Question préalable

Il arrive que des députés proposent, au cours du débat sur une motion dont la Chambre est saisie, « Que cette question soit maintenant mise aux voix11 ». Cette motion, appelée couramment la question préalable, peut être proposée pour les motions de fond pouvant faire l’objet d’un débat12. La question préalable ne met pas nécessairement fin au débat, mais elle le restreint et accélère la mise aux voix de deux manières.

Premièrement, la question préalable empêche la présentation d’amendements à la motion principale et donc la tenue de tout débat qui aurait pu être consacré à ces amendements. Par conséquent, elle ne peut être proposée quand une motion principale fait l’objet d’un amendement. Si la Chambre se prononce favorablement sur la question préalable, le Président est tenu de mettre immédiatement aux voix la motion principale13. Lorsque la question préalable est proposée et que des députés désirent prendre la parole, une autre période de débat débute. La question préalable est en effet considérée comme une nouvelle question soumise à la Chambre et elle est sujette à débat14. Les députés qui sont déjà intervenus dans le débat sur la motion principale ou sur des amendements proposés antérieurement peuvent prendre la parole de nouveau. Utilisée de cette façon, elle s’avère un moyen de limiter le débat aux résultats imprévisibles. En effet, il est arrivé que la Chambre se prononce en faveur de la question préalable sans débat15, après un bref débat16 ou après plusieurs jours de délibérations17. Dans des cas où la question préalable ne semble pas avoir amené la Chambre à se prononcer sur une motion, une motion tendant à ajourner le débat18, une motion de clôture19 ou une motion d’attribution de temps20 ont parfois été proposées pour mettre fin au débat. Lorsqu’un vote par appel nominal est exigé sur la question préalable, le vote peut être reporté à la demande du whip en chef du gouvernement ou du whip en chef de l’Opposition21. Cependant, une fois la question préalable adoptée, le vote par appel nominal sur la motion principale ne peut être reporté22, sauf un vendredi23, ou avec l’accord des whips24 ou encore conformément à un ordre spécial25.

Deuxièmement, la question préalable peut avoir pour effet de remplacer la motion à l’étude, car, si le vote est négatif, le Président est tenu de ne pas mettre la motion principale aux voix à ce moment. En d’autres termes, si la motion « Que cette question soit maintenant mise aux voix » n’est pas adoptée, la motion principale est rayée du Feuilleton. À moins que la Chambre n’y revienne un autre jour et que la motion soit réinscrite au Feuilleton26, elle ne sera pas débattue à nouveau. L’utilisation de la question préalable pour faire en sorte qu’une affaire soit rayée du Feuilleton n’a pas, au fil du temps, produit les effets escomptés. En effet, depuis la première législature, la motion « Que cette question soit maintenant mise aux voix » n’a été rejetée qu’à quatre occasions seulement. Dans la majorité de ces cas, la motion principale a été rétablie et adoptée avec ou sans amendements27.

Tous les députés peuvent proposer la question préalable28. Celle-ci est utilisée par certains dans l’espoir d’accélérer le vote sur la motion principale ou de restreindre les amendements et par d’autres, dans l’espoir d’empêcher le Président de mettre une motion ou un projet de loi aux voix maintenant. Bien que la question préalable puisse être un moyen de forcer la Chambre à se prononcer sur une motion ou, au contraire, de retarder la décision, elle a presque exclusivement été utilisée ces dernières années par le gouvernement pour limiter le débat29.

Par le passé, il n’y a rien eu de prévisible dans le recours à la question préalable. Des ministres l’ont proposée au sujet de motions émanant de députés30, de motions de l’opposition31 ainsi que de motions32 et de projets de loi émanant du gouvernement33. Pour leur part, de simples députés l’ont proposée au sujet de motions émanant d’autres députés34 ou du gouvernement35, pour des projets de loi émanant du gouvernement36 et pour des motions pour affaire courante37.

À cause des nombreuses restrictions qui encadrent son usage et de ses résultats parfois inattendus, la question préalable a été décrite comme le moyen « le plus inefficace » pour limiter le débat38.