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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 24 novembre 1998

• 1529

[Traduction]

Le président (M. Pat O'Brien (London—Fahshawe, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants.

M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président: Très bien, monsieur Wood.

M. Bob Wood: Avant de commencer, je sais que beaucoup de rumeurs circulent, monsieur le président, quant à la comparution des membres de la Canadian Merchant Navy Veterans Association devant notre comité. Comme vous le savez, la réunion de jeudi a été annulée puis reportée.

Il est important que ces hommes aient la possibilité d'exposer leur cas devant le comité le plus tôt possible. J'aimerais simplement dire que grâce aux efforts laborieux du greffier et de notre président, et avec l'aide précieuse de M. Chadderton, notre témoin d'aujourd'hui, nous sommes arrivés à dégager un créneau dans le calendrier pour que ces marins de la marine marchande puissent comparaître jeudi matin, et ils ont déjà été officieusement invités.

J'espère, bien évidemment, que tout le monde pourra assister à cette réunion à 9 heures.

Le président: Merci, monsieur Wood.

• 1530

Cela convient-il à tout le monde que nous les entendions à notre heure normale de réunion à 9 heures?

Des voix: Oui.

Le président: Quant à l'annulation, si je peux me permettre, c'était en fait une simple erreur. La ministre, Mme Fry, a annulé sa comparution mais il n'était pas question d'annuler toute la réunion.

C'est une simple erreur de logistique et nous nous excusons de la méprise.

M. Goldring invoque le Règlement.

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): Nous avions demandé à ce que M. Bill Riddell, le président de la Merchant Navy Association, puisse aussi comparaître devant le comité.

Avez-vous réfléchi à la question? J'ai également en ma possession une lettre de confirmation.

Le président: Une lettre de M. Riddle?

M. Peter Goldring: Une lettre de mon bureau en son nom, à propos de sa demande.

Le président: J'ai entendu dire que M. Riddle voulait comparaître. Je lui ai parlé, tout comme vous, après notre dernière réunion puisqu'il était dans la salle. Il m'a dit son intention de m'envoyer des informations. Je n'ai encore rien reçu et je m'attendais à recevoir une requête de sa part.

Un membre du comité peut suggérer un témoin, mais il est plus normal que ce soit le témoin qui fasse lui-même sa demande.

Quoi qu'il en soit, entendre M. Riddle ne me pose pas de problème. Est-ce que cela pose...

Permettez-moi simplement de vous rappeler que vous pouvez proposer des témoins, mais qu'il est préférable qu'ils confirment eux-mêmes leur demande de comparution.

M. Peter Goldring: Dans la lettre que j'ai, M. Bill Riddell me demande de faire cette demande en son nom. Elle a été envoyée...

Le président: Est-ce que c'est cette lettre, Peter?

M. Peter Goldring: Oui.

Le président: Je dis simplement qu'il serait préférable qu'il envoie directement sa demande de comparution au greffier.

Pour la prochaine fois. Je suis prêt à l'entendre.

Des commentaires?

M. Bob Wood: Il faudrait peut-être nous mettre d'accord sur la durée des témoignages.

Peter, si nous entendons les marins de la marine marchande, combien de temps leur accorderons-nous et combien de temps donnerons-nous à M. Riddell? Je crois qu'il vaudrait mieux se mettre d'accord à l'avance.

Le président: Je suggérerais d'accorder à M. Riddell cinq ou dix minutes après les marins de la marine marchande.

M. Bob Wood: Ou plus, si vous voulez.

Le président: S'il nous reste plus de temps.

M. Peter Goldring: Il fait partie du groupe. Je crois que ce serait approprié.

M. Bob Wood: Qu'il témoigne après les marins de la marine marchande?

M. Peter Goldring: Oui.

Le président: Si cela convient au comité, très bien.

Cependant, pour que les choses soient claires à l'avenir, si vous avez quelqu'un que vous aimeriez voir comparaître, demandez, je vous prie, à cette personne de communiquer directement avec nous pour éviter tout malentendu.

Madame Wayne.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le président, quelqu'un pourrait-il m'expliquer qui est M. Riddell?

Le président: M. Riddell est un ancien marin de la marine marchande lui-même qui...

M. Peter Goldring: Le président de la Merchant Navy Association.

Mme Elsie Wayne: L'ancien président?

Le président: Vous invoquez le Règlement, monsieur Laurin?

[Français]

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le président, je demanderais à mes collègues de s'assurer que lorsqu'ils vous adressent la parole, leur microphone est bien allumé et en bonne position. Les interprètes nous disent souvent que si nous ne portons pas à cela une attention très spéciale, nos interventions risquent d'être inaudibles. J'apprécierais grandement votre collaboration à cet égard.

[Traduction]

Le président: C'est bien ça.

Mme Elsie Wayne: Monsieur le président, est-ce que je peux finir?

Le président: Ce qui aide aussi—et généralement cela ne pose pas de problèmes—c'est que vous passiez par la présidence. Non seulement c'est la procédure correcte, mais cela permet également aux interprètes de faire correctement leur travail.

Madame Wayne, voulez-vous continuer?

Mme Elsie Wayne: Oui; je n'avais pas fini.

Le président de la Merchant Navy Association ainsi que d'autres anciens combattants qui accompagnent M. Chadderton vont venir. Je me demande pourquoi ils ne font pas chacun leur exposé. C'est le président de la marine marchande, président dûment élu, qui vient ici pour vous parler avec M. Chadderton. D'accord? Ce sont eux que nous devons entendre car nous avons déjà entendu les représentants de la coalition.

Le président: Tout à fait.

Bien entendu, nous sommes un comité de la Chambre des communes du Parlement canadien et tout citoyen canadien a le droit de demander à comparaître dans le contexte de nos délibérations. Je considère donc cette demande comme légitime, sauf que, je sais... et j'accepte, pour cette fois-ci, monsieur Goldring, mais à l'avenir je veux que les demandes nous viennent des témoins eux-mêmes, s'il vous plaît.

Je sais que M. Riddell veut nous parler. J'avais penser qu'il nous enverrait quelques documents et une demande, mais si le comité est d'accord nous l'ajouterons à la réunion de jeudi.

Y a-t-il d'autres commentaires à ce sujet? Êtes-vous d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Monsieur Bertrand.

• 1535

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Je me demandais simplement si nous aurons le temps...

Le président: Oui, c'est vrai.

Je signale aux membres du comité que nous avons une vidéo très importante qui sera diffusée sur les antennes nationales dans les prochains jours sur le stress post-traumatique. Je crois qu'il serait très utile que nous puissions la visionner.

Je vais vous demander de mettre fin à notre discussion avec les témoins vers 16 h 45. Cela leur donnera tout le temps qu'il faut, tout le temps qu'il nous faut pour nos questions et cela nous permettra de voir cette vidéo avant d'aller voter à la Chambre.

Croyez-vous que nous allons y arriver? Très bien? Vous êtes d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Très bien.

Monsieur Chadderton, messieurs, vous savez comment nous procédons. Il arrive que l'exposé des témoins soit très long et qu'il ne reste plus de temps pour poser des questions. Sans vouloir vous offenser, souvent la partie la plus utile de ce genre d'exercice est la période de questions et de réponses.

Si vous pouviez en tenir compte, je vous en saurais gré.

Soyez les bienvenus.

M. Clifford Chadderton (président, Association nationale d'anciens combattants du Canada): Monsieur le président, mesdames et messieurs,

[Français]

c'est avec grand plaisir que je participe aux délibérations de votre comité.

[Traduction]

Permettez-moi de vous présenter ceux qui m'accompagnent. Faye Lavell est le chef de service des Associations nationales d'anciens combattants du Canada et Brian Forbes est notre avocat.

En guise d'introduction, nous avons déposé un certain nombre de documents auprès du secrétariat de votre comité. Bien entendu, nous n'avons pas l'intention de les lire, mais mon expérience en la matière, de plus de 50 ans—c'est la 67e fois que je comparais devant un comité parlementaire—m'a montré l'utilité de coucher par écrit tout ce que nous avons l'intention de vous dire, de le déposer auprès de votre secrétariat puis, lors de la comparution, de faire un résumé des points les plus importants.

Cela dit, j'aimerais lire ma déclaration d'ouverture. C'est la seule chose que vous lirai car tout y est ou presque. Son but est de vous faire comprendre qui nous sommes.

Cela fait six mois que nous participons à cette étude et nous sommes arrivés à une conclusion assez intéressante. Le gouvernement canadien a besoin d'un nouveau programme de grande portée pour résoudre les problèmes des soldats canadiens du maintien de la paix après leur retour à la vie civile. Dans notre mémoire de 57 pages, présenté au secrétariat du comité de la Chambre des communes de la défense nationale et des affaires des anciens combattants, le 15 juillet 1998, les 35 organismes des associations nationales des anciens combattants ont conclu que la diversité des dispositions courantes représente une politique insuffisante pour aider les membres sortants des Forces canadiennes.

Notre exposé fait état des opérations de maintien de la paix des Forces canadiennes au cours des 40 dernières années, et signale le rôle joué par le Canada dans la supervision des accords d'interruption des hostilités depuis 1949, dans quelque 53 pays—dont plusieurs du Tiers monde. Au cours de ces missions, les Canadiens, souvent désarmés, étaient placés entre des forces extrêmement hostiles qui n'attachaient que peu de prix à la vie humaine. Les dangers inhérents, quoique à une échelle moindre, n'étaient guère différents de ceux des théâtres d'hostilités au cours de la Deuxième Guerre mondiale et de la guerre de Corée.

J'ajouterai, monsieur le président, que j'ai vu le film que vous allez voir. Mon commentaire a été simple après l'avoir vu. En quatre mois de combats pendant la Deuxième Guerre mondiale, je n'ai jamais rien vu de si terrible. Cela vous donne une petite idée de ce qui vous attend.

On laisse entendre que le ministère de la Défense nationale n'a pas très bien réussi à informer la population des circonstances semblables ailleurs dans les endroits occupés par nos troupes, ce qui a probablement contribué au peu de compassion pour ces hommes de service et ces femmes à leur retour dans la vie civile. Il paraît, en fait, que les officiers supérieurs, responsables des politiques, n'ont, jusqu'à tout dernièrement, porté que peu d'attention aux besoins des membres libérés.

Nous aimerions attirer l'attention du comité sur l'exposé détaillé de notre important mémoire sur le programme de réadaptation à l'intention des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale. Nous ne voyons aucune raison pour qu'un programme semblable ne soit pas mis sur pied dans les Forces canadiennes d'aujourd'hui.

• 1540

C'est encore plus important si le Canada s'attend à ce que les soldats actuels du maintien de la paix aient à maintenir la réputation du pays en soutenant les principes de droits de la personne, de stabilité et de la paix. Ces principes ont été établis en partie dans la Déclaration des droits de l'Homme, dont feu John Humphrey, de l'Université McGill, était l'auteur.

Je mentionne son nom parce qu'il était membre honoraire de notre association, et c'était un amputé. Nous devons aussi nous rappeler qu'on s'est tourné vers le Canada pour ces initiatives lorsque le premier ministre, M. Lester Pearson, s'est vu décerner le Prix Nobel de la paix.

Nous n'offrons aucun excuse pour les critiques quelque peu désagréables à propos de l'inefficacité de la présente Loi sur les pensions en ce qui a trait aux indemnités lorsque les soldats des Forces canadiennes ont subi des blessures reliées à leur service dans les forces armées. Voilà un sujet qui a été étudié par un grand nombre de comités gouvernementaux et de groupes d'étude, y compris lors de l'examen complet du comité d'étude de l'organisation et du travail de la Commission canadienne des pensions (1965-1968).

L'auteur de ce mémoire—moi—était le directeur général de cette étude, menée par feu M. le juge Mervyn Woods, de la cour d'appel de la Saskatchewan et ancien combattant de la Deuxième Guerre mondiale. Les autres membres étaient l'honorable Walter Lindal, retraité du tribunal civil du Manitoba et ancien combattant de la Première Guerre mondiale, et le colonel Gerard A.M. Nantel, du cabinet du juge-avocat général et ancien combattant de la Deuxième Guerre mondiale.

Il importe de mentionner que la législation régissant les provisions de pension à l'intention des soldats des Forces canadiennes du maintien de la paix a été mise sur pied en 1924 afin de gérer une force permanente extrêmement petite. Cette législation est entièrement inadéquate pour combler les besoins croissants des forces armées d'aujourd'hui.

L'exemple le plus important, c'est l'inefficacité de la présente législation à reconnaître qu'un membre des Forces est au travail 24 heures sur 24. Le fait d'être au travail n'entre même pas dans la prise de décision en vue d'obtenir une pension.

La prise de décision se fonde sur deux principes. Premièrement, si d'une part la mort, les blessures ou les maladies ont été contractées dans un endroit de travail désigné—exemple: le golfe Persique—la veuve ou le membre a droit au principe d'assurance qui fournit une pension peu importe les circonstances.

Si d'autre part, la mort, les blessures ou les maladies n'ont pas été contractées dans un endroit de travail désigné, le demandeur doit prouver que l'incident résulte de son service ou y est directement relié. C'est très difficile à prouver.

La restriction voulant que le principe d'assurance s'applique seulement aux endroits de travail désigné est périmée si on se rappelle particulièrement de la contribution des membres des forces armées dans les situations critiques nationales telle la confrontation d'Oka, la tempête de verglas 98 et l'inondation du Manitoba.

On a porté que peu d'attention ou même aucune attention à la situation des membres sortant ayant servi dans les Forces pendant de nombreuses années, (dix années ou plus par exemple). Ce problème prend de l'ampleur si l'on tient compte de la politique actuelle d'universalité qui exige qu'un membre des Forces soit capable de se mesurer aux normes physiques propres au combat ou être mis à la retraite.

Nous devons nécessairement faire une autre comparaison entre les membres libérés après un service exemplaire de longue durée dans les forces armées et les personnes renvoyées par un employeur civil.

Dans le premier cas, il semble n'y avoir littéralement aucune disposition dans les lois qui pourrait aider à obtenir un nouvel emploi. La loi provinciale sur les normes de l'emploi et les affaires de mise à pied injuste comportant des mesures adéquates pour assurer la transition entre l'actuel et le nouvel emploi pour les personnes renvoyées par les employeurs civils.

Nous reconnaissons en plus le dilemme que vivent les personnes qui ont offert leurs excellents services dans les forces militaires canadiennes en temps de paix devant la désignation d'«anciens combattants». Immédiatement après les première et deuxième guerres mondiales et la guerre de Corée, la désignation d'«ancien combattant» avait une connotation connue qui aidait au retour à la vie civile.

D'autre part, nous comprenons fort bien les préoccupations de ceux qui ont servi pendant de nombreuses années ou qui ont subi des blessures dans les forces du maintien de la paix et qui ne peuvent être désignés «anciens combattants». Le titre de «casque bleu n'a pas, selon nous, la même connotation que celui d'«ancien combattant».

• 1545

Nous croyons toutefois qu'il est temps d'offrir aux personnes ayant servi de façon exemplaire pendant de nombreuses années, soit dans des endroits de travail désignés—et nous suggérons à ce propos que ces endroits de travail désignés devraient inclure les endroits également dangereux au Canada—ou au Canada, le droit à la désignation d'honneur d'«ancien combattant».

C'est simplement notre exposé d'ouverture, monsieur le président. J'aimerais également rendre hommage à votre comité à propos de votre premier rapport. Ce ne sera pas long.

Il s'agit du document intitulé «Supplément à l'introduction» avec votre titre «Marche vers l'avant» comme sous-titre. Encore une fois je ne vais pas le lire mais je vais m'y référer.

Mes collègues et moi-même avons longuement étudié votre rapport. Nous ne commenterons que la partie du rapport qui traite des problèmes consécutifs à la libération.

Notre premier commentaire est qu'il semblerait qu'il existe un fâcheux malentendu parmi le personnel des Forces canadiennes au sujet du montant de l'indemnité payable selon la Loi sur les pensions. Je le dis parce qu'il a fallu tellement de temps pour déterminer si ces gens remplissaient les conditions d'admissibilité à la Loi sur les pensions. J'indique que l'évaluation moyenne aujourd'hui pour les libérer des forces armées en temps de paix n'est que de 20 p. 100, ce qui se traduit par 343 $ par mois. Ce n'est pas ça qui réglera leurs problèmes consécutifs à leur libération.

Deuxièmement il y a un malentendu tout aussi fâcheux à propos de la différence entre les paragraphes (1) et (2) de l'article 21 de la Loi sur les pensions. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi car c'est un problème qui va devenir de plus en plus récurrent.

Le paragraphe 21(1) traite des zones de service spécial. C'est le principe de l'assurance. Le type qui tombe de son vélo en se rendant au centre-ville mais dans la zone du Golfe est couvert. Par contre, prenez le type qui est hébergé par un civil pendant les inondations au Manitoba. Il peut sortir de chez lui, trébucher, se casser la jambe et il n'est pas couvert. On considère que cela ne résulte pas du service et n'y est pas directement relié.

C'est, je crois un des grands problèmes que vous avez examinés dans votre premier rapport mais, d'après moi, il faudrait faire encore plus.

Je m'en tiendrai là. Nous donnons plus de détails dans le document.

Je tenais à féliciter votre comité, monsieur le président, car je me rends compte du travail que vous avez fait.

Comme je l'ai dit tout à l'heure je m'intéresse à ces questions depuis 50 ans. Pendant 17 de ces années j'ai été directeur du programme d'aide financière de l'Armée canadienne; donc, il n'y a pas grand monde, je crois, qui puisse m'en apprendre sur les circonstances terribles dans lesquelles vivent les simples soldats du rang des Forces armées canadiennes. À ce que je sache, c'est la première fois que quelqu'un, votre comité, se penche sur les problèmes de ces gens qui vivent dans les logements familiaux ou de ces gens qui vivent sur le marché libre à Gagetown, et j'en suis personnellement très heureux. C'est un excellent rapport.

J'ai déposé auprès de votre comité en juillet dernier un rapport de 58 pages. Certains de vos attachés de recherche ont ce rapport et je ne vais donc pas vous le lire mais j'ai préparé pour aujourd'hui un «condensé». Je crois que si nous nous en servons comme document de discussion nous pourrons aller directement à l'essentiel des problèmes.

À la première page je donne simplement la liste des organismes qui appartiennent au conseil national que je représente. Certains d'entre vous sont membres de certaines de ces associations—par exemple, l'aviation, les infirmières, les pilotes de chasse, les prisonniers de guerre. Elles sont toutes membres du conseil national dont je suis le président et au nom duquel j'ai l'honneur de vous parler.

• 1550

Je passe à la page deux.

Pour commencer, comme je viens de le dire, je sais gré à votre comité d'avoir étudié ce document de 57 pages. Beaucoup de gens ont eu l'occasion de plus ou moins le lire et ils m'ont dit qu'il était fort instructif. Ils m'ont dit qu'il y avait beaucoup de vérités dans ce document sur la réalité des Forces canadiennes aujourd'hui qui devraient être rendues publiques. Il devrait constituer la base de vos discussions.

Deuxièmement, je fais référence au programme de rétablissement des anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale car, à franchement parler, je vois très peu de différences. Je donne la liste à la page quatre de certaines de ces choses.

Lorsque nous avons été libérés de nos engagements après la Deuxième Guerre mondiale, il existait un programme complet de formation professionnelle. Si vous aviez les aptitudes nécessaires, vous pouviez devenir plombier, médecin—tout ce que vous vouliez.

Il y avait un programme de retour à la vie civile, ce qui voulait dire que celui qui revenait retrouvait le travail qu'il avait avant la guerre et ses années de guerre comptaient pour son ancienneté.

Il y avait des pensions pour les blessures, les maladies ou les décès.

Il y avait le fonds de secours et d'allocations aux anciens combattants. C'était une sorte de caisse noire. Un type pouvait se présenter au ministère des Anciens combattants, dire qu'il avait des problèmes et il pouvait recevoir un chèque de 25 $ et se faire dire «Revenez-nous voir». Il avait également droit à une allocation d'ancien combattant s'il n'arrivait pas à travailler.

Il touchait aussi des prestations de chômage. Je tiens à parler de l'assurance-emploi et de son absence. Il n'y avait pas d'assurance-chômage à cette époque mais ils avaient droit à des prestations de chômage pendant toute une année.

Il pouvait suivre des cours de formation sur le tas, programme merveilleux, car les employeurs aidés par le gouvernement embauchaient un ancien combattant pour le former. À la fin de cette formation, s'il était bon, l'employeur le gardait.

Bien entendu, ils bénéficiaient de la gamme complète des soins médicaux.

Ils avaient droit au prêt aux entreprises et aux professionnels. Ça voulait dire beaucoup pour ceux qui voulaient ouvrir une petite épicerie de quartier.

Ils avaient leur établissement sur une ferme ou une petite propriété, la Loi sur les terres destinées aux anciens combattants.

Il y avait des subventions pour le rétablissement, ce qui signifiait que si vous aviez une idée de rétablissement vous pouviez vous adresser au ministère et dans certaines limites, en fonction de vos états de service, cela pouvait être couvert.

Il y avait également des crédits de rétablissement dépendant de la durée du service.

C'est simplement ce qui était mis à la disposition des soldats ayant servi pendant la Deuxième Guerre mondiale. Je ne vois pas vraiment pourquoi nous ne pourrions pas offrir un programme pour aider ceux qui sont libérés de leurs engagements aujourd'hui—à supposer que nous reconnaissions tous le caractère extraordinaire du travail que font ces gens.

Je ne peux même pas imaginer à quoi peut ressembler d'être envoyé dans quatre pays différents en l'espace de deux ans et en laissant derrière femme et enfants.

C'est dans ce contexte que nous vous faisons ces propositions.

C'est jumelé à la politique d'universalité que je trouve draconienne mais qu'il nous faut supporter. Et je crois que vous comprenez ce que je veux dire. Dans les Forces armées canadiennes aujourd'hui, si un soldat ne répond pas immédiatement aux attentes, il est libéré. Comme en plus, il n'y a pas de programme pour ces gens qui sont libérés, les problèmes que cela crée sont énormes.

Je crois qu'il faudrait rappeler ce que les membres des Forces armées canadiennes font de nos jours. Je sais que vous avez étudié la question, que les gens sont venus vous parler de leur situation, de leurs problèmes de logement, etc., mais je n'ai vu nulle part d'énoncés complets de tout ce qu'ils font.

J'ai moi-même étudié la question. Je suis membre du Congrès des associations de la Défense, de tous les organismes, je suis donc au courant et je pense être en mesure de dire certaines choses.

Pour commencer—et je ne pense pas que la population le sache—les Forces armées canadiennes, lorsqu'elles sont en mission, ont le devoir de protéger les civils. Ce n'était pas le cas pendant la Deuxième Guerre mondiale. Cela fait partie aujourd'hui de leur travail.

Elles sont censées superviser les trêves entre les factions armées.

Troisièmement, les Forces canadiennes se retrouvent obligatoirement dans des circonstances où il faut veiller à ne pas créer d'incidents politiques. Imaginez d'avoir à dire à un caporal qui a peut-être une neuvième année, qu'il a intérêt à être prudent car s'il ne fait pas bien son travail ou s'il énerve l'une ou l'autre des deux parties en présence, il risque de mettre en danger tout l'avenir des Nations Unies.

• 1555

Nous imposons des responsabilités énormes à ces simples soldats et à ces caporaux.

Ensuite, ils sont envoyés en mission à l'étranger sans être préparés. Ceux d'entre vous qui se sont retrouvés dans des zones de combat ou près des zones de combat comprendront ce que je veux dire.

Pendant la Deuxième Guerre, nous savions qu'à un moment ou à un autre il faudrait nous battre. Beaucoup de ces jeunes s'engagent pour de très bonnes raisons mais sont-ils vraiment préparés pour affronter le genre de choses que vous verrez dans ce film tout à l'heure? Posez-vous la question.

Je crois que rien ne peut préparer un jeune de 18 ans au spectacle d'un Hutu qui décapite un Tutsi qui n'a même pas trois ans. Je fais peut-être un peu trop dans le tragique, mais c'est la réalité de ce génocide.

Le gouvernement—et je vais conclure—semble hésiter à reconnaître que les caractéristiques des opérations de maintien de la paix s'assimilent à celles de la guerre, et je ne sais pas pourquoi. J'ai connu la guerre. Je ne vois aucun inconvénient à ce qu'une opération postérieure à la Deuxième Guerre mondiale soit assimilée à une opération de guerre. Je connais l'exemple d'un soldat qui a perdu une jambe dans la Bande de Gaza. Je me suis battu pendant cinq ans pour que le ministère des Anciens combattants lui fasse bénéficier du programme d'autonomie des anciens combattants; pour eux ce n'était pas assimilé à une guerre. Il y a donc certaines hésitations.

C'est le condensé de certaines des recommandations. Je vais essayer d'aller aussi vite que possible.

La Loi sur les pensions dont l'intention actuelle est de couvrir le service dans un théâtre de guerre devrait être modifiée de manière à prévoir le versement d'une pension à quiconque est blessé, tombe malade ou est tué en service. Les militaires devraient également être jugés de service 24 heures sur 24. Il faudrait aussi que par secteur de service spécial—c'est-à-dire à l'extérieur du Canada—on entende toute circonstance dans laquelle il y a danger pour la santé.

Deuxièmement, quand une pension est accordée à un membre des Forces en temps de paix, il faudrait qu'elle lui soit payée immédiatement, peu importe qu'elle ait été méritée dans un secteur de service spécial ou non.

Hier après-midi, je suis allé faire une conférence au centre des communications de Leitrim à à peu près cinq milles d'ici. J'ai rencontré un militaire qui a perdu les doigts de la main dans l'accident du Hercules à Alert. On lui a accordé une pension d'invalidité de guerre, mais il ne peut la toucher tant qu'il n'aura pas été libéré des forces armées. Cela me semble absurde. Je crois que votre comité devrait s'y intéresser.

Troisièmement, lorsqu'une pension est accordée mais qu'elle n'est pas justifiée à cause d'une inconduite, elle devrait être annulée sauf si, pour des motifs de compassion, il convient de la verser aux personnes à charge.

Par exemple, un soldat peut se servir sans autorisation d'un véhicule militaire. Il peut le fracasser contre un poteau téléphonique, se blesser sérieusement et être libéré. Il devrait avoir le droit de faire une demande de pension. Cette pension, s'il est considéré qu'il était en service, etc., ou si c'est considéré raisonnable, peut être versée mais elle peut-être suspendue pour inconduite conformément aux dispositions de la loi.

Mais qu'en est-il alors des personnes à charge de ce militaire? C'est le point important. C'est un détail qu'il faut régler dans la loi.

Je ne mentionnerai pas le cas de Matchee, le cas de ce militaire qui s'est pendu mais, en fait, c'est exactement cela. D'accord, il s'est pendu; il y a eu inconduite, probablement; mais il a une femme et des enfants. Devraient-ils être pénalisés ou ne devraient-ils pas l'être étant donné que ce qu'il a fait, il l'a fait dans un secteur de service spécialisé?

Cinquièmement, les militaires devraient avoir droit aux prestations d'assurance-emploi. J'ai toujours des problèmes à essayer d'expliquer à mes amis qu'un membre des Forces armées canadiennes aujourd'hui—et j'en discutais avec un sergent hier—verse 75 $ par mois de cotisation à l'assurance-emploi. Pourtant, lorsqu'il est libéré des forces régulières des Forces armées canadiennes, il ne peut toucher de prestations d'assurance-chômage tant qu'il ne s'est pas trouvé un emploi ou qu'il n'a pas eu un emploi pendant six mois ou un an en fonction des circonstances.

• 1600

Comment peut-on justifier le prélèvement de 75 $ par mois sur la paie d'un caporal des Forces armées canadiennes aux fins de l'assurance-chômage et lui dire en même temps que tant qu'il n'aura pas d'emploi après avoir quitté l'armée il ne pourra pas toucher de prestations. C'est une des réelles injustices liées à la situation consécutive à la libération des militaires.

Cinquièmement...

Le président: Si je peux me permettre, monsieur Chadderton, nous sommes légèrement limités par le temps. Les membres du comité ont dit vouloir regarder cette vidéo que vous nous recommandez vivement. Si votre intention est de lire et de commenter chacune de vos 22 recommandations, il ne restera pas grand temps pour les questions.

Vous êtes un homme d'expérience puisque vous nous avez envoyé tous ces documents à l'avance.

M. Clifford Chadderton: Très bien.

Le président: Je suppose que les membres du comité ont lu tous ces documents. Comment voulez-vous procéder? Il ne restera pas grand temps pour les questions et c'est ma seule crainte.

M. Clifford Chadderton: Très bien. Permettez-moi de conclure sur un ou deux des points des plus importants si cela ne vous dérange pas.

Tout ce que j'ai lu dans le rapport à propos des prestations d'invalidité versées en vertu du Régime de pension du Canada semble jusqu'à présent indiquer que ces gens n'obtiennent pas les renseignements nécessaires et pourtant s'ils ne sont plus militaires et totalement handicapés, ils peuvent faire une demande de prestation d'invalidité au Régime de pension du Canada. Je crois que c'est une autre grosse injustice.

Pour ce qui est de la priorité d'emploi, j'ai visité des centres d'emploi. J'ai demandé si on accordait une attention particulière à ceux qui avaient passé 20 ans dans les forces armées. La réponse est non. Je crois que c'est une question que vous devriez étudier.

J'aimerais faire deux autres commentaires. Le terme «névrose post-traumatique» est une des expressions les moins bien comprises de l'histoire; on saisit d'ailleurs mal ce que cela représente.

En ce qui a trait aux pensions, si un membre des forces armées s'adresse aux Affaires des anciens combattants et veut présenter une demande de pension parce qu'il souffre d'emphysème et qu'il s'agit là d'un trouble post-traumatique, on lui dira qu'il doit obtenir un diagnostic d'un médecin. Il consulte un médecin civil et celui-ci lui dit: «Vous souffrez d'emphysème.» L'ancien combattant lui dit oui, mais c'est un trouble post-traumatique qui découle de ma présence dans le Golfe. Le docteur ne sait rien des conditions qui existaient dans le Golfe et cet ancien combattant se trouve le bec à l'eau.

J'ai écouté ce que le ministère des Affaires des anciens combattants avait à dire—j'étais à une importante conférence il y a quelques semaines—et je crois qu'il nous faut étudier la question et dire simplement: «Prenez des raccourcis». Si les renseignements existent et si vous savez que cet ancien combattant a vécu ces conditions qui ont causé ce trouble post-traumatique, et s'il souffre d'une maladie ou d'un problème quelconque qu'il n'avait pas quand il s'est enrôlé, mais qu'il l'avait lorsqu'il est revenu, et que c'est la raison pour laquelle il n'est plus dans les forces armées, je crois que le ministère des Affaires des anciens combattants doit faire la même chose qu'on fait en Australie. On pourrait automatiquement dire: «Vous souffrez d'un trouble post-traumatique, et nous vous accorderons une pension». Ce n'est pas si simple que ça, et je crois que votre comité doit se pencher sur la question.

Enfin, il faut se demander qui en fait est un ancien combattant. Ça ne semble peut-être pas un gros problème, mais cela représente un énorme problème pour ceux qui ont fait partie des forces armées en temps de paix. Les 35 organisations que je représente sont d'avis—et nous avons tenu notre réunion annuelle samedi dernier—que ce n'est pas simplement ceux qui étaient membres des forces armées pendant la Seconde guerre mondiale ou la Guerre de Corée qui devraient être désignés «anciens combattants».

Je m'en tiendrai à cela, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup. Nous vous remercions d'avoir adapté votre présentation à la façon de procéder du comité.

• 1605

Je vais passer au premier tour de questions. Mais puisque nous aurons la présentation vidéo à 16 h 45, je n'autoriserai que des périodes de cinq minutes pendant le premier tour; nous procéderons cependant comme d'habitude, puis nous passerons à un deuxième tour de questions si nous avons le temps.

Monsieur Goldring, du Parti réformiste.

M. Peter Goldring: Merci, monsieur le président.

Je tiens à vous remercier de votre exposé, monsieur Chadderton.

Vous avez mentionné dans votre mémoire certains des problèmes auxquels est confronté celui qui est libéré des forces armées après le service militaire en temps de guerre. Ainsi, après la Seconde guerre mondiale, lorsque les militaires sont revenus, ils ont eu un traitement spécial au niveau de l'éducation, des emplois et des pensions de retraite, entre autres choses.

Cette question est peut-être secondaire, mais elle touche en fait ce à quoi les anciens combattants n'ont pas accès aujourd'hui. On pourrait résumer la situation comme on le fait avec les membres de la marine marchande pendant la Seconde guerre mondiale, c'est-à-dire qu'on leur refuse pendant des années l'égalité. Il s'agit là de choses que ces militaires ne reçoivent pas.

Ai-je raison?

M. Clifford Chadderton: Je crois que la différence c'est qu'il y avait une mesure législative qui touchait les anciens combattants de la Seconde guerre mondiale; l'autre problème c'est que le gouvernement n'a pas reconnu la participation des membres de la marine marchande.

Ce que j'essaie de dire—et je ne veux pas mélanger les pommes et les oranges—c'est que les gens, le gouvernement, devraient tenir compte des circonstances que vivent les membres des Forces armées d'aujourd'hui. Il devait ainsi décider quels sont les avantages qu'on peut justifier pour faciliter la transition vers la vie civile après 10 ou 20 ans de service dans les forces armées.

M. Peter Goldring: Mais cette liste semble assez juste, on pourrait penser qu'elle est justifiée si elle a été tenue à jour depuis la Seconde guerre mondiale. Sur cette base, on voit que certains ont obtenu des avantages que d'autres n'ont pas eus.

M. Clifford Chadderton: La différence, c'est que pendant les 10 années qui ont suivi la guerre de Corée, les gens considéraient les Forces armées canadiennes—ce qu'on appelait les forces permanentes—exactement de la même façon que les forces permanentes entre les deux guerres. On pensait que ces soldats-là montaient à cheval et apprenaient à danser le cotillon, et c'était à peu près tout. On ne les envoyait jamais à l'étranger. Par contre, dès que nous avons commencé à envoyer nos forces armées à l'étranger, tout a changé.

Ce que je veux dire, et vous le reconnaîtrez avec moi, c'est qu'à cette époque-là, on aurait dû reconsidérer leur statut sérieusement et dire: si nous envoyons ces gens-là à la bande de Gaza, il faudrait peut-être penser mettre en place un programme en prévision du jour où ils reviendront à la vie civile. Mais nous ne l'avons pas fait.

M. Peter Goldring: Et cela nous amène à ce que vous avez dit au sujet du syndrome de la Guerre du Golfe. Nous en sommes maintenant à la Guerre du Golfe, mais nous n'avons toujours pas réfléchi à ces problèmes, qu'il s'agisse de la Guerre du Golfe ou des autres missions de maintien de la paix.

J'aurais assez tendance à dire comme vous que lorsque les gens partent en guerre, ils ne passent pas toujours quatre ans à se battre en première ligne. Parfois, sur une période de quatre ans, il s'agit de quelques mois. Ainsi, qu'il s'agisse de la Guerre du Golfe, de la Première ou de la Seconde guerre mondiale, les gens peuvent être traumatisés pour le reste de leur vie lorsqu'ils sont exposés à d'horribles combats.

Ce qui me semble incroyable également, c'est que les hommes et les femmes qui reviennent de la Guerre du Golfe ou de missions de maintien de la paix où ils ont assisté à d'horribles combats, ne soient pas traités de la même façon que les soldats revenant de la Seconde guerre mondiale, une époque où nous savions pas la moitié de ce que nous savons aujourd'hui.

Est-ce que c'est tellement évident... est-ce que quelqu'un a tracé arbitrairement une ligne dans le sable et déclaré: «La Seconde Guerre mondiale était une vraie guerre»? Il a fallu attendre tout ce temps pour considérer la guerre de Corée comme une guerre. À partir de quel moment considère-t-on qu'un conflit est une guerre?

M. Clifford Chadderton: C'est justement la raison pour laquelle ce comité devrait assumer une certaine responsabilité et se demander ce que deviennent ces gens quand on les renvoie des forces armées. Est-ce que la responsabilité n'est pas la même qu'après la Seconde guerre mondiale et la Corée, ne faudrait-il pas au moins prévoir un programme de réinsertion ou de réhabilitation? C'est aussi simple que cela.

Le président: Ce sera votre dernière question.

M. Peter Goldring: Oui.

Dans ces conditions, il semble évident qu'on devrait prévoir ce genre de choses pour l'ensemble des forces armées, et non pas pour des cas particuliers. Nous aurions dû mettre en place un système à l'intention de nos soldats, qu'ils reviennent du Moyen-Orient ou d'avoir combattu des feux de forêt en Colombie-Britannique. Dans tous ces cas-là, il semble y avoir des problèmes, des possibilités de traumatisme.

• 1610

Maintenant, lorsque les gens quittent les forces armées, pensez-vous également qu'on devrait leur donner la préférence pour des postes dans la fonction publique? Que pouvons-nous faire pour les aider à se réadapter à la vie civile?

M. Clifford Chadderton: J'ai formulé 24 recommandations, et c'est justement une d'entre elles, le fait qu'on devrait certainement leur donner une certaine préférence dans la fonction publique, pour les emplois nationaux, etc. C'est un élément parmi 24 qui me semble nécessaire.

M. Peter Goldring: Avez-vous une idée?

Le président: Excusez-moi, monsieur Goldring, mais je dois donner la parole à quelqu'un d'autre. Nous essaierons de revenir à vous.

[Français]

Monsieur Laurin, je vous accorde cinq minutes.

M. René Laurin: Dans votre exposé d'ouverture, lorsque vous traitiez de la question des endroits de travail désignés, vous donniez l'exemple d'un militaire à qui un sous-officier demande de se faire couper les cheveux. Vous dites que puisque le militaire a reçu l'ordre de se rendre chez un barbier, on devrait considérer qu'il est au travail pendant qu'il se fait couper les cheveux. Afin de mieux comprendre votre point de vue, j'ai cherché d'autres exemples. Si un individu recevait l'ordre d'aller se coucher parce que son commandant juge qu'il semble un peu trop fatigué pour continuer son travail, est-ce que vous considéreriez qu'il est au travail pendant son sommeil puisqu'il a reçu un ordre de son commandant?

[Traduction]

M. Clifford Chadderton: La réponse est «oui», mais avec une réserve; il faut choisir: vous ne pouvez pas dire qu'il est en service dans telle circonstance et pas en service dans telle autre. La question qu'on poserait serait: «Quelle est la nature de l'accident, et cet accident s'est-il produit pendant qu'il était en service?» Si la réponse est «oui», dans ce cas, il remplit les conditions.

Le gros problème, c'est que dans les forces armées, en cas d'accident, il y a une commission d'enquête qui décide si l'intéressé était en service ou pas. C'est très bien, mais dans le cas de la Loi sur les pensions, le terme «en service» ne s'applique absolument pas.

Après 50 ans d'application de cette loi, je pense que la seule façon de trancher est de dire: «Il est en service». Ça ne veut pas forcément dire qu'il aura une pension, mais on tient compte du fait qu'il est en service, et ensuite on décide si l'accident peut donner droit à un dédommagement. C'est loin d'être facile, mais si vous le permettez, je vais vous expliquer en quoi consisterait une autre solution.

Un arbitre est saisi de l'affaire et pose la question: «Est-ce que cela a un rapport direct avec le service ou en découle?» J'ai exposé de nombreuses causes devant la Commission canadienne des pensions. La moitié des commissaires répondaient que oui, l'autre moitié que non.

Par conséquent, si on supprime cet obstacle, si on dit qu'il est en service, c'est une première chose. Deuxièmement, il faut décider s'il s'agit d'une incapacité donnant droit à pension. Mais la seule façon de s'en tirer, c'est de considérer le service 24 heures par jour.

[Français]

M. René Laurin: Monsieur Chadderton, vous réglez le problème de façon assez simple en disant qu'on devrait considérer que les militaires sont en service 24 heures par jour. Vous proposez une solution «bombardement général» qui couvre toutes les situations. Mais je ne connais pas d'autres instances où on invoquerait une telle interprétation. Même les pompiers peuvent être considérés comme étant en service lorsqu'ils dorment à la caserne, mais ils ne sont pas en service sept jours par semaine. Ils ne travaillent officiellement que quatre jours par semaine pour compenser les heures de sommeil qu'on leur demande de faire à la caserne.

Vous semblez nous recommander de reconnaître que les militaires travaillent 24 heures sur 24, sept jours par semaine, 365 jours par année. Est-il juste d'interpréter ainsi votre demande?

[Traduction]

M. Clifford Chadderton: Oui, effectivement monsieur. Là encore, je vais vous expliquer très rapidement. J'ai parlé des pompiers. En ce qui concerne le comité Woods, trois avocats de grande réputation n'ont pas réussi à atteindre une conclusion satisfaisante en l'espace de trois ans.

• 1615

Ils ont dit, «attendez un instant, si le pompier est sur les lieux, il est protégé par son syndicat, il est protégé par les «règles d'engagement» comme on les appelle, protégé du fait de son activité.»

D'un autre côté, pensez à ce qui s'est produit pendant les inondations au Manitoba. On a ramassé tous ces gens-là, on les a fait monter dans des véhicules, on les a amenés à Winnipeg et on leur a dit «descendez et travaillez». S'ils avaient eu un accident sans rapport direct avec l'inondation, ils n'avaient aucune couverture. Et pourtant, s'ils avaient posé la question: «Attendez un instant, pourquoi m'a-t-on envoyé à Winnipeg?» On aurait pu leur répondre qu'ils s'étaient engagés dans les forces armées, que les forces armées les avaient envoyés à Winnipeg et qu'ils étaient là pour faire ce qu'on leur disait.

«En service» ne signifie pas forcément qu'ils auront une pension. «En service», par contre, permet d'échapper à ce terrible dilemme: y avait-il un rapport direct ou est-ce que cela découlait des besoins du service.

Le président: Merci, monsieur Laurin.

Je donne la parole maintenant à un député de la majorité. J'ai quatre noms sur ma liste, mais il nous reste cinq minutes.

Monsieur Proud, puis monsieur O'Reilly.

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Chadderton, merci à vos collègues, d'être venus aujourd'hui. Comme vous l'avez dit, il n'y a probablement personne parmi nous qui connaisse cette question mieux que vous. Vous vous en occupez depuis beaucoup plus longtemps que la plupart d'entre nous.

Votre exposé m'a particulièrement intéressé. Je tiens à vous dire que depuis le début, en ma qualité de membre de ce comité, je demande que ces gens-là soient considérés comme des anciens combattants. En fait, je considère même que c'est un projet personnel et j'ai réussi à convaincre le comité, dans une certaine mesure, d'inscrire cela dans les recommandations destinées à la Chambre.

Le problème, pour certaines personnes, c'est que nous nous demandions ce que vos organismes en penseraient. Or, vous venez nous dire que vos organismes sont d'accord. On s'était demandé si la légion serait d'accord, ou certains de ses membres, car, si j'ai bien compris, les seuls soldats considérés étaient ceux de la guerre des Boers, de la Première et de la Deuxième Guerres mondiales et de la Corée, après quoi on tombe dans les zones de service spécial.

Par exemple, je ne vois pas non plus pourquoi les zones de service spécial qui se trouvent à l'intérieur du Canada ne peuvent pas être considérées également.

Quant à l'idée d'une préférence ou d'une garantie d'emploi, c'est une question que nous avions déjà posée il y a quelque temps, en 1994, au moment du Comité mixte spécial sur la politique de la défense. Personnellement, j'avais été très étonné de constater le manque d'enthousiasme de beaucoup de gens, car j'aurais cru le contraire.

À l'époque, la seule personne qui était en faveur était un membre du Rotary Club de l'Alberta qui était venu nous parler à Edmonton. En fait, son club avait adopté une résolution pour demander que cela fasse l'objet d'une loi. Par contre, dans le reste du pays, personne n'était en faveur. Et il s'agissait seulement des réservistes.

En ce qui concerne les gens qui quittent les forces armées après 10, 15 ou 20 ans, je pense que vous n'auriez aucun mal à nous faire accepter cette idée, à nous qui sommes ici. Mais je regarde seulement les gens qui sont autour de cette table, et je me dis que si vous alliez plus loin, vous risquez d'avoir énormément de problèmes si vous voulez faire accepter cette idée au reste de la Chambre des communes. Ce ne serait certainement pas facile.

Toutefois, je ne suis pas contre cette idée. Je veux seulement vous prévenir car j'ai souvent vu ce genre de problèmes lorsque vous êtes venus témoigner devant des comités.

Vous avez parlé de l'assurance-emploi. C'est une question qui a été soulevée l'autre jour par un autre groupe. Nous pourrions parler de la Commission d'assurance-emploi et de ses règles toute la journée. Ses règles sont fondées sur de nombreuses raisons, mais je ne sais pas dans quelle mesure ces raisons sont bonnes.

C'est la même chose dans le secteur privé. Quand vous prenez votre retraite, on vous verse de l'argent, une indemnité de départ, et vous ne pouvez pas toucher d'assurance-emploi, etc. Il y a toutes sortes de raisons à cela. Je ne sais pas si elles sont justifiées ou pas. Il se trouve seulement que c'est la situation actuelle. Peut-être des changements seraient-ils justifiés.

Quant au problème du gouvernement avec les questions de guerres et l'absence de rapports, nous avons eu l'occasion d'en parler à des témoins du ministère de la Défense nationale. On pourrait, par exemple, parler de l'enclave de Medak, une mission dont on aurait certainement dû parler à la population. On a jugé bon de ne pas le faire mais à mon avis, cela a été une terrible erreur.

• 1620

Cela dit, monsieur Chadderton, quand vous me parlez de vos recommandations et de tout le reste, vous prêchez un converti.

Je tenais seulement à faire ces observations et je vous remercie d'être venu.

Le président: Merci, monsieur Proud.

Monsieur O'Reilly, il reste une minute pour vous.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci, monsieur Proud.

Des voix: Oh, oh.

M. John O'Reilly: Monsieur Chadderton, messieurs, je vous remercie infiniment d'être venus. Je commence à me sentir un peu vieux, car j'ai maintenant fait partie de trois groupes devant lesquels vous avez comparu.

Monsieur le président, il y a probablement trop longtemps que je siège à ce comité.

Si certaines personnes résistent à vos recommandations, c'est parce qu'elles considèrent que les troupes de combat, les gens qu'on envoie dans des champs d'opération, ont des rôles différents à jouer. Comment est-ce que vous définiriez les différents rôles, quelle distinction feriez-vous entre les combattants et les gens qui sont envoyés comme personnel de soutien? Le personnel de soutien ne voit pas toujours les mêmes atrocités, et ne voit pas ce qui se passe sur le terrain. Il y a donc une différence entre un cuisinier et un conducteur d'ambulance, quelque chose qu'on pourrait comparer à la différence qui existe dans le secteur privé... vous savez, lorsqu'un chauffeur de taxi ne réussit pas à obtenir un permis, ce genre de choses.

Si vous voulez que tout le monde soit considéré comme étant de service 24 heures par jour, certains ne seront pas d'accord dans le cas, par exemple, d'un couple marié qui veut vivre à l'extérieur de la base. S'ils ont un accident pendant le trajet quotidien entre la base et leur maison, sont-ils de service ou non?

J'aimerais entendre vos commentaires sur cette question. Certaines des conclusions que vous avez tirées ici peuvent être...

Comme vous le savez, il arrive dans la vie civile que quelqu'un soit renvoyé à la maison parce qu'il ne s'est pas fait couper les cheveux et qu'il travaille dans la préparation des aliments. Si la personne a un accident de voiture en allant se faire couper les cheveux, on lui dira qu'elle aurait dû se faire couper les cheveux avant de venir au travail, et comme cela elle n'aurait pas eu d'accident de voiture.

On pourrait appliquer les mêmes règles ici, et c'est peut-être pour cela qu'il y a de la résistance.

M. Clifford Chadderton: Mon message au comité, c'est que la situation actuelle est atroce. Ces militaires sortent des forces armées après 10 ou 20 ans, et on fait très peu, ou même rien, pour eux.

Je propose l'établissement d'un nouveau programme global. Je fais des propositions concernant certains éléments de ce programme. De toute évidence, je suis dans le milieu depuis assez longtemps pour savoir qu'il serait peut-être difficile de faire accepter certaines composantes et moins difficile d'en faire accepter d'autres. Mais si vous regardez la situation actuelle, l'idée de la zone de service spécial est une dérobade. En réalité, on s'est dit, «nous allons envoyer ces militaires dans la Bande de Gaza». Mais comme ces militaires avaient la même couverture que les autres Canadiens, on a décidé de créer les zones de service spécial.

Dans une de ces zones, un cuisinier militaire pouvait tomber et se briser la cheville; il aurait droit à une pension d'invalidité. Qu'il soit cuisinier ou artilleur, il y avait droit. Une fois que le gouvernement s'est engagé sur cette pente glissante des «zones de service spécial», les militaires qui servaient seulement au Canada, même s'ils rendaient d'excellents services, devaient prouver que tout accident similaire était relié à son service militaire ou en résultait. Le cuisinier de la Bande de Gaza, par contre, n'était pas appelé à fournir quelle que preuve que ce soit.

Je ne dit pas qu'on devrait adopter automatiquement tout ce qui se trouve dans ce mémoire. Je crois, pourtant, qu'il existe tant de cas de discrimination, en quelque sorte, contre divers groupes à l'intérieur des forces armées qu'il faut élaborer un plan qui favorisera la réussite de ces militaires quand ils quittent les forces armées, moyennant ce que j'appelle «un service long et exemplaire».

Le président: Merci beaucoup, monsieur O'Reilly.

Monsieur Earle, cinq minutes.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.

Monsieur Chadderton, j'aimerais vous remercier de votre exposé et de la documentation considérable que vous avez fournie.

J'ai trois questions pour vous. Si je les pose avec brièveté et que vous répondez de la même façon, nous devrions pouvoir les couvrir toutes les trois.

Le président: Très bien.

M. Gordon Earle: D'abord, vous avez parlé du terme «ancien combattant». Est-ce que cela pourrait comprendre les marins de la marine marchande?

M. Clifford Chadderton: Absolument.

M. Gordon Earle: D'accord.

Deuxièmement, vous avez parlé de la possibilité d'accorder des prestations de pension pour des cas de trouble de stress post-traumatique et vous avez proposé qu'un diagnostic médical officieux suffise pour faire une demande.

Pourriez-vous donner plus de précisions?

• 1625

M. Clifford Chadderton: Oui.

En tant qu'arbitre au ministère des Anciens combattants, je reçois le dossier. Je vois que l'ex-militaire souffre d'emphysème. Il a plusieurs autres problèmes médicaux. Mais il a fait son service. Il s'est rendu en Bosnie. Peut-être deux fois. Je devrais pouvoir réfléchir à cela et me poser la question de savoir si le fait d'avoir envoyé ces personnes dans des situations très difficiles pour lesquelles elles n'avaient pas de préparation constitue un motif de trouble de stress post-traumatique. Et ma conclusion serait que la personne devrait recevoir une pension.

M. Gordon Earle: Merci.

Ma troisième question concerne les prestations d'assurance-emploi. Un autre groupe de témoins a aussi parlé de cette question. Pourriez-vous donner quelques détails sur votre proposition? Vous dites que les prestations d'assurance-emploi devraient être disponibles. Croyez-vous que cela doive être le cas dans toutes les circonstances, ou seulement lorsqu'une personne est obligée de partir? On ne parle pas ici de quelqu'un qui prend sa retraite après 20 ou 25 ans dans les forces armées.

M. Clifford Chadderton: Pour vous donner une réponse très rapide, monsieur, les membres des forces armées, qui après tout paient des cotisations, devraient avoir droit aux mêmes prestations à leur départ que quelqu'un renvoyé d'un poste civil.

M. Gordon Earle: D'accord. Merci.

Le président: Merci, monsieur Earle.

Madame Wayne, vous avez cinq minutes.

Mme Elsie Wayne: Merci beaucoup, Cliff, et les deux autres représentants, d'être venus aujourd'hui.

Cliff, en ce qui concerne des problèmes du système reproductif auxquels vous avez fait allusion, la première partie de la documentation, qui en parle, traite des problèmes de reproduction de ceux qui ont servir dans la Guerre du Golfe. Ensuite, selon la dernière partie de l'étude que je vois ici, M. Gilroy aurait constaté que les taux d'incidence des deux groupes de militaires découlent de cas signalés par les militaires eux-mêmes, tandis que les taux pour l'Ontario sont basés sur les observations indépendantes à la naissance et pendant la première année de vie. Par conséquent, la comparaison entre les taux chez les militaires et dans la population générale ne tient pas beaucoup.

Est-ce qu'on a fait un suivi après le rapport?

M. Clifford Chadderton: Non. Très brièvement, je dirai ceci. Le rapport Goss Gilroy a bien indiqué qu'on constatait chez les enfants des militaires qui sont allés à la Guerre du Golfe une incidence plus élevée de malformations congénitales. Pour moi, cela suffit. Je me suis dit que s'ils ont fait cette constatation, on devrait réexaminer toute la question.

Je pense que tout le monde a peur, si on pense aux produits chimiques auxquels ils ont été exposés; il y a des militaires qui se demandent s'ils devraient ou non rendre leur femme enceinte et des femmes qui ont peur de devenir enceintes parce que leur mari est allé dans le Golfe.

Tout ce que je veux dire sur le rapport Goss Gilroy, c'est qu'on a effectivement déterminé que l'incidence des malformations congénitales était plus élevée, et je crois qu'il faut pousser plus loin. Il serait très facile maintenant d'entreprendre une autre étude plus approfondie.

Je n'étais pas convaincu—ce sont eux qui l'ont dit—qu'ils avaient assez de détails pour justifier leur conclusion.

Mme Elsie Wayne: D'accord.

Je sais que vous êtes fortement en faveur de l'idée d'augmenter l'indemnisation pour des invalidités qui sont reliées aux conditions de service. Je suis tout à fait d'accord avec vous sur cette question.

J'aimerais vous signaler que mon personnel et moi travaillons depuis déjà quelque temps sur le dossier d'un homme qui s'est cassé le dos pendant son service militaire. Il a subi une réduction de ses prestations, qui sont passées de 2 000 $ par mois à 900 $ par mois. Maintenant sa femme l'a quitté, et il n'arrive pas à boucler son budget. Une fois qu'il a payé le loyer, l'électricité et le chauffage, il n'a plus les moyens de payer quelqu'un pour le nourrir.

Il y a certainement quelque chose qui ne va pas. Nous sommes tous d'accord, peu importe le parti politique auquel on appartient. C'est un peu comme si on disait non aux militaires, même avant qu'ils fassent leur demande. Il leur revient de prouver leur demande, ils doivent ensuite faire appel, etc.

Le comité étudie la question de la qualité de vie depuis quelque temps déjà, et je me demandais si certaines de leurs recommandations répondent en partie à vos préoccupations à l'égard des ex-militaires.

M. Clifford Chadderton: Nous avons tâché de faire une distinction. La façon dont nous avons compris cela, vous faisiez une étude de la qualité de vie des militaires actuels. Mais qui examine le problème après leur libération?

• 1630

Nous nous sommes tenus à cela. Notre seul commentaire c'est que votre rapport était excellent.

Parmi ces gens-là, il y a d'énormes problèmes de rétablissement civil qui ont bien sûr leur effet sur le moral au sein des forces armées aujourd'hui. Les gens qui estiment que cela n'est pas le cas rêvent en couleurs.

Mme Elsie Wayne: J'aurais une dernière question.

Cliff, existe-t-il des programmes d'aide au réemploi? Si ces programmes existent, sont-ils administrés par des anciens membres des forces armées?

M. Clifford Chadderton: Non. Il n'y a absolument aucun programme officiel.

À la fin de la Seconde guerre mondiale, 1 million de gens ont quitté les forces armées. Le seul moyen d'assurer leur rétablissement civil c'était d'engager des spécialistes de placement—qui étaient membres des forces armées et qui entamaient le processus de rétablissement trois mois avant leur date de libération. Ils identifiaient les besoins de chaque personne, par exemple leur compétence et la formation dont ils auraient besoin. Ils essayaient aussi de déterminer ce que chacun voulait faire.

En lisant tous ces rapports, j'ai donc eu l'impression que les Forces armées canadiennes devraient avoir un tel système actuellement. Un soldat devrait avoir accès à un service de placement, ou à un agent de rétablissement civil.

Il faudrait aussi veiller à ce que toute communication avec un tel service ou un tel agent reste confidentielle, et n'entre pas dans le dossier du soldat. Nous avons un système universel. Il serait donc malheureux si le dossier du soldat montrait qu'il avait communiqué avec un agent de rétablissement civil pour voir quelles seraient ses possibilités de trouver un emploi après avoir quitté les forces armées. Si son commandant voit cela dans son dossier, il voudra sûrement se débarrasser de lui.

Donc ces communications doivent rester confidentielles, et le système doit être établi au sein des forces armées. On l'a fait pendant la Seconde guerre mondiale, et on peut le faire de nouveau.

Le président: Merci, madame Wayne.

Il y aura une deuxième ronde de questions. Nous avons convenu d'arrêter les questions à 16 h 45 pour voir la vidéo. En reprenant, tout député qui a une autre question pourra me l'indiquer, et il aura la possibilité de s'exprimer.

Monsieur Hanger, du Parti de la réforme.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci d'être venu, monsieur Chadderton. Je m'excuse d'être arrivé en retard.

J'ai une question sur le syndrome de la Guerre du Golfe, et l'utilisation de la mefloquine. J'ai l'impression qu'il faut clarifier les effets de ce médicament, et le terme «syndrome de la Guerre du Golfe». J'estime qu'il nous faut plus d'information.

D'après vous, comment devrait-on réagir à cette question? Comment pourrait-on l'étudier? Qui devrait avoir cette responsabilité? Le syndrome est tout simplement là, personne ne veut en parler, mais il y a certaines preuves indiquant que le problème est réel. Donc d'après vous, qu'est-ce qui devrait se faire?

M. Clifford Chadderton: Il y a quelque temps, j'ai fait une présentation importante devant le comité. J'ai dit que la situation des anciens combattants de la Guerre du Golfe est la même que celle des anciens combattants revenus de Hong Kong. Quand ils sont rentrés, ils avaient toutes sortes de choses—toutes sortes de maladie, ils souffraient aussi de malnutrition. Il a fallu 25 ans pour que le gouvernement réagisse. Nous avons lutté pour qu'ils reçoivent quelque chose, et finalement nous avons gagné la bataille. Automatiquement, tout ancien combattant ayant servi à Hong Kong reçoit une pension de 50 p. 100.

Maintenant, pour ce qui est de la Guerre du Golfe... J'ai lu toutes les études. Si vous les retrouvez sur Internet, il vous faudra trois jours pour les lire tous. Toutes ces études indiquent que le problème est réel. Mais nous ne savons pas exactement ce qu'il est.

Voilà donc ce que nous proposons. Des anciens combattants de Hong Kong ont reçu une pension de 50 p. 100. Toute personne revenant de la Guerre du Golfe pourrait recevoir tout simplement 5 p. 100 pour le syndrome. Cela le mettrait sur le bon chemin, et éliminerait cette perception négative qu'il ne fait que se plaindre. Personnellement, je ne considère pas que les anciens combattants de la Guerre du Golfe se plaignent, mais c'est tout de même un problème très important.

• 1635

Regardez ce qui est arrivé aux anciens combattants de Hong Kong. On a finalement décidé de donner un nom à leur syndrome «l'avitaminose»—et on leur a tous donné une pension de 50 p. 100.

Tout irait beaucoup plus vite si on rassurait tous les anciens combattants ayant servi dans la Guerre du Golfe qu'ils pourraient recevoir une pension de 5 p. 100 s'ils souffrent de quelque chose. Ils n'auraient qu'à en faire la demande. Cela représente 85 $ par mois, mais ça les met tout de même sur le bon chemin et ils pourront peut-être être traités. Si leur état ne s'aggrave pas, ça va comme ça.

Voilà ce qu'on devrait faire.

M. Art Hanger: Devrait-on établir un organisme indépendant pour étudier...

M. Clifford Chadderton: Non, d'après moi cela n'est pas nécessaire. La Commission des pensions du Canada pourrait prendre sa décision demain.

Le président: Merci.

Nous ferons assez vite pour permettre à autant de députés que possible de poser leurs questions.

Monsieur Richardson, puis je reviendrai à M. Laurin, etc.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci d'être venu, monsieur Chadderton.

J'aimerais parler d'un cas qui m'a choqué énormément. C'est un cas où on a été très injuste envers une personne qui a été blessée—le major Henwood. Son cas illustre toute la mesquinerie dont a été victime un homme qui a perdu ses jambes et qui attendait ses prothèses.

Il est très difficile pour moi d'en parler. Certaines personnes mêlées à l'affaire sont des gens avec qui j'ai servi. Je me suis demandé comment ils ont pu dénier justice à cet homme, et ne pas lui être venu en aide sur-le-champ. Ils ont tout fait pour ralentir le processus.

M. Clifford Chadderton: Absolument.

M. John Richardson: Je ne sais pas s'ils pourront jamais régler ce cas au ministère de la Défense. Je ne le sais vraiment pas. Mais d'après moi, c'est un cas à donner à quiconque se voit confier ce travail en exemple de ce qu'il ne faut pas faire.

Pour la population... Cet homme est marié. Il a comparu devant nous à Edmonton, et je crois que nous avions tous les larmes aux yeux. Nous avions déjà entendu parler de son cas avant d'arriver.

Mais ce n'est pas le seul cas qui nous a été présenté. Il y en a eu d'autres, qui étaient moins graves, où le processus a été ralenti. On dirait presque que les fonctionnaires ont essayé d'empêcher le major Henwood de recevoir son dû.

Je ne sais pas ce qu'on peut faire. Et j'estime que les fonctionnaires du ministère de la Défense nationale n'ont pas vraiment compris ce qu'ils lui faisaient. Je le crois très sincèrement. C'est le système qui a causé le problème, et ces fonctionnaires faisaient partie du système. Quand nous avons des combattants qui ont été si gravement blessés, le processus devrait être accéléré. Ils ne devraient pas être envoyés d'un ministère à l'autre—des Affaires des anciens combattants à la Défense nationale, comme la major Henwood.

Il faut que tout cela cesse. Nous entendons toutes sortes de choses, qui nous attristent beaucoup. Nous sommes tous d'accord là-dessus; nous n'avons pas une attitude partisane. Nous avons décidé à l'unanimité qu'il faut un système qui accélère le processus pour ceux qui servent dans les zones spéciales. Il faut les traiter comme on a traité les forces armées après la Seconde guerre mondiale. Tout a été rapide—les services médicaux, les prothèses, les soins. Ils ont fait des progrès.

Je voulais parler de tout cela, parce que je sais que vous en savez beaucoup.

Le président: Monsieur Chadderton, avez-vous un commentaire?

M. Clifford Chadderton: Oui.

Ce matin, nous avons parlé avec le major Henwood. J'aimerais que ceci figure au compte-rendu: sans les efforts des Amputés de Guerre du Canada, il serait encore en train de se battre tout seul.

Voilà pourquoi j'ai dit au début qu'il nous faut un programme global, un programme qui réunit toutes les agents et qui permet de répondre aux besoins justifiés des gens comme le major Henwood.

En ce moment il va très bien, mais demain, s'il perd son boulot, qu'est-ce qui va lui arriver?

Je suis content que vous ayez mentionné Henwood, parce que cela m'incite à dire, «Pourquoi avons-nous besoin d'un programme plus complet?» Nous en avons besoin, monsieur Richardson, parce que c'est ce qui arrive aux soldats. Remarquez, c'est un cas très rare. Ils n'avaient pas tous la même compassion. Mais moi, j'ai autant de compassion pour un gars qui perd un doigt que pour un gars qui perd les deux jambes. Je veux dire, on ne les traite pas comme il faut.

Le président: Merci.

Monsieur Laurin, une seule question, s'il vous plaît.

[Français]

M. René Laurin: Je n'ai pas d'autres questions pour le moment.

[Traduction]

Le président: Monsieur Proud, une seule question, s'il vous plaît.

M. George Proud: Merci, monsieur le président.

Monsieur Chadderton, vous avez parlé des allocations de réinstallation offertes après la Seconde Guerre mondiale. Vous avez ajouté qu'on pourrait sans doute offrir quelque chose de semblable maintenant pour ceux qui ont servi.

• 1640

En 1991, quand la Guerre du Golfe a commencé, on a soulevé cette question, et ils ont dit que ces gens-là étaient des soldats professionnels, tandis que dans la Seconde Guerre mondiale, c'étaient des volontaires... C'est le genre de choses qu'on dit.

J'ai mentionné qu'un bon nombre de ces gens qui sont allés dans le Golfe étaient des réservistes, et pourquoi ne pas organiser une sorte de programme de réinstallation comme dans le cas de la Seconde Guerre mondiale et de la Corée?

Pensez-vous qu'il est réaliste d'avancer cette idée, qu'on peut espérer obtenir gain de cause?

M. Clifford Chadderton: Certainement. Au sujet des forces régulières d'aujourd'hui, je crois que si le public avait une idée—et ceci est une description vivante de tous les endroits où ils ont été—il dirait, mon Dieu, on ne peut pas utiliser ces gens-là comme ça pour préserver la paix dans le monde, préserver notre place dans le monde, et puis, quand ils ont fini, simplement dire, «merci beaucoup».

Je dis simplement qu'il faudrait faire quelque chose pour eux, parce qu'ils le méritent. Pour un soldat qui a servi pendant deux ans, alors c'est au prorata, et s'il a servi pendant 20 ans, ou 10 ans...

M. George Proud: Réserviste.

M. Clifford Chadderton: Eh bien, je parle du plein temps. Avec les réservistes, ils ont pris un risque, ils se sont inscrits, ils savaient ce qu'ils faisaient, et ils ont démissionné. Je pense que c'est un problème trop grand pour préparer un programme de réinstallation pour un réserviste, qui sert deux ans ou quoi que ce soit, et qui ensuite démissionne. Je parle des gens qui s'inscrivent, qui donnent tout leur temps et leur énergie à ce pays pendant 10 ans ou plus. Ils méritent quelque chose de mieux.

Le président: Et quand ils font toutes ces missions, il faut les payer mieux et les traiter mieux. Mais je ne suis pas censé commenter.

Monsieur Earle, une question.

M. Gordon Earle: Vous avez dit dans une de vos recommandations que l'information concernant la prestation d'invalidité devait être disponible sous le Régime de pensions du Canada. D'après mon expérience dans mon comté, je sais qu'il est très difficile d'avoir des prestations d'invalidité dans le cadre de ce régime—il faut établir l'invalidité, passer par beaucoup d'appels, prendre beaucoup de temps et ainsi de suite.

Dites-vous qu'il y a une obstruction de plus ici pour les militaires, et qu'ils ne reçoivent pas l'information sur le régime et sur la prestation d'invalidité? Qu'en est-il au juste?

M. Clifford Chadderton: En premier lieu, je ne pense pas qu'ils savent que cela existe. Deuxièmement, si le corps médical dans les forces armées a les dossiers, et si on les libère comme étant totalement handicapés, si ces dossiers sont là, cela va aider dans la décision initiale. S'il ne réussit pas à cette étape, ça va aider dans le processus d'appel.

Je répète que si vous lisez mon rapport en entier, vous allez comprendre que certains d'entre eux reçoivent un peu d'information. Et comme vous le savez, les renseignements incomplets sont dangereux. Ils reçoivent certains renseignements, et se disent qu'ils seront admissibles lorsqu'ils seront libérés.

On peut les aider quand ils sont toujours militaires, mais je crois que le système de counselling devrait les aviser des avantages auxquels ils pourraient être admissibles. Mais se contenter de les rejeter, complètement invalides, et puis de leur dire, «allez faire une demande»...

Vous avez tout à fait raison. Vous en avez déjà fait l'expérience dans vos bureaux de comté, et vous savez que c'est très difficile.

Le président: Merci, monsieur Earle.

Nous avons le temps de terminer cette ronde avec de brèves questions.

Monsieur O'Reilly et puis madame Wayne.

M. John O'Reilly: Merci, monsieur le président.

Il y a un problème médical ici. Il y a le stress avant déploiement, le stress post-traumatique et, maintenant le syndrome de la Guerre du Golfe. Dans le cas d'un syndrome, les éléments de preuve ne sont pas concluants; c'est le terme médical qui fait état de cette situation. Une maladie peut être traitée.

En tenant compte de cela, j'aimerais que vous songiez à une approche qui nous permettrait d'éliminer l'obstacle entre une maladie et un syndrome. Les professionnels de la santé avec qui j'ai fait affaire pour le syndrome de la Guerre du Golfe évoquent toujours les preuves non concluantes, l'absence de traitement etc. Pourtant nous savons tous qu'il suffit de naviguer sur Internet, ou tout autre Net...

Que proposez-vous qu'on fasse? Voici ma question.

M. Clifford Chadderton: L'échappatoire existe déjà dans la Loi sur les pensions. On peut accorder une pension, et réexaminer le dossier après six mois et dire, «Je regrette, mais vous allez mieux», et c'est fini. Une pension n'est pas nécessairement accordée à vie.

Le président: Merci, monsieur O'Reilly.

Il reste une dernière petite question pour Mme Wayne.

Mme Elsie Wayne: Je n'ai vraiment pas de questions, juste une brève observation.

Monsieur Chadderton, je vous remercie beaucoup du rapport que vous nous avez présenté aujourd'hui. Ce comité a un mandat, et je crois que vous allez constater que tout le monde autour de cette table comme M. Proud l'a dit plus tôt, reconnaît—peut-être à cause de notre âge...

• 1645

Des voix: Oh, oh!

Mme Elsie Wayne: ...l'importance de s'occuper de nos anciens combattants.

Mais je dirais aussi, comme George l'a dit, qu'il y a beaucoup de jeunes qui ne le comprennent vraiment pas. Vous le savez aussi bien que nous. C'est dommage.

Mais je crois que le président serait d'accord avec moi pour dire que nous allons certainement nous pencher sur les recommandations que vous nous avez faites ici. Nous vous en remercions vivement.

M. Clifford Chadderton: J'ai une dernière observation. Merci beaucoup de m'avoir entendu.

Je suis très content que vous allez voir ce film. Ce que vous allez voir sur l'écran confirmera ce que j'ai dit concernant les conditions qu'on impose à ces gens et pourquoi on a besoin d'un programme global.

Merci monsieur.

Le président: Je vous remercie, monsieur Chadderton, et les autres témoins, de votre témoignage et de votre mémoire. Merci de vos observations agréables concernant notre rapport et du bon travail que vous faites. Nous apprécions votre présence ici.

Maintenant, nous allons voir la vidéo.

M. Clifford Chadderton: Je l'ai vu. Préparez-vous pour un choc.

Le président: Je ne suis pas certain que nous soyons prêts.

Cela devrait être terminé avant la sonnerie, collègues.

• 1646

[Note de la rédaction: présentation vidéo]

• 1715

Le président: La séance est levée.