représentent le gouvernement et qui sont beaucoup plus nombreux. Ils arrivent en septième ou huitième place sur la liste des intervenants et ils ne vont tout simplement pas pouvoir prendre la parole, à moins que les députés qui siègent de ce côté-ci de la table décident de partager leur temps de parole de façon un peu plus efficace. C'est une des frustrations dont on fait l'expérience lorsqu'on siège de ce côté-ci de la table, comme j'ai pu le constater.
• 0920
J'ai vu des cas où un député—et comme je l'ai déjà dit, je fais moi
aussi partie des coupables—fait un long préambule et parvient à peine
à poser ses questions. Bref, le président est censé permettre à ce
député d'utiliser le reste de son temps de parole pour poser la
question, et il s'agit parfois littéralement de quelques secondes.
Donc, quelques députés ont eu le sentiment de ne pas avoir la réponse
qu'ils souhaitaient. C'est parce qu'ils ont utilisé tout leur temps de
parole pour poser leurs questions après avoir fait une très longue
déclaration. Je tiens à souligner cela pour le bénéfice de tous.
Il y a une autre astuce. Certains vieux routiers—je ne donnerai pas leurs noms—des divers partis sont passés maîtres en la matière. Ils utilisent toute une série de temps de parole de cinq minutes pour poser quinze questions et, si le président n'intervient pas, les témoins vont essayer de répondre à ces quinze questions. En l'occurrence, le député en question n'utilise pas cinq à dix minutes mais quinze ou vingt minutes. J'ai essayé d'empêcher cela. J'ai pu me laisser prendre deux ou trois fois.
En tant que président, je vais essayer d'être très vigilant en la matière à partir de maintenant. Vous disposez d'un certain temps pour poser vos questions et obtenir des réponses. Si vous posez dix questions et que cela ne vous laisse que 30 secondes, vous pourrez vous estimer heureux d'obtenir du témoin une brève réponse à votre première question. Je pense que nous connaissons tous certaines des astuces que tous les parlementaires essaient d'utiliser de temps en temps.
Trève de commentaires; pour inscrire la chose dans un contexte plus large, le comité a décidé, le 30 octobre 1997, de se conformer à des règles que j'ai moi-même respectées. On propose maintenant de modifier ces règles. Le député qui a déposé la motion a expliqué pourquoi.
Quelqu'un a-t-il des questions à poser ou des observations à faire avant que nous passions au vote? M. Price, suivi de M. O'Reilly.
M. David Price: Juste une petite question de forme. À la dernière ligne de la motion, dans la version anglaise, on peut lire: «from Opposition Party». Ce devrait être: «Parties». À part cela, ce qui peut paraître surprenant, je n'ai pas d'objection.
Je suis plutôt satisfait de la façon dont le comité a fonctionné. Il y a de bons échanges, et j'irais même jusqu'à dire que du côté du gouvernement, on a posé de bonnes questions. J'aime voir que le débat suscite des questions. Parmi celles qui ont été posées, il y a eu des questions de fond. Mais il y a un problème, et je dois viser...
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): J'invoque le Règlement. Je ne pense pas que ce soit le moment de parler de cela. À mon avis, nous devrions régler cette question lorsque la réunion sera terminée et que nous pouvons le faire entre nous. Ce n'est pas juste pour M. Matthews et M. Haddock de les obliger à assister à une discussion qui porte sur nos divergences de vues. Cela ne les regarde pas et je suis sûr qu'ils ne veulent pas y être mêlés. Passons donc aux questions, et nous nous occuperons de cela plus tard. Je ne pense pas que ce soit le moment de le faire.
Le président: Monsieur Wood, je ne suis pas d'accord avec vous. Nous étions cinq à être à l'heure. J'ai déjà fait remarquer aux membres du comité qu'il est frustrant, pour le président, que certains membres ainsi que les témoins soient à l'heure, mais pas tous les membres. Je ne vise personne en particulier. Mais il reste que nous avions l'intention de régler cette question en premier et que si cela n'a pas été fait, c'est parce que nous n'avions pas le quorum. La motion est maintenant déposée et je décrète que nous allons la régler maintenant.
Monsieur Price.
M. David Price: Je pense que certains d'entre nous ont commencé leur carrière politique au niveau municipal où les choses se passaient un peu différemment. Lorsque quelqu'un comparaissait devant vous, vous posiez une question et vous n'aviez pas cinq ou dix minutes pour faire un préambule uniquement pour faire consigner quelque chose au compte rendu. Je pense que nous sommes ici pour poser aux témoins de sérieuses questions, afin de préciser ce qui peut ne pas être clair ou d'aller au fond des choses.
Cela dit, je suis désolé, monsieur le président, mais c'est vous que je vise en disant ceci. Je pense que le président devrait limiter le temps qui est consacré aux préambules. De mon point de vue, dans le cadre d'un temps de parole de sept minutes, on devrait allouer deux minutes au préambule et c'est tout. Posez votre question, pour donner au témoin le temps de répondre.
Le président: Permettez-moi de réagir puisque c'est moi qui suis visé. J'ai été des deux côtés de la barrière, et également au niveau municipal. Ce n'est vraiment pas le rôle du président de dire à un député ce qu'il ou elle peut dire pendant le temps qui lui est imparti. En toute franchise, la stratégie adoptée par certains députés, à leurs propres fins politiques, est d'utiliser tout leur temps de parole dans un seul but. Ils ne veulent pas vraiment obtenir une réponse. Ils veulent faire une déclaration. Je pense que pour le président, ce serait abuser de ses pouvoirs, tels que je les comprends, que de procéder comme vous le dites.
• 0925
J'ai essayé d'encourager les députés en disant: «La question, s'il
vous plaît», mais s'ils veulent faire durer le plaisir, je n'ai aucun
réel...
M. David Price: Dans ce cas, c'est véritablement injuste pour le témoin, parce que cela vous oblige à lui couper la parole.
Le président: Je suis d'accord avec vous, David, et je vais être plus strict en la matière. En effet, il faut dire au témoin: «Désolé, monsieur, mais étant donné que nous en sommes à une série de questions de cinq minutes et que le député a consacré quatre minutes et quarante secondes à un préambule et à la question, cela ne vous laisse, au grand maximum, que 15 ou 20 secondes pour répondre.» C'est la raison pour laquelle je vais être plus strict à cet égard. Nous avons eu tendance à nous montrer un peu souples, mais je pense que nous allons devoir être plus disciplinés pour faire ce que vous suggérez. Je vais donner la parole à d'autres députés et ensuite, nous passerons au vote.
Monsieur O'Reilly, et ensuite, M. Laurin.
M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Juste une précision. La procédure à suivre pour la période des questions portait également en partie sur les règles à respecter en cas d'interruption, lorsque nous devons aller voter à la Chambre ou lorsqu'il se passe quelque chose à l'extérieur ou encore au cas où les témoins sont interrompus. Nous étions alors censés passer à des séries de questions de cinq minutes. Corrigez-moi si je me trompe, mais je pensais que c'était la... On peut lire dans la motion que si le témoin ne peut pas se mettre à la disposition du comité pour une période de questions pleine et entière, le président répartira le temps de parole entre tous les partis au prorata. Cela faisait partie de cette autre motion. Est-ce que cela fait partie de celle-ci? Est-ce que cela a été changé?
Le président: Non. D'après ce que je comprends, c'est ce qu'envisage le député qui a déposé la motion. Je pense que le président est obligé de procéder ainsi. Nous nous sommes retrouvés récemment dans une situation où j'ai dû passer à une série de questions de trois minutes à cause du temps limité qui nous restait. Je pense que si le président essaie d'être juste envers les deux parties en cause, il va falloir qu'il prenne ce genre de décision. C'est en réalité ce que cette disposition oblige le président à faire. Disons que c'est sous-entendu dans la présente motion.
M. John O'Reilly: Merci.
Le président: Monsieur Laurin.
[Français]
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le président, j'ai de la difficulté à accepter l'esprit de cette motion. Si elle est adoptée, on réduira davantage le rôle de l'opposition dans les comités. L'opposition est déjà minoritaire dans les comités et le parti au pouvoir peut faire adopter toutes les recommandations et motions qu'il veut parce qu'il a la majorité. L'opposition n'a pas cette possibilité, étant en minorité.
Dans tous les comités, la tradition veut que la parole soit d'abord accordée aux députés de l'opposition parce qu'ils ont moins de possibilité d'aller chercher des renseignements à d'autres endroits qu'aux comités. Les gens du parti ministériel peuvent plus facilement avoir accès aux ministères, aux ministres, etc.
Si on accorde sept minutes au lieu de dix au premier tour, dans l'hypothèse où il n'y aurait que deux tours de questions, il ne me resterait que 12 minutes au lieu de 15; je perdrais trois minutes. Je comprends mes collègues du Parti libéral qui, parfois, n'ont pas la chance de poser des questions, mais c'est à cause de leur nombre. Ils sont trop nombreux parce qu'ils sont majoritaires. Ils pourraient se discipliner et partager leur temps au lieu de prendre chacun dix minutes, l'un prenant sept minutes pour en laisser trois à l'autre. Ils doivent s'organiser entre eux pour qu'au total le parti dispose du même temps.
Si cette motion était adoptée, on réduirait le temps accordé à l'opposition. Ce serait injuste compte tenu que nos conditions de participation à ce comité sont un peu moins favorables.
[Traduction]
Le président: Monsieur Laurin, l'attaché de recherche a fait quelques calculs pour moi, car ce n'est pas mon fort. À l'heure actuelle, pendant la première série de questions, l'opposition dispose, au total, de 45 minutes et le gouvernement, de 15 minutes, comme l'a indiqué M. Pratt. La modification qu'il propose signifie que l'opposition passerait d'une période de questions totalisant 45 minutes à 43 minutes. Quant au gouvernement, il disposerait non plus de 15 minutes, mais de 17 minutes au total au cours de la première heure de la période des questions.
Je ne vais pas enfoncer des portes ouvertes. Je comprends ce que vous voulez faire valoir, mais voilà les chiffres, selon le calcul mathématique.
M. White s'est absenté. Donc, personne d'autre n'a indiqué...? Monsieur Hart.
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le président, je pense que nous devrions essayer cette formule. Au nom de l'équité et de la collaboration entre les membres du comité, nous devrions voir comment cela fonctionne. Essayons.
Le président: Ce n'est pas coulé dans le béton. Nous pouvons toujours revenir à la formule précédente.
Je vais poser la question... Monsieur Bertrand.
[Français]
M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le président, au numéro 8 de la motion il est indiqué: «de l'opposition au parti ministériel pour le reste du temps». Reste-il des blocs de cinq minutes?
Le président: Des blocs de cinq minutes, oui. Sans oublier l'amendement qui a été amicalement apporté à la version anglaise pour remplacer «Opposition Party» par «Opposition Parties». C'est ce qu'on voulait dire.
[Français]
Monsieur Laurin.
M. René Laurin: Monsieur le président, il y a un défaut dans le calcul mathématique. Lorsque les députés de l'opposition et ceux du parti ministériel sont tous présents, le temps est calculé différemment, mais dans l'hypothèse où, comme aujourd'hui, il n'y aurait qu'un représentant de chaque parti de l'opposition, si on accordait sept minutes à chacun au premier tour, l'opposition serait défavorisée. Mon parti a droit à deux représentants et je suis seul aujourd'hui. Si mon collègue était présent, le parti d'opposition aurait deux fois dix ou sept minutes, selon le système qu'on adopterait, mais si j'étais le seul, vous iriez de l'autre côté.
Le président: Excusez-moi, monsieur Laurin, mais ce n'est pas correct.
[Traduction]
C'est pour le parti. C'est sept minutes pour le parti, René. Donc, si vous êtes seul, vous disposez pleinement des sept minutes qui sont allouées au Bloc. Si vous et votre collègue êtes présents, vous n'avez toujours que sept minutes au total au cours de la première série de questions. Ce n'est pas sept minutes chacun. Je crois que même certains de mes collègues de ce côté-ci de la table se méprennent à ce propos. Ce n'est pas sept minutes pour chaque député; c'est sept minutes pour le parti. Si un député utilise tout ce temps de parole, il va sans doute y avoir cinq ou six autres membres du parti au pouvoir qui vont être frustrés parce qu'ils n'ont pas eu l'occasion de s'exprimer. Sans doute vont-ils en vouloir au président qui, sur le plan politique, est de leur côté, mais qui doit être objectif lorsqu'il occupe le fauteuil.
M. René Laurin: Très bien.
Le président: Bon. Ça va?
M. David Pratt: Monsieur le président, puis-je faire quelques observations pour conclure la discussion à propos de cette motion? Je réponds à un commentaire de M. Laurin, lorsqu'il a dit que l'opposition avait moins facilement accès aux ministres ou aux ministères.
Le fait est que 90 p. 100 des réunions du comité ne sont pas consacrées à entendre le ministre ou des responsables du ministère. Nous entendons des témoins indépendants comme M. Matthews et d'autres spécialistes de tel ou tel domaine. Donc, l'objection que nous soulevons de ce côté-ci de la table a pour objet de nous donner la possibilité de poser des questions à des témoins comme cela. Et à mon avis, ce que nous essayons de faire en proposant cette motion, c'est respecter le principe voulant que tous les députés sont égaux et que certains ne sont pas plus égaux que les autres.
Le président: Je crois qu'il y a un assez bon consensus. Certaines réserves ont été exprimées, mais nous allons essayer la formule. Je pense que c'est dans ce sens que le comité veut aller et, si nous n'aimons pas la formule, nous la modifierons encore une fois. Je note les réserves exprimées par certains membres.
(La motion est adoptée)
Le président: Monsieur Matthews, je vous remercie de votre indulgence. Nous ne pensions pas tous qu'il était approprié de procéder ainsi, mais c'était mon avis. Voilà qui est fait.
Permettez-moi d'accueillir le groupe Sikorsky. Je pense qu'il est mieux d'entendre tous les témoins et de passer ensuite aux questions. Est-ce que cela vous convient?
Je souhaite la bienvenue à M. Haddock, de la Société Sikorsky Canada Inc. Et vous, monsieur, allez-vous vous joindre à lui? Non. Bien. M. Haddock va faire une déclaration liminaire et ensuite, nous passerons à une série de questions.
Monsieur, soyez le bienvenu.
M. Joseph Haddock (directeur, Affaires internationales, Sikorsky Canada Inc.): Merci.
Si vous le permettez, je vais lire les remarques que j'ai préparées.
Je tiens à remercier le comité de me donner l'occasion de présenter mon point de vue sur cette question fort complexe et importante.
Comme vous avez pu le lire dans la biographie que je vous ai remise, je compte près de 29 années de service dans les Forces navales des États-Unis, dont trois années au cours desquelles j'ai servi au sein du 443e Escadron d'hélicoptères stationné, à l'époque, à la base de Shearwater, comme pilote d'hélicoptère Sea King. Au cours de cette affectation, j'ai accumulé environ 750 heures de vol aux commandes d'un Sea King. Chose intéressante, c'est cette affectation qui m'a permis d'acquérir l'expérience jugée nécessaire par les Forces navales des États-Unis, au moment où elles ont entrepris d'égaler le succès du Canada en matière d'utilisation de gros hélicoptères depuis le pont de navires relativement petits.
À la fin de mon affectation au 443e Escadron, j'ai été détaché auprès du Premier escadron d'évaluation et d'essais aériens, stationné à la base aéronavale de Patuxent River, pour superviser les essais opérationnels de notre tout nouvel hélicoptère embarqué sur frégate, le ST-60 Seahawk. C'était en 1980, et au cours des 17 années qui ont suivi, j'ai occupé divers postes dans les domaines de l'acquisition et de l'essai du matériel de défense.
J'ai été témoin des réussites et des échecs du système d'acquisition du matériel de défense des États-Unis, et j'ai vécu les modes et les expériences qui nous ont été imposées au nom de la réforme. Je peux vous dire que la plupart des chefs politiques américains partagent votre frustration face au processus lourd et inefficace d'acquisition de matériel de défense. Je vous offre mon point de vue, qui s'appuie sur une vaste expérience du système américain, ainsi que mes premières impressions du processus qui existe au Canada.
L'acquisition est une affaire sérieuse et fort complexe. On ne peut facilement la comparer à la dynamique du marché commercial, bien que certains prétendent le faire. On peut cependant tirer certaines comparaisons utiles avec le marché commercial, ce qui pourrait aider à améliorer certains aspects du processus, notamment, à mon avis, le côté soutien du continuum d'acquisition qui, comme l'a souligné mon collègue, s'inscrit dans le cadre de la diversification des modes de prestation des services. J'ajouterai que c'est l'aspect le plus négligé de l'acquisition de matériel complet et celui qui offre, selon moi, le plus grand potentiel de rendement, s'il est réformé.
• 0935
J'estime que l'adhésion du Canada au concept de diversification des
modes de prestation des services laisse miroiter d'importants
rendements si sa mise en oeuvre se fait de façon élargie, dynamique et
équitable. Toutefois, comme le temps m'est compté, j'aimerais laisser
de côté la question des services de soutien et y revenir uniquement si
l'on aborde le sujet pendant la période des questions. Le reste de mes
observations portera principalement sur la réforme du processus
d'acquisition et d'impartition.
Pour commencer par une observation positive, il me semble que le processus mis en place au Canada est plus simple que le système américain, en ce qui a trait au budget. Aux États-Unis, la multitude d'examens réalisés par le Congrès et la manipulation politique des budgets prévus ont un effet dévastateur sur la planification et l'exécution, tant du point du vue du gouvernement que de celui de l'industrie. Si l'on ajoute à cela la répartition des fonds par couleurs—qui différencie les sommes pouvant être consacrées au développement, à l'acquisition, au soutien, aux modifications et aux opérations, chaque couleur se voyant attribuer une durée de vie particulière—après quoi les fonds ne peuvent plus être dépensés—on comprend pourquoi les programmes sont toujours instables sur le plan financier. Ce genre de complication budgétaire garantit la prise de mauvaises décisions et l'octroi des pires contrats.
Cependant, tant au Canada qu'aux États-Unis, le système budgétaire se fonde sur des rêves illusoires, puisque les prévisions budgétaires sont presque toujours moins élevées que les coûts réels. Cela crée à coup sûr des difficultés financières qui, à leur tour, peuvent entraîner une redéfinition des besoins, comme ce pourrait être le cas du programme d'hélicoptère maritime. Il est facile et politiquement acceptable d'imputer à un environnement en perpétuel changement le réexamen des besoins, mais en réalité, on le fait habituellement pour des raisons d'ordre économique.
Malheureusement, les discussions touchant la capacité de payer relativement à la réduction des besoins pèsent lourdement sur les tenants et les aboutissants du débat. Bien que cela soit difficile à faire, si le gouvernement veut réduire un besoin pour respecter son budget, il devrait tout simplement le dire. On pourrait alors fixer les priorités objectivement, afin de respecter l'équilibre budgétaire et les besoins opérationnels.
En guise de conclusion, j'aimerais formuler des commentaires assez radicaux sur le régime de concurrence. Je travaille dans le domaine depuis 17 ans et je n'ai pas encore été convaincu du fait que lancer un appel d'offres pour l'acquisition d'un système d'armes complexe permet réellement de réaliser des économies. Il est certain que cela ne permet pas de gagner du temps. La raison pour laquelle je dis cela, c'est que dans les organismes de défense actuels dont les effectifs ont été réduits, il n'y a pas suffisamment de ressources humaines pour créer une demande de propositions suffisamment détaillée afin de lancer un concours ouvert, à moins qu'on s'écarte de façon radicale de la façon habituelle de procéder en choisissant de présenter une demande de propositions axée uniquement sur le rendement. Dans ce cas, la pénurie de personnel nuira encore une fois au processus d'examen, puisque les entrepreneurs ont toute la latitude voulue pour proposer un large éventail de solutions à des besoins formulés en termes généraux.
Alors, quelle est la réponse? L'industrie continue d'entendre le mantra prêchant les vertus du partenariat, mais elle continue également d'être assujettie aux rites du régime de concurrence qui limitent et grèvent le partenariat, avant, durant et après le processus d'appel d'offres. À mon avis, il existe d'autres façons de procéder. Témoin votre achat des hélicoptères Griffon. Vous avez pris une décision rationnelle fondée sur une combinaison de considérations d'ordre politique et opérationnel, en partenariat, je crois, avec Bell Helicopter. Comment cette décision a-t-elle été prise? Y a-t-il eu des entrevues, des visites d'usine? Y a-t-il eu des vols d'essai avant que vous achetiez cet hélicoptère? Est-ce que l'entrepreneur a offert des garanties? Je suis persuadé qu'un petit groupe d'utilisateurs expérimentés, aidés de spécialistes en matière d'acquisition, pourrait se faire une opinion du projet, en informer la voie hiérarchique et amener les autorités compétentes à prendre une décision équitable. C'est radical, j'en conviens, parce que cela présume que le processus est fondé sur la confiance, l'éthique et l'honnêteté.
Il est certain que les Forces navales des États-Unis ont tiré de dures leçons du fait qu'elles se sont fiées au régime de concurrence pour se doter d'un système inadéquatement financé, défini et justifié. L'acquisition du A-12 Avenger, le jet qui devait remplacer, sur nos porte-avions, le A-6E Intruder vieillissant, est un exemple tragique d'un appel d'offres qui a mal tourné. Cela a abouti à la perte d'un avion de mission d'attaque en profondeur et, pire encore, à une dépense de 4 milliards de dollars pour rien d'autre que des frais juridiques. Les Forces navales des États-Unis ont essentiellement dépensé pratiquement tout leur budget pour rien.
On pourrait établir une comparaison avec le programme NSA, né d'un appel d'offres, jugé trop coûteux et annulé, ce qui a entraîné une dépense de 500 millions de dollars en frais juridiques. Je crois effectivement que le processus d'appel d'offres incite les entrepreneurs à bien faire leurs devoirs, mais qu'il les oblige également à présenter une soumission correspondant exactement à ce qui a été demandé, rien de plus, rien de moins, la condition première étant d'offrir le coût le plus bas. Dans ce contexte, où y a-t-il place pour l'innovation?
Enfin, un commentaire en forme d'annonce publicitaire sur la personne qui a le plus d'influence et qui joue le rôle le plus important dans le processus: le gestionnaire de programme. Bien qu'il se situe au bas de la hiérarchie, il en sait plus que quiconque sur le programme, ses particularités et les entrepreneurs qui y participent. Il vit jour et nuit pour le programme. C'est à lui qu'il faut s'adresser directement pour obtenir des informations factuelles.
• 0940
Je m'arrête ici. J'espère que vous pouvez voir à quel point ce sujet
me tient à coeur. Bien que certains disent qu'une saine gestion des
affaires publiques ne pourra jamais rivaliser avec une saine gestion
des affaires, je crois qu'il est vrai qu'un bon gouvernement cherchera
toujours à s'améliorer pour le bien de la population.
Je souhaite au comité tout le succès qu'il mérite pour mener à bien cette tâche importante. Merci.
Le président: Je vous remercie, monsieur Haddock, et vous également, monsieur Matthews. Vous avez fait tous les deux des déclarations très directes, et c'est exactement le genre d'observations qui sont utiles au comité. Nous allons maintenant passer, dans la foulée, à une série de questions.
Au cours de cette première série, le temps imparti à chaque membre sera de sept minutes pour les questions et les réponses. Je vais commencer par l'opposition officielle, M. Hart, du Parti réformiste.
M. Jim Hart: Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs. Vous devez être bien contents que nous ne soyons pas des avionneurs, n'est-ce pas?
Ma première question s'adresse à M. Matthews. Vous avez déclaré que souvent, les objectifs nationaux ne sont même pas connus—qu'en fait, ils sont tenus secrets. Qu'avez-vous découvert à propos de ces objectifs nationaux une fois un projet terminé? Qu'est-ce qui a constitué un obstacle pour l'industrie?
M. Bill Matthews: Monsieur le président, à mon avis, le fait qu'ils ne soient pas énoncés dans les documents d'acquisition et que sans doute, on en a discuté uniquement à huis clos au cours du processus de prise de décision empêche de savoir quels sont tous les critères qui ont été pris en compte en dernière analyse.
Nous aimerions simplement que ces objectifs soient énoncés clairement, de façon à ce que chaque intéressé puisse décider s'il peut, ou non, les réaliser. Si cela s'avère impossible, l'entreprise en question sait que ce n'est pas la peine qu'elle se mette sur les rangs. Dans le cas contraire, elle peut utiliser des moyens novateurs pour réaliser ses objectifs, et tout le monde y gagne.
M. Jim Hart: Est-ce que certains de ces objectifs étaient en fait des retombées industrielles et régionales?
M. Bill Matthews: Nous nous sommes rendu compte que même si cela est rarement chiffré dans les documents d'acquisition, Industrie Canada emploie beaucoup sa force de persuasion pour qu'on mette l'accent sur ce qui est jugé d'un oeil favorable.
Je ne pense pas que ce soit la meilleure façon de procéder. À mon avis, il est toujours préférable que cela soit écrit noir sur blanc. Généralement, je pense, il y a une formule convenue pour déterminer où devraient aller les retombées industrielles, et cela peut varier d'un projet à l'autre selon la capacité des régions à appuyer le projet en question. Cela devrait être assez facile à définir.
M. Jim Hart: L'un ou l'autre d'entre vous peut répondre à cette question. Estimez-vous que les retombées régionales rendent plus coûteux le système d'acquisition?
M. Bill Matthews: Comme je l'ai indiqué plus tôt, nous produisons beaucoup pour l'exportation et si cela concerne des pays qui exigent un accord de contrepartie industrielle de notre part, cela augmente définitivement nos coûts. Étant donné que nous ne sommes pas une oeuvre de bienfaisance, cela augmente également les coûts de l'autre partie intéressée.
M. Joseph Haddock: Je suis d'accord avec cela.
M. Jim Hart: Monsieur Matthews, vous avez également parlé d'incitation à la réduction des coûts. Comment cela peut-il être intégré au système d'acquisition du gouvernement? Pouvez-vous nous donner des détails sur la façon dont cela pourrait fonctionner?
M. Bill Matthews: Je peux vous dire comment cela fonctionne sur le marché commercial. Si nous fabriquons un produit pour l'un des principaux motoristes, par exemple, et si nous pouvons avoir recours à un nouveau processus qui fait baisser les coûts, nous allons demander à notre acheteur l'autorisation d'aller de l'avant et d'apporter les changements techniques en question. Nous allons partager les avantages qui vont en découler avec cette entreprise, et cela va être convenu clairement avant que nous engagions des fonds pour apporter des améliorations.
À mon avis, même si la marge de manoeuvre dont dispose un agent d'acquisition du gouvernement pour conclure des accords n'est pas aussi grande, on devrait reconnaître le fait qu'il sait aussi bien que quiconque comment conclure la meilleure affaire pour le gouvernement et, encore une fois, il devrait être convenu ouvertement que le montant investi sera de tant, que vos profits s'élèveront à tant, et les nôtres à tant, et que si cela vous convient, il n'y a plus qu'à aller de l'avant.
M. Joseph Haddock: C'est à cet aspect qu'on s'est beaucoup intéressé aux États-Unis.
• 0945
Je vais vous donner un exemple de la façon dont le gouvernement
pourrait en fait donner des incitatifs à un entrepreneur. On pourrait
conclure un contrat de maintenance à long terme. Par exemple, il y a
un programme qui s'applique aux moteurs et qui permet la facturation
en fonction du nombre d'heures de vol. Si vous acceptez de verser à un
motoriste une certaine somme par heure de vol, si vous acceptez que ce
coût reste stable pendant un certain temps et si vous faites valoir à
l'entrepreneur dès le début du contrat... Si, après certaines
analyses, vous avez déterminé ce que vous coûte actuellement une heure
de vol, et si vous coupez ce chiffre de 10 à 15 p. 100, vous pouvez
offrir un incitatif à l'entrepreneur, car même s'il perd de l'argent
pendant la première année au cours de laquelle le contrat est en
vigueur, il va trouver des moyens de faire de l'argent par la suite.
Il va trouver des moyens d'être plus efficace. Il va trouver des
moyens de faire baisser le coût de l'heure de vol jusqu'au moment où
il va pouvoir commencer, après un certain temps, à faire des bénéfices
qui, en pourcentage, seront assez intéressants. Cependant, le
gouvernement y gagne aussi, car il paie moins qu'il a payé auparavant,
alors que l'entrepreneur sort gagnant parce qu'il a été autorisé à
couper le coût d'exploitation du moteur. C'est la méthode que nous
essayons d'appliquer à l'heure actuelle à notre programme des V-22.
M. Jim Hart: Monsieur Haddock, vous avez déclaré que la meilleure diversification des modes de prestation des services doit reposer sur une mise en oeuvre élargie et dynamique. Pouvez-vous nous donner des détails à cet égard? Que voulez-vous dire exactement par là?
M. Joseph Haddock: Je connais un peu l'initiative qui a été lancée à Goose Bay dans le cadre de la diversification des modes de prestation des services, et je sais également un peu quelles sont les ramifications politiques et syndicales que l'on doit essayer de contrôler pour que, sur le plan politique, ce projet soit jugé acceptable par tout le monde.
Je pense que par «dynamique» je veux dire que si vous décidez qu'un entrepreneur va être chargé d'un service, faites en sorte qu'il en soit ainsi et ne... Trouvez un moyen d'éliminer les complications qui pourraient surgir à cause des façons de faire adoptées dans le passé. Quand je parle de mise en oeuvre «élargie» je veux dire que plus vous trouverez de secteurs où, à votre avis, un organisme auxiliaire peut avantageusement remplacer un organisme public, plus vous en tirerez des bénéfices. Ce n'est pas dans tous les secteurs que l'industrie peut mieux faire que le gouvernement, et il faut donc faire un certain nombre d'analyses pour découvrir quels sont ces domaines.
Je crois que l'expérience que vous avez faite du concept de maintenance du Griffon avec Bell Helicopter s'est révélée positive. Je n'aime pas faire de la publicité pour Bell Helicopter, mais c'est une entreprise qui est reconnue à travers le monde pour son service après-vente, que Sikorsky essaie d'ailleurs d'imiter. Si vous pouvez faire parvenir des pièces à un exploitant d'aéronef dont l'activité est lucrative plus rapidement que son concurrent, monétairement parlant, vous êtes gagnant. Ensuite, vous faites le saut, vous faites un acte de foi pour commencer, en partant du principe que vos forces opérationnelles ne vous assurent peut-être pas un profit, mais quelles sont gagnantes au plan des heures de vol et de la disponibilité. Quant au gouvernement, il y gagne en coupant certains éléments de la chaîne de maintenance.
M. Jim Hart: Merci.
[Français]
Le président: Monsieur Laurin, sept minutes.
M. René Laurin: Merci, monsieur le président.
Ma première question d'adresse à M. Haddock. Dans votre présentation, monsieur Haddock, vous dites:
-
On peut cependant tirer certaines comparaisons utiles avec le marché
commercial, ce qui pourrait aider à améliorer certains aspects du
processus, notamment le côté soutien du continuum d'acquisition.
Qu'entendez-vous par «continuum d'acquisition»?
[Traduction]
Le président: Joe.
M. Joseph Haddock: Il y a un cycle d'approvisionnement qui s'applique à l'acquisition de tout produit. Je vais simplement prendre un exemple cher à mon coeur, celui du programme d'acquisition d'hélicoptères maritimes.
Il faut qu'un cahier des charges soit écrit, qu'une stratégie d'acquisition soit élaborée et peut-être qu'une demande d'acquisition soit lancée. Dans le contexte d'un continuum d'acquisition, on pourrait appeler cela la phase de pré-acquisition. Ensuite, quand on passe effectivement à l'acquisition, il y a parfois une phase de développement au cours de laquelle certaines caractéristiques peuvent être modifiées quand on acquiert un produit couramment disponible sur le marché, comme cela a été le cas lorsque vous avez acheté le Griffon. Il y avait certains éléments qui devaient être modifiés de façon à adapter cet appareil à un environnement militaire.
• 0950
On appellerait donc cela l'étape du prototype ou l'étape du
développement. Ensuite, il y a habituellement l'étape des essais, au
cours de laquelle on s'assure que l'aéronef est conforme aux normes
prescrites et fonctionne selon les garanties données par
l'entrepreneur. Ensuite, il y a l'étape du cycle de vie ou encore
l'étape de la maintenance, qui commence au moment où l'appareil est
livré et se poursuit pendant la période où il est en service ce qui,
dans le cas de nos Sea King, peut durer jusqu'à 50 ans. Ce sur
quoi se concentre généralement l'attention du gouvernement, ce sont
les coûts d'achat. Combien cela va-t-il nous coûter aujourd'hui? Or,
en pourcentage, cela représente probablement 14 p. 100 ou moins du
coût total d'un système d'arme pendant son cycle de vie, quand on
prend en compte le fait qu'il faut entretenir cet aéronef ou ce
système pendant les prochains 10, 20, 30, 40 et même 50 ans car, cette
période étant plus longue, cela peut entraîner des coûts plus
importants. Même avec un horizon prévisionnel aussi éloigné—et l'on
sait bien que pour les gouvernements, l'horizon prévisionnel est
généralement très rapproché—c'est pendant cette période de temps que
vous pouvez le mieux réduire les coûts—et j'en reviens à ma
déclaration sur les accords de maintenance à long terme offerts par
l'industrie ou la nécessité pour les gouvernements d'adopter une
perspective à long terme. C'est tout ce volet du processus
d'acquisition qui est—si je peux m'exprimer ainsi—le moins
passionnant. Personne n'y prête grande attention parce qu'il n'y a là
rien d'excitant. On ne parle plus d'un appareil qui peut lâcher des
bombes et faire des loopings, etc., mais il est très important de
savoir quels sont les coûts d'exploitation.
J'espère que vous savez combien vous coûtent aujourd'hui vos Sea King. Je doute fort que qui que ce soit puisse rassembler les données pour savoir combien cela coûte aujourd'hui de maintenir un Sea King en état de marche, mais ayant fait quelques recherches, je dirais que cela se situe autour de 6 500 $ de l'heure. On trouve aujourd'hui des hélicoptères qui coûtent entre 800 et 1 000 $ de l'heure. Or, le gouvernement paie 6 500 $ de l'heure multiplié par 500, soit la moyenne annuelle du nombre d'heures de vol, multiplié par le nombre d'appareils que vous possédez. Faites les calculs, divisez par six et vous verrez quelles économies vous pouvez faire. C'est une somme qui peut rentrer directement dans les coffres de l'État.
[Français]
M. René Laurin: J'aimerais que vous me donniez votre opinion sur le système d'acquisition du Royaume-Uni. Ils ont un processus qui, à mon avis, semble fonctionner de telle sorte qu'une compagnie est associée à la préparation du devis ou des plans de l'appareil qu'on veut acheter en bout de ligne. Ce système vous paraît-il acceptable ou avantageux?
[Traduction]
M. Joseph Haddock: Je connais assez bien le système. Pour moi, il est satisfaisant. En effet, même s'il semble très difficile de lancer un programme—quand on pense à la planification et à la préparation qui doivent être faites au départ—une fois qu'il est lancé, le budget a tendance à être très stable. Les crédits ne sont pas alloués annuellement, comme c'est le cas aux États-Unis. Le partenariat entre les autorités militaires et les entrepreneurs est très solide, et je pense que c'est un facteur positif.
Le défaut du système britannique qui a tendance à me faire hésiter—l'exemple de l'acquisition d'hélicoptères EH-101 par la marine britannique le démontre bien—, c'est que l'appareil que vous achetez au gouvernement et à l'entrepreneur ne fait pas l'objet d'essais avant l'étape de la production. Aux États-Unis, l'approbation des fonds nécessaires à la production n'est pas donnée tant que le système n'a pas passé avec succès un test opérationnel—qui est très rigoureux. Par ailleurs, des considérations d'ordre politique risquent fort d'entrer en ligne de compte dans le système britannique.
En bout de ligne, en Grande-Bretagne, l'utilisateur, l'exploitant, peut être confronté à des problèmes qui ne seront résolus que plus tard. Pour moi, tout tourne autour de ce que j'appelle la gestion des attentes. Si l'équipe que forment l'entrepreneur et le gouvernement sait gérer les attentes de l'exploitant de la flotte en entretenant des communications adéquates, il n'y aura pas de problème. Mais il se pourrait qu'il y en ait et que cela coûte cher si, par exemple, l'équipe que forment le gouvernement et l'entrepreneur n'a pas tenu compte d'un élément touchant l'exploitation de l'appareil qui pourtant était assez évident, par exemple, le fait qu'il ne rentre pas dans le hangar ou qu'il ne peut pas bouger sur le pont.
Le président: Une petite question, monsieur Laurin?
M. René Laurin: À votre avis, le système britannique permet-il à la concurrence de jouer son rôle aussi efficacement?
[Traduction]
M. Joseph Haddock: Je suis au courant de la procédure de soumission concurrentielle à laquelle Lockheed Martin a dû se plier dans le cadre du programme d'acquisition des Merlin.
Permettez-moi d'émettre une opinion personnelle hardie: je pense que sous certains angles, c'est effectivement le cas, mais en Grande-Bretagne, la procédure est probablement plus politisée que n'importe où ailleurs.
Le président: Voilà une observation intéressante. Je pense que M. Matthews voulait ajouter quelque chose brièvement et ensuite, nous passerons au prochain...
M. Bill Matthews: Bristol a récemment participé à un important appel d'offres concurrentiel au Royaume-Uni, à titre de membre de l'équipe de plusieurs gros producteurs d'hélicoptères, dans le cadre du programme d'acquisition d'hélicoptères d'attaque par l'armée britannique, un concours qui a éventuellement été remporté par Boeing avec ses Apaches. Nous fournissons un sous-système qui est intégré à cet appareil et cela se solde pour nous par environ 100 millions de dollars de bénéfices. Nous avons donc suivi le processus de très près, et je dois dire que de notre point de vue à nous qui traitons des affaires à travers le monde, c'est le système d'acquisition le plus ouvert, le plus clairement défini et le moins sujet à des revirements inattendus que nous connaissons. Même si les politiciens sont nombreux à prendre position, cela n'a eu, d'après ce que nous avons pu voir, aucune influence. De fait, c'est une entreprise qui n'est pas britannique qui l'a emporté, et je pense que cela dit tout.
Le président: Pour l'information des témoins, je signale que certains membres du comité, sinon tous, ont l'intention de se rendre au Royaume-Uni d'ici quelque temps pour approfondir la question là-bas.
Merci, monsieur Laurin.
Passons maintenant aux représentants du gouvernement. J'ai déjà trois noms: M. Bertrand, M. Pratt et M. O'Reilly. Monsieur Bertrand.
M. Robert Bertrand: J'ai une ou deux questions à poser à l'un et l'autre témoin, en commençant par M. Matthews. Peut-être devrais-je vous poser ces questions à tous les deux et ensuite, vous pourriez répondre chacun votre tour.
Premièrement, que pensez-vous du système d'acquisition du secteur de la défense depuis 1993? Deuxièmement, est-ce que le MDN a jamais attribué à Bristol un contrat exclusif? Troisièmement, est-ce que votre entreprise travaille à l'heure actuelle sur un projet quelconque touchant la défense?
Monsieur Haddock, nous avons entendu M. Matthews dire que les retombées industrielles et régionales jouent un rôle très important dans le système d'acquisition du secteur de la défense. Je crois savoir que Sikorsky était sur les rangs en ce qui concerne les hélicoptères de recherche et de sauvetage. Comment les retombées que votre offre assurait ont-elles été évaluées? J'ai entendu dire que l'on n'avait attribué aucun point, dans le processus de soumission, aux retombées industrielles et régionales.
Le président: Monsieur Matthews.
M. Bill Matthews: Si vous le permettez, je ne vais pas répondre tout de suite à votre question portant sur le processus global en place depuis 1993, mais je vais vous parler des contrats exclusifs.
À l'heure actuelle, notre entreprise a deux contrats exclusifs. Il s'agit, dans les deux cas, de programmes d'armement touchant la fuséonautique. Bristol est la seule entreprise canadienne qui a les capacités nécessaires pour répondre aux besoins dans le domaine de la fuséonautique, et je pense que c'est l'une des raisons pour lesquelles le ministère des Travaux publics a décidé en faveur d'un contrat exclusif. S'il n'y a qu'une seule possibilité viable, on peut procéder ainsi. Malheureusement pour nous, ce contrat, même s'il est exclusif, est assujetti aux restrictions imposées par la politique sur les profits. À cause de cela, en réalité, s'il y avait eu un appel d'offres concurrentiel, nous aurions probablement pu faire quelques bénéfices, alors qu'avec ce contrat exclusif, nous n'allons pas en faire—ou alors, pas beaucoup.
M. Robert Bertrand: Je voulais simplement noter cela.
M. Bill Matthews: Comme M. Haddock l'a signalé, cela nous pousse à chercher des moyens de réduire les coûts.
Je le répète, même jusqu'en 1993-1994, c'était les crédits alloués par le gouvernement canadien à la défense qui finançaient 65 p. 100 de nos activités en ce domaine. Cette année, même si nos ventes ont sensiblement augmenté, nous ne comptons sur le gouvernement canadien que pour financer moins de 10 p. 100 de nos travaux—à peu près la moitié de ces crédits étant réservée au secteur de la défense et le reste, à l'agence spatiale. Nous avons donc compensé la réduction du budget du ministère de la Défense et celle des programmes que nous avions en train en exportant et en nous consacrant davantage à des projets commerciaux.
Le président: Vouliez-vous vous abstenir de répondre à la question portant sur le processus d'acquisition depuis 1993?
M. Bill Matthews: Je ne vois pas où est l'importance particulière de l'année 1993, mais...
Le président: Le parti au pouvoir a changé...
M. Bill Matthews: Oh.
Le président: ...je me permets simplement de le rappeler.
M. Bill Matthews: Là voilà, votre réponse.
Le président: J'allais dire «heureusement», mais j'occupe le fauteuil de président.
M. Bill Matthews: Je dirais ceci: Je pense que le processus suivi par les ministères a été relativement cohérent. En vérité, lorsque les fonctionnaires ont comparu devant vous, ils ont insisté sur la limpidité de ce processus. Je crois que c'est vrai et nous n'avons pas de reproches à leur faire à ce sujet.
Est-ce que l'introduction de critères non définis a été une nouveauté? Je ne pense pas. Je crois que c'est dans l'ordre des choses. Tout ce que nous demandons, ce n'est pas d'éliminer ces critères, mais tout simplement de les énoncer clairement.
Le président: Monsieur Haddock, vous avez environ deux minutes pour répondre aux questions.
M. Joseph Haddock: Bien, je vais parler vite.
Le président: Merci.
M. Joseph Haddock: À propos du processus d'acquisition depuis 1993, je ne suis pas vraiment bien placé pour répondre étant donné que je ne suis ici que depuis 1997. Je connais cependant le processus d'acquisition de l'hélicoptère de recherche et de sauvetage et je peux en parler, si vous le jugez utile.
Nous ne détenons aucun contrat exclusif. En ce qui concerne les points attribués à une offre à cause de ses retombées industrielles et régionales, je le répète, je ne travaillais par pour Sikorsky au moment où a été lancé l'appel d'offres concurrentiel du CSH; cependant, d'après les quelques discussions que nous avons pu avoir à propos du résultat de ce concours, je peux vous dire que, selon moi, notre plan concernant les retombées industrielles et régionales a été très apprécié. Cela ne nous a peut-être valu aucun point, mais c'est parce que notre proposition a été éliminée, ayant été jugée non conforme. De fait, on n'a même pas regardé nos chiffres, alors que nous pensions l'emporter à cause de cela.
Le président: Si vous en avez terminé, monsieur Bertrand, je vais donner la parole au député libéral dont le nom suit sur la liste.
M. Robert Bertrand: Oui, j'ai terminé pour l'instant.
M. David Pratt: Dans ces conditions, je vais céder mon temps de parole à l'opposition, car je ne pense pas que nous puissions lancer une discussion intéressante.
Le président: Merci, messieurs.
Je donne la parole à M. Earle qui dispose de sept minutes.
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Merci.
Parlons des hélicoptères maritimes: on a suggéré différentes méthodes d'acquisition pour se procurer ces hélicoptères de la façon la plus efficace. J'ai entendu dire, par exemple, que l'on pourrait peut-être acquérir une coque de série et sous-traiter le système de mission, et ainsi de suite. J'ai aussi entendu dire que pour respecter les exigences en matière de contenu canadien, on pourrait faire appel à un groupe d'entreprises canadiennes qui fourniraient le système de mission et qui se procureraient la coque et ainsi de suite en sous-traitance.
Je vous pose la question à tous les deux, messieurs: À votre avis, quelle est la façon la plus efficace d'acquérir ces hélicoptères? Maintenant que l'on comprend mieux ce que souhaite le gouvernement, quelle serait la méthode la plus rentable d'acquérir ces appareils?
Deuxièmement—s'il reste encore du temps—pourriez-vous me dire ce que vous pensez de l'Accord sur le partage de la production de défense et de l'Accord sur le partage du développement industriel pour la défense, étant donné que certains ont laissé entendre que ces accords avantagent l'industrie américaine aux dépens des entreprises canadiennes? J'aimerais savoir si vous pensez que c'est vrai et si le commerce transfrontalier découlant de ces accords s'est traduit par des avantages dont vos entreprises ont bénéficié. Si oui, donnez-nous des exemples.
M. Joseph Haddock: Je vais essayer de ne pas me montrer partial à l'égard de la stratégie d'acquisition de l'hélicoptère maritime. Étant donné que je travaille pour Sikorsky, je pense évidemment que l'on devrait nous confier tout le programme, un point c'est tout.
Une voix: Aucune partialité là-dedans.
M. Joseph Haddock: Cela dit, je vais mettre ma casquette de marin et vous résumer brièvement ce qui s'est passé lorsque j'étais gestionnaire du programme Seahawk de la marine. Nous avons essentiellement acheté, chez Sikorsky, une coque et un système de mission produit par Lockheed Martin à Owego, New York. La formule a assez bien marché.
• 1005
Le principal, c'était qu'ainsi, le gouvernement... À titre de
gestionnaire de programme, l'entrepreneur principal, c'était moi.
J'étais responsable de la réussite opérationnelle de cet engin. Cela a
bien marché. Nous avons collaboré et avons fait les choses comme il
faut. Mais pour un fonctionnaire, c'était une position très difficile
à occuper car en réalité, on ne peut mettre de pression sur personne,
à moins de se regarder dans la glace et d'invectiver sa propre image.
Je crois qu'il devrait y avoir un entrepreneur principal responsable de tout—le système de mission, la cellule, les moteurs, la maintenance. De cette façon, il n'y a qu'une seule entité avec laquelle il faut traiter, et on peut exercer une certaine influence. Dans ce contexte, je pense que si vous voulez lancer un appel d'offres pour la fourniture d'une partie de l'appareil, disons la cellule, et que vous voulez travailler avec l'entrepreneur retenu pour sélectionner un groupe d'industries canadiennes, en confiant à cet entrepreneur le soin d'organiser un appel d'offres concurrentiel tout en réservant, pour le gouvernement, un droit de préemption, il y a moyen de le faire. Je l'ai déjà fait.
Vous pouvez divulguer le nom de l'entreprise et simplement mettre l'accent sur sa capacité à remplir le cahier des charges de la façon la plus économique pour le consommateur. Ensuite, le gouvernement peut dire: «Je préfère le groupe B» et il suffit alors que l'entrepreneur principal, c'est-à-dire celui qui fournit la cellule, réponde: «À vos ordres», et tout est réglé. C'est la façon dont un gouvernement devrait s'y prendre, à mon avis, pour acquérir un système d'arme très complexe et important.
J'aimerais laisser mon collègue répondre à votre deuxième question, étant donné que je ne sais rien de ce à quoi vous faites allusion.
M. Bill Matthews: Monsieur le président, peut-on me rafraîchir la mémoire et me dire quelle était cette deuxième question?
M. Gordon Earle: En deux mots, pour certains, l'Accord sur le partage de la production de défense et l'Accord sur le partage du développement industriel pour la défense conclus avec les États-Unis privilégient l'industrie américaine aux dépens des entreprises canadiennes. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.
Deuxièmement, est-ce que votre entreprise a tiré profit de ces accords? Si oui, donnez-nous des exemples précis. En outre, si vous pouvez suggérer des modifications à ces accords, vous pouvez aussi nous en parler.
M. Bill Matthews: Du point de vue de Bristol et de mon propre point de vue à moi qui travaille pour cette entreprise, tant le DPSA que le DDSA ont ouvert de bons débouchés aux entreprises canadiennes. Si, en bout de ligne, ces accords ont été plus favorables aux entreprises américaines, c'est que du côté canadien, les programmes ont été sous-financés. Nous trouvons toujours difficile d'assurer, au Canada, le financement de la partie des travaux qui nous revient. En effet, ces programmes fonctionnent de la façon suivante: il faut assurer une partie du financement pour avoir une partie du travail, et si vous ne fournissez pas les fonds dès le départ, vos entreprises n'obtiennent aucun travail.
Dans la plupart des cas, le Canada a sous-financé sa participation à ces programmes, alors que des débouchés s'ouvraient; c'est peut-être à cause des restrictions budgétaires. Quoi qu'il en soit, il y a eu des histoires à succès. Pour vous donner un exemple récent et important, il y a environ cinq ans, nous avons participé au programme Hokum-X dans le cadre du DDSA. Ce programme était parrainé par l'armée américaine et le gouvernement canadien. L'entrepreneur principal était Bristol Aerospace et notre sous-traitant était Boeing. C'était vraiment le monde à l'envers.
Il s'agissait de transformer un hélicoptère réformé pour en faire un appareil totalement différent—que ce soit en matière de signature IR, de signature radar ou d'apparence. Il y avait donc beaucoup de modifications intéressantes à apporter au plan de la signature électronique.
Le programme a fort bien réussi. Les travaux ont été effectués dans les délais prescrits, le budget a été respecté, et nous en sommes maintenant à une étape de suivi incluse dans le programme en option, dans le cadre de laquelle nous produisons des appareils additionnels qui seront tous utilisés aux États-Unis. Voilà donc un cas où une entreprise canadienne a bénéficié de ces accords, même si le financement assuré par le Canada était relativement modeste et si notre participation se limitait au volet développement.
Le président: Merci, monsieur Earle.
Monsieur Price, vous disposez de sept minutes.
M. David Price: Merci, monsieur le président.
Je vais commencer en m'adresser à M. Matthews. Au début de votre exposé, vous avez parlé de la DMPS. Comme vous dites, nous avons entendu parler d'histoires à succès, mais les échecs, on n'en parle pas autant. Pour ce qui est de Goose Bay, le projet est encore trop récent. Nous ne savons pas encore quels seront les résultats. Peut-être pourriez-vous nous donner un ou deux exemples qui illustrent la DMPS.
M. Bill Matthews: Nous avons été l'un des principaux membres d'une équipe dirigée par Lockheed Martin qui a préparé une proposition portant sur la prestation de services de maintenance à l'établissement de génie et d'essais aérospatiaux de Cold Lake. Le MDN avait établi un budget cible. On a demandé aux entrepreneurs de montrer comment ils entendaient fournir un certain niveau de service correspondant à ce budget. Le projet a exigé beaucoup de travail de la part de l'équipe. Au bout du compte, parce que nous envisagions d'utiliser moins d'employés en place que ne le souhaitait le ministère, même si nous prenions le risque de fournir quand même le niveau de service requis, il a tout simplement été décidé de ne pas nous confier le contrat.
M. David Price: Tout le processus a été arrêté.
M. Bill Matthews: Tout le processus a été arrêté, une fois fait l'investissement que cela représentait pour nous. Nous en sommes restés quelque peu amers.
M. David Price: Oui, je peux vous croire.
M. Bill Matthews: Encore une fois, ce qui était en cause, ce n'était pas seulement les services qui devaient être fournis, mais plutôt le fait que le ministère ne voulait pas que nous fassions les choses à notre façon. Il fallait procéder comme le ministère avait l'habitude de le faire.
M. David Price: On ne va donc rien changer du tout.
M. Bill Matthews: C'est exact.
M. David Price: Est-ce un exemple isolé ou y en a-t-il d'autres? Je me doute bien qu'après cette expérience, si vous étiez appelés à participer à un autre projet de ce genre, vous diriez certainement, dès le départ: «Voilà ce que nous avons fait auparavant et la façon dont vous avez réagi. Qu'est-ce qui va arriver cette fois-ci?»
M. Bill Matthews: Je pense que nous hésiterions beaucoup à participer à un appel d'offres concurrentiel entrant dans le cadre de la DMPS, à moins que toutes les conditions ne soient bien différentes.
M. David Price: Quel genre de changements souhaiteriez-vous que l'on apporte?
M. Bill Matthews: J'aimerais que l'on indique plus clairement quelles sont les règles, non pas celles qui sont stipulées au début du processus, mais celles qui sont appliquées à la fin.
À ce que nous sachions, cela se résumait à des problèmes avec les gens en place, des problèmes de conventions collectives et d'avantages sociaux, si vous voulez—comme c'était probablement le cas à Goose Bay, même si je dois dire que je ne connais pas la situation là-bas. Tout un tas de problèmes sont apparus en bout de ligne. Cela a démontré qu'au départ, le projet n'avait peut-être pas été assez bien pensé et que l'on n'avait pas réfléchi à la façon de résoudre ces problèmes avant de lancer un appel d'offres qui coûtait cher.
M. David Price: Aviez-fait l'expérience d'un autre projet de DMPS dans un autre pays, par exemple?
M. Bill Matthews: Nous offrons des services de maintenance dans certains autres pays, mais je ne pense pas que cela puisse mener à des comparaisons valables, car nous remplissons un vide et nous ne remplaçons pas des services fournis par le gouvernement. Lorsqu'il n'y a aucun service, c'est habituellement très simple de se présenter et de les fournir. Mais dans les cas où le gouvernement fournit ce genre de services et où vous vous retrouvez en concurrence avec votre client, pour ainsi dire, les règles deviennent assez floues.
M. David Price: Bien.
Monsieur Haddock, vous avez dit que vous êtes arrivé alors que le programme de recherche et de sauvetage tirait à sa fin, mais je suis sûr que vous en avez beaucoup entendu parler. Manifestement, c'est vous qui dirigez le nouveau programme d'hélicoptère maritime. Vous avez également été gestionnaire de programme. Si vous comparez votre expérience du côté américain et du côté canadien, à quel moment un gestionnaire de programme intervient-il au Canada? Est-il également impliqué dès le départ?
M. Joseph Haddock: Bien sûr. J'ai pu constater que les gestionnaires de programme que j'ai rencontrés ici ont des responsabilités tout à fait similaires. Ils ont un peu plus d'expérience des fonctions primaires, notamment dans le programme des hélicoptères maritimes, parce que c'est ainsi que les choses se passent depuis longtemps.
C'est à la fois un avantage et un problème. L'avantage, c'est que cela permet d'acquérir beaucoup d'expérience et d'accumuler beaucoup de documentation. Le problème, c'est que cela laisse beaucoup de temps libre pour faire des choses qui n'ajoutent aucune valeur au programme—il y a beaucoup de papier qui passe d'un côté du bureau à l'autre, beaucoup de documents d'acquisition sous forme d'ébauches qui peuvent éventuellement être inclus dans le document sous forme révisable, alors qu'il n'y a vraiment aucune raison pour qu'il en soit ainsi. Tout le problème est là. Mais c'est la tâche qu'on leur a confiée, et ils s'en acquittent très bien.
• 1015
J'aime la façon dont les choses se passent dans le bureau où l'on
s'occupe du programme des hélicoptères maritimes. J'aime les relations
étroites qui se tissent entre le service qui s'occupe du cahier des
charges et celui du gestionnaire de programme. Ils sont
essentiellement comme les deux doigts de la main.
Aux États-Unis, des relations presque aussi étroites s'étaient tissées entre le Pentagone et les services de la marine chargés de l'approvisionnement dont les locaux étaient situés à onze minutes de marche les uns des autres; bien des fois, je me suis rendu à pied de Crystal City au Pentagone. Maintenant que nous avons déménagé à Patuxent River, nous découvrons qu'à cause de la distance qui nous sépare du Pentagone, nous fonctionnons de façon moins efficace. J'aime bien qu'il y ait des relations étroites avec le service qui s'occupe des cahiers des charges.
M. David Price: À l'heure actuelle, le système est plutôt figé, étant donné que le processus est en place depuis si longtemps alors qu'au fil des années, il y a eu énormément de changements technologiques. Le système est-il cependant assez souple pour permettre de progresser au rythme de ces changements et de modifier constamment, par exemple, l'EB? Si vous faites la comparaison avec les États-Unis, y avait-il là-bas une certaine souplesse au plan opérationnel, au fur et à mesure que le processus se déroulait, ou bien aviez-vous les mains liées?
M. Joseph Haddock: L'engouement pour la technologie et la rigueur du système d'acquisition des gouvernements ne font pas nécessairement bon ménage. Je pense que c'est bien de s'orienter vers un système qui privilégie les équipements de série disponibles dans le commerce. À la limite, notamment en ce qui concerne les ordinateurs des systèmes de mission, si vous décidez en faveur d'un mode de prestation de services qui aboutit à l'utilisation de Windows NT ou de Windows 98 dans votre aéronef, vos mises à jour vont être faciles, car c'est Bill Gates qui va s'en charger. Vous n'avez qu'à vous les procurer, purement et simplement. Un système de mission qui a ce type de capacité est excellent et très puissant.
Aux États-Unis, c'est au plan budgétaire qu'il n'existe pratiquement aucune marge de manoeuvre. Je reviens sur la question de l'argent, car c'est le problème le plus difficile à régler aux États-Unis. Au cours de l'année où le projet doit être exécuté, le gestionnaire de programme américain n'a pratiquement aucun contrôle sur le plan financier, aucun. Il n'a que l'argent que lui alloue le Congrès. L'entrepreneur pourrait entrer dans son bureau et lui dire: «Donnez-moi 2 millions de dollars aujourd'hui et vous économiserez 50 millions de dollars dans trois ans.», le gestionnaire de programme ne pourrait rien faire. Il n'a pas la marge de manoeuvre nécessaire.
Le président: Merci, monsieur Price. Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions, en commençant par M. Hart qui dispose de cinq minutes.
M. Jim Hart: Merci beaucoup, monsieur le président.
Je me demande si l'un de vous peut nous dire si les fonds réservés au Canada à la R-D sont suffisants ou si on devrait les augmenter. En ce qui concerne l'industrie de la défense, quelle est votre opinion à ce propos?
M. Bill Matthews: Ce n'est jamais assez. Je pense que dans certains secteurs, le Canada finance raisonnablement bien la R-D. Il fut un temps où, à mon avis, les sommes dépensées pour financer la R-D dans les industries de la défense et de l'aérospatiale étaient assez raisonnables. À l'exception de Bombardier et peut-être de Pratt & Whitney Canada, je crois qu'il n'y a pas d'entreprises qui ont assez d'envergure pour entreprendre des travaux de R-D permettant de fabriquer des produits qui se maintiennent, à long terme, parmi les meilleurs du monde. Nous le savons, les divers secteurs qui appuient ce type de R-D font l'objet de restrictions.
Nous estimons que le PPT est l'approche qu'il faut adopter, car elle permet réellement de partager les risques du développement de technologies et de processus nouveaux et d'occuper une position du chef de file dans la spécialité qui a pu être choisie. Ce genre de partage des risques est nécessaire pour des industries de la taille de celles qui existent au Canada. Je parle de l'industrie de l'aérospatiale. On compte très peu d'entreprises de très grande envergure au Canada, et les autres n'ont pas la capacité voulue à l'heure actuelle pour prendre tous les risques qu'implique la fabrication de produits d'avant-garde. Ce serait mieux s'il y en avait davantage.
• 1020
De notre point de vue, le PPT est un bon programme, un programme qui
s'oriente dans le bon sens. Il a subi les effets d'un certain
sous-financement, mais on a rectifié le tir dans une certaine mesure
dans le dernier budget. Nous espérons voir cette tendance se
poursuivre.
M. Jim Hart: Avez-vous des observations à faire?
M. Joseph Haddock: J'aurais tendance à dire, moi aussi, que les fonds consacrés à la R-D ne sont jamais suffisants. Toutefois, à mon avis, il y a en quelque sorte une dichotomie entre adhérer strictement à une technologie de série et appliquer la R-D, surtout dans une situation comme celle du MDN. Si vous devez faire des coupures, alors, de mon point de vue, il vaut mieux confier la R-D à quelqu'un d'autre. Des programmes comme le PPT peuvent prendre le relais, mais il faut s'assurer que l'argent est utilisé à bonnes fins et non gaspillé ailleurs.
M. Jim Hart: Monsieur Haddock, vous avez dit que pour maintenir le Sea King en état de vol, cela nous coûte 6 500 $ de l'heure. Je présume que ce coût va augmenter parce qu'il va nous falloir attendre au moins huit ans avant de disposer d'une nouvelle plate-forme pour remplacer celle de l'hélicoptère embarqué. Cette remarque ne met en cause aucun gouvernement en particulier, même si on cherche à connaître votre opinion sur ce qui s'est passé depuis 1993.
Il semble que le problème ait des ramifications beaucoup plus profondes que cela, car nous avons entendu des témoins nous dire que l'on a mis en place au moins quatre fois un programme de remplacement du Sea King, dès les années 70. Il semble qu'en ce qui concerne certains équipements, on pratique presque la gestion au coup par coup. Que pouvons-nous faire pour régler ce problème très réel et ne pas attendre que certains équipements essentiels soient devenus complètement obsolètes pour les remplacer?
Le président: Vous avez une minute pour répondre.
M. Joseph Haddock: J'ai juste une minute.
Le président: Désolé, je sais que c'est une question à laquelle il est assez difficile de répondre en une minute.
M. Joseph Haddock: C'est difficile, en effet. Je pense que c'est une question de volonté politique, purement et simplement. S'il n'en tenait qu'au MDN, vous auriez de nouveaux hélicoptères. Il faut trouver l'argent, défendre votre position et faire la dépense nécessaire.
Était-il logique d'annuler le NAE, sachant que chaque hélicoptère coûtait 5,8 milliards de dollars? Je dirais que oui. De nos jours, 5,8 milliards de dollars, c'est une somme, et je pense que le programme d'hélicoptère maritime va vous permettre d'avoir des appareils très valables pour beaucoup moins que 5,8 milliards de dollars.
Je le répète, c'est donc une question de volonté politique, parce que les dirigeants se disent: «Où est l'ennemi, le monde a changé, avons-nous vraiment besoin de cela?» C'est la même chose aux États-Unis. Je suis surpris que l'on n'ait pas annulé le programme du F-22 Raptor. Il y a aussi le programme conjoint d'avions de combat. Si vous jetez un coup d'oeil au budget, c'est vraiment un peu dur à avaler. Je ne suis pas certain que le budget américain puisse absorber cela.
Donc, faites preuve de volonté politique et restez sur vos positions si vous pensez que c'est nécessaire. Je ne crois pas que le programme d'hélicoptère maritime soulève beaucoup de questions parmi la population. Je pense que ce n'est pas un dossier qui pose un problème de fond.
Le président: Merci, monsieur Haddock.
Monsieur Hart, merci. Je donne maintenant la parole à M. Pratt pour cinq minutes.
M. David Pratt: Merci, monsieur le président.
J'aimerais vous demander à tous les deux de me parler d'un phénomène que l'on a pu constater aux États-Unis et en Europe; je veux parler des fusions dans l'industrie de la défense. J'aimerais savoir si d'après vous, cela va éventuellement avoir un impact sur le processus d'acquisition utilisé en Amérique du Nord. Avez-vous quelques petites idées là-dessus?
Monsieur Matthews, on a beaucoup entendu parler de la controverse que suscite actuellement le fait que le Canada a perdu son statut de nation la plus favorisée en ce qui concerne les entreprises du secteur de la défense et les contrats conclus de l'autre côté de la frontière. Vous attendez-vous à ce que cela ait des retombées sur vos activités?
Quant à vous, monsieur Haddock, pensez-vous que le problème d'électricité statique de l'hélicoptère Griffon, dont on a fait état récemment, a été grossi par les médias? Est-ce un problème relativement courant? Qu'en pensez-vous?
M. Joseph Haddock: Si vous le permettez, je veux faire une observation en réponse à votre première question, à propos des fusions et des effets que cela pourra avoir.
• 1025
Politiquement parlant, la situation va certainement devenir plus
intéressante qu'à l'heure actuelle; avec une entreprise qui emploie de
250 000 à 500 000 personnes—ce qui pourrait être le cas si Lockheed
Martin continue de tout acheter—vous avez un moyen d'influence très
fort. En effet, une telle entreprise emploie des gens dans tous les
États, ce qui crée un intérêt politique et, bien évidemment, selon
moi, donne un avantage certain à cette société.
Cela peut avoir une autre conséquence, comme nous avons pu le constater aux États-Unis: une société d'une telle envergure a des bras et des tentacules innombrables et mène de front de nombreux programmes; alors, si les politiciens décident qu'il faut réduire de 200 millions de dollars le programme F-22, Lockheed Martin peut fort bien intervenir devant le Congrès en disant: «Parfait, mais vous savez, ce programme-ci et ce programme-là et celui-là encore vont tous vous coûter plus cher, tous les prix vont augmenter, parce que nous, qui sommes une grosse société, avons des frais généraux et que tout dépend de...» C'est un autre problème.
Je crois que les fusions importantes qui ont eu lieu en Europe... Et si je peux me permettre de répéter un cliché, je dirais que cela mène à encore plus de manoeuvres politiques. De toute façon, en Europe, le processus est très politisé, et si ces fusions ont lieu, ce sera comme si on traitait avec une firme ou un organe du Parlement et non avec un entrepreneur du secteur de la défense.
Alors, est-ce une mauvaise chose? Pas forcément. Tout le monde regrette la disparition de la concurrence, mais vous savez bien ce que je pense de la concurrence, et s'il y a un seul entrepreneur avec lequel vous êtes en quelque sorte obligés de travailler... Par exemple, Newport News construit des porte-avions. Nous aussi, nous en construisons encore. Je ne sais pas si c'est rentable, mais il y a une bonne collaboration entre le gouvernement et Newport News ce qui, à mon avis, est l'aspect positif de cette situation. Je crois donc qu'à cet égard, la balance ne penche pas vraiment d'un côté ou de l'autre.
Le président: Monsieur Matthews, vous avez une question à poser?
M. Bill Matthews: Monsieur le président, la question concernait les modifications récemment apportées à la législation américaine qui ont un impact sur les méthodes traditionnelles que nous employons ici pour faire affaire.
Plus précisément, je pense que ce qui est en question, ce sont les amendements apportés aux règlements concernant le commerce international et les accords sur l'armement; en effet, le Canada perd ainsi certaines des exemptions importantes dont il jouissait et qui lui permettaient d'échapper à certaines des dispositions les plus lourdes de conséquences qui étaient imposées aux pays étrangers.
Or, les États-Unis sont encore notre plus gros client dans le secteur de la défense et également sur le plan commercial. Dans l'immédiat, l'effet s'est relativement peu fait sentir. Les contrats en vigueur demeurent, etc. Dans l'avenir prévisible, nous ne pensons pas qu'il y aura de graves conséquences parce que nous travaillons déjà sur certains programmes, etc.; nous avons la documentation et ainsi de suite.
Mais il est probable que l'impact que cela aura sur nous sera beaucoup plus marqué dans des situations comme celle-ci, par exemple: disons que nous voulons soumissionner pour appuyer Sikorsky dans le cadre d'un certain programme; Sikorsky peut fort bien ne pas pouvoir fournir les données requises pour faire une contre-offre. La procédure imposée par le département d'État peut fort bien se traduire par une contrainte de telle envergure et qui durera si longtemps que le concours sera terminé avant que nous ayons pu voir quelque documentation que ce soit. Cela aura un impact majeur sur les entreprises canadiennes qui, notamment dans le secteur commercial, dépendent de ce genre de chose pour rester en affaires.
Tout aussi important, peut-être, cela touche les secteurs de l'aérospatiale, des satellites et des fusées, des secteurs où les relations entre le Canada et les États-Unis, par l'intermédiaire de la NASA et de l'Agence spatiale canadienne, étaient très solides. Je dirais que de telles dispositions menacent également ces relations.
Nous sommes très déçus que ces changements aient été apportés et que pour quelque raison que ce soit, le Canada n'ait pas pu conserver les avantages dont il jouissait. Nous nous attendons à certains effets négatifs en aval si nous ne mettons pas en place des mécanismes qui nous permettront d'obtenir les informations dont nous avons besoin à temps: par exemple, faire une demande d'information bien à l'avance ou quelque chose comme cela. Cela va définitivement nous rendre la vie beaucoup plus difficile.
Le président: Merci, monsieur Pratt.
[Français]
Monsieur Laurin, cinq minutes.
M. René Laurin: Pendant que je pose ma première question, j'aimerais, si c'est possible, qu'on revienne à la diapositive traitant de la politique sur les profits parce que ma deuxième question portera là-dessus.
Compte tenu des coûts exorbitants de l'entretien des hélicoptères, existe-il chez les fabricants d'hélicoptères ou d'avions des politiques de garantie de fonctionnement ou des pièces, comme cela existe dans le domaine de l'automobile?
[Traduction]
M. Joseph Haddock: Les fabricants d'hélicoptères offrent effectivement des garanties. Le sénateur Dan Quayle fit adopter par le Congrès, au milieu des années 80, une loi qui stipulait que tous les approvisionnements militaires devaient être accompagnés d'une garantie. J'ai été le destinataire de cette directive, et cela a abouti à augmenter d'environ 10 p. 100 le coût du matériel. On n'a rien pour rien. Cette loi fut par ailleurs à l'origine d'un énorme cauchemar logistique, car il fallait que chaque pièce porte une plaque de garantie indiquant qui appeler en cas de panne; par ailleurs, en cas de panne, il fallait s'adresser au tribunal pour savoir si c'était l'utilisateur qui l'avait cassée ou si elle s'était brisée toute seule. C'était donc quelque chose de très compliqué à appliquer.
Je pense que de nos jours—et j'en ai fait l'expérience concrète—si un entrepreneur fabrique une pièce de mauvaise qualité, le monde entier le saura car les fabricants d'hélicoptères ont moins de clients. Le secteur n'a pas procédé à des fusions comme l'ont fait d'autres industries, et c'est un panier de crabes. Par conséquent si vous construisez un hélicoptère qui n'est pas fiable, le monde entier le saura et vous ferez tout simplement faillite. C'est mon opinion.
En ce qui concerne les coûts exorbitants, je me permettrai de m'inscrire en faux à l'égard de ce qui a été dit. Les coûts diminuent. Je voudrais juste mentionner—même si je n'aime pas faire de la publicité en la circonstance—que notre nouvel hélicoptère, le S-92, a été conçu pour le marché commercial et pour permettre à un exploitant commercial de gagner de l'argent. Notre rôle, en tant que fabricant d'hélicoptères, est de fabriquer un appareil aussi bon marché à exploiter que possible.
Nous devons pouvoir soumissionner contre d'autres fabricants d'hélicoptères qui présentent d'autres modèles et faire mieux qu'eux pour ce qui est du prix. Pour y parvenir, nous nous sommes inspirés de Ford Motors et des Japonais. Nous avons appris à construire des machines d'un niveau de qualité six sigma. Nous avons appris à résoudre le problème des fuites. Nous n'avons pas encore trouvé comment les empêcher de vibrer, mais les vibrations sont intrinsèques à un hélicoptère, et elles ont été minimisées.
Je pense donc qu'il y a des moyens de faire baisser les coûts, et des moyens grâce auxquels les entreprises peuvent—là encore en partenariat avec un associé, un gouvernement ou un exploitant privé—offrir la garantie que si les appareils tombent en panne, il suffira simplement de les renvoyer pour les faire remplacer gratuitement.
[Français]
M. René Laurin: Lorsque la politique de garantie a été appliquée, a-t-elle été avantageuse pour l'acheteur?
[Traduction]
M. Joseph Haddock: Je crois. Là encore, dans un environnement commercial... J'en reviens toujours au secteur commercial car j'en ai encore le souvenir. Mais ça serait la même chose pour le secteur militaire. Foncièrement, on achète l'appareil...
[Français]
M. René Laurin: Je m'excuse de vous interrompre. Je veux savoir si la garantie a été utilisée. Si on donne une garantie qui n'est jamais utilisée par l'acheteur, ce dernier paie une surprime. En pratique, on donne une garantie sur des pièces qui ne se brisent jamais. C'est le sens de ma question. Il faudrait que vous puissiez me répondre répondre brièvement, parce que j'aimerais qu'il me reste du temps pour mon tableau.
[Traduction]
M. Joseph Haddock: Oui. C'est avantageux pour l'acheteur, et l'acheteur s'en prévaut; en l'occurrence les militaires y recourent moins que les acheteurs commerciaux.
[Français]
M. René Laurin: Dans le tableau, vous donnez trois exemples, A, B et C. Pourriez-vous reprendre l'explication que vous en avez donnée, parce que je ne crois pas avoir bien saisi le sens de vos propos? C'est M. Matthews, je crois, qui a expliqué ce tableau-là.
M. Bill Matthews: Monsieur le président, quand on regarde le premier des deux tableaux, les exemples A, B et C, on constate que la politique actuelle prévoit un coût de 100 $, un bénéfice de 8 $ et un prix de vente de 108 $. L'exemple B montre que s'il y avait une réduction du coût, il y aurait également, en vertu de la politique actuelle, une réduction du bénéfice...
Le président: Une réduction obligatoire.
M. Bill Matthews: ... une réduction obligatoire du bénéfice. Par conséquent, il est difficile de comprendre où est l'incitatif pour quelqu'un qui voudrait réduire les coûts, car il ne lui serait pas possible de récupérer l'investissement consenti pour parvenir à cette réduction du coût.
Dans le troisième exemple, cette réduction du coût est partagée, et le client bénéficie encore d'une réduction substantielle, mais le fournisseur a cette fois la possibilité de récupérer ses coûts et même, le cas échéant, d'obtenir un petit quelque chose pour avoir réduit le coût pour son client.
Le tableau du bas est simplement une récapitulation des résultats.
Le président: Merci d'avoir clarifié ce point.
Je donne maintenant la parole à M. O'Reilly qui dispose de cinq minutes.
M. John O'Reilly: Merci, monsieur le président.
Je souhaitais avoir des commentaires un peu plus précis sur le programme A-12. Je ne suis pas sûr de comprendre comment cela se situe par rapport à la procédure d'approvisionnement dont nous discutons. Je me demande s'il vous serait possible d'en parler de façon un peu plus détaillée.
M. Bill Matthews: Le A-12 a fait l'objet d'un concours pour la commande d'un avion embarqué de remplacement, un gros bombardier à rayon d'action moyen. Il s'agissait d'un appareil qui se situait très près du F-117, très furtif, si bien que tout le processus était secret, première complication.
Le deuxième problème venait du fait que l'appareil devait non seulement être de type furtif, mais qu'il s'agissait d'un avion embarqué, capable de transporter une grosse quantité d'armements internes et d'atterrir sur un porte-avions. Cela exigeait une utilisation poussée de la technologie furtive et de matériaux composites. Les firmes McDonnell Douglas, Northrop Grumman, Lockheed Martin étaient en concurrence; elles ont toutes répondu à l'appel d'offres. McDonnell Douglas l'a emporté en déclarant qu'il pouvait fabriquer l'appareil. Le budget lui-même était classé secret et jalousement gardé au Congrès.
Foncièrement, le fait qu'il s'agissait du dernier avion embarqué qui serait construit avant 50 ans poussa les fabricants à se dire: «Mon Dieu, il faut que nous emportions l'affaire.» Ils sous-estimèrent la tâche et le coût. Ils se mirent au travail et s'aperçurent qu'ils n'y arriveraient pas. Le gouvernement ne disposait pas des données qu'il avait promises, et la coopération avec l'armée de l'air et les responsables du F-117 était inexistante. On informa le Congrès que tout allait bien. M. Cheney, le secrétaire d'État à la Défense de l'époque, déclara au Congrès que tout se passait bien. Or, le lendemain, les dirigeants de McDonnell Douglas se sont présentés au Congrès pour dire: «Nous dépassons la soumission d'un milliard de dollars. Si vous ne nous aidez pas, nous allons droit à la faillite.» M. Cheney déclara: «Je pensais que tout allait bien». La marine a eu plutôt l'air bête. Il annula le programme et limogea deux amiraux et le gestionnaire du programme.
L'affaire a été portée en justice. Elle est d'ailleurs toujours entre les mains de la justice, et la facture va s'élever à 4 milliards de dollars. Les tribunaux ont déclaré que nous devons ce montant aux entrepreneurs, que nous les avons trompés, que nous ne disposions pas d'un cahier des charges valable, ou que nous n'avons pas reformulé nos exigences, que l'appel d'offres ne tenait pas debout et que nous aurions dû nous rendre compte du coût de l'appareil. Ce fut un jour très sombre—c'était, je pense, en 1991. Cela a eu pour conséquence de réveiller les responsables de l'approvisionnement de la marine américaine qui s'efforça d'apporter des changements draconiens au processus. Et nous y sommes parvenus en... Le plus important a été de faire preuve d'ouverture à l'égard de l'industrie et de refondre la procédure qui aboutit à un système complexe.
Vous le remarquerez, le successeur de l'A-12—nous avions toujours besoin d'un avion embarqué—fut le F/A-18, qui ne fut pas soumis à un appel d'offres. Le contrat fut simplement attribué à McDonnell Douglas, vu qu'il s'agissait d'une modification du F-18C/D. Si vous mettez les deux appareils côte à côte, vous remarquez qu'il ne s'agit pas du même avion. C'est donc comme cela que le A-12...
M. John O'Reilly: Le MDN met actuellement au point un plan d'action pour restructurer son processus d'acquisition. Êtes-vous au courant? Dans l'affirmative, pouvez-vous nous en dire quelque chose?
M. Joseph Haddock: Tout ce que je sais, c'est ce que vous venez de m'en dire. Je n'ai rien constaté à ce propos, à part le fait que le bureau du programme est très actif auprès de toutes les entreprises en lice pour l'hélicoptère maritime qu'il recueille l'information et qu'il nous fournit une aide très utile pour le programme d'essais du S-92.
M. John O'Reilly: Je suppose que notre comité doit son existence au rapport du vérificateur général qui mentionnait que des améliorations étaient nécessaires. C'est, je pense, la vocation du comité et c'est la raison pour laquelle j'ai posé la question. On entend toujours le MDN dire qu'il procède à des modifications, à des changements, et que tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais nous voudrions savoir si, à l'autre bout, vous entendez la même chose, ou si vous constatez que de nouvelles procédure sont mises en place.
M. Joseph Haddock: On parle effectivement de discussions sur la diversification des modes de prestation de services concernant la maintenance à long terme. Je ne peux que rappeler l'exemple d'un EB et notre surprise quand nous avons constaté que la DP avait quelque 1 200 pages.
Le président: Merci, monsieur O'Reilly.
M. John O'Reilly: Monsieur le président, je voudrais invoquer le Règlement à propos d'une question connexe. J'ai reçu une lettre que j'aimerais voir traduite et consignée au procès-verbal, de manière à ce que tous les membres du comité puissent en prendre connaissance.
Le président: Si vous la transmettez à la greffière, elle veillera à ce qu'elle soit traduite, distribuée aux membres du comité et consignée officiellement au procès-verbal.
M. John O'Reilly: Merci. Cela n'a rien à voir avec vous, la lettre traite d'une autre question.
Le président: Elle concerne les marins de la marine marchande et présente l'importante question dont nous parlons sous un autre angle.
Je vais maintenant donner la parole à M. Earle pour cinq minutes.
M. Gordon Earle: Merci, monsieur le président.
Ma question s'inscrit dans le prolongement de l'observation qui a été faite concernant un énoncé de besoins de 1 200 pages. Il y a une chose que j'ai apprise depuis que nous avons entrepris d'examiner le processus d'approvisionnement du ministère de la Défense nationale: c'est certainement un processus long et compliqué, et probablement relativement frustrant parfois pour tous les intéressés.
Plusieurs ministères sont impliqués dans ce processus. Il y a le ministère de la Défense nationale bien sûr; le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international à cause des divers accords commerciaux internationaux; Industrie Canada pour les retombées régionales et ainsi de suite; Travaux publics et Services gouvernementaux; et le Conseil du Trésor. J'aimerais que les témoins nous donnent leur opinion sur l'intervention d'un aussi grand nombre de ministères, et qu'ils nous disent si, en pratique, cela complique le processus. Vos entreprises comprennent-elles parfaitement les divers rôles des différents ministères? Selon vous, ces ministères coordonnent-ils correctement leurs efforts dans le cadre de ce processus?
M. Bill Matthews: Je dirais, pour commencer, que l'implication d'un grand nombre de ministères complique évidemment le processus. Je ne suis pas bien placé pour dire s'il s'agit ou non d'une complication nécessaire.
Si l'on procède effectivement à une comparaison avec le contexte commercial pour des produits similaires, on s'aperçoit que dans le contexte commercial, la procédure s'étalerait sur peut-être trois à six mois, selon la complexité du dossier, et peut-être sur seulement 30 jours s'il était simple. Comment parviennent-ils à procéder aussi rapidement? Il y a des procédures établies et des acheteurs qui sont chargés de se procurer les produits requis, et qui en sont tenus responsables. Si les acheteurs ne parviennent pas à conclure des marchés avantageux, ils ne montent pas dans la hiérarchie de l'entreprise et ils peuvent même être obligés à cherche un emploi ailleurs.
Par comparaison, le même processus, au gouvernement, prend de cinq à six ans, et je pense qu'il devrait être possible de faire quelque chose pour l'améliorer.
C'est une chose de s'entendre sur un cahier des charges dans une perspective opérationnelle. Cela se fait probablement assez vite, compte tenu de la taille et de l'importance de la commande. Donc, on peut penser qu'au cours de la première année, un cahier des charges pour un programme majeur tel que celui des hélicoptères maritimes pourrait être assez bien défini.
Mais il faut ensuite tenter de persuader chacun des autres ministères, y compris le Conseil du Trésor, voire même le Cabinet, que tout est conforme dans les moindres détails. Comme la procédure n'aboutira jamais à la première tentative, cela ajoute plusieurs années au processus dans son ensemble, et on aboutit à un système qui, dans une certaine mesure, s'autorépète. Ensuite, le temps passe, le cahier des charges peut évoluer légèrement ou c'est le budget qui change, et le programme doit ensuite être refocalisé et ainsi de suite. Finalement, plus ça prend de temps, plus il faut de temps.
M. Joseph Haddock: Je pense que c'est un excellent résumé. J'ajouterai seulement que, dans l'industrie, nous comprenons bien sûr que les gouvernements doivent se montrer équitables, et je pense que l'équité de la procédure rend nécessairement les délais plus longs, mais la volonté de se montrer aussi équitable que possible pourrait peut-être profiter d'un examen attentif du processus.
Le reste du processus... Je voudrais préciser une chose: la demande de propositions pour le CSH comptait 1 200 pages; l'EB était, à notre avis, déjà bien défini à la page 30.
Le président: Encore une minute, monsieur Earle, si vous voulez.
M. Gordon Earle: L'un ou l'autre des témoins pourrait-il dire ce qu'il considère comme la chose à faire en priorité pour améliorer tout le processus d'approvisionnement? Je sais qu'il s'agit d'une question très vaste, mais pourriez-vous définir en une minute ce qui, à votre avis, doit être simplifié en priorité pour rendre le processus plus efficace?
M. Joseph Haddock: Dans ma déclaration préliminaire, j'ai dit que s'il y a un budget à respecter, il faut le dire, et ensuite faire en sorte que le cahier des charges permette de le respecter. Au cours des années 80, les budgets évoluaient en fonction des cahiers des charges. Dans les années 90, nous devons adapter les cahiers des charges.
Le président: Monsieur Matthews, pourriez-vous répondre brièvement à la même question? Je pense que mon collègue souhaitait entendre deux opinions.
M. Bill Matthews: Il ne m'en vient pas de meilleure à l'esprit.
Le président: It says it all, comme on dit en anglais.
M. Bill Matthews: Mais je pense qu'une transparence initiale et une stabilité budgétaire seraient dans le meilleur intérêt de tout le monde.
Le président: Très bien, merci.
Monsieur Clouthier, vous avez cinq minutes.
M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Oui. Messieurs, avant de nous faire élire députés à la Chambre des communes, nous avions tous une véritable occupation. Certains étaient enseignants, d'autres dans les affaires. O'Reilly était agent immobilier, ça se voit, car il a la parole facile et pourrait vendre de la crème glacée à un Esquimau.
Le président: Il va vous vendre une voiture à la sortie.
M. Hec Clouthier: Oui, tout à fait.
J'ai travaillé dans l'industrie de l'exploitation forestière, et j'aimerais revenir à ce processus d'approvisionnement, aux énoncés de besoins et aux demandes de propositions. Je pouvais m'adresser à des commerçants locaux si, par exemple, je voulais acheter quatre ou cinq gros grumiers, qui sont assez chers, ou deux ou trois bouteurs et leur dire: voilà exactement ce que je veux. Certains revenaient me voir et dans le meilleur des cas, me fournissaient ce que j'avais demandé en me disant: voilà ce que ça coûte.
Mais vous venez de dire, monsieur Haddock, que le Sikorsky a été déclaré non conforme, avant même qu'il ait été question de prix. Manifestement, c'est parce qu'il ne satisfaisait pas au cahier des charges. Je trouve cela difficile à justifier, vu que c'est moi qui paie, enfin, en l'occurrence, c'est le gouvernement. Je sais que vous avez rencontré certaines difficultés, mais pourquoi Sikorsky ou n'importe quel autre fabriquant d'hélicoptère serait-il disposé à engager de grosses dépenses pour se préparer alors que, nous le savons tous, on vous a dit: voilà l'ER ou voilà la DP, et après en avoir pris connaissance, vous vous êtes dit: non nous n'allons pas faire ce qu'ils veulent, nous allons proposer notre propre modèle et qu'ils aillent au diable? Et, bien sûr, ça va être moins cher.
Un gars est venu me dire: «Hec, je peux te vendre ce boutoir pour 75 000 $ de moins que mon plus proche concurrent.» J'ai répondu: «Oui, mais voilà le moteur que je veux. Tu me proposes un moteur qui a 25 chevaux de moins, et ce n'est pas ce que je voulais.»
Je sais que c'est difficile quand on vient du secteur dans lequel vous travaillez et que vous pensez peut-être qu'ils n'ont pas besoin de tous les accessoires possibles et imaginables qu'ils veulent; et il se peut que vous ayez tout à fait raison. Mais on revient à la question de savoir pourquoi quelqu'un répondrait à un appel d'offres sachant qu'il n'obtiendra pas la commande?
M. Joseph Haddock: Bonne question. N'étant pas employé par Sikorsky à l'époque, je me suis demandé pourquoi ils faisaient cela s'ils ne pouvaient pas satisfaire au cahier des charges? Ils vendent des hélicoptères à travers le monde depuis 50 ans. La réponse est que nous pensions que nous satisfaisions au cahier des charges.
Il y a plusieurs hypothèses à ce sujet, et on peut en tirer une conclusion. Nous sommes un fabricant d'hélicoptères. Nous passons notre temps à essayer de vendre des hélicoptères dans le monde entier. Pourquoi avons-nous pensé que nous satisfaisions à ce cahier des charges? Parce que certaines charges étaient cachées; parce que c'était énoncé dans le cadre d'un ensemble de statistiques différent. Tel ou tel facteur était-il souhaité ou exigé? Je ne connais pas la réponse à cette question.
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Je sais toutefois que la société Sikorsky n'est pas stupide. Quelque
chose nous a poussés à soumissionner. C'était la conviction que nous
pouvions gagner, être juste un peu moins-disants—et nous savions que
ce serait très serré. Il y avait quelques facteurs qui pouvaient tout
changer. Premièrement, nous avons des hélicoptères de recherche et de
sauvetage dans le monde entier. Un de nos hélicoptères de la garde
côtière venait de récupérer des gens au large de la Nouvelle-Écosse;
j'ajouterais qu'il était piloté par un Canadien. Donc, nous avons
pensé: très bien, nous savons ce qu'est la recherche et le sauvetage;
nous l'avons pratiquement inventé avec nos hélicoptères. Deuxièmement,
effectivement, c'est serré, mais si nous apportons quelques
modifications au réservoir de carburant, le volume de la cabine sera
suffisant. Troisièmement, nous allons être à 50 p. 100 du prix. On
penserait que les gouvernements seraient intéressés à payer 50 p. 100
de moins pour le même potentiel.
Or, nous avions tort. Si je remets mon uniforme, je peux dire que le processus du cahier des charges a fonctionné. Il a très bien fonctionné. Le cahier des charges l'a emporté. Les techniciens de la recherche et du sauvetage l'ont emporté. Ils disposent d'hélicoptères dont le Canada a besoin pour faire ce qu'il juge nécessaire. C'est très bien en ce qui nous concerne. Pas de problème. Mais je ne pense pas que nous ayons été stupides en soumissionnant. Je crois simplement que vous vouliez qu'il y ait un appel d'offres, et vous l'avez fait.
Le président: Monsieur Clouthier.
M. Hec Clouthier: Pensez-vous qu'il serait possible d'intégrer un mécanisme à la demande de propositions—des milliards et des milliards de dollars sont en jeu—pour que, dans le cadre du processus, les responsables puissent rencontrer—cela s'est peut-être fait—les gens qui fabriquent les hélicoptères qui pourront alors donner des explications sur leur perspective et sur les raisons pour lesquelles ils ne se sont pas véritablement conformés à l'EB, ou simplement dire: voilà notre raisonnement. Pourquoi voudriez-vous tous ces gadgets, ou pourquoi souhaitez-vous autant d'espace dans la cabine, pourquoi tant de chevaux quand vous pouvez très bien vous en dispenser? Y a-t-il eu des consultations de ce genre entre les parties?
M. Joseph Haddock: Je vais remettre mon uniforme de marin. Sikorsky avait justement la réputation d'une entreprise qui disait: on sait mieux que vous ce qu'il vous faut. Ce n'est pas une approche très recommandée vis-à-vis un client. Non, non, ce n'est plus ainsi que nous fonctionnons. Nous nous contentons de nous dire, en somme voici les spécifications. Je suppose que si nous avions une question à propos du volume requis pour la cabine, nous dirions: donnez-le nous en pieds carrés, en mètres carrés, en verges carrées, sous une forme ou sous une autre. Donnez-nous un chiffre et nous allons mesurer; s'il ne nous est pas possible de répondre à la demande, nous ne ferons pas de proposition, un point c'est tout. C'est facile. Pourquoi? Comment cela se fait-il? Pourquoi avons-nous soumissionné?
Le président: Monsieur Clouthier, je vous remercie.
Chers collègues, il faut finir à 11 h tapant, et on peut le faire.
Monsieur Price, vous avez cinq minutes.
M. David Price: Il a à nouveau été question d'acquisition de produits de série et je me demandais si vous pouviez parler un peu du problème de l'interopérabilité avec nos partenaires de l'OTAN, avec tous ceux avec lesquels nous traitons aujourd'hui. Le principe de l'acquisition de produits livrables sur stock prend un peu plus d'importance. Cela réduit-il nos coûts, ou le contraire? Par ailleurs, pour terminer, à propos du problème d'électricité statique du Griffon que nous n'avons pas abordé...
M. Joseph Haddock: Je commencerai par parler de ce problème.
M. David Price: Très bien.
M. Joseph Haddock: Les hélicoptères, les palles de rotor qui tournent dans l'air, produisent de l'électricité statique. C'est incontournable. Il faut donc que l'aéronef soit mis à la terre. Et dans le cas des hélicoptères maritimes, lorsque vous repêchez un type dans l'eau, la dernière chose que vous voulez faire, c'est lui faire attraper le câble de levage, car il ferait alors l'expérience du choc de sa vie. Par conséquent, on commence par descendre le câble de levage, on met l'hélicoptère à la masse, on traîne le câble jusqu'au type, et on le monte à bord.
Les hélicoptères Griffon accumulent naturellement une charge statique. Il y a des déperditeurs de potentiel habituellement sur la queue de l'appareil, des petits morceaux de matière fibreuse qui claquent au vent et qui sont censés décharger l'appareil de son électricité statique de temps à autre. Mais au fond... Je trouve étrange que ce problème d'électricité statique soit considéré comme une surprise, car si vous avez passé le cours de physique 101, vous allez naturellement savoir qu'il y aura une charge statique dans n'importe quel aéronef. Donc, il faut d'abord que l'appareil se pose avant que quiconque y touche, et après il sera à la masse et tout ira bien.
Maintenant, pour répondre rapidement à la question sur l'acquisition de produits de série, je dirais que cela devrait se solder par une économie. Les questions d'interopérabilité peuvent être résolues. Il y a des questions d'interopérabilité qui se posent à propos de n'importe quel hélicoptère qui s'envole de n'importe quel navire—et je m'en tiens à ce que je connais, c'est-à-dire aux hélicoptères maritimes—il faut le même carburant, des orifices de ravitaillement identiques, des aires de poser virtuellement adaptables à la plupart des hélicoptères, à moins que cela implique les plus petites frégates. Donc, c'est un problème. La disponibilité des pièces—si vous choisissez un avion existant dont un grand nombre d'exemplaires volent à travers le monde et qu'il existe aussi une énorme chaîne logistique, vous allez économiser de l'argent, c'est certain, en prenant un appareil livrable sur stock.
M. Bill Matthews: Monsieur le président, pourrais-je juste ajouter quelque chose?
Le président: Je vous en prie.
M. Bill Matthews: Je pense que la livraison sur stock est un concept intéressant, mais il faut bien distinguer entre ce qu'il est raisonnable d'utiliser parmi les produits de série et ce qui ne l'est pas. Comme on peut le constater dans les conflits en cours, c'est du matériel plutôt spécialisé, qui ne fait partie d'aucun stock que l'on utilise. Il n'est donc pas raisonnable de penser que l'on pourrait se procurer la majorité du matériel de défense dans le commerce, selon moi, mais il y a certains éléments qui... lorsqu'il est possible de remplacer le sur mesure par du matériel de série, nous devrions le faire. Je pense qu'ici encore, comme l'a souligné M. Haddock, prendre un maître d'oeuvre et lui confier cette responsabilité est une façon de tirer le meilleur parti du concept d'approvisionnement à partir de matériels livrables sur stock, car il peut contribuer à la décision en disant ce qu'il vaut la peine d'acheter dans le commerce et ce qui doit être fabriqué sur mesure.
Le président: Monsieur Bertrand, il nous reste suffisamment de temps pour une question, si vous en avez une autre—une ou deux, très brèves.
M. Robert Bertrand: Une très brève.
Monsieur Haddock, j'ai remarqué que dans votre cv vous indiquez que vous avez reçu votre brevet de pilotage en 1971 et que vous avez été entraîné sur les hélicoptères Sea King. Pouvez-vous me dire si l'armée américaine utilise toujours le Sea King?
M. Joseph Haddock: Oui, je pense qu'il y a toujours des hélicoptères Sea King en service. On les a retirés de nos navires. Nous leur réservons un rôle foncièrement utilitaire comme points de prise de vue et pour les opérations de recherche et de sauvetage.
M. Robert Bertrand: Savez-vous si on a l'intention de les remplacer?
M. Joseph Haddock: Oui. La marine américaine possède un plan directeur qui porte essentiellement sur huit... deux modèles d'hélicoptère. J'ajouterai que les deux sont fabriqués par Sikorsky.
M. Robert Bertrand: Une coïncidence.
Ai-je le temps?
Le président: Alors, une très brève question.
M. Robert Bertrand: Dans votre exposé, vous avez déclaré que le processus d'approvisionnement canadien est plus simple que celui des Américains. Pourriez-vous brièvement décrire au comité—en une ou deux minutes—la procédure américaine, étape par étape?
Le président: Si je peux me permettre, serait-ce trop vous demander de nous envoyer une note de synthèse sur la question?
M. Joseph Haddock: Pas du tout. Ça me prendra environ un mois pour la rédiger.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Je présume que vous ne pourriez pas l'expliquer en une minute.
Monsieur Haddock, monsieur Matthews, je vous remercie de nous avoir donné un témoignage très utile et très franc. Cela nous aidera. Je pense que le rythme des questions a été assez vif. J'aime le nouveau format, qui était une idée de M. Pratt.
Je vous remercie à nouveau, chers collègues, ainsi que nos témoins. Merci de nous avoir accordé un peu de votre temps.
La séance est levée.